Ainsi, il devint courant pour les Portugais de venir avec
des navires chargés de personnes et de cargaisons et de
revenir avec du poivre, du gingembre séché et plusieurs
autres produits, année après année. Lorsque les Portugais
s’installèrent à Kochi et Kannour et y trouvèrent une base
solide, les habitants de ces villes avec leurs dépendants se
s’engagèrent dans des voyages en mer emportant avec eux des
laissez-passer des Portugais pour éviter les risques. Chaque
navire, aussi petit soit-il, était muni d’un laissez-passer,
pour lequel les Portugais fixaient une redevance et au
moment du voyage, le capitaine du navire prenait le
laissez-passer contre paiement de la redevance. Les
Portugais firent comprendre aux gens que le système de
laissez-passer introduit par eux était à leur avantage et
les incitèrent donc à s’y soumettre. Chaque fois que les
Portugais tombaient sur un navire qui ne possédait pas leur
laissez-passer, ils saisissaient le navire, son équipage et
sa cargaison. En raison de cette grande injustice, les
Samouris, ses sujets et ses dépendants se battaient
constamment contre les Portugais.
Les Samouris dépensèrent une grande partie de leur richesse
dans cette guerre, et après un certain temps lui et des
sujets diminuèrent en force. Les Samouris envoyèrent donc
des lettres aux Sultans musulmans pour demander de l’aide
mais ils ne se présentèrent pas pour l’aider. Cependant, le
Sultan de Jazrat (Gujarat), le Sultan Mahmoud Shah,
le père du estimé Sultan Mouzaffar Shah, et ‘Adil Shah, le
grand-père du grand Sultan ‘Ali ‘Adil Shah (qu’Allah
illumine leurs tombes), donnèrent l’ordre de préparer leur
navires de guerre et leurs navires d’escorte qui se
révélèrent par la suite impropres à la mise en mer. Le
Sultan de Misr (Egypte), Qansouh al-Ghawri, qu’Allah
lui fasse miséricorde, avait envoyé un de ses émirs, ‘Amir
Houssayn, avec treize navires et quelques troupes.
‘Amir Houssayn atteignit le port de Diu au Gujarat.
Puis ils s’embarquèrent pour Shiyul et avec eux se
trouvaient Malik Ilyas, le na’ib à Diu et ses navires
d’escorte. Ils tombèrent sur quelques navires portugais, et
dans le combat qui suivit, ‘Amir Houssayn captura un
gros navire portugais. ‘Amir Houssayn et ses troupes
retournèrent alors à Diu avec leurs navires. Il y resta
quelques mois pendant la saison des pluies. Par la suite,
sur instruction des Samouris, une quarantaine de navires de
sa ville et d’ailleurs arrivèrent à Diu pour renforcer ‘Amir
Houssayn.
En apprenant l’existence de ‘Amir Houssayn et de ses
hommes campant à Diu, les Portugais embarquèrent sur vingt
navires préparés pour la guerre et apparurent soudainement
devant Diu. Répondant à cette arrivée portugaise inattendue,
‘Amir Houssayn, sans préparation, mit en mer ses
navires et ceux de Malik Ilyas, ainsi que les petits navires
venus de Malabar. Lorsque les Portugais rencontrèrent les
forces combinées, ils fixèrent leur attention sur les
navires de ‘Amir Houssayn et capturèrent quelques-uns
de ses navires tandis que le reste se sépara. Ainsi, par le
décret d’Allah et son commandement incontestable, les
maudits portugais revinrent victorieux à Kochi.
‘Amir Houssayn et quelques-uns de ses soldats purent
s’échapper avec les troupes de Malik Ilyas, les Malabaris et
leurs navires. ‘Amir Houssayn retourna en Egypte.
Qansouh al-Ghawri, le Sultan de Misr, s’indigna de la
défaite et dépêcha vingt-deux navires entièrement équipés de
tout l’attirail de guerre, sous le commandement de ‘Amir
Salman ar-Roumi avec ‘Amir Houssayn. Les forces
d’al-Ghawri avec leurs navires atteignirent le port bien
protégé de Jeddah et se rendirent ensuite au port de Camran.
Là, ‘Amir Houssayn lutta contre le peuple du Yémen et
pilla son pays. Sur ce, Salman ar-Roumi le quitta et navigua
vers le port d’Aden avant de retourner à Jeddah ou une
bagarre éclata entre ‘Amir Houssayn et Salman
ar-Roumi à cause des combats de ‘Amir Houssayn et du
pillage des Musulmans. Salman dû alors quitter Jeddah et
retourner dans son pays. ‘Amir Houssayn fut capturé
peu après par le Sultan ash-Sharif Barakat du Hijaz
et mourut noyé dans la mer.
C’est après ces incidents, que la nouvelle parvint à Jeddah
qu’une guerre avait éclaté entre le Sultan Qansouh
al-Ghawri et le Sultan Salim Shah ar-Roumi. Qansouh
al-Ghawri perdit et fut bientôt assassiné et Salim Shah
ar-Roumi captura son royaume.
Allah est le Maître de Ses affaires.
Le jeudi 22 Ramadan 915 (1510), les Portugais arrivèrent à
Calicut et attaquèrent la ville. Ils mirent le feu à la
mosquée de la congrégation, qui avait été construite par le
célèbre Nakhouda Mithqal. Puis ils entrèrent dans le palais
de Samouri affirmant qu’ils l’avaient capturé. Le Samouri
était absent à ce moment-là et était à quelque distance
de-là pour des questions liées à la guerre. Les soldats Nair
dans le palais combattirent les intrus portugais et les
chassèrent du palais. Ils tuèrent environ cinq cents soldats
du côté portugais.
Beaucoup moururent noyés en mer et les autres fuirent vers
leurs navires dans le désespoir, comme Allah, Exalté
soit-Il, l’a voulu.
Quelque temps avant ou après cet incident, les Portugais
arrivèrent à Ponnani et mirent le feu à près de cinquante
bateaux de pêche qu’ils trouvèrent sur la plage. Quelque
soixante-dix Musulmans qui les combattirent furent
martyrisés.
De même, les Portugais arrivèrent à Aden et une bataille
féroce eut lieu avec les Musulmans. Allah Exalté aida les
Musulmans et abandonna les Portugais qui durent fuir pour
sauver leurs vies, totalement vaincus. Cela se produisit
alors que ‘Amir Marjan était le dirigeant d’Aden, qu’Allah
lui fasse miséricorde.
Les Portugais, après avoir sécurisé leurs positions à Kochi
et Kannour, conclurent un traité avec le roi de Kollam et
construisirent un fort. Kochi et Kollam, à l’époque, étaient
les centres qui attiraient la plus grande partie du commerce
du poivre, plus que tout autre endroit.
Puis les Portugais combattirent le peuple de Goa,
capturèrent la ville et l’occupèrent. Le port de Goa était
aux mains de ‘Adil Shah, le grand-père de ‘Ali ‘Adil Shah le
Grand. Les Portugais firent de Goa leur capitale en Inde et
établirent leur domination. Mais, peu après, ‘Adil Shah
combattit les Portugais, reprit Goa et les mis en déroute à
partir de là. Ainsi, elle redevint une partie du territoire
islamique (Dar al-Islam). Enragés, les Portugais revinrent
avec des préparatifs massifs. Ils combattirent les Musulmans
et capturèrent à nouveau Goa et en firent une partie de leur
domaine. On rapporta que les émirs et les principaux hommes
de Goa avaient un accord secret avec les Portugais ; par
conséquent, la reprise de Goa leur fut facilité. Ensuite,
les Portugais y construisirent plusieurs forts, d’immenses
bâtiments et tours. Si Allah veut quelque chose, Il
l’accomplit. Ainsi leur puissance commença à croître de jour
en jour.
Certaines actions honteuses des Portugais
Au début, une condition prévalait à Malabar qui permettait
aux Musulmans de mener une vie prospère et confortable en
raison de la bienveillance de leurs dirigeants, de leurs
coutumes ancestrales et de leur gentillesse. Mais, ils
déprécièrent les bénédictions d’Allah, transgressèrent et
devinrent insouciants. Alors Allah plaça sur eux les
Chrétiens portugais et qu’Il soit exalté, les abandonna. Ils
opprimèrent les Musulmans, les corrompirent et commirent
toutes sortes d’actes laids et infâmes contre eux, abjects
pour être décrit.
Les Portugais se moquaient des Musulmans et les méprisaient.
Ils les harcelèrent sans raison, les insultèrent, les
humilièrent, les forcèrent à les porter sur leur dos pour
traverser des étendues sales et boueuses alors qu’ils
parcouraient la campagne, leur crachèrent dessus et sur
leurs visages, entravèrent leurs voyages, en particulier
ceux du Hajj, pillèrent leur richesse, saisirent
leurs véhicules, incendièrent leurs maisons et leurs
mosquées, piétinèrent et brûlèrent le Saint Qur’an et
d’autres livres religieux, insultèrent publiquement le
Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), souillèrent et
polluèrent les lieux de culte, leur firent dirent du mal et
contre la religion de l’Islam, les forcèrent à s’incliner
devant la croix et donnèrent de l’argent à ceux qui le
firent, ils défilèrent les femmes chrétiennes entièrement
ornées de riches ornements et vêtues de beaux vêtements
devant les femmes musulmanes pour tenter les femmes
musulmanes, tuèrent les pèlerins du Hajj et les
persécutèrent avec toutes sortes de cruautés, les
capturèrent et les enchainèrent aux pieds dans de lourdes
chaînes ou les menottèrent en les traînant dans les rues et
les marchés pour les vendre comme esclaves et, chaque fois
que quelqu’un osait les libérer par sympathie, ils les
fouettaient sans pitié pour exiger des prix plus élevés. Ils
les enfermèrent et les gardèrent confinés dans des pièces
sombres sales et pestilentielles, surpeuplées dans des
conditions dangereuses, les battirent avec des sandales et
les marquèrent avec des bâtons d’encens incandescents pour
avoir utilisé de l’eau pour se nettoyer après les besoins.
Ils capturèrent des Musulmans et les vendirent, réduisirent
certains en esclavage, les forcèrent à faire toutes sortes
de travaux forcés sans aucune compensation. C’étaient les
choses qu’ils faisaient habituellement aux Musulmans.
Les Portugais, après de grands préparatifs, naviguèrent vers
les ports du Gujarat, Konkan et Malabar, et la côte
d’Arabie, attendirent les bateaux des Musulmans et les
saisirent. Ils accumulèrent ainsi une richesse abondante et
acquirent un grand nombre de prisonniers musulmans. Combien
de femmes musulmanes de noble naissance furent-elles prises
captives, et dont l’honneur fut violé pour mettre au monde
des enfants chrétiens qui deviendraient des ennemis de la
foi d’Allah et des agents pour causer l’affliction aux
Musulmans ! De nombreux savants, membres de la famille du
Noble Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et autres
grands personnages furent capturés, retenus en otages,
persécutés et finalement tués brutalement. Beaucoup d’hommes
et de femmes musulmanes furent convertis de force au
Christianisme. Combien de telles atrocités et cruautés ! Les
langues se lassent de les décrire et détestent les mettre en
mots. Puisse Allah, le Tout-Puissant, les châtier
éternellement pour leurs crimes. Amin !
Le désir ardent des Portugais comme des Chrétiens a toujours
été de faire renoncer les Musulmans à la foi de l’Islam et
de les convertir au Christianisme. Qu’Allah nous protège de
leur maux ! Cependant les Portugais durent maintenir des
relations pacifiques avec les Musulmans, par nécessité, car
ils devaient vivre parmi les Musulmans qui formaient le
principal corps de population dans tous les ports maritimes
de Malabar. Ainsi, les Portugais nouvellement arrivés
pendant certaines saisons de l’année, remarquant les
Musulmans et leur conduite à Kochi, disaient à leurs
compatriotes : « Jusqu’à aujourd’hui, les Musulmans n’ont
pas changé d’apparence. » Ils reprochèrent à leurs
prédécesseurs de ne pas avoir fait assez pour amener les
Musulmans à changer de religion. «
Ils veulent éteindre
avec leurs bouches la lumière d’Allah, alors qu’Allah ne
veut que parachever Sa lumière, quelque répulsion qu’en
aient les mécréants. » (Qur’an, 9:32)
Enfin, ils firent même fait appel au roi de Kochi pour
expulser en masse les Musulmans. Ils tentèrent d’influencer
le roi en lui disant que ses revenus des Musulmans étaient
très maigres et que s’il les chassait tous de son
territoire, ils lui donneraient ces revenus plusieurs fois
multipliés. La réponse du roi de Kochi fut que les Musulmans
ne pouvaient pas être expulsés de son pays car ils étaient
ses sujets depuis des temps immémoriaux et, en outre, ils
avaient beaucoup contribué au développement et à la
prospérité du pays. Les Portugais montrèrent de l’hostilité
uniquement envers les Musulmans et leur foi et non envers
les Nairs ou les autres incroyants de Malabar.
Le Traité Samouri-portugais et la construction du fort portugais à Calicut
Au fur et à mesure que la guerre se prolongeait, la
faiblesse des musulmans augmentait. Et le Samouri qui avait
dépensé une grosse somme dans ces guerres mourut et son
jeune frère lui succéda.
Ce nouveau roi était d’avis que la paix avec les Portugais
était la meilleure solution, car elle apporterait à ses
sujets musulmans la prospérité dans leur commerce comme la
prospérité dont jouissent ceux de Kannour et Kochi, et
supprimerait leur faiblesse et les sauverait de leur
pénurie. Et en conséquence, il conclut un traité avec les
Portugais par lequel il permit aux Portugais de construire
un fort à Calicut à condition qu’ils permettent à ses sujets
musulmans d’entreprendre des voyages commerciaux vers le
port arabe de Jeddah et Aden à bord de quatre navires chaque
année.
Puis les Portugais maudits commencèrent à construire un fort
solide tandis que les sujets de Samouri partaient vers les
ports arabes à bord de quatre navires chargés de poivre et
de gingembre séché. Comme d’autres, ils commencèrent
également à faire des voyages commerciaux comme auparavant
au Gujarat et à d’autres destinations avec des
laissez-passer portugais. C’était en 920 ou 921 de l’Hégire
(1514-15).
Au moment où les quatre premiers navires revinrent à
Calicut, les Portugais avaient terminé la construction de
leur fort à Calicut. Alors, ils interdirent ensuite aux
Musulmans de faire d’autres voyages dans les ports arabes
avec du poivre et du gingembre dans leurs navires. Ainsi,
ils voulaient monopoliser le commerce du poivre et du
gingembre séché. Chaque fois qu’ils voyaient ne serait-ce
qu’une petite quantité de ces deux épices dans un navire,
ils s’emparaient du navire, de son contenu et de son
équipage. Les Portugais devinrent ainsi la source de grandes
afflictions et de détresse pour les Musulmans et autres
sujets.
Le Samouri, qui respectait dûment la paix, endura leurs
mauvaises actions avec patience, parce qu’il craignait leur
inimitié. Néanmoins, il envoya secrètement des lettres aux
Sultans musulmans les exhortant à se préparer à la guerre
avec les Portugais, mais cela resta sans suite. C’était ce
qu’Allah voulut.
Les Portugais, qu’Allah les maudisse, étaient intelligents
et perfides. Ils connaissaient très bien le cours qui
convenait le mieux à leur entreprise. Ils étaient tout à
fait cordiaux et polis envers leurs ennemis si nécessaire,
mais une fois qu’ils avaient atteint leurs objectifs, ils
les traitaient de manière abominable. Entre eux, ils étaient
assez unis dans le sentiment et la conduite. Ils ne
désobéissent pas à leurs aînés même s’ils étaient loin de
leurs dirigeants. Il était rare qu’un désaccord d’opinion se
produise entre eux, et rien n’a été entendu à ce jour sur le
fait que quiconque parmi eux ait assassiné l’un d’entre eux
pour avoir pris le pouvoir. Telles étaient les raisons pour
lesquelles les dirigeants de Malabar et d’autres se
soumirent aux Portugais malgré leur petit nombre. D’un autre
côté, les soldats musulmans et leurs émirs se disputaient
entre eux et s’efforçaient de se retirer du pouvoir même en
tuant.
Une fois que les Portugais s’établirent fermement à Calicut
et consolidèrent leur position, ils invitèrent les Samouri à
leur résidence dans le fort sous prétexte de lui offrir des
cadeaux précieux qu’ils avaient reçus par lui de leur roi du
Portugal. Mais leur véritable intention était de le faire
prisonnier. Le Samouri, en arrivant là-bas, eut un soupçon
lorsqu’il vit la gesticulation d’un Portugais. Il quitta
donc rapidement les lieux en faisant semblant de répondre à
un appel de la nature. Ainsi, par la grâce d’Allah, il put
s’échapper sans tomber dans le piège que lui tendaient les
perfides Portugais. L’homme qui avait gesticulé et qui avait
permis au Samouri d’échapper fut punis et transféré de
Calicut à Kannour.
Au mois de Mouharram, 923 de l’Hégire (1517), les
Portugais partirent de Goa avec des préparatifs de guerre
massifs, avec une flotte d’environ vingt-huit navires, ayant
en vue le port bien fortifié de Jeddah. Lorsqu’ils
atteignirent le port, les Musulmans furent terriblement
perturbés et effrayés. Salman ar-Roumi, qui avait été envoyé
plus tôt par Qansouh al-Ghawri pour aider les
Musulmans de Malabar contre les Portugais, y était alors
présent avec ses navires de guerre et environ deux cents
soldats. Il ouvrit le feu sur les Portugais depuis le
rivage, causant des dommages considérables à certains de
leurs navires. Les Portugais hissèrent toutes les voiles,
s’éloignèrent de la portée de tir des canons et s’enfuirent
craintifs. Cependant, Salman ar-Roumi envoya trente soldats
dans deux bateaux à leur poursuite. Ils capturèrent un
navire portugais à Camran et retournèrent à Jeddah avec
douze chrétiens qui étaient à bord du navire. Les Portugais
restèrent à Camran jusqu’à la fin de la saison de la mousson
et retournèrent à Goa, frustrés dans leurs espérances. Tel
était le plaisir d’Allah.
La rivalité entre Samouri et les Portugais et la capture du fort de Calicut
Sache que : Les atrocités et les excès portugais à Calicut
augmentèrent de jour en jour. Mais le Samouri ferma les yeux
sur ces atrocités. Leurs excès continuèrent jusqu’au jour où
une bagarre éclata à Calicut entre les Portugais et quelques
Musulmans de Pantalayani. L’incident se produisit le 10 Mouharram
931 (1524). Ainsi la paix fut rompue et les hostilités
reprirent. De plus, environ un an plus tôt en 930, lors d’un
autre incident, des personnes de Pantalayani, Chemmanad,
Tirourangadi, Parappanangadi et quelques autres endroits,
naviguant sur de petits bateaux, avaient capturé une dizaine
de navires de commerce appartenant aux Portugais.
Pendant ce temps, un conflit civil éclata à Kodoungallour
entre les Musulmans et les Juifs de la localité. Les Juifs
avaient tué un Musulman ce qui conduisit à l’émeute. Les
Musulmans envoyèrent des messagers à leurs frères dans
diverses villes de Malabar pour demander leur aide pour
riposter contre les Juifs. Les habitants de Calicut avec
leurs proches de Pantalayani, les habitants de Kakkad,
Tikkodi et leurs proches de Chaliyam et les habitants de
Parappanangadi, Tirourangadi, Tanour, Parawanna, Ponnani et
Weliancode se réunirent dans la mosquée de la prière du
Vendredi de Chaliyam. Là, ils résolurent d’attaquer les
Juifs de Kodoungallour. Ils résolurent également de faire la
guerre aux Portugais et de ne faire la paix avec eux qu’avec
la permission du Samouri. Cela se produisit également en
l’an 931 de l’Hégire.
En conséquence, ils embarquèrent dans une flotte d’une
centaine de petits navires à Kodoungallour et y tuèrent
plusieurs Juifs. Les autres fuirent vers les zones rurales
de l’est de Kodoungallour. Les Musulmans incendièrent les
maisons et les synagogues des Juifs. Lorsqu’ils
s’aventurèrent à incendier les maisons et les églises
appartenant aux Chrétiens, la communauté de Nair protesta et
cela provoqua un affrontement entre les Musulmans et la
communauté de Nair. Quelques hommes de la communauté Nair
furent tués dans l’affrontement. Pour cette raison, il
devint intenable pour les Musulmans de la localité d’y vivre
et ils furent forcés de migrer vers d’autres endroits.
Cette même année, les habitants de Darmadam, Edakkad,
Kannour, Tirouwangad, Ezhimala et Chemmanad, unirent leurs
forces pour déclencher une guerre contre les Portugais. Les
Musulmans d’autres villes firent également de même.
Toujours cette même année, certains des chefs de Kochi comme
Faqih Ahmad Marakkar, son frère Kounhi ‘Ali Marakkar,
leur oncle Muhammad ‘Ali Marakkar et leurs partisans
ressentirent le besoin de combattre les Portugais et
naviguèrent donc de Kochi à Calicut. Lorsque les Portugais
prirent conscience que la plupart des Musulmans et des
Samouri étaient fermement opposés à eux, ils firent de grand
préparatif pour la guerre et levèrent les voiles de Kochi et
débarquèrent à Ponnani, le samedi matin, 3 Joumadah al-Oula
931.
Ils incendièrent d’innombrables maisons, centres d’affaires,
entrepôts et quelques mosquées sur le rivage. Ils abattirent
et détruisirent d’innombrables cocotiers sur le rivage. De
nombreux Musulmans furent martyrisés. Ensuite, les Portugais
naviguèrent après la deuxième nuit de l’arrivée et
atteignirent Pantalayani. Là, ils s’emparèrent d’une
quarantaine de navires appartenant à ses habitants et à
d’autres. Là encore, de nombreux Musulmans tombèrent
martyrs.
Lorsque la discorde éclata à Calicut entre les Portugais et
certains Musulmans de Pantalayani, les Samouri résolurent de
lutter contre les Portugais. Mais lorsque les Portugais
arrivèrent, ils étaient absent et à une certaine distance de
Calicut, impliqué dans un autre conflit avec certains de
leurs ennemis. Le Samouri envoya donc son ministre en chef,
al-Yadh, avec l’ordre de lutter contre les Portugais.
Al-Yadh fit des préparatifs massifs en dépensant une énorme
somme d’argent.
Les guerriers musulmans et les troupes Nair du Samouri
assiègent ensemble le fort portugais. Les Musulmans de
nombreuses régions du pays convergèrent à Calicut avec le
zèle de faire le jihad dans la voie d’Allah. Puis, le
Samouri lui-même arriva. À ce moment-là, les Portugais
étaient à court de provisions dans le fort et ils n’avaient
aucun espoir de se ravitailler de l’extérieur. Les
Portugais, désespérés, creusèrent la partie arrière du fort
sans être vu de l’extérieur et déplacèrent tous leurs objets
de valeur sur leurs navires et s’échappèrent. Cela eut lieu
en l’an 932 (1525). Au moment où cette campagne se termina
par la victoire, plus de deux mille personnes, parmi
lesquelles des Musulmans, des guerriers Nair et les
officiers du Samouri, avaient été tuées. L’inimitié des
Portugais envers les Samouri et les Musulmans s’accrut avec
la perte de leur fort. Et cet état de fait dura très
longtemps.
Comme ils étaient résolus de faire la guerre aux Portugais,
les Musulmans commencèrent faire des voyages commerciaux par
navires et sans permis des Portugais, parfaitement préparés
pour la guerre. Ils transportèrent du gingembre séché, du
poivre, etc. au Gujarat et à quelques autres endroits. Bien
que certains de ces navires aient pu échapper aux Portugais,
la plupart d’entre eux furent capturés ou bloqués à terre à
cause de cela. En conséquence, les habitants de Darmadam et
leurs alliés se portèrent volontaires pour faire la paix
avec les Portugais vers la fin de la saison et commencèrent
leurs voyages commerciaux avec une licence portugaise comme
auparavant. Mais le Samouri et ses sujets poursuivirent leur
confrontation avec les Portugais pendant des années ce qui
affaiblit leur pouvoir et épuisa leurs ressources.
En l’an 935 de l’Hégire (1528), au début de la mousson, un
navire portugais fit naufrage à Tanour au début de la saison
des pluies. Le roi de Tanour donna refuge ceux qui se
trouvaient à bord. Le Samouri écrivit au roi Tanour pour lui
demander de lui remettre le navire, ses marchandises et les
personnes à bord. Mais la demande du Samouri fut rejetée.
Cela incita donc le roi Tanour à conclure un pacte avec les
Portugais par lequel les habitants de Tanour devaient
reprendre leurs voyages commerciaux avec la licence des
Portugais, et les Portugais devaient construire un fort sur
le côté nord de la rivière Ponnani, qui était sous son
territoire. L’objectif principal derrière l’idée de
construire le fort ici était d’affaiblir la position des
Samouri, d’harceler les voyageurs et paralyser Ponnani.
Pour construire le fort, les Portugais partirent de Kochi à
bord de nombreux navires et bateaux transportant des briques
et de la chaux vive et jetèrent l’ancre au large de Ponnani.
C’est peut-être l’aide d’Allah envers les Samouri et les
Musulmans, que tous ces navires et bateaux furent détruits
dans une violente tempête et que certains d’entre eux furent
jetés du côté sud de Weliancode. Seul un petit bateau
échappa aux ravages.
Plusieurs personnes dont les Portugais, leurs ouvriers et
leurs esclaves se noyèrent en mer. Et parmi ceux qui
réussirent à s’échapper vers le rivage, plusieurs furent
arrêtés et tués. Un grand nombre d’hommes prisonniers entre
les mains des Portugais furent libérés par les Musulmans.
Les Samouris emportèrent tous les gros canons.
Ainsi, le complot secret des Portugais et de leurs alliés
locaux fut contrecarré.
En 937 ou 938 de l’Hégire (1530-31), les sujets du Samouri
et quelques autres de l’extérieur firent ensemble un voyage
commercial dans une trentaine de navires vers divers ports
du Gujarat. Le groupe comprenait ‘Ali Ibrahim Marakkar, son
neveu Koutty Ibrahim Marakkar et leurs amis et quelques
autres personnes importantes.
La plupart descendirent à Joujar et Sourat et quelques
autres à Barouj. Apprenant cela, les Portugais
s’embarquèrent sur des navires et des bateaux pour leur
faire la guerre. Ils descendirent également dans les ports
de Joujar et Sourat et saisirent les navires qui y étaient
amarrés avec leurs marchandises. Ceux qui étaient descendus
à Barouj réussirent à s’échapper.
Avant cet incident, de nombreux navires appartenant à
Bahadour Shah, au Sultan du Gujarat et aux habitants de
Malabar, étaient tombés, par malheur, entre les mains des
Portugais à plusieurs reprises.
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