Le Vingt-cinquième Sultan Ottoman
Sultan ‘Uthman III
Règne : 1167 - 1170 (1754-1757)
Nom du Père
: Mustafa II.
Nom de la Mère
: Sultan Sehsouvar Valide.
Lieu et date de naissance
: Edirne, le 29 Joumadah ath-Thani 1110 (2 janvier 1699).
Âge à l’accession au trône
: 56 ans.
Cause et date de décès:
Cancer. Le 16 Safar 1171 (30 octobre 1757).
Lieu de décès et de sépulture
: Istanbul. Il fut enterré dans le tombeau de Sultan Khadija
Tourkhan Valide près de la Mosquée Yeni (Nouvelle),
Istanbul.
Le Sultan ‘Uthman III fut confiné dans la section Simsirlik
du Palais de Topkapi pendant de longues années et monta sur
le trône dans sa cinquante-sixième année en tant qu’héritier
le plus âgé assumant le trône ottoman jusqu’à cette époque.
Il aimait faire de la menuiserie pendant ses années
Shehzade. De longues années d’enfermement dans le Palais le
rendirent colérique, et ‘Uthman III se décidait généralement
assez vite bien qu’il regrettait parfois la décision qu’il
avait prise.
En tant que nouveau sultan, ‘Uthman III choisit
méticuleusement ses hommes d’état et remplaça assez souvent
ses Grands Vizirs. Les fréquents rotations du Grand Vizirat
provoquèrent en effet l’instabilité et interrompirent les
procédures en matière d’état. Il est très probable que
‘Uthman III se débarrassa régulièrement de ses Grands Vizirs
parce qu’ils avaient acquis une influence et un pouvoir
accrus pendant son règne et qu’ils étaient venus à dominer
l’administration.
Sur le plan économique, le budget impérial ottoman présenta
des excédents sous le régime de ‘Uthman III, comme cela
avait été le cas au cours des cinquante dernières années.
Pendant cette période, la Sikke-i Jadid (nouvelle pièce) fut
scellée et frappée à Islamboul (littéralement, « là où
l’islam abonde »), un autre nom d’Istanbul.
C’est sous son règne que la capitale ottomane fut exposée à
une inondation, à deux tremblements de terre mineurs et à un
hiver assez dur pour geler étonnamment la Corne d’or en 1169
(1755). Le Sultan visita en personne les scènes où ces
catastrophes avaient infligé des pertes et de graves
dommages. Il demanda aux responsables d’évaluer les dommages
causés par les incendies de grande ampleur qui avaient
ravagé une partie importante d’Istanbul. Le Sultan prit un
soin particulier à couvrir les pertes et à mettre en œuvre
des dizaines de mesures pour éviter de futurs incendies.
L’Empire Ottoman ne s’engagea dans aucune guerre sous le
règne du Sultan ‘Uthman III alors que le Sultan consacrait
son temps aux problèmes internes. Il agit contre le
banditisme en Anatolie et en Roumanie pendant cette période
et ordonna des peines sévères pour les brigands qui
attaquaient les pèlerins pendant leur voyage ainsi que ceux
qui corrompaient leurs positions administratives en
exploitant les biens de dotation consacrés à des fins
religieuses ou caritatives. Le Sultan donna en outre la
priorité à la gestion des problèmes des pèlerins à La Mecque
et à Médine.
De même, pendant son règne, une interdiction capitale
concerna la migration vers Istanbul, qui était devenue une
immense métropole peuplée. Dans la pratique, le gouvernement
n’accordait l’admission à l’entrée qu’à des fins
commerciales et, dans ce cas, non pas aux grandes
entreprises mais aux particuliers.
Le Sultan ‘Uthman III se mêla souvent au public, quoique
incognito. Il observa non seulement de près les problèmes
que ses sujets devaient affronter, mais il découvrit
également ce qu’ils pensaient de l’administration. Le Sultan
‘Uthman III interdit les spectacles et l’utilisation du
tabac en public cependant, aucune restriction ne
s’appliquait à ceux qui fumaient de manière responsable en
privé. Ce sont les Hollandais qui introduisirent le Tabac
dans l’Empire.
Pour la première fois dans l’histoire ottomane, les Ottomans
signèrent un traité d’amitié et de commerce avec le Royaume
du Danemark. Le Sultan ‘Uthman III tomba gravement malade
avant d’assister à une cérémonie publique tenue après la
Prière de la Congrégation du Vendredi et décéda deux jours
plus tard. Certaines sources suggèrent qu’il avait un
cancer. Il fut le cinquième et dernier Sultan ottoman à être
enterré dans la tombe de Sultan Tourkhan Valide Khadija à
côté de la Mosquée Yeni.
La mère du Sultan ‘Uthman Ill, Sultan Sehsouvar Valide, qui
avait rencontré son destin au cours de la troisième année du
règne du Sultan, était connue pour son dévouement et sa
piété. Le Sultan, qui grandit dans un environnement familial
musulman pieux, était également un musulman pratiquant. Il
abhorrait le gaspillage, le mensonge et la corruption. Il
sympathisait avec la population locale, effectuait ses
visites incognito auprès du grand public et essayait de
répondre à leurs besoins.
Uthman III était un calligraphe accompli et un homme d’arts.
Certaines de ses œuvres calligraphiques ont survécu jusqu’à
nos jours au Musée du Palais de Topkapi. En plus des
empreintes de pas du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa
sallam) qui sont conservées dans le Palais et dans plusieurs
autres tombes, ‘Uthman III chargea des artistes talentueux
de dessiner un tableau des empreintes sacrées à placer près
de la tombe du Sultan Ayyoub (radhiyallahou ‘anhou). Le
Sultan ‘Uthman III construisit Ihsaniye, un nouveau
quartier dans le quartier Uskudar d’Istanbul et y érigea la
Mosquée Ihsaniye et de nombreuses autres mosquées
plus petites qui perdurèrent jusqu’à aujourd’hui. En outre,
il reconstruisit la Mosquée Minare Yanik (Minaret brûlé). Le
Complexe de la Mosquée Nuruos-maniye, dont Mahmoud I
avait posé les fondations et fut également achevé par
‘Uthman III.
Après qu’un gros navire s’échoua une nuit sur les rives
Ahirkapi d’Istanbul, le Sultan ‘Uthman III commença la
construction du premier phare de la région. Dans le Palais
de Topkapi, le Sultan construisit également le Pavillon de
‘Uthman III, qui fait face au Parc Gulhane et se compose
d’une pièce principale et de deux pièces sur les côtés. En
outre, il fit réparer le Dairesi Shimshirlik, dans lequel il
avait été confiné pendant de longues années et ajouta des
bâtiments adjacents.
Le Vingt-sixième Sultan Ottoman
Règne : 1171 - 1188 (1757-1774)
Titres honorifiques et pseudonymes
: Jihangir (conquérant du monde, dominant le monde) et
Ghazi.
Nom du Père
: Ahmed III.
Nom de la Mère
: Sultan Mihrishah Amine.
Lieu et date de naissance
: Edirne, le 14 Safar 1129 (28 janvier 1717).
Âge à l’accession au trône
: 40 ans.
Cause et date du décès
: Œdème. Le 1 Dzoul Qi’dah 1187 (21 janvier 1774).
Lieu de décès et de sépulture
: Istanbul. Il fut enterré dans la tombe sous son nom près
de la Mosquée Laleli à Istanbul.
Héritiers
: Salim III et Muhammad.
Héritières
: Sultan Shah, Sultan Fatima, Sultan Bekhan et Sultan Hibatullah.
Le Sultan Mustafa III devint le nouveau Sultan Ottoman après
la mort de ‘Uthman III, son cousin et fils de son oncle
paternel. Mustafa III eut beaucoup de chance d’avoir Khoja
Ragip Bacha, un munificent Grand Vizir, à sa disposition. La
période de paix augmenta sous son règne. En fait, il
poursuivit la diplomatie d’accommodement pour garder
l’Empire Ottoman hors de la guerre tandis que la guerre de
sept ans en cours empêchait l’Europe d’attaquer les
Ottomans.
Après trente ans de paix avec la Russie suite au Traité de
Belgrade en 1152 (1739), les ambitions russes contre les
intérêts ottomans amenèrent les deux pays au bord de la
guerre en 1181 (1768). Catherine II de Russie voulait mettre
la Crimée et le Caucase sous contrôle russe, puis envoyer la
flotte russe vers la Mer Noire pour obtenir le libre passage
des Détroits ottomans du Bosphore et des Dardanelles, et
étendre sa sphère d’influence dans les Balkans. Elle annonça
finalement clairement sa belligérance lorsque la Russie
s’ingéra dans les affaires intérieures de la Pologne,
violant le Traité de Prout. Les Ottomans réagirent peu de
temps après.
Les Polonais demandèrent l’aide des Ottomans après que les
Russes aient remplacé le défunt roi polonais par un chef
pro-russe. Enfin, l’Empire Ottoman déclara la guerre à la
Russie avec le soutien manifeste du Khan de Crimée et des
Français en 1181 (1768). Lorsque la Russie assiégea Khotyn
en 1182 (1769), les Ottomans ripostèrent efficacement, ce
qui valut au Sultan le titre de Ghazi. Néanmoins, l’armée
ottomane perdit les combats suivants et le Sultan,
maintenant le Sultan Ghazi, subit de vives critiques du
public.
La réponse de la Russie à la déclaration de guerre ottomane
fut rapide. L’armée russe pénétra en Valachie et en
Moldavie, captura les ports de Kilia et d’Akkerman, qui
contrôlaient les embouchures du Danube et du Dniestr, tandis
que les forces navales russes naviguèrent depuis la Mer
Baltique à travers le détroit de Gibraltar jusqu’à la
Méditerranée, grâce à l’aide des Britanniques.
En Méditerranée, les Russes agitèrent les Morènes pour se
rebeller contre l’Empire Ottoman. Les Ottomans réprimèrent
effectivement la rébellion à la surprise de la Russie
cependant, ils incendièrent la flotte ottomane ancrée dans
le port de Cesme sur la côte occidentale de l’Anatolie. Les
événements qui se déroulèrent révélèrent une prédiction de
ce qui se passerait ensuite en 1183 (1770). Nous reviendrons
en détail sur cette opération à la fin du volume.
Le commandant en chef de la marine ottomane, Hassan
Cezayirli Bacha, força finalement les Russes à quitter la
Méditerranée et les amena à modifier le cours de la guerre.
Les forces russes annexèrent la Crimée. Les forces ottomanes
ne purent pas affronter les Russes en Crimée et le Sultan
fut contraint d’offrir une trêve. Pendant ce temps, les
victoires russes sur les Ottomans irritèrent et alarmèrent
les Autrichiens en raison de leurs intentions territoriales
concernant la Valachie et la Moldavie. La guerre reprit
après que les réunions de paix de Bucarest aient proposé des
conditions trop lourdes pour que le Sultan les accepte. La
Russie captura Silistra et Rousse sur le Danube. Aucune
bonne nouvelle ne vint des champs de bataille, mais plutôt
de plus en plus de pertes. Tout cela coûta la santé au
Sultan et le vendredi 1 Dzoul-Qi’dah 1187 (21 janvier 1774),
le Sultan Mustafa III décéda dans la Mosquée Ayasofya en
écoutant l’Adhan, ou l’appel islamique à la prière, pour la
prière de la Congrégation du Vendredi.
Les chroniques font référence au Sultan Mustafa III comme à
un personnage franc, bénin, gracieux, philanthropique et
généreux. C’était un musulman pieux et il exécutait en
particulier secrètement le Fajr, ou prière d’aube, dans la
Mosquée Ayasofya avec le public.
Soucieux du bien de la communauté, Mustafa III réglementa
les impôts prélevés sur ses sujets de manière à les mettre à
l’aise. Il était très organisé et économe. Il inspecta
toutes les dépenses, y compris celles du Palais, afin de
garder le trésor impérial plein. Il prit également des
mesures très fermes pour sécuriser l’itinéraire de
pèlerinage et réorganisa les structures des dotations au
Haramayn. D’une manière générale, ses politiques
frugales en matière financière et ses contrôles stricts de
la corruption administrative aboutirent à une augmentation
des revenus de l’état. Le Bureau Impérial des Recettes,
devint un département d’état important pendant son règne. Le
Sultan Mustafa III était un orateur et calligraphe
impressionnant. Il essaya de maîtriser même les moindres
détails des affaires d’état.
Comme ses prédécesseurs Mahmoud I et ‘Uthman III
n’avaient pas d’enfants, la venue de la première fille du
Sultan Mustafa III Hibatoullah en 1172 (1759) et de
son premier fils Salim en 1174 (1761) reçut un accueil très
chaleureux et heureux. Puisque la dynastie ottomane n’avait
donné naissance à aucun héritier pendant quarante ans, leurs
naissances devinrent l’occasion d’un gala qui dura des
jours.
Le Sultan Mustafa III continua les leçons de Houzour
(littéralement, présence du cœur avec Dieu), une tradition
que son père, le Sultan Ahmed III initia. Ces leçons
étaient composées de leçons inspirantes du Noble Qur’an et
tenues en présence du Sultan chaque année durant le mois de
Ramadan.
Il est rapporté que le Sultan Mustafa III parcourut la
capitale déguisé pendant la guerre de Russie, écoutant les
idées et les souhaits de son peuple et faisant de son mieux
pour répondre à leurs besoins. Il mobilisa également toutes
les ressources de l’état pour reconstruire la ville et ses
environs lorsqu’un tremblement de terre majeur secoua
Istanbul le dernier jour de la fête islamique du sacrifice
(‘Id al-Adhah) le 3 Rabi’ ath-Thani 1190 (22 mai 1766). Des
sources notent que les dépenses du gouvernement pour cet
énorme projet dépassèrent vingt-deux mille sacs de pièces
d’or et une énorme quantité de chaux. Le tremblement de
terre causa des dommages considérables aux Mosquée Fatih
et Sultan Ayyoub, au Kapali Qarsi (Grand Bazar), aux
remparts de la ville, à Kiz Kulesi (Tour de la Jeune Fille)
et à de nombreux autres bâtiments. Néanmoins, le Sultan
guérira de nombreuses blessures et construira de nouveau la
ville grâce au trésor impérial remplit à ras bord du fait de
ses dépenses publiques frugales.
Le Sultan Mustafa III avait également deux autres projets.
Il voulait relier le Lac Sapanca, situé à l’est du Golfe
d’Izmit, à la Mer Noire et ouvrir un canal à Suez. Ces
projets ne se sont jamais concrétisés principalement en
raison de l’opposition farouche des hommes d’état et du
grand public.
Parmi les mosquées parrainées par le Sultan se trouvaient la
Mosquée Mihrigah connue également sous le nom de Mosquée
Ayazma à Uskudar, qui servait à la mémoire de sa défunte
mère Sultan Amina Mihrigah et de son frère aîné Souleyman.
Il construisit également le Complexe de la Mosquée Laleli du
côté européen de la ville en l’honneur de Laleli Baba, un
dévot que le Sultan respectait beaucoup. Le Sultan et le
dévot furent enterrés dans la cour de la Mosquée Laleli.
Passionné de poésie, le Sultan écrivit de nombreux poèmes
sous le nom de Jihangir. Un quadrant célèbre qui se finit
comme suit se traduit :
À la merci de l’Eternel est donc notre destin...
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