Description de la campagne terrestre et maritime du Sultan contre Lépante et les possessions des Italiens, la victoire des 
guerriers de l’Islam en mer et les conquêtes du Sultan 

 

Le concept de ghazwa contre les impies, est le devoir de tous les Musulmans. Lorsque le divan du Sultan se réunit, une décision unanime fut prise pour une gaza contre Lépante par terre et par mer.

 

(Al-Qassah) Le Sultan souhaitait achever la conquête des terres de Morée. Pour réaliser son plan, l’assujettissement du château de Lépante était nécessaire, car ces deux mamlakat, la Morée et Lépante, étaient des possessions vénitiennes. De ce côté, la mer des Francs atteignait la côte de Roumélie, et donc ces deux provinces se trouvent à l’ouest des terres de l’Islam en Roumélie. Les rois des Francs, et en particulier de Venise, de la frontière nord-ouest de ce littoral à leur point de départ d’origine est un voyage de six jours. Venise est bordée par la Hongrie au nord et la frontière sud-ouest de l’Italie est sur la Mer de Fiqaouss jusqu’à ce qu’elle atteigne les terres de l’ouest.

 

La raison, qui empêcha la conquête de Modon et Koron dans la Morée, et de là la conquête de Lépante, est que la Morée se trouvait dans un endroit isolé, entouré par la mer des Francs. Mais du côté de Roumélie et des terres de l’Islam, il y a à peu près l’équivalent d’un farsah, entre les deux bandes d’eau qui entourent la Morée et une zone montagneuse. Lorsque les impies régnaient sur la Morée, ce morceau de terre était autrefois fortifié d’un rivage à l’autre. Les terres jusqu’à la côte nord-est de la Morée étaient progressivement devenues des domaines ottomans, mais Lépante et ses environs n’avaient pas encore été conquis, car on ne pouvait ordonner la conquête de ce fort que si l’on avait une flotte forte pour résister au d’innombrables navires des Francs. L’aide de Venise arrive à ce château par la mer en six jours et ainsi seul un siège de ces châteaux, qui se trouvent isolés dans des zones ouvertes, est empêché. Les anciens Sultans ne prirent pris de mesures pour créer une marine assez forte pour affronter les Francs, très expérimentés dans le transport maritime.

 

Lorsque ce Sultan monta sur le trône avec une direction divine prospère, les armements de conquête du monde sur terre et sur mer atteignirent un tel stade que le nombre de son armée terrestre ressemblait à la taille des troupes de Salomon et de l’armée victorieuse d’Alexandre, et la puissance de ses serviteurs et de son armée en mer, comparée aux travaux et actes maritimes de tous les dirigeants, infidèles ou Musulmans, est la plus destructrice. Parce que ses navires célestes sont si nombreux, à la surface de la mer, ils ressemblent à des étoiles fixes et mobiles. L’organisation de l’artillerie de ces vaisseaux célestes et la masse de leurs marins sont distingués, forts et puissants. En ce qui concerne la connaissance habile de la guerre et l’utilisation des canons et des armes à feu de ses serviteurs de ces jours, ils étaient plus forts et plus nombreux que les experts, les impies et les idolâtres, et dans le feu d’une bataille en ce qui concerne les mangonneaux et les armes, ils sont plus sévère et impétueux que le feu ardent du canon.

 

Ainsi, lorsque le Sultan décida de conquérir ce château et ses environs, afin d’équiper et de préparer ses navires, et de se préparer à l’opposition aux ennemis, des Francs audacieux, des ouvriers et des maîtres qualifiés, connaissant les armes et l’armurerie, préparèrent les navires du Sultan et les équipèrent de canons et de machines de guerre. Et il ordonna à tous ceux à son service qui étaient qualifiés dans des métiers merveilleux et extraordinaires de les assembler et de les construire. À Istanbul, des navires aussi grands que des montagnes furent construits à partir de navires neufs et anciens avec l’intention de ghazwa. Deux grands navires furent construits, connus sous le nom de kuke dans la terminologie grecque et italienne et chacun d’eux a la taille d’une montagne lorsqu’il est en mer. Pendant qu’ils étaient construits sur terre, le bois et le fer précieux pour leurs outils, leurs clous et leurs ancres furent apportés des régions et des mines proches d’Istanbul. Les hommes qui travaillaient à leur construction, à tous les postes importants, étaient tous des esclaves personnels du Sultan qui avait travaillé comme charpentiers et forgerons salariés spécialisés. Les navires coûtent 24000 pièces d’or chacun.

 

Ce fakir fut informé des mesures suivantes : La taille du navire était de 70 coudées (31m) de long et 35 (environ 16m) coudées de large, et la hauteur de son mât central était d’environ 70 pieds (21m). Leurs mâts étaient épais et droits, faits d’énormes arbres reliés entre eux de sorte qu’ils ressemblaient à un minaret. Le périmètre de chacun d’eux était de 4 coudées (1.8m).

Leur sommet était fait comme la galerie d’un minaret et assez large pour trois personnes. Les navires étaient remplis de boulets et de poudre à canon pour aller au combat contre les ennemis. Les quartiers de résidence des ghazi et moujahidin étaient cachés sous la surface de l’eau et mesuraient environ 20 pieds de haut (6m). Sa capacité en soldats, y compris leurs armes, artillerie et victuailles, était de 1000 hommes. Il transporte tous les moujahidin dans toutes les directions du monde pour combattre. Même si chacun de ces navires est haut comme une montagne, après avoir voyagé sur la mer pendant quelques jours, il y a une limite de temps, quand il doit quitter la mer, car la soif afflige tous les hommes à bord. Les types de navires utilisés dans la mer des Francs et de Roum, selon beaucoup, sont les plus rapides et les meilleurs de tous les transporteurs ; l’habileté des Francs et des Grecs est la plus grande de tous les marins et ils disent que le kuke (cog ?) est le plus grand de tous les autres navires. En comparaison avec le mauna, le kadriga ou le galion, le kuke est le plus destructeur pour sa précision de tir. Son canon est toujours fermement fixé.

 

Chacun de ces navires est un navire de guerre. Le type de navire appelé mauna est comme un fort spacieux et haut sur la mer. Il a des voiles et ressemble à un géant. Il est toujours utilisé pour le transport des victuailles. Il porte les bagages des voyageurs, mais il est très lent. Le type de navire appelé kadriga se déplace à l’aviron et n’a pas de voiles, mais c’est le plus rapide de toutes sortes de navires. En attaque et en retraite, il est très obéissant, et il est si rapide qu’il arrive toujours le premier lorsqu’il est pressé et qu’il est supérieur aux voiliers en vitesse. Il est toujours loué par tous les grands marins de notre temps. Le type appelé barca est un petit kuke et il est basé sur lui en ce qui concerne son apparence et sa façon de voyager. Le type appelé galion est basé sur le mauna et est utilisé de la même manière. C’est le plus petit de tous les types de navires. Lorsque le Sultan décida de faire une campagne pour la conquête des terres des Chrétiens, dans les deux ans, il construisit une grande flotte et l’équipa de milliers de canons, d’équipements de défense et de toufak, d’armes et de mangonneaux grands comme des montagnes, des instruments et des outils pour conquérir des châteaux. Il les équipa également de commandants terrestres et maritimes et de nombreuses troupes à envoyer pour une campagne de gaza.

 

À cette époque, pour une deuxième fois, une ghazwa fut ordonné et une fois de plus Bali Beg Malkochoglu fut envoyé contre la Pologne, les Saqalibah et les Russes. Il rassembla 50000 hommes de toutes les directions et ils partirent avec lui pour une marche d’un mois. Ils pillèrent et détruisirent quelques villes et wilayah des impies et rassemblèrent d’innombrables butins, esclaves et animaux. Sur le chemin du retour, ils tombèrent sur des terrains vagues non cultivés près d’une rivière. Les troupes étaient fatiguées, c’était le début de l’hiver, et le grand nombre de captifs et de bétail devenait un fardeau. Les captifs et le bétail étaient plus nombreux que les soldats, qui étaient fatigués et faibles, et ils souffrirent de grands malheurs.

 

Le premier jour de l’année 904 (1498-9), le Sultan rassembla ses forces et le 20 Shawwal de la même année, le Sultan marcha d’Istanbul à Edirne et ordonna le début de la campagne. Daoud Basha Sani était alors le commandant de la flotte et avait été en charge des navires et de l’équipement des troupes navales. Il y avait de nombreux autres commandants de navires et de marins et de grands voyageurs, en particulier Raïs Kamal, Roustam et Isfendiyar, Raïs Bourak et d’autres courageux capitaines. Mille hommes furent affectés à chaque navire, ainsi que des canons, des toufaks, des victuailles et des instruments de guerre. D’autres hommes et commandants estimés furent affectés aux 300 autres navires, qui furent approvisionnés de la même manière avec ces deux navires, et ils furent tous envoyés à Gallipoli. De là, ils partirent en direction de la Morée et prirent des dispositions pour s’y retrouver dans un mois, quand on estima que l’armée arriverait par voie terrestre. De cette manière, ils assiégeraient le fort de Lépante à la fois par terre et par mer.

 

Lorsque les rois des Francs, et en particulier le souverain de Lépante, qui était le souverain de Venise, entendirent parler de cette campagne du Sultan, ils rassemblèrent une grande armée et une large flotte lourdement équipée. Parce que les Francs avaient une grande armée, une richesse et une main-d’œuvre immenses, et qu’ils avaient une grande confiance dans la grandeur et l’excellence de leurs hommes en mer, ils se précipitèrent vers le Golfe de Lépante et, avec un zèle religieux, ils allèrent repousser les ghazi du Sultan.

 

Quand ils virent la flotte des Musulmans s’approcher de la mamlakat de Morée, les Francs apparurent avec leurs énormes navires pour affronter la marine musulmane. Soudain, un vent fort se leva contre la flotte des Musulmans mais selon les désirs de leurs ennemis, et les navires des Musulmans furent forcés de mouiller dans un port en face de la ville de Modon. En raison du vent fort, ils furent contraints d’y rester pendant près de vingt jours. Du côté de la mer, les moujahidin étaient bloqués par les navires des Francs, qui, aidés par le vent, étaient en meilleure position de combat. De l’autre côté, les habitants du château de Modon, qui se trouvait près du rivage, et toute la population de la côte attaquèrent les navires des Musulmans, jusqu’à ce qu’ils n’aient plus de nourriture et de boisson, n’ayant aucun moyen de débarquer. L’équipage des 300 navires turcs traversa de telles difficultés, également en raison des hautes vagues, qu’ils ne vitrent aucun moyen de s’échapper.

 

En secret, ils envoyèrent un message au député du Sultan qui se trouvait dans le fort de Lépante au sujet de la situation difficile dans laquelle ils se trouvaient. À ce moment-là, le Sultan campait à Chatalcha, près de Lépante. Il envoya immédiatement Ahmad Basha Hersekoglu, qui se précipita à travers une route montagneuse pour les aider. Quand il atteignit le rivage, le vent changea de nouveau et commença à souffler du rivage, ce qui aida à la fois les soldats dans et hors de mer. Ahmad Basha monta à bord avec des soldats et leur proposa de l’aide. Il envoya leur matériel et leurs malades au camp royal en passant par la Morée, tandis que les navires s’embarquaient vers Lépante et les cargos devaient suivre le long de la côte.

 

Alors que la flotte des Musulmans était ainsi bloquée dans le golfe, les Francs avaient rassemblé environ 150 navires qui ressemblaient à des châteaux à l’embouchure du golfe et au large autour de lui. Chaque navire avait 1000 hommes armés et 500 marins, qui étaient lourdement équipés de nombreux canons et armes à feu et prêts pour la bataille. Ainsi, dans chaque récipient plus petit à tous égards, furent disposés environ vingt grands pots incendiaires, qu’ils disposèrent à cinq lieues de nous. Les navires des Musulmans étaient également équipés de canons et d’armes à feu, mais comme les navires des Francs voyagent partout et comme la plupart des Francs sont des marins, ils sont très rapides. De plus, en peu de temps, ils se rassemblèrent et bloquèrent le passage des Musulmans de toutes parts. Ils disposèrent leurs canons et leurs pots incendiaires devant les navires des Musulmans de leur manière experte.

 

Les Musulmans se confièrent à Allah Exalté et firent leurs adieux à leurs camarades certains qu’ils n’auraient pas d’échappatoire. Tout le monde savait qu’il y avait un grand risque de mourir martyr, mais leur foi en Allah leur donna de l’espoir. Finalement, lorsque la flotte musulmane sortit du golfe, les navires confiés par Raïs Kamal à Bourak se préparèrent et se dirigèrent vers les ennemis. Comme ces navires musulmans sont faits pour voyager avec le vent, ils avaient beaucoup de provisions, de canons et d’armes à feu et avaient de grandes chances pour que leurs boulets de canon affrontent les énormes navires des impies.

 

Ce jour-là, une bataille chaude et sanglante commença sur la mer, où le feu et le sang se mêlèrent à l’eau. Les impies pensaient que le navire de Bourak Raïs était celui de Kamal. Des vaisseaux des impies, deux grands kuke transportant 2000 hommes et des munitions, un mauna avec 1000 hommes, un barga, qui est un petit kuke, et deux galions, qui sont de petits maunas, avec 300 et 400 hommes chacun, s’avancèrent et commencèrent à tirer avec leur canon. Les impies s’approchèrent du navire de Bourak Raïs, sur lequel Kamal Beg, le gouverneur de Yenishehir, était chef de l’armée et son commandant était Kara Hassan, un homme courageux avec une grande expérience de la navigation. Lorsque les impies atteignirent le navire de Bourak, ils lancèrent des grappins et des crochets de fer et s’attachèrent avec des chaînes aux côtés du navire des Musulmans. Ainsi, la bataille des canons et des toufak se transformée en bataille d’armes et d’épées, et chacun combattit avec son ennemi à bord du navire. Bourak décida alors sagement de jeter du naphta blanc sur les deux navires des impies qui étaient attachés au sien, et de les incendier. Les deux vaisseaux des ennemis, tous leurs hommes et tout ce qui se trouvait sur eux furent consumés par le feu, mais comme son bateau était attaché à ceux des infidèles avec des grappins, il prit également pris feu. Tout le monde sur ces deux navires italiens et musulman fut brûlé sous les yeux de tous les observateurs.

 

Aussi un mauna et une barga des Francs, venus secourir les Francs, subirent tant de coups de boulets de canon, que tout le monde dans les deux navires fut tué. Après cette victoire des Musulmans, un autre galion vénitien fut détruit, tous ses hommes faits prisonniers et 350 impies tombèrent à la mer. Bourak Raïs, Kamal Beg, Kara Hassan et l’équipage de ce kuke devinrent tous martyrs. Sept cent hommes du côté musulman, se jetèrent à la mer et réussirent à monter à bord d’autres navires avec l’aide de leurs camarades. En outre, environ 1000 Francs, qui se jetèrent dans la mer depuis les navires en flammes, furent rassemblés par les Musulmans et exécutés en représailles. Pendant la confusion de la bataille, la flotte des Musulmans en profita pour bouger. Ahmad Basha Hersekoglu, Daoud Basha et les commandants des autres navires, avec l’aide d’Allah Exalté, sortirent de cette situation difficile et les Francs, qui souhaitaient couper le chemin aux Musulmans, perdirent tout espoir de réussir. Les moujahidin sortirent au large et atteignirent la côte de Lépante.

 

Dès son arrivée dans la région, le Sultan campa près du fort de Lépante. Comme le temps d’été y était très chaud, il chargea son éminent Vizir Mustafa Basha d’assiéger Lépante par voie terrestre. Mais la flotte musulmane n’arriva toujours pas durant un autre mois, pendant lequel elle traversa ce qui fut rapporté ci-dessus tandis que les impies à l’intérieur du château en furent informés. Une fois de plus, la flotte de l’ennemi coupa le passage des navires musulmans alors qu’ils venaient du large pour se rendre dans le Golfe de Lépante ou se trouvaient les forces vénitiennes pour se battre et tuer. Les Musulmans se confièrent de nouveau à Allah Exalté et se préparèrent pour le Jihad. Les deux camps commencèrent à s’attaquer avec des canons et des armes à feu et ils tombèrent sur les forces vénitiennes avec une grande ardeur.

 

Pendant un certain temps, les deux camps tirèrent et furent touchés par des boulets de canon et certains navires coulèrent des deux côtés. Les ghazi étaient motivés par le courage qu’on trouve dans les situations difficiles et leur désir d’éradiquer ceux contre l’Islam. Mais bien que la flotte des Musulmans fût plus grande que celle des impies, les navires des Musulmans étaient inférieurs à ceux des Francs en taille et en force. Les Francs, cependant, tirèrent de nombreux boulets de canon contre les Musulmans avec une grande hâte, et leurs bateaux étaient si grands que beaucoup de boulets de canon qu’ils tirèrent contre les ghazi passèrent au-dessus de leurs navires et ne leur causèrent pas de mal, et avec l’aide d’Allah Exalté, de nombreux coups des impies furent perdus. Au contraire, les boulets de canon des Musulmans, tirés du bas vers le haut, furent pénétrants et efficaces. Dans le feu de l’action, le mélange des deux armées ressemblait à un conflit entre dragons des mers. Soudain, trois kadrigas musulmans avec environ 1000 hommes chacun furent encerclés par les impies et ils se battirent jusqu’à la nuit avec des haches et des épées.

À un moment donné, de courageux moujahidin se dirigèrent vers les navires des Francs et mirent en déroute plusieurs de leurs hommes, avant que les impies ne les battent et deviennent ainsi des martyrs. Les trois kadrigas restèrent dans la mer jusqu’au lendemain matin sans que les infidèles ne les saisissent. Ainsi, le lendemain matin, un corps d’environ 1000 ghazi de ces navires atteignit les autres navires musulmans et les sauvèrent des mains des impies. La nuit tombée, la flotte musulmane se dirigea vers Lépante pour rencontrer l’armée.

 

Après deux ou trois jours de voyage, les navires atteignirent le château et la bonne nouvelle de leur arrivée fut envoyée à la hâte au Sultan. Les défenseurs du château espéraient l’arrivée et l’aide de la flotte des impies et étaient prêts à se réjouir en voyant ces vaisseaux passer par l’ouverture. Quand ils virent que les Musulmans arrivaient, ils perdirent immédiatement tout espoir, voyant qu’ils étaient encerclés par les Musulmans de terre et de mer. Dans l’espoir de sauver leur vie et leurs biens, ils s’humilièrent et demandèrent miséricorde. Mustafa Basha fut nommé responsable. Cette conquête eut lieu au mois de Mouharram 905 (août 1499). L’écho de cette victoire brisa l’esprit de tous les mécréants.

 

Le Sultan, après avoir organisé les affaires de la mamlakat, l’administration des frontières de l’Islam, de la ville conquise et du château selon la Shari’ah, donna la permission à l’armée de retourner dans leurs patries et l’armée impériale retourna à Edirne. Le Sultan vit qu’il était évident qu’il serait facile de défendre et de protéger Lépante des vils impies avec des forces navales qui garderaient la côte nord de la Morée, qui se trouve au sud-est de Lépante, si deux forteresses étaient construites en face l’une de l’autre en l’endroit par lequel passaient les navires allant à Lépante. Les deux forteresses devaient être armées de canons face à la côte en direction des Francs et de chaque côté, afin que les gardiens de ces forteresses veillent sur les navires qui venaient de la mer des Francs. Si les Francs avaient l’intention d’emmener leur armée par voie maritime, ils n’auraient aucune chance de traverser le détroit, et ce serait comme s’il fallait passer par Gallipoli pour se rendre à Istanbul. Afin d’achever les arrangements pour l’organisation de la zone, le Sultan ordonna à Mustafa Basha, qui était le conquérant du château, de réparer les deux forteresses en coopération avec Sinan Basha, qui était l’émir al-Oumara d’Anadolu. Une armée fut immédiatement envoyée aux deux forteresses, leur défense et leur garde furent organisées et tous les mamlakat et wilayah côtières de Roumélie, qui sont près de Morée et de Lépante, furent encloses dans les terres de l’Islam et tous leurs habitants sécurisés.

 

Le Sultan pensa également que sa flotte, qui avait traversé une campagne aussi difficile et pénible, avait subi de nombreux et divers dommages, avait besoin d’être armée de canons et d’armes à feu, ne devait pas revenir en arrière. Il fit donc en sorte que les navires resteraient pendant l’hiver à Lépante et des émirs et des troupes furent nommées pour superviser les réparations. Daoud Basha Sani, qui avait été le commandant de la flotte, fut laissé dans la même position, et tous les autres qui administraient des affaires similaires étaient sous son commandement. Le gouverneur de Préveza, Mustafa Beg, qui était l’un des esclaves personnels du Sultan et estimé pour sa bravoure, sa générosité et sa piété, fut chargé de superviser la construction et l’équipement de 40 nouveaux navires. Il fut convenu qu’au début du printemps, ces vaisseaux se dirigeraient vers la Morée ou ils lanceraient une ghazwa contre Modon, Koron et d’autres forts de la région.

 

Au milieu de l’hiver, Mustafa Beg avait vingt navires achevés et vingt autres presque terminés. Mais soudain, une nuit, des navires vénitiens arrivèrent en secret et y mirent le feu. Cette ruse des impies brûla tout le chantier naval et la plupart des navires qui s’y trouvaient. Les Ottomans envoyèrent leurs navires avec beaucoup de soin, chargés de canons, d’armes et de munitions et, sur ordre du Sultan, ils se dirigèrent vers Modon et Koron. Il avait été rapporté de cette région, que pendant l’hiver, les forces vénitiennes causaient constamment des problèmes aux Ottomans en représailles à l’assujettissement de Lépante. Soudain, des navires entièrement armés d’impies se retournèrent contre le château et la région de Rakya en Roumélie, qui faisait partie du Dar al-Islam et se trouvait dans la région de la wilayah gouvernée par Mustafa Beg, et après avoir débarqué, ils commencèrent à les assiéger. Les gens là-bas étaient négligents et sans armes et lorsque le siège commença, ils envoyèrent des messages aux émirs et gouverneurs ottomans du voisinage et les informèrent de leur état.

 

De nombreux commandants de la région étaient négligents, mais Mustafa Beg rassembla son armée et s’y rendit. Au moment de son arrivée, cependant, les murs du château étaient pleins de trous à cause des boulets de canon et les Musulmans avaient été faits prisonniers. Mustafa Beg et ses braves hommes se précipitèrent sur les impies, qui avaient pris le château et y étaient fortifiés. Ils entrèrent dans le château contre les canons et les toufak des Francs et se battirent contre eux. Parce que l’émir susmentionné avait été formé en tant que commandant du Sultan des moujahidin et était un excellent guerrier, dans ce siège, il fit preuve d’un si grand courage qu’il faudrait plusieurs pages pour le décrire. Lui et ses hommes se battirent avec les mécréants pendant un certain temps aux abords du château, jusqu’à ce que le frère de l’émir soit tué et que son neveu soit blessé par un boulet de canon. Le cheval de Mustafa Beg fut également touché par un boulet de canon et fut blessé à la cuisse, mais la grâce d’Allah Exalté le protégea et il ne fut pas gravement blessé. Lorsque le combat se transféra à l’extérieur du fort, Mustafa Beg n’était pas préparé à l’artillerie lourde des infidèles, il se retira donc sur les navires du Sultan qui l’attendait et rentra. Il envoya un rapport au Sultan sur la situation et revint avec les navires. Il équipa ces vingt maunas de grands guerriers et d’artillerie et équipa chaque navire d’excellents canons.

 

De tous les rapports sur les activités ennuyeuses des Vénitiens pendant l’hiver, on sait qu’après que les troupes victorieuses du Sultan aient quitté Lépante, ces infidèles étaient furieux ; par mer, ils envoyèrent une armée équipée de canons et d’armes à feu et partirent pour subjuguer l’île de Céphalonie, possession ottomane en face de la Morée.

Cette île, située en dehors des côtes de Lépante, était proche du royaume des Francs, et y envoyer de l’aide avec de nombreux navires et surtout pendant cet hiver n’était pas facile. Par conséquent, les Francs assiégèrent l’île pendant environ trois mois avec d’innombrables canons et ses habitants désertèrent le château, qui était entouré de montagnes. Ses défenseurs, cependant, et en particulier le gouverneur du château, restèrent très dévoués et maintinrent la défense, bien que les fortifications aient été détruites. La fille du gouverneur fut si courageuse qu’elle tua à elle seule douze impies au cours d’une bataille. Bien qu’ils aient eut tous les jours un grand besoin d’aide, ils continuèrent à se battre jusqu’à ce que les provisions des Francs soient terminées et qu’ils soient obligés de se retirer, abandonnant l’espoir de prendre le château.

 

 

À la fin de l’hiver, le Sultan se prépara à marcher contre Modon et Koron, mais il reçut la nouvelle que les rois des Francs, et surtout le souverain de Venise, échangeaient des envoyés entre eux et s’étaient mis d’accord avec les Kral de Hongrie, de Pologne et des Tchèques que : « Bien que le Sultan ait conquis Lépante, nous avons bloqué les navires musulmans et ils ont de grandes difficultés à sortir. Une attaque contre les terres de Roumélie à travers les montagnes par les rois de Hongrie, de Pologne et les Tchèques donnera aux Chrétiens l’occasion de subjuguer les terres de l’Islam. Avec d’innombrables navires des flottes des rois des Francs, nous pouvons subjuguer toute la côte de Roumélie. De nombreux envoyés furent envoyés au cours de ces négociations et ils reçurent beaucoup d’argent. Après cela, ils communiquèrent avec le Pape, qui est le chef des rois chrétiens et ils l’informèrent de chaque ordre qu’ils donnaient. Le Pape consenti à leurs plans diaboliques.

 

Le Sultan, cependant, fut informé de ces plans des impies et au début de l’an 907 (1501) de l’Hégire, il partit en ghazwa contre les châteaux des Francs. Il donna l’ordre aux commandants généraux des navires de Lépante, en particulier Daoud Basha et Mustafa Beg, de poursuivre leurs navires vers Modon et Koron. Le Vizir Ya’qoub Basha, Giovan Beg, Ishaq Beg Matraqchi et Biyikli Mahmoud Beg furent nommés comme assistants, avec environ 3000 piyades et ‘azebs, de sorte que les Francs, malgré leurs forces conjointes, ne puissent pas les affronter. Bien qu’il y ait eu quelques petits incidents avec les impies, en raison de la grandeur des commandants musulmans et de leur supériorité en nombre, les forces ottomanes se rendirent au château de Modon sans problème.