Abou Bakr nomme ‘Amr commandant 

Alors qu’Abou Bakr (qu’Allah soit satisfait de lui) considérait qui devrait être nommé commandant du détachement de reconnaissance d’Abou Oubaydah, Souhayl Ibn ‘Amr, ‘Ikrimah Ibn Abi Jahl et Harith Ibn Hisham arrivèrent. Ils portaient leurs armes et voulurent que le commandement de l’armée leur soit donné. Abou Bakr par conséquent consulta ‘Omar (qu’Allah soit satisfait de lui) qui répondit : « Je ne trouve pas cela convenable ».

Harith se tourna vers lui et dit : « 0 Abou Hafs (i.e. ‘Omar) tu étais une épée contre nous avant que nous ayons embrassions l’Islam. Maintenant qu’Allah nous a guidés, tu n’as toujours aucune considération pour nos relations alors qu’Allah a ordonné l’accomplissement des droits de parenté ».

‘Omar (qu’Allah soit satisfait de lui) lui répondit : « Je considère que les premiers dans l’Islam sont plus méritants ».

Souhayl dit alors : « Si c’est ton critère alors nous ne te désobéirons d’aucune manière. Cependant tout le temps que nous avons dépensé avant l’Islam à combattre le Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) nous le multiplierons par deux et nous doublerons nos efforts contre les ennemis d’Allah ».

‘Ikrimah (qu’Allah soit satisfait de lui) dit à son tour : « O gens, je vous prends à témoins devant Allah que dorénavant, je me consacre corps et âme au combat dans la voie d’Allah. Mes compagnons, mes enfants et mes richesses sont exclusivement pour Allah et je ne quitterais jamais le Jihad ».

Abou Bakr (qu’Allah soit satisfait de lui) dit : « O Allah, accorde-leur plus que ce qu’ils espèrent ».

Puis, il confia le drapeau à ‘Amr ‘Ibn al-‘As Ibn Wahil Ibn as-Sahmi (qu’Allah soit satisfait de lui) et dit : « Je te nomme commandant de l’armée des gens de La Mecque, de Thaqif, de Taif, de Hawazin, des Banou Kilab et d’Hadramawt. Quand vous atteindrez la Palestine, écrit à Abou ‘Oubaydah : « Si tu as besoin d’assistance, je suis disponible ». Ne fait rien sans le consulter. Si vous vous séparez puisse Allah bénir vos intentions ».

‘Amr alla voir ‘Omar et lui dit : « Tu connais ma dureté contre l’ennemi et ma patience dans le Jihad. Ce serait bien si tu demandes que le Calife me fasse commandant sur Abou ‘Oubaydah. Tu connais mon rang auprès du Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) et j’espère qu’Allah accordera la victoire par moi et détruira l’ennemi ».

« Ce que tu dis est juste lui répondit ‘Omar,  mais je ne suis pas d’accord que tu commandes Abou ‘Oubaydah. Je le considère plus élevé que toi haut et il t’a précédé dans Islam et le Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) a dit : « Abou ‘Oubaydah est le digne de confiance (loyal) de cette Communauté (oummah) » ».

- « S’il est sous mon commandement, il ne sera pas humilié et son rang n’en sera pas amoindrit ».

- « O ‘Amr, il est triste que tu désires les honneurs du monde et le prestige. Craint Allah et choisit l’honneur du monde à venir ! »

- « Ce sera comme tu l’as dit ».

‘Amr ordonna le départ de l’armée qui se mit en marche dans cet ordre : Les gens de La Mecque suivis par les Banou Kilab, les Banou Asnahi, les Hawazin et les Banou Thaqif. Les Mouhajirin et les Ansar restèrent pour rejoindre Abou ‘Oubaydah (qu’Allah soit satisfait de lui). ‘Amr nomma Sa’id Ibn Khalid à la tête de l’avant garde.

 

Abou Darda (qu’Allah soit satisfait de lui) raconte qu’il partit avec l’armée de ‘Amr et qu’avant de partir, il entendit Abou Bakr dire :

« Craignez Allah ouvertement et en secret. Maintenez votre modestie envers Lui dans le privé car Il vous regarde toujours. Vous savez très bien que je vous ai nommés sur des gens qui sont plus honorables et plus pieux que vous. Faites tout ce que vous pouvez pour gagner l’Au-delà et pour plaire à Allah. Soyez comme un père affectueux envers vos hommes.

N’accélérez pas votre marche et pensez au bien être des soldats. Vous avez un long voyage devant vous et il y a parmi eux des gens différents dont certains sont fragiles et faibles. Allah est le Secours de Sa Religion et Il la fera triompher sur toute les autres religions n’en déplaisent aux polythéistes. Ne prenez pas le même itinéraire que Yazid Ibn Abi Soufyan, Rabi’ah Ibn ‘Amir et Shourahbil Ibn Hassanah. Prenez plutôt la route d’Aylah et si Allah Exalté le veut, vous arriverez en Palestine. Lorsque vous y serez, envoyez des espions et tenez-vous informé au sujet d’Abou ‘Oubaydah. S’il est victorieux alors commencez votre campagne en Palestine, mais s’il a besoin, envoyez des armées les unes après les autres sous le commandement de Souhayl, ‘Ikrimah, Harith et Sa’id Ibn Khalid.

Ne soyez pas paresseux ou négligent dans la tâche qui vous a été confié. Évitez l’indolence autant que possible. Quand vous voyez l’ennemi plus nombreux ne dites pas : « Dans quel pétrin nous a piégé Abou Bakr Ibn Abi Qouhafah. Il nous a envoyés contre un ennemi qu’il est impossible de battre » parce que, O ‘Amr, tu as vu de nombreuses fois comment un petit nombre ont vaincus un plus grand nombre de polythéistes. Souviens-toi de la Bataille de Khaybar alors tu te rappelleras comment les Musulmans ont acquis la victoire sous tes propres yeux.

O ‘Amr, il y a avec toi des Mouhajirin et des Ansar qui ont combattu à Badr. Respecte-les et honore-les. Remplit leurs droits et ne soit pas arrogant envers eux dans ton commandement, pensant que : « Si Abou Bakr m’a nommé sur eux c’est que je dois être meilleur qu’eux ».  Méfies-toi de la tromperie de ton égo. Ne te considère rien d’autre qu’un soldat comme eux. Consulte-les pour tout ce qui se présente à toi et la Prière (salat) est la plus grande chose. Lancez l’appel à la prière (adhan) sitôt l’entrée de son heure.

Ne priez jamais une prière sans Adhan. Priez quand l’armée entière l’a entendu. Ceux qui prient avec vous en congrégation auront atteint une grande vertu tandis que ceux qui prient dans leurs tentes recevront leur pleine récompense. Écoutez attentivement les ambassadeurs et ne les mets pas de côté par égard à certains autres. Restez toujours sur votre garde contre l’ennemi. Faites valoir à vos compagnons l’importance de lire le Qur’an. Désignez des gardes et surveillez-les.

Passez vos soirées avec vos compagnons. Ne punissez pas trop rudement et ne soyez trop gentil sinon, ils s’enhardiront contre vous. Évitez de fouetter quelqu’un, autant que possible, de peur qu’il se joigne à l’ennemi et les aider contre vous. N’enquêtez sur personne trop profondément, mais acceptez-le d’après les apparences. Faites des efforts dans votre travail. Ayez foi en Allah quand vous faite face à l’ennemi et gardez ces conseils en tête. Faites savoir à vos compagnons qu’ils ne doivent pas tomber dans les extrêmes et s’ils le font ils devront être punis. Quand vous les conseillez, soyez bref.

Soyez droits afin que nos sujets le soient aussi car un souverain pieux est plus proche d’Allah qu’une personne ordinaire. Je t’ai nommé commandant sur les Musulmans, reconnait la valeur de chaque tribu et de chaque clan. Traite-les comme un père affectueux le ferait. Enquête sur les conditions de l’armée entière avant de marcher. Envoie des éclaireurs en avant et ceux dont tu as le plus confiance, confie leur l’arrière garde pour votre sécurité. Soyez patients et fermes quand vous rencontrez l’ennemi.

Ne fuyiez pas et ne vous exposez-pas comme des lâches, faibles et impuissants. Les lecteurs de Qur’an doivent être distincts dans leur récitation. Les hommes doivent être empêchés de parler de la période préislamique qui ne conduit qu’à l’inimitié. Eloignez-vous des parures et des attraits de ce monde jusqu’à ce que vous rencontriez ceux qui vous ont précédés et qui sont mort affamés. Rejoignez ces gens qu’Allah a loué dans le Qur’an :

« Nous les fîmes des dirigeants qui guidaient par Notre ordre. Et Nous leur révélâmes de faire le bien, d’accomplir la prière et d’acquitter la Zakat. Et ils étaient Nos adorateurs » [21:73] ».

 

Abou ad-Darda (qu’Allah soit satisfait de lui) a dit :

« Abou ‘Oubaydah était aussi présent quand Abou Bakr conseilla ‘Amr Ibn al-‘As. Puis Abou Bakr dit : « Maintenant partez avec la bénédiction et l’aide d’Allah Exalté. Je vous conseille de Le craindre, faites le Jihad dans Sa voie et combattez les mécréants. Allah aidera certainement la personne qui recherche Son aide ».

 

Al-Waqidi a dit :

« ‘Amr Ibn al-‘As commandait neuf mille hommes quand il marcha sur la Palestine. Le jour précédent, le Calife donna à Abou ‘Oubaydah Ibn al-Jarrah un drapeau et le nomma commandant en chef de toutes les armées islamiques. Il lui ordonna d’avancer vers al-Jabiyah et lui dit : « O Digne de confiance de cette Oummah, tu as entendu mes conseils à ‘Amr Ibn al-‘As. Je te fais donc mes adieux ».

Abou ‘Oubaydah (qu’Allah soit satisfait de lui) partit alors tandis qu’Abou Bakr (qu’Allah soit satisfait de lui) revint et appela Khalid Ibn al-Walid al-Makhzoumi (qu’Allah soit satisfait de lui). Il lui donna le commandement d’un groupe de neuf cents cavaliers, de Lakhm et de Joutham avant de lui confier la bannière noire du Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui). Ces neuf cents cavaliers démontrèrent leurs audaces et leurs dévouements dans la plupart des batailles qu’ils menèrent avec le Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’ Allah sur lui). Abou Bakr (qu’Allah soit satisfait de lui) lui dit : « O Abou Souleyman (Khalid), je t’ai donné le commandement de cette armée que tu dois mener à Aylah[1] et en Perse. J’espère qu’Allah Exalté conquerra ces terres par vous. S’Il veut, vous serez assistés ».

Puis Khalid partit pour l’Irak.

 

Rouwaym Ibn ‘Amir a rapporté de Waqis Ibn Sayf ash-Shabkari qui a dit :

« J’étais dans l’armée qu’Abou Bakr envoya à Aylah et en Palestine sous le commandement de ‘Amr Ibn al-‘As tandis que Sa’id Ibn Khalid Sa’id portait le drapeau. Je l’ai vu agiter le drapeau et réciter ce poème :

« Nous marchons avec une petite armée de la meilleure nation,

Contre les mécréants et la Syrie est notre destination.

Ils adorent la croix et ils sont des gens mauvais,

Je les abattrais et avec mon sabre les tuerais.

Avec ma lance, je les transpercerai,

Sur le champ de bataille, il n’y a rien que je redouterai.

Dans cette guerre, le Paradis est mon ambition,

Et qu’avec les pieux soient ma résurrection ».

 

Rouwaym Ibn ‘Amir a dit qu’il entendit Marik Ibn Joundoub rapporté, de narrateurs fiables de la conquête de Syrie, que Shourahbil Ibn Hassanah (qu’Allah soit satisfait de lui) récita ce même poème le jour ou Abou Bakr (qu’Allah soit satisfait de lui) l’envoya après Yazid Ibn Abi Soufyan et Rabi’ah Ibn ‘Amir.

Abou Bakr faisait des invocations pour la victoire des armées qu’il avait envoyé en Irak et en Syrie et était très inquiet à leurs sujets. ‘Uthman (qu’Allah soit satisfait de lui) perçu les signes de cette inquiétude sur son visage et lui demanda : « Qu’est-ce qui te trouble ? »

Abou Bakr lui répondit : « Par Allah ! Je sais bien que les paroles du Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) sont vraies. Il n’y a aucun doute que nous conquerrons Rome et la Perse mais nous ne savons pas si ce sera durant cette guerre ou dans une autre occasion, ni ne savons quelle armée sera victorieuse ».

« C’est vrai, lui dit ‘Uthman, mais nous devons avoir de l’espoir en Allah ».

 

 

Héraclius envoie 100000 hommes contre ‘Amr 

Cette nuit Abou Bakr (qu’Allah soit satisfait de lui) rêva que ‘Amr Ibn al-‘As (qu’Allah soit satisfait de lui) et ses hommes traversaient un obscur défilé de montagne et qu’ils étaient très inquiets. Ils voulurent quitter la passe. ‘Amr talonna son cheval et les autres le suivirent. Soudain, il se retrouva dans une large place d’un vert luxuriant. Il campa et trouva un grand confort. Ce rêve plu énormément à Abou Bakr. ‘Uthman l’interpréta comme une victoire pour ‘Amr et son armée excepté qu’ils devraient d’abord subir de grandes difficultés.

Dans l’antéislam et aussi durant l’Islam, les marchands apportaient du blé, de l’orge, de l’huile d’olive, des raisins secs, des pommes et des figues pour les vendre à Médine. Ces marchands, qui étaient présents quand Abou Bakr organisa et envoya ses armées, entendirent les ordres qu’il donna à ‘Amr Ibn al-‘As concernant Aylah et la Palestine. Ils allèrent informer César Héraclius ainsi que de la défaite des Romains à Tabouk. Héraclius rassembla tous ses fonctionnaires, ses stratèges et ses prêtres. Il leur dit : « O Romains, il s’agit de ce que je vous ai prévenus il y a quelque temps. Les partisans de ce Prophète saisiront bientôt ma couronne et mon trône et gouverneront sur cette terre. Ils ont hachés votre armée à Tabouk. Le Calife de Muhammad a envoyé une armée qui arrivera bientôt. Vous devez conserver votre respect et combattre cœur et âme pour défendre votre religion, vos familles, vos proches, vos vies et vos richesses. Si vous hésitez maintenant alors les Arabes captureront votre empire et vos richesses ».

Ces nouvelles les firent pleurer sur leurs morts tués à Tabouk. Et Héraclius les réprimanda : « Vous êtes des hommes et pleurez ainsi ? Arrêtez, car c’est le privilège des femmes. Vous devriez maintenant rassembler vos forces à Ajnadayn ». Le Premier ministre dit : « Nous demandons que les gens qui vous ont donné cette information soient amenés afin d’être questionnés ». Héraclius ordonna ceci et un soldat introduisit un chrétien de la tribu de Lakhm.

Héraclius lui demanda :

- « Depuis combien de as-tu quitté Médine ? » Lakhmi lui répondit :

- « Vingt-cinq jours ».

- « Qui est le chef des Musulmans ? »

- « Son nom est Abou Bakr. Il a rassemblé une armée et l’a envoyé contre vous. Je les ai bien examinés. Ils sont énergiques, rusés, préparés et fermes ».

- « Est-ce tu as vu cet Abou Bakr ? »

- « Oui, il m’a en fait acheté un châle qu’il a drapé sur ses épaules. Il apparait comme un homme ordinaire sans rien de distinctif. Il parcourt le marché, vêtu de deux vêtements, et surveillent que les forts respectent les droits des faibles. Il traite les faibles et les forts équitablement.

- « Décris-moi ses traits ».

- « Il est grand, coloré, la peau fine et mince. Les joints de ses doigts sont larges et ses dents sont belles ». Héraclius sourit et dit :

- « Il est donc le Calife de Muhammad que nos écritures saintes mentionnent. Son successeur aura les yeux noirs, grand, coloré comme un lion. Il conquerra et expulsera ses ennemis de leurs terres ».

- « J’ai vu une personne en sa compagnie qui ne sépare jamais de lui ».

- « Je suis maintenant définitivement convaincu. Auparavant, j’ai essayé de faire comprendre les Romains et les ai invités au salut mais personne ne m’a écouté et ils ont refusé d’obéir. Maintenant les Romains vont être expulsés très rapidement de Syrie ».

Héraclius avait une croix d’or qu’il donné à Rubius, le commandant de l’armée et lui dit : « Je te nomme commandant de toutes mes forces. Hâte-toi vers les armées islamiques et empêche-les d’occuper la Palestine parce que c’est un magnifique territoire prospère. En fait, notre prestige et notre pouvoir dépendent d’elle ». Rubius organisa ses troupes et partit pour Ajnadayn le même jour.



[1] Autre nom de Jérusalem, la capitale de Palestine.