Al-Mousta’sim Billah, le trente-septième calife abbasside et dernier calife de Baghdad 

 

Al-Mousta’sim Billah Abou Ahmad ‘AbdAllah Ibn al-Moustansir Billah, dernier des califes des deux Iraq (rafidayn), naquit en l’an 609 de l’Hégire (1212) et sa mère était une fille d’esclave appelée Hajar. Il devint calife à la mort de son père. Il était généreux, léger d’humeur, de mon caractère et d’une vertu exemplaire.

Al-Mouwayyad at-Toussi lui accorda l’autorité comme un diplômé de Traditions par Ibn an-Najjar et Abou Rouh al-Harawi et un certain nombre d’autres firent ainsi. Les Traditions furent transmises sur son autorité et autorisée par an-Najm al-Badaray, ash-Sharf ad-Dimyati. Ad-Dimyati prit de sa narration quarante traditions que j’ai vu dans ses écrits.

 

Le Shaykh Qoutb ad-Din a rapporté qu’il était orthodoxe dans la religion, et se conforma à ses préceptes comme son père et grand-père, mais qu’il n’était pas leur égal dans la vigilance, la fermeté du but et la hauteur (distinction) de l’âme. Al-Moustansir avait un frère courageux appelé al-Khafaji qui avait l’habitude de dire que s’il était dans l’autorité suprême, il traverserait la Transoxiane à la tête d’une armée, arracherait les provinces aux Tatars et les traquerait. Quand al-Moustansir décéda, les dignitaires s’opposèrent à la cérémonie d’investiture d’al-Khafaji par peur de lui et donnèrent l’autorité à al-Mousta’sim.

 

En l’an 647 de l’Hégire (1249), sous le règne d’al-Mousta’sim, les croisés sous le commandement de Louis de France, prirent Damiette. Le sultan al-Malik as-Salih Ayyoub était à cette époque malade et mourut dans la nuit du 15 du mois de Sha’ban. Sa femme Oumm Khalil, surnommé Shajar ad-Dourr dissimula sa mort et convoqua son fils Touran Shah al-Malik al-Mou’addam qui arriva, peu avant d’être assassiné, au mois de Mouharram de l’année 648 de l’Hégire (1251). Les personnes à charge de son père l’assaillirent, le tuèrent et élevèrent à la succession la femme de son père Shajar ad-Dourr. Les Turcs lui portèrent allégeance et à son ministre en chef le Turcoman ‘Izz ad-Din Aybak. Elle commença par accorder des robes d’honneur et de riches présents aux principaux nobles et nomma ensuite ‘Izz ad-Din au sultanat au mois de Rabi’ Thani. Il reçut alors le titre d’al-Mou’iz. Plus tard, les troupes portèrent allégeance à al-Malik al-Ashraf Ibn Salah ad-Din Youssouf Ibn al-Mas’oud Ibn al-Kamil, un garçon de huit ans et ‘Izz ad-Din resta comme son gardien. Ils furent tous les deux inclus dans la Khoutbah et leurs noms gravés sur la monnaie.

 

Cette même année, Damiette fut reprise aux croisés.

 

 

En l’an 648 de l’Hégire (1250), le calife al-Mousta’sim nomma vizir l’infâme traitre Mouayyad ad-Din Abi Talab Muhammad Ibn Ahmad Ibn al-‘Alqami Ibn ar-Raffidi malédiction d’Allah sur lui, qui avait précédemment occupé des fonctions au califat et avait été surnommé « al-Oustad Dar al-Khalifat ». Al-Mousta’sim plaça sa dépendance sur son vizir, le shiite hérétique, qui ruina le pays et joua avec le califat comme il le désira. Il établit une correspondance secrète avec les Moghols, s’arrangea avec eux et leur conseilla de marcher sur l’Iraq, de capturer Baghdad et de mettre fin à la dynastie abbaside. Il dissimula tous les renseignements qui arrivèrent sur les Moghols au calife, mais garda les Tatars informés des mouvements du calife jusqu’à l’arrivée du tragique événement et de ce qui s’ensuivit.

 

 

En l’an 652 de l’Hégire (1254), un feu apparu dans la terre d’Aden, ses étincelles s’envolèrent de nuit[1] vers la mer et une vaste colonne de fumée s’éleva d’elle ce jour.

 

Cette même année, al-Mou’iz mit de côté l’insignifiante autorité d’al-Malik al-Ashraf et assuma le sultanat.

 

 

En l’an 654 de l’Hégire (1256), apparut un feu dans la ville prophétique de Médine. Abou Shamah a rapporté qu’il reçut des lettres de Médina comme suit : « Le mardi soir 3 du mois de Joumadah Thani, on entendit un impétueux son puissant suivi par un énorme tremblement de terre qui continua par intervalles courts jusqu’au 5 du mois. Alors apparut dans al-Harrah près de Qouraydah un immense feu que nous vîmes de nos maisons dans Médine comme s’il était proche de nous. Puis, il coula des fleuves de feu vers Wadi Shataf comme la ruée d’une inondation. Nous sommes montés sur nos maisons pour le voir, quand soudain, les collines avancèrent avec les torrents de flamme et continuèrent ainsi. Et de la même manière des flammes jaillirent des montagnes ainsi que des étincelles, aussi vastes que des édifices, volèrent si haut que leurs lumières furent  aperçus partout dans la Mecque[2] et dans le désert. Tous les gens se réunirent dans la mosquée prophétique, priant pour la clémence et se repentant et cela dura pendant plus d’un mois.

Ad-Dahhabi a rapporté que la mention de ce feu est mentionnée dans une Tradition ininterrompue et qui fut prédit par le Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) qui a dit : « Le dernier jour n’aura pas lieu avant que n’apparaissent un feu dans le Hijaz qui illuminera les cous des chameaux dans Bousra » et en vérité, plus d’un d’entre ceux qui étaient à Bousra, près de Harwan en Palestine, pendant cette nuit mentionnèrent ce feu et que les cous des chameaux étaient visibles par sa lumière.

 

 

Durant l’année 655 de l’Hégire (1257), il y eut de grands troubles à Baghdad entre les sounnis et les shiites alimentés le vizir al-‘Alqami. Une bataille eut lieu entre les deux groupes et les sounnis l’emportèrent. Ils détruisirent le mausolée des shiites à Baghdad et parmi les tués il y eut des proches du vizir qui se mit à haïr encore plus profondément les sounnis.

 

Cette même année, pérît le sultan d’Égypte al-Mou’iz Aybak. Il fut assassiné par sa femme Shajar ad-Dourr et ils élevèrent au sultanat pour lui succéder, son fils al-Malik al-Mansour et durant ce temps, les Moghol s’étendaient sur les provinces, leurs démesures augmentaient et leurs flammes ravageaient tandis que le calife et les gens étaient inconscients de ce qui leur était destiné. Le vizir al-‘Alqami rechercha la destruction de la dynastie des abbaside et correspondit secrètement avec les Moghols, pendant qu’al-Mousta’sim, absorbé dans ses occupations, n’avait aucune connaissance des événements qui menaçaient l’état islamique et se préoccupait  encore moins des intérêts pour le bien-être public.

Son père al-Moustansir avait augmenté en grande partie son armée et en plus, il apaisa les Tatars avec des cadeaux, fit la paix avec eux et les concilia, alors qu’al-Mousta’im, quand il accéda au pouvoir, privé de compréhension et de compétences administrative, fut conseillé par son vizir, pour atteindre son but, de dissoudre la plus grande partie de ses troupes qui s’élevaient à cette époque à plus de 100.000 soldats. Le vizir traita les Tatars avec générosité et courtoisie et poursuivit sa correspondance secrète avec eux, leur conseilla de marcher sur les provinces et facilita leur but, en décrivant les forces et les points faibles des Musulmans. En plus de certaines conditions, comme la protection des shiites et des chrétiens de la ville, il se proposa comme leur gouverneur et ils acceptèrent ses propositions. Ils firent alors leurs préparations pour leur marcher sur Baghdad.

Tandis que l’armée du calife se trouvait réduite à 10.000 soldats, le vizir contacta le chef des Rafidis al-Khawjah Nassir ad-Din Toussi, né à Touss, qui était un philosophe athée, un astronome et un mathématicien qui mourut en l’an 678 de l’Hégire (1279), malédiction d’Allah sur lui. Il était un des vizirs et un des conseillers du chef des hérétiques hashashiyyines Rouqn ad-Din Khoursha, des assassins d’Iran. Lorsque les Moghols, sous le commandement d’Houlakou[3], envahirent l’Iran, qu’ils détruisirent les forteresses des assassins et les écrasèrent en l’an 654 de l’Hégire (1255), les assassins leur envoyèrent Nassir ad-Din at-Toussi et Houlakou en fit un de ses conseillers. Lors de l’invasion des Moghols sur le pays des hashashiyyines en Iran en l’an 654 de l’Hégire, ils réussirent à capturer plus de 40 de leurs forteresses dont Alamout, leur forteresse principale, qui fut commandé par leur premier chef, l’hérétique Hassan Ibn Sabah en 483 de l’Hégire (1090). Se succédèrent alors à la tête des assassins, huit chefs, dont le dernier fut Rouqn ad-Din Khoursha.

 

Les Moghols ou les Tatars

 

La dynastie abbasside prit fin avec l’invasion des Moghols que beaucoup d’historiens ont appelés les Tatars.

Les Moghols étaient des tribus asiatiques qui parlaient le Turc. Leur pays d’origine était la Mongolie entre la Chine et la Russie. C’était des tribus dispersées et divisées parmi lesquels la tribu Qiraït Markit, la tribu Markit, la tribu Taïbourt et la tribu Naïman. Cette dernière tribu était une tribu turque mais elle était considérée comme une tribu Moghols. Leur pays était vaste, très chaud en été et glacial en hiver.

 

Aux environs de l’année 555 de l’Hégire (1159), le chef Yassoukay Bahadour de la petite tribu Qiyat Moghol eut un enfant alors qu’il revenait vainqueur d’une bataille qu’il venait de mener contre les Tatars ou il réussit à tuer leur chef Timoujine. Suite à sa victoire, il nomma son enfant Timoujine.

 

Durant l’année 563 de l’Hégire, le chef Yassoukay Bahadour mourut laissant derrière lui sa femme et ses quatre enfants. Il fut succédé par des gens de son clan et Timoujine fut pris prisonnier par la tribu Taïbourt qui plaça autour de son cou un carcan rond en bois, qui emprisonnait aussi ses mains. Néanmoins Timoujine réussit à s’enfuir de ses ennemis et il s’employa à poursuivre son rêve, d’unifier les tribus Moghols voisines en une seule force et ainsi de réunir une immense et écrasante armée et de partir à l’assaut du monde.

Timoujine Ibn Yassoukay Bahadour, avait un puissant corps et était un chef né. Deux historiens, dont l’un chinois du nom de Ming Hang qui fut le ministre de la dynastie Song qui contrôlait le sud de la Chine et proche des Moghols, écrivit une description du chef Moghol. Le nord de la Chine était à cette époque contrôlée par la dynastie Qin.

 

 

En l’an 618 de l’Hégire, Ming Hang rencontra Timoujine et il rapporta : « C’était un homme puissamment bâti, de larges épaules et une longue barbe ».  

L’historien perse ‘Uthman Ibn Souraj ad-Din al-Jawzajani, décédé en l’an 698 de l’Hégire (1298), rapporta de Timoujine, qui mourut avant cet historien en l’an 624 de l’Hégire (1226), une description de cet homme que des gens de son époque avait connu. Il rapporta en t’autre : « Il avait une solide charpente (bounia qawiyyah), un puissant corps (dakhm al-jouththa), grand, une vue pénétrante, une forte personnalité, courageux, intelligent, un grand prestige (haybah kabira) » telle était les caractéristiques de ce Moghol sanguinaire, de ce tyran, par lequel les Musulmans furent durement éprouvés.

 

Timoujine attaqua, vainquit et soumit la tribu Taïbourt qui l’avait fait prisonnier. Puis il vainquit la puissante tribu Qiraït en l’an 599 de l’Hégire (1202). Suite à ces deux grandes victoires successives, les tribus Hawayrat et Kounkourat se soumirent pacifiquement.

 

 

En l’an 600 de l’Hégire (1203), lorsqu’il vainquit la grande tribu Naïman, toutes les autres tribus se soumirent à leur tour, les unes après les autres. Alors toutes les tribus se réunirent lors d’une grande rencontre et surnommèrent Timoujine Ibn Yassoukay Bahadour : Janjis Khan[4], le maitre des souverains.

Lorsque Janjis Khan unifia les tribus Moghols, il leur imposa son fameux code « al-Liassa ou al-Liassaq » qui devint le code de conduite des Moghols et leur constitution. Il menaça de mort quiconque ne suivrait pas ce code, qui avait pour but d’organiser l’empire Moghol à tous les échelons, militaire, social, culturel et politique. Les historiens ont rapporté quelques une de ces lois :

- L’exécution de l’adultère marié ou célibataire, de l’homosexuel (af’al qawm lout), du menteur, du magicien, du sorcier, de l’espion et de celui qui urinerait dans l’eau courante.

- Celui qui utilisera de l’eau, ne devra pas mettre sa main directement dans l’eau, mais utiliser un récipient.

- L’enfant ne devra pas désobéir à son père, ni lui tenir tête.

- Le petit enfant ne devra pas désobéir à son grand frère.

- Le Moghol riche devra venir à l’aide du Moghol pauvre.

- Nul ne devra faire de discours, peu importe son rang, sans avancer précédemment son nom.

- Toutes les choses étaient pures et il n’existait rien d’impur chez les Moghols.

- Le Moghol n’aura pas à laver ses vêtements et devra les porter tant qu’ils sont utilisables.

- Quiconque nourrira au habillera un prisonnier sans autorisation, sera exécuté.

- Quiconque capturera une personne en fuite ou un prisonnier en fuite, devra le remettre à l’autorité sans quoi, il sera exécuté.

- Quiconque sacrifiera une bête à la manière des Musulmans, sera exécuté. Et quand la question lui fut posée sur la manière de tuer une bête, il répondit : « la bête doit être attachée, ouverte et le cœur saisit dans la main jusqu’à ce que la mort de la bête s’ensuive ».

C’était un exemple des lois du Liassaq Moghol.

 

 

En l’an 606 de l’Hégire (1209), la puissante tribu Turque Orghori se soumit à Janjis Khan qui décida de poursuivre son plan et de rallier à lui les tribus Tatars. Les Tatars étaient aussi des tribus asiatiques nombreuses, dures et implacables, toujours en guerre entre elles. Parce qu’elles étaient puissantes, les autres tribus les imitèrent et prirent aussi le nom de tribus Tatars. Les Tatars étaient toujours en guerre contre les Moghols ou dans le rang des ennemis des Moghols. C’est pourquoi, lorsque Janjis Khan unifia les tribus Moghols, il les attaqua en premier. Il ordonna à ses hommes de ne leur faire aucun répit et de tous les massacrer, hommes, femmes, enfants, vieillards. Les Tatars furent donc écrasés puis massacrés et ceux qui restèrent en vie, se soumirent à lui.

Dans toutes les histoires des nations, lorsqu’elles sont en guerre, il y a des massacres. Nul ne fait exception à la règle. Mais lorsque ces massacres sont ordonnés par des lois, c’est vraiment un grand malheur. Les Moghols suivaient la doctrine des shamans, une prétendue religion qui faisait appel aux âmes des morts pour leur aide, et les shamans avaient une haute position chez les Moghols du fait qu’ils « contrôlaient » les âmes des morts. La base de leur doctrine était que si un humain ennemi était tué cela était compté comme une bonne action. Et donc plus un individu tuait et plus il avait de bonnes actions et si l’un d’entre eux voulait faire du bien, il n’avait qu’à tuer. C’est pour ça, que lors de leur guerre, ils tuaient le maximum de personnes, pour ajouter à leur trophée, les âmes de ces tués. Ensuite, ils dépeçaient leurs victimes.

 

Al-Mouwaffak ‘Abdel Latif a rapporté dans son histoire des Tatars : « C’est un récit qui absorbe tous les autres récits, une chronique qui remplace toutes les autres chroniques, une histoire qui fait oublier toutes les autres histoires, une malheur qui réduit à l’insignifiance tous les autres malheurs, une calamité qui ravagea la terre en latitude et longitude.

La langue de ces gens est mélangée avec celle de l’Inde dans les environs de laquelle ils habitent et entre eux et la Mecque, il y a une distance de quatre mois de voyage. Comparés aux Turcs, ils ont de plus larges visages, la poitrine plus forte, les flancs plus maigres, ils ont de plus petits yeux, sont de couleur fauve, rapides dans le mouvement du corps et de l’esprit. Les histoires des autres nations les atteignent, mais aucune de leurs informations ne sort de chez eux et il est impossible qu’un espion puisse s’installer parmi eux car son apparence est différente et les étrangers ne leur ressemblent pas. Quand ils se proposent de partir dans une certaine direction, ils dissimulent leur but et l’exécutent avec une soudaine rapidité, pour que les gens d’une ville ne sachent rien d’eux avant qu’ils n’y soient déjà entrés, ni une armée jusqu’à ce qu’ils soient au beau milieu d’elle, coupant et embrouillant ainsi aux gens les moyens et les voies de fuite. Leurs femmes luttent aussi bien que les hommes. Leurs principales armes sont les flèches et leur nourriture, n’importe quelle viande qu’ils peuvent trouver. Ils ne font aucune exception ni quartier dans leur massacre, ils tuent tout ce qui est vivant, les hommes, les femmes et les enfants. Leur but est la destruction de la race humaine et la ruine du monde et non pas la domination ou le pillage ».

 

Un autre auteur a rapporté : « Le pays des Tatars touche les limites de la Chine ; qu’ils habitent dans les déserts et sont notoires pour leur malignité et leur perfidie. Les causes de leur grand nombre sont dues au fait que le pays de Chine à de vastes dimensions d’une distance de six mois de voyage. Il est composé de six principautés et ils ont un chef souverain qui les gouverne toutes. Il est le grand Khan qui réside à Tamghaj et exerce les mêmes fonctions que le calife des Musulmans. Le sultan d’une de ces principautés était Doush Khan qui se maria avec la tante paternelle, de Janjis[5] Khan. Après la mort de son mari, Janjis Khan lui rendit visite accompagné par Kashlou Khan et elle les informa que le prince, son mari, n’avait laissé aucun héritier et avait suggéré que son neveu lui succède. Sur ce Janjis Khan assuma le gouvernement et fut rejoint par les Moghols. Il envoya alors des présents au grand Khan, qui devint enragé et ordonna que les queues des chevaux lui soit présentés, pour être coupés et renvoyés vides de leurs cavaliers qu’il fit exécuter parce que les Tatars n’étaient pas intéressés par les possessions, étant des voyageurs nomades.

Quand Janjis Khan et son ami Kashlou Khan furent informés de ces nouvelles, ils jurèrent vengeance, déclarèrent la guerre contre le Khan et un vaste nombre de Moghols se rassemblèrent autour d’eux. Le Khan, conscient de leur pouvoir et de leur férocité, envoya un messager pour les concilier affectant en même temps la prévention et la menace. Cependant, cela ne fut d’aucun bénéfice puisque les Moghols marchèrent à sa rencontre et lui de même. Les deux armées se rencontrèrent et une grande bataille survint au cours de laquelle ils vainquirent le Khan et prirent possession de ses dominions. Leurs excès fut prodigieux et le pays resta asservi à Janjis Khan et à Kashlou Khan en commun. Ils marchèrent ensuite contre le pays de Shakoun aux confins de la Chine et en prirent possession. Kashlou Khan mourut peu après et son fils lui succéda, mais Janjis Khan n’en tint pas compte, l’attaqua, le saisit et assuma seul l’autorité Les Tatars se soumirent à lui et reconnurent sa gouvernance. Ils l’honorèrent divinement et lui portèrent la dévotion la plus extrême.

 

Après cela, leur première intrusion fut en l’an 606 de l’Hégire (1209) de leurs propre territoire vers Ferghana et les dominions turcs. Khwarizm Shah Muhammad Ibn Toukoush, le seigneur du Khorasan, qui avait renversé des rois et conquit leurs territoires, qui avait marché sans succès contre le calife an-Nassir, ordonna aux habitants de Ferghana, de Shash, de Kassan et des autres villes semblable et prospère de les quitter et de se rendre à Samarkand et d’autres endroits. Il leur demanda de prendre avec eux tous leurs biens de peur qu’ils ne tombent entre les mains des Moghols puisqu’il savait qu’il serait incapable de les affronter.

 

 

En l’an 612 de l’Hégire (1215), lorsque Janjis Khan prit la grande ville de Bakine, son armée s’élevait alors à des centaines de milliers de guerriers-nés pour qui la guerre était un sport. Il ne fait aucun doute, qu’une telle armée, lorsqu’elle est en guerre ou en mouvement, envahit tout l’horizon sur plusieurs jours de marche.

 

Les Moghols et le Khwarizm Shah

 

Les Moghols continuèrent leurs pillages et errances jusqu’à l’année 615 de l’Hégire (1218) quand Janjis Khan envoya une ambassade et des présents au Khwarizm Shah. L’envoyé des Moghols lui dit : « Le grand Khan te salue et te dit que l’ampleur de son pouvoir et le haut dominion qu’il a atteint, l’étendue de son autorité sur les nations ne t’es pas inconnue et il considère une alliance avec toi parmi les obligations nécessaires et que tu es à lui comme le plus honoré de ses enfants. De plus, tu es certainement informé de sa conquête de la Chine, cet immense territoire que tu connais, qui sont riches en soldats, en chevaux, en mines d’or et d’argent et d’une suffisance de quantités d’autres choses. Si donc tu juges opportun de t’unir dans l’amitié avec lui et de laisser les commerçants procéder, afin que vous puissions en tirer des intérêts réciproques pour les deux pays, vous agirons en conséquence ».

Il fut donc convenu cette même année, d’un accord sur la protection des caravanes marchandes entre les Moghols et ‘Ala’ ad-Din Muhammad Ibn Taqsh Khwarizm Shah. L’accord fut entériné dans la ville de Boukhara entre l’ambassadeur musulman Mahmoud al-Khawarizmi et Janjis Khan. Suite à cet accord, ce dernier prépara une caravane de marchandises de valeur conduite par 550 Musulmans de ses partisans. Son état était devenu un empire et donc tous les peuples et les religions y étaient représentées.

Le Khwarizm Shah lui répondit selon son désir et Janjis Khan fut heureux et les choses restèrent paisibles jusqu’à l’arrivée de ces commerçants dans la ville d’Otrar.

À cette époque, l’oncle maternel de Khwarizm Shah, Yanal Khan, qui était le gouverneur de Transoxiane avec vingt-mille cavaliers, convoita les marchandises des commerçants et écrivit au Khwarizm Shah, en disant que ces hommes étaient entrés déguisés en commerçants, mais que leur réel but n’était rien d’autre que d’espionner. Il lui demanda la permission d’agir à leur égard. Le Khwarizm Shah lui donna l’autorisation de les surveiller mais son oncle maternel les saisis et confisqua leur propriété. Sur cela, les envoyés de Janjis Khan arrivèrent devant Khwarizm Shah, et lui dirent de la part de leur maître : « En vérité, tu as donné un sauf-conduit de sécurité aux commerçants. Tu n’as pas joué franc jeu et la perfidie est une vilenie particulièrement de la part d’un prince musulman. Mais si tu nous s’affirme que ce que ton oncle a fait fut sans ta permission alors délivre-nous le sans quoi, tu verras de moi ce que tu sais pour une telle affaire ».

La peur ou le contraire affecta peut-être Khwarizm Shah et influença son jugement et il ordonna d’exécuter les envoyés et ils le furent. Hélas! Pour un acte qui provoqua le sang des Musulmans d’être répandus et non vengé et qui répandit des torrents de sang. Alors Janjis Khan marcha alors contre lui et Khwarizm Shah traversa la Transoxiane à Nayssabour et se dirigea vers le fort de Hamadan de peur des Tatars. Mais l’ennemi l’encercla, massacra tous ceux qui étaient avec lui et il s’enfuit seul et se réfugia dans île de la Mer Caspienne. Là, il tomba malade d’une pleurésie et mourut seul et abandonné. Son cadavre fut enveloppé dans la literie qu’il avait avec lui. Son fils Jalal ad-Din Minkobarti prit sa succession et mena plusieurs bataille contre les Moghols ou il fut victorieux avant de mourir tué par un paysan comme nous l’avons déjà mentionné. Quant à Yanal Khan, il fut capturé et envoyé à Janjis Khan qui ordonna de lui verser de l’or fondu dans les oreilles et sur les yeux et les Moghols aménagèrent tous les dominions de Khwarizm Shah en l’an 617 de l’Hégire (1220).

 

 

Sabt al-Jawzi a rapporté que les Tatars apparurent d’abord dans la Transoxiane durant l’année 615 de l’Hégire (1218), au mois de Dzoul Hijjah ou ils prirent Boukhara et Samarkand et massacrèrent tous les habitants avant d’assiéger le Khwarizm Shah. Après cela, ils traversèrent le fleuve de Transoxiane, mais comme le Khwarizm Shah avait renversé les princes des villes du Khorasan, les Tatars constatèrent que personne ne s’opposa à eux. Ils marchèrent donc rapidement massacrant à travers le pays et prenant des prisonniers avant d’accélérer et d’atteindre Hamadan et Qazwin la même année.

 

L’invasion des Moghols

 

Ibn al-Athir a rapporté dans son livre « al-Kamil fi at-Tarikh » : « L’invasion des Tatars fut l’une des plus grandes calamités et la plus terrible invasion qui tomba sur le monde en général et sur les Musulmans en particulier[6]. Si quelqu’un disait que le monde, depuis sa création par Allah Exalté à Lui les Louanges et la Gloire, jusqu’à nos jours, ne fut jamais si affligé, il serait véridique car l’histoire n’a jamais rapporté quelque chose de similaire. Peut-être, le pire évènement que les historiens eurent à mentionner fut le traitement de Jérusalem et des enfants d’Israël par Nabuchodonosor (bakhtanazar), mais qu’est Jérusalem comparé avec ce que ces vils maudits détruisirent de villes musulmanes et que sont les enfants d’Israël en comparaison avec ceux que les Moghols firent périr ? Ce fut une calamité dont les étincelles se répandirent largement et profondément et dont la misère fut universelle, survolant la terre comme un nuage conduit par le vent, une horde venue des confins de la Chine attaqua les villes du Turkestan comme celle de Kashghar, le territoire de Shaghraj[7], Boukhara et Samarkand qu’ils capturèrent et exterminèrent leurs habitants. Puis, un corps d’entre eux passa par le Khorasan, et le dévasta en détruisant, pillant et massacrant avant de marcher sur Rayy, Hamadan et aux frontières de l’Iraq. Ensuite, ils entrèrent en Azerbaïdjan et dans ses dépendances, en les détruisant et les ravageant avant de laisser derrière eux un désert jonché de ruines, tous cela en moins d’un an, un événement dont nul n’a jamais entendu ou vu de pareil. D’Azerbaïdjan, ils passèrent à Darband Sharwan, subjuguèrent son territoire et traversèrent Allan et al-Lalkaz, massacrant tout sur leur passage et prenant des prisonniers. De là, ils marchèrent vers les plaines de Qafjaq[8], où les gens étaient plus nombreux que les Turcs et massacrèrent tous ceux qui s’opposèrent à eux ont dit que le reste s’enfuit et les Moghols aménagèrent le pays. Un autre corps se dirigea vers Ghazni et ses dépendances, au Sijistan, à Kirmân et firent là comme les autres mais de manière plus sauvage.

On n’entendit jamais parler d’évènements similaires dans le passé et même Alexandre le Grand, qui se fit maître du monde, ne fit pas ainsi et avec une telle rapidité. Ces conquêtes prirent environ dix ans et de plus il ne massacra pas et se contenta de la soumission des peuples. Mais ceux-ci subjuguèrent une grande partie habitable du globe, ses plus belles et plus fertiles régions, en environ une année et personne ne resta dans les provinces qu’ils n’assaillirent pas. Tous se sauvèrent et ceux qui ne le purent attendirent tremblants leur arrivée. De plus les Moghols n’eurent pas à dépendre de réserves car ils ramenèrent tous ce dont ils avaient besoin avec eux, maïs, moutons, bœufs et chevaux, dont ils ne mangeaient rien d’autre que leurs chaires. Quant à leurs chevaux, ils creusaient la terre avec leurs sabots et mangeaient les racines des plantes et ne connaissait pas l’orge. Quant à leur conviction, ils adoraient le soleil à son lever, et ne jugeaient rien illégal. Ils mangeaient la chair de tous les animaux et même celle des hommes. Ils ne reconnaissaient pas le mariage et une femme était visitée par plusieurs hommes ».

 

 

En l’an 617 de l’Hégire (1220), les Tatars envahirent le Khorasan et les régions avoisinantes. Ils attaquèrent Merv puis la grande ville de Nayssabour, le bastion des Samanides, des Ghaznawi et des Seldjouks au mois de Safar de l’année 618 de l’Hégire (1221). La fille de Janjis Khan entra dans la ville à la tête d’un détachement et tua systématiquement tous ceux qui tombèrent sous ses mains. Puis, elle tua tous les chiens, les chats et toutes les créatures vivantes pour venger son mari qui avait été tué par une flèche empoisonnée lors du siège de la ville.

Puis, les Moghols envahirent l’Afghanistan avant que Janjis Khan ne revienne dans son pays où il recommanda avant de mourir la succession après lui à son fils Oktaï. Janjis Khan mourut au mois de Ramadan de l’année 624 de l’Hégire (1226). Son corps fut ramené en Mongolie ou il fut enterré dans un endroit secret, pour éviter les représailles suite à sa sanglante vie et ses trop nombreux crimes. Avant de mourir, il ordonna d’empoisonner son grand fils Joutchi, qui était contre lui et n’approuvait pas ses massacres. Et effectivement, il mourut empoisonné au mois de Rabi’ Awwal  de cette même année.

 

Deux ans après la mort de ce sanguinaire Moghol, al-Koraltal, l’assemblée moghole, décida d’appliquer les volontés de Janjis Khan et d’introniser Oktaï al-Khakan, le grand Khan, qui se trouvait dans sa capitale Qaraqorn, à la tête des Moghols. Oktaï avait d’autres frères dont Jaktaï, le dernier fils de Janjis Khan. Ce dernier fut nommé gouverneur du Turkestan et sa postérité après lui avant de se diviser en deux branches. Batou Ibn Joutchi Ibn Janjis Khan fut nommé gouverneur de la Russie et sa postérité après lui et ils furent appelés par la suite la Horde d’Or, à cause de la couleur de leurs tentes. Ils gouvernèrent la Russie jusqu’à l’arrivée d’Yvan de Moscou ou d’Yvan le Terrible en l’an 885 de l’Hégire (1480).

 

 

Le Khakan Moghol Oktaï mourut en l’an 639 de l’Hégire (1241) après avoir mis la main sur un nombre important de pays musulman. Puis les Moghols attaquèrent l’Azerbaïdjan, la Géorgie, l’Arménie, la Bulgarie, la Russie et incendièrent Moscou. Ensuite, leur courroux ravagea l’Ukraine, la Pologne, les Majars[9] et furent sur le point d’arriver en Allemagne. Sur leur passage ils ne laissèrent que massacres, destructions et incendies à une échelle dont  nul ne peut faire le bilan.

 

A la mort du Khakan Moghol Oktaï, son fils Kaokrane lui succéda avant de mourir huit ans plus tard en l’an 647 de l’Hégire (1249). Il fut succédé par le fils de son oncle, Manjo[10] Khan, le fils de Touli Khan Ibn Janjis Khan. Manjo Khan conduisit trois grandes invasions.

La première invasion, sous le commandement de son frère Houlakou[11], qui attaqua les hashashiyyines, la secte hérétique shiite des assassins, puis l’état abbasside et parvint à ses fins, comme nous le verrons par la suite. Houlakou établit un gouvernement en Iran, « al-Soulalah al-Khaniyah » qui deviendront par la suite Musulmans. Leur état en Iran dura jusqu’en l’an  736 de l’Hégire (1335).

La seconde invasion, sous le commandement de Koubilaï Khan, le frère de Manjo Khan qui prit la souveraineté après son frère, attaqua le sud de la Chine dirigée par la dynastie Song.

La troisième invasion, sous le commandement du Khakan en personne Manjo Khan, servit de renfort à l’invasion de Koubilaï Khan.

 

 

En l’an 655 de l’Hégire (1256), Manjo Khan mourut et son frère Koubilaï Khan lui succéda. Il prit contrôle de la Chine qu’il dirigea aussi. Il fonda la dynastie Touwan qui contrôla le pays jusqu’à la révolte des chinois en l’an 770 de l’Hégire (1368) qui expulsèrent définitivement les Moghols de Chine.

 

 

Au début de l’année 653 de l’Hégire (1255), l’élite des Moghols, au nombre de 200.000 commandés par Houlakou, sortit de Qaraqorn. Le Khakan donna des ordres précis à son frère et lui dit : « Quand tu auras fini la destruction des places fortes et des forts au Qouhistan, le pays de la secte hérétique ismaélienne nizariyah des assassins, rends toi en Iraq et tue al-Lor, un peuple de bandits de Fars et les Kurdes sans t’approcher du calife abbasside. Propose-lui de se soumettre à toi et s’il refuse, applique-lui le même traitement de ceux qui l’ont précédé ».

Houlakou quitta Qaraqorn, la capitale les Moghols, honorant sur sa route tous les gens qu’il rencontra du fait que toutes ces terres appartenaient aux Moghols et arriva à Samarkand au mois de Sha’ban de cette même année. Puis, il entra en Iran ou il pilonna les forteresses des ismaéliens qui s’effondrèrent les unes après les autres.

 

 

Au mois de Dzoul Qi’dah de l’année 654 de l’Hégire (1256), la secte hérétique des ismaéliens se soumit à lui en la personne de Rouqn ad-Din Khorsha sous la condition que les Moghols prennent comme conseiller Nassir ad-Din at-Toussi et ce dernier sut que l’affaire des assassins était finit. Rouqn ad-Din Khorsha s’était réfugié dans la forteresse de Maymoundiz et peu après, il se rendit aux Moghols dans la forteresse d’Alamout, une des plus imprenables forteresses au monde. Et avec sa reddition prit fin la secte des maudits hérétiques assassins. Nassir ad-Din at-Toussi rejoignit le vil Houlakou et se mit à son service et devint l’un de ses conseillers les plus proches.

 

La chute de la dynastie des abbassides

 

Un nombre importants d’historiens musulmans ont écrit sur la chute de la dynastie des Abbassides aux mains des Moghols sous le commandement d’Houlakou. Un autre nombre importants de rapporteurs qui vécurent la chute, ou de personnes interposées, nous ont rapportés les évènements de l’époque. Le plus populaire d’entre eux est l’historien perse Rashid ad-Din al-Hamadani. C’était aussi un philosophe, un docteur et le vizir du Khan moghol Mahmoud Khazan, le frère d’Olkaïtou Khoudabandah[12] Muhammad. Mahmoud Khazan qui était le petit fils de Janjis Khan était un bouddhiste qui devint Musulman.

Rashid ad-Din al-Hamadani écrivit un certain nombre de livres desquels ne survécut que ce livre connut « an-Nadir wa al-Ham » en quatre volumes. Le reste fut brûlé par les Moghols lorsqu’ils le soupçonnèrent d’avoir tué Olkaïtou Khoudabandah Muhammad. Olkaïtou était tombé malade et avait choisi Rashid ad-Din pour être son docteur mais il allait mourir et son docteur fut accusé de l’avoir tué. Il fut violemment tué et ses écrits brûlés, excepté le livre précédemment mentionné.

 

Lorsqu’il débuta sa mission en Iran, Houlakou envoya un messager au calife abbasside al-Mousta’sim Billah, pour lui demander de lui envoyer une force abbasside pour l’aider à venir à bout des assassins. Mais le calife écouta les conseils de son vil conseiller et ne lui répondit pas. Lorsque Houlakou finit sa mission, il envoya de nouveau un messager au calife, en l’an 655 de l’Hégire (1257), avec une lettre de menace pour ne pas l’avoir assisté contre les hérétiques ismaéliens. Il demanda au dernier calife abbasside, de raser ses forteresses et de combler les fossés qui entouraient les villes islamiques. Il lui demanda aussi de venir en personne pour le rencontrer et s’il ne pouvait le faire d’envoyer le vizir Ibn al-‘Alqami, Salman Shah[13] et Douhaydar[14] afin qu’il te transmette ma lettre. Si tu fais ce que je te demande, tu resteras à tes fonctions sinon prépare ton armée, choisit le lieu de la bataille et avertis-nous. Si je me courrouce après toi et me mets en route pour Baghdad, tu n’auras aucun secours. Le calife, lorsqu’il reçut cette lettre, lui répondit sur le même ton et lui dit : « O jeune égaré qui croit avoir conquis le monde sache que les miens remplissent l’est et l’ouest. Si c’est vraiment ce que tu désires, réunit alors un grand nombre des tiens. Car je vais commencer par l’Iran, puis conquérir le pays de Touran[15] ».

Cette lettre menaçante fut adressée à la force conquérante de l’époque, qui possédait un immense territoire et de vastes et infinies armées tandis que le califat était dans ses soubresauts finals, faible et sans armée pour faire face à la menace, sans compter la traitrise d’Ibn al-‘Alqami, était-ce donc la réponse à envoyer ?

 

Avant de lancer ses armées sur Baghdad, Houlakou convoqua ses astronomes et demanda leur avis. Le grand astronome Houssam ad-Din qui avait été envoyé par Manjo Khan pour servir son frère était un Sounni qui avait de la sympathie pour le calife et voulait préserver son état de la menace. Il dit à Houlakou que les étoiles n’étaient pas propices à invasion et : « Si jamais tu attaques le califat, un terrible malheur s’ensuivra pour le monde, les chevaux trouveront la mort (les chevaux étaient très importants pour les Moghols), le soleil s’assombrira, la pluie cessera, le terre s’asséchera et aucune plante ne poussera et les soldats deviendront malades ». Il voulait à tout prix l’empêcher de conduire sa guerre. Mais quand le tour de l’infâme Nassir ad-Din at-Toussi, le fils du chien[16], arriva, il encouragea Houlakou dans son action et lui dit : «  Regarde l’Histoire, Tahir Ibn Houssayn tua le calife Amin et il ne lui arriva rien. Regarde les émirs turcs qui tuèrent le calife al-Moutawakkil et son fils le calife al-Mountassir et son fils le calife al-Mou’taz, il ne leur arriva rien non plus ! »

 

Et effectivement l’histoire se répète. Rappelez-vous ce que firent les ismaéliens qarmates aux Musulmans, en plus d’égorger les pèlerins dans la Maison Sacrée ; ils massacrèrent aussi les caravanes de pèlerins et achevèrent les blessés. Rappelez-vous aussi, au mois de Mouharram de l’an 294 de l’Hégire (906), quand Zikrawayh Ibn Mikrawayh massacra une caravane de pèlerins du Khorasan, tandis que les femmes qarmates passaient avec de l’eau entre les blessés seulement pour les achever ! Telle est la « religion » des ismaéliens. Ces gens-là n’ont aucune pitié, nulle pitié ne devrait donc leur être faite.

Rappelez-vous aussi les caravanes de pèlerins d’Iraq en route vers la Mecque en 394 de l’Hégire (1003), 100 ans après ! Quand al-Hajjaj envoya deux lecteurs du Qur’an à Houssayf al-Mountafiqi et sa grande force, ces deux lecteurs, à la belle lecture, arrivèrent chez ce bédouin un tyran bourru à la peau et au cœur dur, lui lurent le Qur’an et lorsqu’il l’entendit son cœur s’émut. Il se réjouit et se réjouit des lecteurs qu’il honora grandement. Et il leur demanda : « Y-a-t-il quelqu’un à Baghdad qui vous a déjà donné un million de dinars en un seul jour ? » Ils lui dirent : «  Non, même pas mille dinars en un jours ». Il leur répondit : « Je vais donner à chacun d’entre vous un million de dinar maintenant ! » La valeur d’une caravane complète de pèlerins, qui partaient en pèlerinage par la grâce d’Allah Exalté sur eux !  Regardez la différence entre ces gens, des ismaéliens shiites et des simples bandits, qui étaient tous les deux des coupeurs de routes. L’un portait la haine dans son cœur et des centaines de pèlerins ne l’émurent même pas tandis que l’autre, à la simple mention des versets d’Allah, se rappela !

Nassir ad-Din at-Toussi et Ibn al-‘Alqami étaient des shiites ismaéliens dont la haine nourrissait le cœur et la conscience et qui ne connaissait ni la pitié et ni l’honneur.

 

L’arrivée des Moghols à Baghdad

 

Houlakou ordonna à sa terrifiante armée et ceux qui étaient avec eux, soit plus de cent-mille guerriers, de marcher sur Baghdad, l’immense ville capitale de l’état abbasside. Lorsqu’il arriva à Baghdad, il mit le siège sur la ville le 22 du mois de Mouharram de l’année 656 de l’Hégire (1257). Et Ibn al-‘Alqami[17], après avoir réduit l’armée musulmane de 100.000 à 10.000, joua alors sa dernière carte pour détruire l’islam et les Musulmans. Il contacta alors Houlakou pour lui transmettre toutes les informations de l’état et de ses hommes tout en décourageant les Musulmans. Il proposa même au calife de quitter Baghdad pour Basra et lui dit : «  La paix aura lieu, part ! » Le calife était faible, sans volonté et ne comprenait pas vraiment ce qui arrivait.

Nassir ad-Din at-Toussi à son tour alla voir le calife et lui demanda d’envoyer Douhaydar Junior et Souleyman Shah al-Iwahi à Houlakou car il désirait s’entretenir avec eux. Le calife répondit à sa demande et envoya les deux hommes avec 700 personnes de leurs familles. Lorsqu’ils arrivèrent chez Houlakou, le 2 du mois de Safar, il ordonna de tous les tuer.

 

Le vizir, puisse Allah le confondre, conseilla à al-Mousta’sim de les concilier et dit : « J’irai moi-même en avant chez eux arranger les termes de paix » et il partit les rencontrer, demanda la sécurité de sa propre personne et revint au calife et dit : « Le monarque désire marier sa fille à ton fils l’émir Abou Bakr et il te confirmera ta position de calife contrairement au seigneur d’ar-Roum qui s’est vu retenir sa souveraineté. Il ne cherche rien d’autre que ta soumission comme tes ancêtres se soumirent aux princes Seldjouk. Alors, il partira alors avec son armée. Consens-y, mon seigneur, pour que le sang des Musulmans soit épargné et ensuite tu pourras faire ce que tu veux. Mais il est recommandé que nous allions le trouver ».

Le dimanche 4 du mois de Safar, sur le conseil d’al-‘Alqami, le calife al-Mousta’sim Billah avec une suite de plus de 1.200 personnes de ses proches et des nobles sortirent pour rencontrer Houlakou. Parmi ces personnes se trouvaient les trois fils du calife et Houlakou les accueillit amicalement par ruse. Il demanda alors au calife d’ordonner à toutes les personnes armées de rendre leurs armes, ce qu’ils firent puis Houlakou ordonna de tuer toute la compagnie du calife, soit les 1200 personnes excepté le calife et ses enfants.

Le vizir al-‘Alqami, convoqua les juristes et les principaux hommes pour être témoin de la négociation. Ils sortirent tous de Baghdad et leurs têtes furent tranchées ainsi que toutes les compagnies les unes après les autres, furent décapités jusqu’à ce que tous les savants, les nobles, les chambellans et les principaux hommes furent exécutés jusqu’au dernier.

Alors, les Moghols emplirent les fossés, détruisirent les enceintes de protection, jetèrent un pont en travers du fleuve Dajla et le 7 du mois de Safar, ils entrèrent dans Baghdad de l’est et de l’ouest et le massacre dura environ quarante jours. Plus d’un million de musulmans furent massacrés et personne ne put s’enfuir excepté ceux qui se cachèrent dans les puits et les canaux souterrains. Tout fut systématiquement détruit, incendié et rasé, y compris les mosquées et les palais.

Lorsque Houlakou en personne entra à Baghdad, il ordonna de ramener le calife et de lui présenter ses trésors. Le calife était un homme avare qui avait amassé de grandes quantités de coffres d’or, d’argent et de pierres précieuses.

Imaginez-vous la scène, en 656 de l’Hégire (1257), le faible calife attaché présenté devant Houlakou qui demanda à que tous ses trésors soient placés devant lui et la scène d’al-Mou’tassim Billah, le huitième calife abbasside, quand il apprit que l’empereur Byzantin Théophile avait attaqué les Musulmans à Zibratah et Malatyah en 223 de l’Hégire (837), comme nous l’avons déjà rapporté. Que fit donc le puissant calife al-Mou’tassim Ibn ar-Rashid ? Il appela tous les juges et les juristes pour qu’ils témoignent qu’il avait donné un tiers de sa fortune personnelle pour ses enfants, un tiers pour les pauvres musulmans et un tiers pour ses Mawlah. Puis il demanda : « Quel est la ville la plus importante des Romains et la plus fortifiée ? » Ils répondirent : « Amouriyyah, qu’aucun musulman à ce jour n’a encore attaqué ! » Alors, il prépara ses armées en conséquence et marcha sur cette ville, qu’il conquit.

 

Houlakou interdit alors de nourrir le calife, et lorsque le calife ressentit la faim, il demanda à manger. Il lui fut rapporté de l’or dans un plat et Houlakou lui dit : « Mange ce que tu as amassé ! Pourquoi n’as-tu pas dépensé cet argent pour ton armée afin qu’elle soit prête pour un évènement comme celui de ce jour ? Pourquoi n’as-tu pas fait des flèches avec les portes de ta cité ? Pourquoi n’as-tu pas traversé le fleuve pour m’empêcher de venir à vous ? » Le calife lui répondit : « Ceci est la prédestination du Seigneur de l’univers » et Houlakou dit : « Et qui te préservera de la prédestination du Seigneur ? »

Quarante jours après, Houlakou ordonna à ses guerriers d’arrêter les massacres et d’annoncer la sécurité aux survivants de la ville ensanglantée. Les gens qui s’étaient cachés dans les puits, les canalisations et les tombes sortirent ainsi que les juifs, les chrétiens et les marchands qui avaient versés des grandes sommes d’argent pour acheter leur sécurité. Les Moghols se touchèrent pas non plus tous ceux qui se réfugièrent dans le palais du Khabith shiite ismaélien al-‘Alqami mais, ils furent décimés à leur tour par la maladie due à la pestilence des dépouilles qui restèrent là où la mort les avaient fauchés.

Certains historiens ont rapporté que le minimum de personnes qui mourut s’éleva à 800.000. D’autres ont rapporté 1.800.000 et certains 2.000.000 Musulmans furent massacrés lors de la prise de Baghdad, et il n’y a de force et de puissance qu’en Allah Exalté !

 

Houlakou quitta Baghdad à cause de la pestilence des innombrables cadavres, un jeudi du mois de Safar et s’arrêta dans une ville du nom de Waqf pas très éloignée de Baghdad. Ce même jour, il ordonna de ramener le pauvre calife et de le mettre dans un sac et il fut piétiné par les sabots de leurs chevaux jusqu’à la mort. Certains ont rapporté qu’il fut jeté dans le fleuve Dajla et d’autres ont dit qu’il fut pendu. Néanmoins, la première version est la plus correcte car c’est ainsi que les Moghols tuaient les grandes personnes. Ils la mettaient dans un sac pour éviter que son sang ne se répandent car ils croyaient que si son sang coulait, ne serait-ce qu’une goutte, le mort reviendrait pour se venger.

 

Après la chute de Baghdad, Houlakou le sanguinaire revint en Azerbaïdjan ou il s’établit et fonda la dynastie Moghol Ilkhaniyah, qui gouverna Fars. Un certain nombre de souverains musulmans effrayés vinrent le réconforter, de peur qu’ils ne leur arrivent ce qui arriva au calife. Parmi eux Badr ad-Din Lou'lou', le souverain de Mossoul, deux sultans de descendance Seldjouk Kikaous II et Qalj Arsalan IV. Le sultan Kikaous II alla jusqu’à s’humilier en disant au souverain Moghol : «  Je demande à sa seigneurie d’honorer la tête de son serviteur, en posant dessus ton pied bénit ! » Allahou Akbar ! Quelle différence avec son ancêtre Seldjouk, Alb Arsalan, le fléau des Romains ! Quelle sorte de gouverneur était donc cet homme qui a beaucoup de commun avec les dirigeants des nations musulmanes de nos jours, qui ne sont plus à une humiliation près ou une traitrise ! Par contre, vous les trouverez des tyrans implacables envers leurs peuples, supérieurs contre les Musulmans et inférieurs devant les mécréants !

 

La prise de Baghdad et la mort du calife abbasside eut un important impact sur le monde. L’empire musulman se retrouvait pour la première fois de son histoire, sans calife et les mécréants se réjouirent grandement de la défaite des Musulmans aux mains d’Houlakou et de la chute du califat ! Houlakou qui écoutait toujours les conseils de son épouse chrétienne Doukouz Khatoun. Suite à sa victoire sur l’Iraq, Houlakou décida de poursuivre ses conquêtes et d’attaquer la Syrie et enfin le dernier bastion de l’islam, l’Egypte d’autant plus que le roi d’Arménie Hitoum II le rejoignit avec ses forces et le mari de sa fille, le roi croisé d’Antioche, Bohémond VI.

 

Ainsi Ad-Dahhabi a rapporté à propos du dernier calife abbasside : « Je ne pense pas qu’il fut enterré mais il fut tué là avec un certain nombre de ses enfants et oncles et certains furent emprisonnés. Et ce fut une calamité telle qui n’arriva jamais en Islam ».

 

Ce que le vizir traitre et maudit chercha, cependant, ne fut pas été réalisé car il goûta l’ignominie et le mépris des Tatars et ne survécut pas longtemps à cet événement. Les poètes écrivirent des élégies sur Baghdad et ses habitants et les mots de Sabt at-Ta’widi sont applicables au vizir :

« Il périt et les gens avec, et leurs maisons sont abandonnés par la traîtrise,

De notre seigneur le vizir »

 

Et un autre a dit :

« O gens de l’Islam, pleurez et portez le deuil,

Pour le chagrin de ce qui est arrivé à al-Mousta’sim

L’autorité ministérielle avant lui

Était dans les mains d’Ibn al-Fourat et passa ensuite à Ibn al-’Alqami ».

 

Lors de la dernière Khoutbah prêchée à Baghdad l’Imam débuta ainsi : « Louange à Allah qui donna la mort à d’éminentes vies et qui ordonna la destruction des gens de cette maison. Cela, tandis que l’épée continue… ».

 

Le célèbre poème de Taqi ad-Din Ibn ‘Ali Yousr sur Baghdad dit :

« Mortifiantes sont les histoires de Baghdad pour celui qui gémit.

Pourquoi restez-vous quand vos amis sont partis ?

N’approchez-vous pas de Baghdad, vous les pénitents

Car dans cette enceinte protégée et ses demeures, il n’y a aucun habitant.

La couronne du califat, le séjour du printemps, où sont honorés

Ses mémoriaux, en vérité la dévastation l’a effacé.

Dans cette demeure, il y a des marques de la destruction qui y tomba,

Et les traces de larmes sur les dégâts.

O feu de mon cœur, fait jaillir du tumulte de la guerre, le feu

Qui flamba sur elle, une tornade qui balaya cet endroit populeux.

Combien de femmes chastes les Turcs prirent-ils de force en captivité

Préservée par d’autres voiles que celui de la modicité ?

Et combien de beauté, dans leur pleines lunes, furent éclipsées

De qui de leur grossesse ne reviendront jamais ?

Et combien de trésor furent dispersé

Par le pillage, que les infidèles ont capturé ?

Et combien de peines furent infligées par l’épée

Sur les cous d’hommes, par qui leurs péchés seront mis de côté ?

Et je dis que même les captifs furent avilis

Et leur sang répandu, par leurs terribles ennemis ».

 

 

Quand Houlakou accomplit le massacre du calife et des habitants de Baghdad, il nomma un gouverneur sur l’Iraq. Houlakou ne consentit pas au demande d’Ibn al-‘Alqami le traitre mais, il les rejeta et offrit ce dernier à l’un de ses esclaves. Ibn al-‘Alqami resta avec eux dans la position d’un de leurs esclaves et mourut de chagrin, puisse Allah Exalté ne pas lui faire miséricorde, ni lui pardonner, ainsi qu’à tous les traitres comme lui qui vendirent leur nation et leur peuple aux mécréants.



[1] Eruption volcanique.

[2] À plus de 400 km de là !

[3] Hulagu.

[4] Gengis Khan.

[5] Gengis.

[6] En fait, seuls les Musulmans étaient visés puisqu’il apparut beaucoup plus tard, comme l’ont rapporté les historiens, qu’il y eut des tractations secrètes entre la papauté et les Moghols pour prendre les musulmans en étau et les exterminer. Mais le Seigneur, Exalté soit-Il, en avait décidé autrement. Aujourd’hui, les ennemis de l’Islam font de la publicité pour ces exterminateurs et les honorent ouvertement dans des livres et des films !

Je reste persuadé qu’ils n’oseraient pas faire de la publicité pour Hitler pour des raisons évidentes, n’est-ce pas !

[7] Une région à 25 km de Samarkand.

[8] La plaine de Kipzak qui s’étend de chaque côté de la Volga.

[9] La Tchécoslovaquie.

[10] Mango.

[11] Hulagu.

[12] « ‘AbdAllah » en arabe et « serviteur d’Allah » en français.

[13] Salman Shah était un des grands commandants de l’armée Abbasside.

[14] Douhaydar Aybak Junior s’occupait des affaires du palais et était aussi un des conseillers du calife.

[15] Le pays des turcs.

[16] Ainsi rapporté dans le texte original.

[17] Vous n’êtes pas sans savoir que tous ces ennemis de l’Islam et des Musulmans sont vénérés en Iran et ont leurs propres mausolées que les gens visitent en pèlerinage !