Houlakou menace la Syrie

 

Houlakou envoya une lettre à an-Nassir[1], le souverain de Damas[2], comme suit : « Le sultan al-Malik an-Nassir, puisse sa vie être prolongée, doit savoir que lorsque nous nous mimes en route pour l’Iraq, leur force s’opposa à nous et nous les avons faits périr avec l’épée de Dieu. Alors les chefs de la ville et ses notables vinrent me trouver mais, le sujet de leur discours fut la cause de la destruction des vies et les mérites de leurs destructions. Quant au gouverneur de la ville, en vérité il vint en avant pour nous servir et entra sous notre obéissance et nous l’avons questionné à propos de certaines choses mais il nous trompa et mérita la mort, car son mensonge était manifeste « Et ils trouveront devant eux tout ce qu’ils ont œuvré[3] », (XVIII). Répond au seigneur de la terre et ne mentionne pas tes forteresses imprenables et tes vaillantes armées : et en vérité nous avons entendu dire qu’une partie de l’armée s’était réfugiée chez avec toi et cherché un asile auprès de toi :

« Où y a-t-il une place de refuge ? Il n’y a aucun asile pour le fugitif,

Car nous sommes les deux plaines, la terre et la mer ».

À la réception de notre lettre, nivelle les forteresses syriennes avec la terre, leur longueur comme leur largeur, et paix à toi ».

Il lui envoya une deuxième lettre disant : « À al-Malik an-Nassir, maintenant, en vérité, nous avons pris Baghdad et avons détruit son royaume et son monarque. Il fut avare de ses richesses et n’entretint pas ses troupes espérant que son royaume et sa gloire continuerait de cette manière et son pouvoir augmenta jusqu’à ce que sa lune fut éclipsé à son plein.

« Quand une chose atteint son apogée, son déclin commence,

Quand on annonce la plénitude, attend-toi à la dégénérescence ».

Mais nous cherchons l’augmentation durant l’avancée de l’âge. « Et ne soyez pas comme ceux qui ont oublié Allah ; [Allah] leur a fait alors oublier leur propres personnes.[4] » et montre ce qui est dans ton esprit, l’abstention de bons offices ou la poursuite de courtoisie et répond à la citation du seigneur de la terre, et tu seras peut-être à l’abri de sa colère, appréciez ses avantages et soyez généreux avec lui de vos richesses et vos troupes et ne retardez pas nos messagers ».

Puis, il lui envoya une troisième lettre, disant : « Maintenant, nous sommes l’armée du Seigneur. Par nous, Il se venge des effrontés et des vaniteux, des rebelles et des orgueilleux qui ne se soumettent pas à Ses commandes et qui, s’ils sont réprimandés, deviennent furieux et protestent avec un entêtement continu. Et, en vérité, nous avons renversé des villes et avons détruit les habitants et avons tués des femmes et des enfants. O vous qui êtes en vie ! Vous êtes sur le point de rejoindre les décédés. O vous qui êtes insouciants! Vous êtes en train d’être conduits vers eux, car nous sommes l’armée de la destruction, pas l’armée de domination. Notre but est la vengeance et notre royaume est au-delà du désir des hommes. Notre invité n’est pas blessé et notre justice, partout dans nos dominions, est connue lointaine et large et où y-at-il un asile pour nos épées ?

« Où y-a-t-il un place de refuge ? Il n’y a aucun asile pour le fugitif,

Car nous sommes les deux plaines, la terre et la mer ».

Les lions sont soumis à notre pouvoir et sont tombés

Dans notre prise, princes et califes ».

Nous sommes sur le point de marcher contre vous et c’est à vous de fuir et à nous de vous poursuivre :

« Layla saura bientôt que la dette doit être payée,

Et combien exigeant est un créancier à sa créance ».

Nous avons détruit des villes et avons fait des enfants des orphelins. Nous avons extirpé les habitants et leur avons fait goûter l’affliction et nous avons fait de leurs grands des petits et de leurs nobles des captifs. Vous pensez que vous pouvez vous enfuir et d’être délivrés de nous, mais vous saurez bientôt vers ou nous nous dirigeons et qu’en vérité celui qui est averti, n’a pas d’excuses ».

 

 

Pendant ce temps, le souverain d’Egypte, qui était à cette époque al-Mansour ‘Ali Ibn al-Mou’iz Aybak un garçon et son tuteur l’émir Sayf ad-Din Qoutouz al-Mou’iz un esclave de son père et le Sahib Kamal ad-Din al-‘Adim leur envoya un messager demandant de l’aide contre les Moghols. Sur ce, Qoutouz rassembla les nobles et les principaux hommes et fut présent ce jour-là, le Shaykh ‘Izz ad-Din Ibn ‘Abd as-Salam qui était célèbre pour son éloquence et qui dit : « Depuis que l’ennemi a dépassé les provinces, il incombe à la communauté entière de s’opposer contre eux et il est légal de prendre des gens leur subsistance après l’épuisement de la trésorerie publique et que nous ayons vendu ce que nous possédons de bien. Et que nous nous contentions, chacun d’entre nous, de cheval et d’armes, pour que vous et le peuple soyez au même niveau et qu’à partir de là, il nous est autorisé de prendre la substance des gens mais que l’armée garde ses richesses et ses meubles coûteux, cela ne peut être ». Quelques jours plus tard, Qoutouz saisit al-Mansour, le fils de son maître et dit : « Ce n’est qu’un garçon et la situation est critique. Il est nécessaire qu’un homme d’esprit se lève pour conduire la guerre contre les mécréants ». Qoutouz obtint alors l’autorité suprême et fut surnommé al-Mouzaffar, puisse Allah Exalté le couvrir de miséricorde et de gloire.

 

 

Ainsi commença l’année 657 de l’Hégire (1258) et le monde sans calife.

Au point de vue militaire, si Houlakou avait décidé de ravager le monde musulman, nul n’aurait été en mesure de l’arrêter. Voici ce qu’il avait dit au calife al-Mou’tassim dans l’une de ses lettres : «  Je me dirige vers Baghdad, à la tête d’une armée comme les fourmis et les sauterelles », ce qui était vrai ! Qui aurait pu se mettre en travers de leur route ? Mais voici ce qui arriva.

 

Au mois de Ramadan de cette même année, Houlakou quitta l’Azerbaïdjan à la tête de son innombrable armée puis, il captura Mayafariqin et un grand nombre de villes musulmanes se soumirent sans combattre.

De Mardin, il se dirigea vers Halab, qu’il captura au mois de Safar de l’année 658 de l’Hégire (1259). Il ne va pas sans dire que là où il passa, il laissa derrière lui ruine et mort et même les animaux, n’échappèrent pas aux massacres !

Puis, il assiégea la forteresse stratégique de Harim, qu’il captura avec Hama, al-Magharrah et Homs avant de marcher vers Damas. Le gouverneur de la ville sortit à la rencontre d’Houlakou et lui remit la ville, la capitale des Omeyyades, sans combat. Houlakou y entra à la fin du mois de Safar de cette même année et il ne tua personne. Mais la forteresse de Damas résista et il l’assiégea avant de la prendre et tua tous ses occupants.

Puis Houlakou quitta Damas et se dirigea vers Naplouse en Palestine qu’il captura puis Gaza. Allah Exalté protégea Jérusalem de son mal.

 

 

A la fin de ces évènements rapides et successifs qui passèrent sur l’état islamique, qui débuta avec la venue de Janjis Khan en 617 de l’Hégire (1220), la chute des Abbassides et du califat, la chute de la Syrie et malgré l’extrême état de faiblesse de la nation musulmane, allait arriver le secours du Seigneur de l’Univers. Comme vous le savez, le Seigneur n’a pas besoin de Se montrer mais grâce à une suite d’événements successifs, qui doivent paraître naturels aux yeux des humains, le changement survint. Et en l’occurrence deux évènements importants allaient se produire.

Le premier de ces évènements fut la mort du Khakan Moghol Manjo Khan en l’an 655 de l’Hégire (1256) et le second fut la conversion à l’Islam du puissant Chef Moghol Barakah Khan Ibn Joutchi Ibn Janjis Khan. Cet Ibn Joutchi était le fils du grand fils de Janjis Khan qui avait été empoisonné sur les ordres de ce dernier. Barakah Khan Ibn Joutchi Ibn Janjis Khan était le souverain de la ville de Qabjak et lorsqu’il fut informé des massacres des Musulmans par le fils de son oncle Houlakou Ibn Touli Ibn Janjis Khan, il lui envoya une lettre de menace et de vengeance pour ses crimes. Certains d’entre vous pourraient se poser la question pourquoi les nouvelles mirent autant de temps pour parvenir à Houlakou. Il y avait entre Qaraqorn et la Syrie plus de 6.000 kilomètres à vol d’oiseau. En distance réelle avec toutes les difficultés géographiques et physiques rencontrées sur leur route par les messagers, la distance était beaucoup plus grande que cela.  

Lorsque Houlakou fut informé de la mort du Khakan Manjo Khan, il décida de faire retourner avec ses armées en Azerbaïdjan, pour deux raisons. D’abord pour prendre part à l’assemblée des Moghols, al-Qoraltaï, pour la succession et pour faire face à la menace de Barakah Khan. Mais les associées d’Houlakou, les croisés, lui demandèrent de laisser derrière lui un corps de troupes, pour finir les conquêtes dont ils avaient convenus ensemble, et capturer le reste de la Palestine puis l’Egypte. Houlakou accepta leur requête et laissa derrière lui son fameux commandant Kitou Boukanouyan[5], qui était un chrétien de la tribu Moghol Naïman, à la tête d’une partie de l’armée.

 

 

L’année 658 de l’Hégire (1289) débuta toujours sans calife.

 

Sayf ad-Din Qoutouz al-Mouzaffar et Rouqn ad-Din Baybars al-Bandoukdari

 

Au mois de Sha’ban, les Egyptiens marchèrent vers la Syrie pour s’opposer aux Tatars et al-Mouzaffar envoya avec ses forces et ses troupes choisies, Rouqn ad-Din Baybars al-Bandoukdari. L’armée égyptienne rencontra les Moghols à ‘Ayn Jalout et la bataille eut lieu le vendredi 15 du mois de Ramadan. Les Tatars furent totalement déroutés et les Musulmans victorieux, louange à Allah. Leur chef fut capturé et Rouqn ad-Din Baybars ordonna de l’exécuter.

Les Tatars furent massacrés et s’enfuirent précipitamment mais les gens les poursuivirent avec impatience, les saisirent et les pillèrent. Une lettre d’al-Mouzaffar avec les nouvelles de la victoire arriva à Damas et les gens furent portés de joie. Peu de temps après, al-Mouzaffar entra à Damas triomphant et victorieux et les gens l’acclamèrent avec une grande estime tandis que Baybars poursuivit les Moghols dans le territoire d’Alep et les reconduisit des provinces. Le sultan Qoutouz eut l’intention de se mettre en route pour Alep pour balayer toutes les provinces des traces des Moghols, mais il fut assassiné le 16 du mois de Dzoul Qi’dah et Baybars assuma le gouvernement et reçut le titre d’al Malik al-Qahir. Il entra au Caire et releva les gens des exactions tyranniques que leur avait imposés al-Mouzaffar. Le vizir Zayn al-Millat wa ad-Din Ibn az-Zoubayr lui conseilla de changer son titre et lui rappela que quiconque l’avait porté n’avait pas prospéré, al-Qahir le fils d’al-Mou’tadid fut ainsi appelé et il fut ar la suite déposé et aveuglé et al-Qahir le fils du gouverneur de Mosul fut empoisonné. Le sultan abandonna donc ce titre pour celui d’al-Malik az-Zahir.

 

 

L’année 659 de l’Hégire (1260) débuta comme précédemment toujours sans aucun calife jusqu’au mois de Rajab quand le califat fut rétablit en Egypte et al-Moustansir reconnut comme tel. La période sans califat fut de trois ans et demi.


Derniers mots

 

Au départ de cette traduction qui ne faisait qu’un seul volume, j’avais projeté de consacrer un volume uniquement pour les croisades mais en recorrigeant le précédents texte sur l’Histoire de l’Andalousie, j’ai décidé d’y introduire aussi l’Histoire du Maghreb et ce qui n’était qu’un volume de 330 pages est devenu deux volumes de 650 pages chacun.

En relisant le présent texte, et ce qu’a rapporté l’historien Ibn al-Athir, puisse Allah Exalté lui faire miséricorde, sur les Tatars puisqu’il vivait à cette époque, il m’apparait nécessaire et obligatoire de revenir beaucoup plus en détails sur ce terrible fléau qui ravagea les terres musulmanes et particulièrement la décisive bataille de ‘Ayn Jalout. Et comme l’a rapporté Ibn al-Athir, combien fut-il douloureux de rapporter ces évènements et n’était-ce l’espoir de leur utilités aux musulmans, je me serais contenté de ce j’ai déjà rapporté et qui me parait assez complet mais je voudrais que vous sachiez qui étaient ces Tatars que les mécréants admirent pour ce qu’ils ont fait aux Musulmans

C’est pourquoi je vais suivre le même procédé que pour l’Histoire du Maghreb et de l’Andalousie et rajouter un deuxième volume à cet Abrégé de l’Histoire des Abbassides qui comportera un très large résumé :

- Du début des croisades jusqu’à la bataille décisive de Hattin et l’apparition de la menace Moghol. De la cruauté des croisés qui allèrent jusqu’à rôtir et manger des enfants Musulmans.

- De l’entrée des Tatars ou Moghols sur la scène internationale jusqu’à la bataille de ‘Ayn Jalout, leur implacable, terrible et douloureuse férocité qui n’est pas sans rappeler le comportement des coalisés de nos jours et que j’ai personnellement vu via des vidéos sur Internet[6], des vidéos que vous ne verrez jamais dans les informations sur vos petits écrans et pour cause, leurs crimes sont ignominieux ! 

- Et enfin de la période du califat en Egypte après sa chute en Iraq qui sera notre introduction à l’Abrégé de l’Histoire des Ottomans qui sera suivi par un retour au source (en fait j’aurais dû commencer par là mais mon projet initial était loin d’être aussi complet) la traduction intégrale des Califes Bien Guidés de l’Imam at-Tabari et enfin un Abrégé sur la Conquête de l’Inde. 


 

Fin du premier volume

 

Al-Ahad 26 Dzoul Hijjah 1436

 

11 Novembre 2012


[1] Al-Malik an-Nassir Abou al-Mouzaffar Youssouf surnommé Salah ad-Din, Ibn al-Malik al-‘Aziz Ibn az-Zahir Ibn Salah ad-Din, né en 627 de l’Hégire (1229). Il gouverna Damas et la Syrie à la mort de son père, mais fut expulsé par les Moghols et mourut aux mains de Houlakou en l’an 656 de l’Hégire (1257).

[2] La Syrie dont une partie était déjà occupée par les croisés.

[3] Qur’an 18 : 49

[4] Qur’an 59 : 19.

[5] Noyan signifie commandant d’une division de 10.000 combattants. Plus connu sous le nom de Kitbouka.

[6] You Tube par exemple qui regorge de leurs crimes.