Chapitre 10 
 
Conclusion de la première partie

Puisque campagnes militaires furent lancées pour l’île de Crète et dure jusqu’à aujourd’hui, terminons la première partie avec quelques mots sur cette île. Comme il est écrit dans le Livre de l’Atlas, l’île de Crète est une longue île de deux cents soixante-dix milles d’est en ouest et de cinquante milles de large. Son périmètre est de cinq cent quatre-vingt-huit milles et il y a de grandes montagnes et des eaux. C’est une île agréable et productive. Philinus dit ce qui suit : Les meilleurs et le plus beaux des produits sont cultivés sur l’île de Crète. Ses fruits sont délicieux. Le miel, le safran, le labdanum et l’antimoine sont trouvés ici. Les animaux sauvages qui nuisent aux êtres humains comme les loups, les renards et les serpents ne vivent pas ici. Si des hiboux viennent d’ailleurs, ils meurent immédiatement. Les anciens auteurs disent que cette île fut d’abord gouvernée par Jubiter puis par Rhadamanthos et Minos puis enfin les Grecs. L’île resta entre leurs mains pendant un moment. Après l’apparition des Romains et des empereurs, leur commandant en chef, Metellus, prit la Crète des Grecs et la gouverna lui-même par la suite, de sorte que le commandant susmentionné s’appelait alors « Kretikus ». Il resta sous la domination de l’Empereur d’Istanbul qui était parmi les grands empereurs. Alors Baldonius, qui était le Beg de Flandiria et le souverain de Constantin, l’accorda au Beg de Monfrat. Il vendit la Crète au Vénitien en 1194 après Jésus Christ et reçut en échange beaucoup de pièces d’or. Elle Il fut considérée comme un titre indiquant le règne sur Candia parmi les titres vénitiens. Encore une fois dans le Livre de l’Atlas, il est écrit qu’Aristatalis dit ce qui suit, dans la section huit du deuxième article du livre « Tedbîr-i Medîne » (c.-à-d. Les mesures de la ville) : « Cette île est très importante pour les souverains grecs car elle se trouve au milieu de la mer et près du pays grec. D’un côté, elle est proche du Péloponnèse et de l’Europe et de l’autre, elle est proche de Rhodes et de l’Asie. Le souverain de Minos la saisit dans le passé et fit des attaques dans la mer et captura les îles. Il fit des célébrations comme certaines d’entre elles (îles) étaient vides. La situation dans le reste des îles est écrite dans Levâmi’un-nûr (i.e. le livre intitulé « Les Lustres de Lumière ») que nous avons traduit. Il suffit de dire cela ici. Maintenant, il est clair pourquoi Venise a fait tout ce qu’elle pouvait pour garder cette île et sacrifier autant d’âmes pour cela.

 

Addendum

 

Le Livre de l’Atlas ne mentionne pas que cette île fut conquise une fois dans le passé. Cependant, comme on le voit dans les livres d’histoire islamique, nous l’avons aussi mentionné. Il est écrit dans Ravzu’l-Mi’tar (c.-à-d. le livre intitulé « Le Jardin Parfumé ») que ce fut Sa’d-oğlu Abdullah (‘Abdallah Ibn Sa’d) qui organisa pour la première fois une expédition (combat dans la voie d’Allah) contre cette île alors qu’il était le gouverneur de l’Egypte à l’époque des Omeyyades et que sa conquête fut facile. Ce qui signifie probablement que certaines parties de l’île ou certaines de ses personnes se soumirent à lui. L’événement des Rabad (Rabad, voir nos deux volumes de l’Abrégé de l’Histoire de l’Andalousie et du Maghreb) apparut à l’époque d’al-Hakam Ibn Hisham des Omeyyades, qui émergea en Andalousie à l’époque des Abbassides. Environ dix mille personnes, exilées de Cordoue, s’installèrent à Alexandrie puis allèrent en Crète et la saisirent par nécessité. ‘Amr Ibn (le fils de) ‘Issa, était leur chef et il devint le souverain et le pouvoir en Crète resta entre les mains de ses fils pendant quatre-vingts ans. En 345 (956), elle tomba de nouveau entre les mains des mécréants. Selon Nücûmü’z-zâhire (c.-à-d. le livre intitulé « Les étoiles visibles »), l’événement des Rabad eut lieu en Ramadan 198 (avril / mai 814) et cela se réfère à la révolte du peuple de Cordoue en raison de l’oppression d’al-Hakam. Ce Hakam prévalut après le combat et il bannit les gens qui s’étaient révoltés. Le passage des Andalous en Crète en 212 (827) eut lieu à l’époque de ‘AbdAllah Ibn Tahir as-Saggaris, qui fut nommé gouverneur de l’Égypte par les Abbassides afin de réprimer l’insurrection de ceux-ci. On dit que leurs descendants existent encore aujourd’hui. Nüveyri (décédé en 1332 après J.C) narra ceci différemment dans son Nihaye-tü’l-ereb. Il dit que le premier à lancer un combat dans la voie d’Allah contre cette île parmi les Musulmans fut Jounayd, qui conquit les mers à l’époque de Mou’awiyyah (radhiyallahou ‘anhoum). Il est la personne qui construisit la tour arabe à Rhodes. Puis, toutes les îles de la Méditerranée furent saisies pendant la conquête d’Andalousie en 92 (711). Cependant seules quelques parties de la Crète furent conquises. Hamid, le fils de Mansour, qui était un commandant d’Haroun Rashid, conquis également certaines parties de celle-ci. Puis Abou Hafs ‘Omar, le fils de Habib al-Andalousi, saisit l’un de ses châteaux au temps du calife al-Ma'moun et en fit son quartier général. Peu à peu, il envahit toute l’île et fit payer le tribut aux mécréants. Ses fils l’héritèrent de lui et en 198 (813/814), Hakam, le fils d’Hisham, exila le peuple (les employés rebelles) de Cordoue. Ils déménagèrent (ils furent aussi expulsés pour les mêmes raisons) donc sur cette île via Alexandrie comme mentionné ci-dessus. Son Beg (souverain) fit tout ce qui était nécessaire pour protéger l’île. Il mena des expéditions (combats dans la voie d’Allah) contre les îles et pilla les voisinages des Dardanelles avec quarante navires. L’empereur à Istanbul fut incapable de la défendre et il commença à faire ce qu’il voulait. L’Empereur Ermanos envoya un envoyé à ‘Abd al-‘Aziz Ibn Habib, qui était le souverain de l’île, et établit une base d’amitié. Il dit : « Si des navires sont fournis et que l’armée est approvisionnée en armes et que le pays est pillé, tout ce qui est saisi sera donné et d’autres encore. Alors pourquoi aller vers de tels ennuis ? La confiance a disparue des deux côtés et les routes sont bloquées. Il est préférable que le Sultan n’obtienne pas les navires, mais qu’il obtienne de nous la propriété du pillage et encore plus de biens que cela. Il est certain qu’il sera envoyé avec contentement et accord. » C’était une attitude apparemment amicale, mais malhonnête qui ne serait acceptée que par des imbéciles, mais il réussit à tromper ‘Abd al-‘Aziz. Donc, il tomba dans le piège et la tromperie de l’ennemi pour être un conseil bien intentionné et accepta. Ermanos envoya des cadeaux et des biens pendant quelques années afin de remplir les exigences de cette tromperie. Il envoya ses marchands dans cette région. ‘Abd al-‘Aziz devint occupé avec les siens accumulés et cessa de s’engager dans les combats dans la voie d’Allah (Jihad). Quand la paix fut faite avec l’ennemi, il cessa de payer les soldats en disant que ce serait un gaspillage de la trésorerie et manqua donc de respecter les droits de ceux qui avaient des revendications légitimes. L’empereur fourbe envoya un envoyé qui dit : « qu’il y avait pénurie dans notre pays ; nous n’avons pas eu de céréales et de légumes. Que cinq cents juments avaient été envoyées dans les plaines de Crète pour paitre et que les étalons qui naîtront appartiendront au souverain estimé. » Puis il nomma le chef de l’Anatolie, dont le nom dans leur langue est Dimestikos, comme commandant et l’envoya avec des navires. Il arriva et monta sur une jument sauvage. Ils atteignirent la ville où se trouvait le siège du gouvernement alors que ‘Abd al-‘Aziz ignorait ce qui se passait. Ils ouvrirent les portes au moment de la prière de l’aube et tuèrent tous ceux qu’ils trouvèrent dans le palais. ‘Abd al-‘Aziz fut également tué à ce moment-là, puis il envoya les biens et les trésors qu’ils lui avaient envoyés auparavant et encore plus à l’empereur. L’empereur ordonna que les sujets parmi les Musulmans de Crète soient épargnés et que les soldats soient tués. Le mécréant mentionné ci-dessus exécuta l’ordre et nomma un souverain pour l’île avant de se rendre en personne chez l’empereur. Cet incident eut lieu en 305 (917/918). Le gouverneur de Crète recueillit cette année le tribut des Musulmans et ne leur fit pas de mal. Le jour de Noël, il leur dit « L’empereur vous a rendu service. Vous devriez le remercier en célébrant Noël. » Cent personnes parmi eux allèrent à Ermanos et il les complimenta et leur donna des robes d’honneur. Ceux qui n’y allèrent pas le regrettèrent mais l’année suivante, la plupart d’entre eux allèrent et l’empereur les enferma. Il ne leur donna ni à manger et ni à boire et il leur suggéra qu’ils se convertissent au christianisme. Quand ils furent épuisés par la faim, ils se convertirent et ils retournèrent en Crète. Le gouverneur de Crète leur assigna des gardes et leur interdit d’entrer dans leurs maisons pour que leurs familles se convertissent également au christianisme. C’est ainsi que tout le peuple de Crète devint chrétien de cette manière en quelques années. Ceci n’est pas contraire à ce qui a été rapporté dans le Livre de l’Atlas. Cependant, ces événements n’ont pas été racontés et ils furent passés sous silence en raison des nécessités de la science.

 

La morale de l’histoire est que ceux qui occupent des positions clefs dans l’état ne devraient pas être indifférentes à la tromperie des ennemis et ne devrait pas effectuer leur travail en prenant leurs mots qui semblent être des conseils. Laisser les mesures nécessaires, le chemin de la raison, ne pas penser à ce qui est nécessaire pour le combat dans la voie d’Allah et le négliger n’est pas juste. Le remords après le fait est inutile. On devrait voir ce qui est requis avant qu’il ne devienne une urgence.