De l’expédition
des Tatars contre Khwarizm Shah, sa fuite et sa mort
Lorsque les maudits mécréants eurent pris
Samarcande, Shinjiz Khan décida d’envoyer 20 000 cavaliers et leur
dit : « Poursuivez Khwarizm Shah où qu’il soit même s’il grimpe vers
le ciel, jusqu’à ce que vous le rattrapez et le saisissez. » Ce
groupe de Tatars s’appelait « du côté de l’ouest » parce qu’ils
voyagèrent à l’ouest du Khorasan et pour les distinguer entre eux et
le reste puisqu’ils sont ceux qui pénétrèrent profondément dans nos
terres. Lorsque Shinjiz Khan leur ordonna de partir, ils
chevauchèrent en direction d’un lieu nommé Panj Ab, qui signifie «
les cinq eaux ». Lorsqu’ils y arrivèrent, ils ne trouvèrent pas un
seul bateau alors ils construisirent ce qui ressemblait à de grandes
abreuvoirs en bois qu’ils couvrirent de peaux de bovins pour les
rendre imperméable à l’eau dans lesquels, ils placèrent leurs armes
et leurs biens puis ensuite entrainèrent leurs chevaux dans l’eau
ainsi, chaque cheval tira un homme et chaque homme tira un bac
chargé de ses armes et de ses effets personnels. Tous traversèrent
ensemble et passèrent sur l’autre rive et Khwarizm Shah sut alors
qu’ils étaient avec lui sur le même terrain.
Les Musulmans étaient tant effrayés que
terrifiés en plus d’être en désaccord entre eux et bien qu’ils
croyaient que l’Oxus les sépareraient des Tatars mais lorsque ces
derniers le traversèrent, ils furent incapables de tenir ferme ou de
manœuvrer collectivement. Ils se dispersèrent dans toutes les
directions et chaque détachement prit sa propre route.
Khwarizm Shah, sans aucun égard pour qui que ce
soit d’autre, partit avec un petit groupe de sa garde spéciale pour
Nishapour. Après y être entré, une partie de son armée se réunit
autour de lui mais à peine venait-il d’arriver que ces mêmes Tatars
arrivèrent. Ils ne s’attardèrent ni à piller ou à tuer sur leur
route mais se concentrèrent sur sa poursuite pour ne lui laisser
aucun répit pour organiser la résistance contre eux. Quand il
entendit parler de leur approche, il partit à Mazandaran, également
l’un de ses domaines. Les Tatars « du côté de l’ouest » de nouveau
se lancèrent sur ses traces et se détournèrent de Nishapour. Chaque
fois qu’il quittait une halte, ils descendaient sur elle jusqu’à ce
qu’il parvienne à un port sur la mer Caspienne, connu sous le nom
d’Abaskoun où il avait un fort à une petite distance de la mer.
Quand lui et ses hommes embarquèrent sur les bateaux, les Tatars
arrivèrent et, voyant que Khwarizm Shah avait pris la mer, ils
s’arrêtèrent au bord de l’eau puis désespérant de le rattraper, ils
se retirèrent et ce sont ceux qui attaquèrent ar-Rayy et au-delà
comme nous le rapporterons, si Allah Exalté le veut.
C’est ce qui m’a été rapporté par un certain
juriste qui était à Boukhara et qui fut pris prisonnier et emmené à
Samarcande mais qui plus tard, s’échappa et vint à nous.
D’autres, qui étaient des marchands, dirent que
Khwarizm Shah quitta Mazandaran pour ar-Rayy puis de là à Hamadan
avec les Tatars sur ses talons. Il quitta Hamadan avec un petit
groupe et sans bagages pour cacher son identité et des informations
sur lui-même, retourna à Mazandaran et enfin vers la mer pour ce
fort.
Cette dernière version est l’authentique
puisque le juriste était en captivité à cette époque, alors que ces
commerçants ont dit qu’ils étaient à Hamadan quand arriva Khwarizm
Shah suivit par des gens qui l’informèrent que les Tatars arrivaient
et il quitta aussitôt la ville ou les Tatars arrivèrent moins d’un
jour plus tard. Par conséquent, ils furent des témoins oculaires.
Lorsque Khwarizm Shah arriva dans son château
sur une ile de la mer caspienne et y mourut peu après (de la manière
la plus misérable).
Une
description de Khwarizm Shah et quelque brefs éléments sur sa vie
Il était ‘Ala' ad-Din Muhammad Ibn ‘Ala' ad-Din
Takash et son règne dura 21 ans et quelques mois. Son royaume était
vaste et son prestige élevé. Il aimait l’obéissance universelle.
Depuis les Seljouks, nul ne gouverna un royaume comme le sien qui
s’étendait de la frontière de l’Irak et aussi loin que le Turkestan.
Il gouverna le territoire de Ghazna, une partie de l’Inde, le
Sijistan, Kirman, le Tabaristan, le Jourjan, les Hautes Terres
(régions montagneuses), le Khorasan et une partie de Fars. Il fit
également de grandes choses contre le Qarakhitay et prit leurs
terres.
Il était un homme instruit qui connaissait le
droit, les principes fondamentaux de la religion et d’autres sujets.
Il était respectueux envers les ‘Oulama, profondément affectueux et
généreux avec eux, se joignait souvent à leurs sessions et à leurs
joutes verbales. Il pouvait supporter la fatigue et les marches
forcées à cheval et n’était ni adonné au luxe et aux plaisirs. Son
seul souci était son royaume, son administration et sa maintenance
ainsi que la protection de ses sujets. Il révérait les hommes de
religion, les favorisa et rechercha la bénédiction en s’associant
avec eux.
Un des serviteurs de la chambre-tombeau du
Prophète (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) revenu du
Khorasan, m’a raconté ce qui suit. Il dit : « Je suis arrivé au
Khwarezm, trouvé un logement et suis allé ensuite aux bains puis,
j’ai cherché la cour du sultan ‘Ala' ad-Din à laquelle je me suis
rendu. Arrivé sur place, je fus accueilli par un homme, qui me
demanda : « Quel est ton affaire ? » Je lui répondis : « Je suis
l’un des serviteurs de la chambre du Prophète (Saluts et
Bénédictions d’Allah sur lui). » Il m’ordonna de prendre un siège et
me laissa pendant un certain temps. Puis il revint et m’escorta dans
la résidence du sultan. L’un des chambellans du sultan me reçut et
dit : « J’ai informé le sultan de ta présence et il t’a fait mandé.
» J’entrais alors. Il était assis au centre contre la paroi arrière
d’une grande salle voûtée. Quand je suis arrivé au milieu de la
cour, il se leva et se dirigea vers moi, alors j’ai accéléré ma
progression et le rencontra dans le centre de la salle voûtée. Je
voulus lui embrasser la main mais il m’arrêta, m’embrassa, s’assit
et m’invita sur un siège près de lui. Il me dit : « Sers-tu donc la
chambre du Prophète (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) ? » Sur
quoi je répondis : « « Oui. » Il prit ma main et la passa sur son
visage, avant de me questionner sur la situation, la vie, la
description de Médine et sa grandeur. Il tint une longue
conversation avec moi et quand je me levais pour partir, il dit : «
N’était-ce le fait que je prévois une campagne en ce moment, je
n’aurais pas pris congé de toi. J’ai l’intention de traverser l’Oxus
pour rencontrer les Qarakhitay. C’est maintenant un voyage béni
puisque nous avons vu celui qui sert la chambre du Prophète (Saluts
et Bénédictions d’Allah sur lui). » Il me dit alors adieu, m’envoya
une grande somme pour mes dépenses et alla son chemin.
Et ce qui lui est arrivé avec les Qarakhitay à
déjà été rapporté et si nous devions énumérer toutes ses vertus, ce
serait une longue tâche
(qu’Allah lui fasse miséricorde).
Comment les
Tatars « du côté de l’ouest » débordèrent Mazandaran
Lorsque les Tatars « du côté de l’ouest »
désespérèrent d’attraper
Khwarizm Shah, ils se retirèrent et se dirigèrent vers les terres de
Mazandaran qu’ils prirent le plus rapidement possible malgré ses
solides défenses, l’accès difficile et la robustesse de ses forts
qui avaient continué à résister aux attaques tant dans le passé que
de nos jours, si bien que lorsque les Musulmans prirent toutes les
terres des empereurs perses, de l’Irak aux parties les plus
éloignées de Khorasan, les districts de Mazandaran survécurent en
payant le tribut et les Musulmans ne purent y entrer jusqu’à ce
qu’elles furent prises sous le règne de Souleyman Ibn ‘Abdel-Malik
en l’an 90 de l’Hégire (709) tandis que ces maudits les prirent sans
aucun problème pour un but qu’Allah Tout Puissant voulut.
Quand ils prirent Mazandaran, ils
assassinèrent, asservirent, pillèrent et brûlèrent puis, lorsqu’ils
eurent fini, ils prirent la direction d’ar-Rayy. Sur leur chemin,
ils rencontrèrent la mère de Khwarizm Shah, ses femmes, ses biens et
ses trésors, des objets précieux qu’on ne vit jamais précédemment.
La raison est que lorsque la mère de Khwarizm Shah entendit ce qui
était arrivé à son fils, elle quitta craintive Khwarezm pour aller à
ar-Rayy pour se diriger ensuite vers Ispahan, Hamadan et les Hautes
Terres. Les Tatars la rencontrèrent sur la route et ce qu’elle avait
avec elle fut saisi. Chaque objet rare, chaque gemme précieuse et
ainsi de suite comme nul n’en avait jamais été vu, remplit leurs
yeux et leurs cœurs et ils envoyèrent tout cela à Shinjiz Khan à
Samarcande.
Compte de
l’arrivée des Tatars à Rayy et Hamadan
En l’an 617 de l’Hégire (1220), les Tatars,
qu’Allah les maudisse, arrivèrent à ar-Rayy poursuivant Khwarizm
Shah Muhammad parce qu’ils entendirent qu’il s’était enfui dans la
direction d’ar-Rayy. Ils se dépêchèrent en toute hâte sur ses
traces. Un grand nombre de soldats, des Musulmans et de mécréants
s’étaient attachés à eux ainsi que les malfaiteurs qui voulaient
piller et faire du mal. Ils arrivèrent à ar-Rayy en prenant les
habitants par surprise qui n’avaient pas la moindre idée d’eux
jusqu’à leur arrivée. Ils prirent et pillèrent la ville, capturèrent
les femmes et réduisirent les enfants en esclavage. Ils commirent
des actes sans précédent mais ne restèrent pas et reprirent leur
poursuite après Khwarizm Shah. Sur la route, ils pillèrent chaque
ville et village qu’ils rencontrèrent et à qui ils firent des choses
bien plus horribles que ce qu’ils avaient fait à ar-Rayy. Ils
incendièrent, détruisirent et passèrent les hommes, les femmes et
les enfants par l’épée sans rien épargner.
Ils poursuivirent de la même façon aussi loin
que Hamadan ou était arrivé Khwarizm Shah avec un petit corps de
suivants pour quitter aussitôt la ville. Ce fut la dernière des
informations qui fut rapportée le concernant car nul se savait ce
qui lui arriva ensuite selon le rapport de certaines personnes.
Cependant, il y eut un autre récit que nous avons rapporté.
Lorsque les Tatars arrivèrent près de Hamadan,
le chef sortit avec une somme d’argent, des vêtements, des chevaux
et d’autres éléments pour demander des conditions pour les habitants
qui lui furent accordées puis, ils allèrent à Zanjan où ils firent
beaucoup plus que leurs habitudes avant de se diriger et arriver à
Qazwin ou les habitants de la ville leur résistèrent. Les Tatars les
engagèrent férocement et entrèrent par la force des armes. Les
citoyens combattirent dans la ville même avec des poignards et un
nombre incalculable fut tué des deux côtés. Finalement, ils
quittèrent Qazwin ou les habitants tués furent comptés et dénombrés
à plus de quarante mille.
De
l’arrivée de la Tatars en Azerbaïdjan
Quand l’hiver tomba sur les Tatars dans Hamadan
et les Hautes Terres, ils éprouvèrent le froid intense et les
tempêtes de neige alors ils se rendirent en Azerbaïdjan pillant et
tuant tout ce qui tomba sur leur route. Les villes et les villages
subirent le même sort de destructions et d’incendies. Ils arrivèrent
à Tabriz, où son seigneur Ouzbak Ibn Bahlawan ne bougea pas ni se
résolut à les affronter parce qu’il était occupé à s’enivrer jour et
nuit sans jamais être sobre. Il leur envoya simplement de l’argent
pour les acheter ainsi que des vêtements et des chevaux. Ils le
laissèrent alors et se dirigèrent vers la côte de la Mer Caspienne
car l’hiver pouvait être moins froid là-bas et parce qu’il y avait
beaucoup de pâturages pour leurs animaux. Leur route les conduisit à
Mouqan et ils entrèrent dans les terres des Géorgiens ou ils furent
accueillis par environ 10 000 combattants géorgiens. Une bataille
s’ensuivit entre eux, les Géorgiens furent défaits et la plupart
d’entre eux furent tués.
Les Géorgiens envoyèrent un messager à Ouzbak
pour lui demander de faire la paix et de former une alliance pour
résister aux Tatars. Ils conclurent donc un accord pour unir leurs
forces lorsque l’hiver serait fini. Les Géorgiens envoyèrent aussi
un messager à al-Ashraf Ibn al-‘Adil, seigneur de Khilat et
d’al-Jazirah, pour lui demander de conclure un accord avec eux. Tous
pensèrent que les Tatars attendraient la fin de l’hiver jusqu’à
l’arrivée du printemps mais ils ne le firent pas. Ils marchèrent
vers les terres des Géorgiens et furent rejoint par un Mamelouk turc
d’Ouzbak nommé ‘Aqoush qui avait rassemblé les habitants de ces
montagnes et des plaines, des Turkmènes, des Kurdes et d’autres
jusqu’à ce qu’un grand nombre se rassembla autour de lui et prit
contact avec les Tatars pour les rejoindre.
Ils acceptèrent cela et s’inclinèrent vers lui
sur la base de l’appartenance ethnique commune. Lorsqu’ils furent
tous rassemblés, ils se joignirent à la caravane des Tatars contre
les Géorgiens puis prirent un de leurs forts qu’ils rasèrent avant
de piller et de ruiner le pays. Ils tuèrent les habitants et
pillèrent leurs biens puis arrivèrent finalement près de Tiflis.
Du
rassemblement des Géorgiens pour la bataille
Après avoir été accueillis par ‘Aqoush à la
tête de ses homme, ils engagèrent une féroce bataille dans laquelle
ils restèrent ferme et ou un grand nombre des hommes de ce dernier
furent tués. Les Tatars tombèrent sur eux quand les Géorgiens
furent fatigués du combat et que beaucoup d’entre eux avaient été
tués. Ils ne résistèrent pas devant les Tatars mais subirent l’une
des plus terribles déroutes et furent passés par l’épée de tous les
côtés si bien qu’un nombre incalculable d’entre eux trouva la mort.
Cette bataille eut lieu au mois de Dzoul Qi’dah de cette année et
après celle-ci, les Tatars pillèrent les terres qui avaient échappé
à leur attention.
En fait, ces Tatars firent quelque chose jamais
précédemment fait que ce soit dans les temps anciens ou modernes. Un
peuple émergea des frontières de la Chine et avant que l’année ne
soit écoulée, certains d’entre eux atteignirent les terres d’Arménie
dans cette direction et allèrent au-delà de l’Irak dans la direction
de Hamadan. Par Allah, il ne fait aucun doute que tous ceux qui
viendront après nous, quand une longue période de temps sera passé,
et liront les rapports de cet événement refuseront de l’accepter et
le penseront improbable, bien que la vérité soit sous leurs yeux.
Quand il l’estimera peu probable, qu’il considère que nous et tous
ceux qui écrivirent l’histoire de ces temps, l’avons fait à l’époque
où tous ceux qui vivaient connaissaient cette catastrophe, tant les
lettrés que les ignorants, tous égaux dans leur compréhension en
raison de l’ampleur de sa notoriété.
Puisse Allah Exalté donner aux Musulmans et
l’Islam quelqu’un pour les préserver et les protéger car ils furent
contraints de rencontrer un ennemi redoutable tandis que les princes
musulmans sont réduits à
leurs aspirations qui ne vont pas au-delà de leurs ventres et de
leurs parties intimes. Depuis la venue du Prophète (Saluts et
Bénédictions d’Allah sur lui) jusqu’à ce temps présent, les
Musulmans n’ont pas subi de telles difficultés et une misère
affligeante telle que maintenant.
Cet ennemi, les Tatars mécréants, qu’Allah les
maudisse, pénétrèrent les terres de la Transoxiane qu’ils saisirent
et ruinèrent. C’était un
territoire assez vaste pour eux mais ce groupe traversa le fleuve
pour le Khorasan qu’il prit et à qui il appliqua le même traitement
avant de revenir ensuite à ar-Rayy, les Hautes Terres et
l’Azerbaïdjan ou ils entrèrent en contact avec les Géorgiens et
accablèrent leur pays.
L’autre ennemi, les croisés, qu’Allah les
maudisse aussi, sortirent de leurs terres des coins les plus reculés
des terres des Roum (Romains) dans le nord-ouest et vinrent en
Egypte et conquirent une ville comme Damiette ou ils s’établirent et
les Musulmans furent incapables de les déloger ou de les chasser
mettant ainsi le reste de l’Egypte en danger. En vérité, nous
appartenons à Allah et à Lui nous retournons. Il n’y a de Force et
de Puissance qu’en Allah le Très Haut, le Tout-Puissant.
Un des plus grands malheurs des Musulmans fut
que leur sultan Khwarizm Shah Muhammad était absent et que ce qui
lui arriva était inconnu. A un moment, il fut dit qu’il était mort à
Hamadan et que sa mort avait été caché puis il fut aussi dit qu’il
était entré dans l’enceinte de Fars où il mourut et sa mort fut
gardée secrète afin que les Tatars ne se lancent pas à sa poursuite.
À un autre moment, il fut rapporté qu’il était retourné au
Tabaristan, puis vers la mer et qu’il était décédé sur une île
là-bas. En bref, il disparut mais par la suite, il s’avéra qu’il
était mort dans (une ile de) la Mer Caspienne.
Il est vraiment terrible que ceux (les pays)
comme le Khorasan et l’Irak sont devenus « une bête lâche » sans
défenseurs et sans sultan pour les protéger, tandis que l’ennemi
rôde dans le pays en prenant ou en laissant ce qu’il souhaite. De
toute manière, ils n’épargnèrent pas une seule ville et
détruisirent, incendièrent et ravagèrent tout ce qui tomba sous
leurs mains et ce qui n’était pas utile pour eux était brûlé. Ils
rassemblèrent des monts de soie puis y mirent le feu et firent la
même chose avec d’autres éléments.
Chapitre Sept
L’exhortation du pape
En l’an 619 de l’Hégire (1222), après sa
défaire en Egypte et l’échec de la cinquième croisade, le roi Jean
de Brienne se rendit en Italie au siège de la papauté et rencontra
le pape Honorius III (3) puis partit pour la France, l’Angleterre et
l’Espagne pour demander de l’aide à leurs rois catholiques et
l’urgence d’une nouvelle guerre sainte, convaincu que les Musulmans
étaient dans une période de faiblesse et qu’il avait failli gagner
la guerre.
Le pape quant à lui ne perdit pas de temps et
envoya des messagers aux rois d’Europe pour leur montrer la
nécessité de l’envoi d’une sixième croisade et particulièrement à
l’empereur d’Allemagne Frederik II à qui il promit de le marier avec
Yolande, la fille de Jean de Brienne, le roi de Bayt al-Madqis en
Palestine pour l’inciter à partir. Cependant, l’empereur allemand
était plus intelligent que le pape et au regard des échecs des
croisades précédentes, dont il avait fait l’expérience, il refusa
d’envoyer ses armées et de participer à la croisade mais donna son
accord pour le mariage qui eut lieu en Sicile.
Le pape Honorius III mourut au mois de Rabi’
Thani de l’année 625 de l’Hégire (1227) et fut succédé par Grégoire
IX (9) au trône de la papauté. Avant la mort d’Honorius III, l’émir
Fakhr ad-Din Youssouf Ibn Sheikh, l’envoyé du sultan d’Egypte
al-Kamil Muhammad arriva en Sicile pour assister au mariage de
Frederik alors qu’il était allié à son frère Ashraf Moussa contre
leur autre frère al-Malik al-Mou’addam ‘Issa, le gouverneur de Damas
qui était lui-même allié à Jalal ad-Din Ibn Khawarizm Shah connut
aussi sous le nom de Jalal ad-Din Minkobarti qui fuyait les Mongols
après que ces derniers aient ruiné le Khwarezm. C’est pourquoi le
sultan al-Malik al-Kamil Muhammad Ibn Abi Bakr al-‘Adil Ibn Ayyoub
Ibn Shadi demanda à l’empereur Frederik II d’Allemagne de l’aider à
combattre ses ennemis (ses frères) en échange de toutes les terres
libérées par Salah ad-Din al-Ayyoubi lors des guerres de
son grand Jihad y comprit Bayt al-Maqdis, le troisième Haram
de l’Islam.
Nous voyons comment donc cet homme s’humilia et
se rabaissa pour conserver son trône en offrant gratuitement aux
ennemis d’Allah ce que les respectables Compagnons (qu’Allah soit
satisfait d’eux) du Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah
sur lui) conquirent avec leur vies et combien les mécréants aiment
ce genre de mauviette.
L’empereur allemand lui envoya donc ses navires
en Egypte avec des cadeaux pour le protéger et il fit de même en
échange et lors de son retour en Allemagne, l’envoyé de l’empereur
décida de s’arrêter en Sicile après avoir envoyé un messager à
al-Malik al-Mou’addam ‘Issa à Damas à qui il demanda de remettre
Bayt al-Maqdis à l’empereur.
Al-Malik al-Mou’addam ‘Issa lui répondit
alors : « Va dire à ton empereur de s’adresser à Kamil car pour ma
part vous n’aurez que le sabre. » Cette réponse était sans aucun
doute excellente de la part du sultan kurde !
Le début de la sixième croisade
Frederik II devint alors sujet à l’acharnement
du pape contre lui et par un édit papal issu au mois de Shawwal de
l’année 624 de l’Hégire (1226) et vous savez maintenant combien ces
édits étaient terrifiants (rahiba) et destructeurs (moudammirah)
pour leur destinataire, il fut excommunié pour ne pas avoir voulu
participer à la nouvelle croisade. Frederik II fut alors abandonné
par tous ses partisans et n’eut d’autre choix que de lever sa propre
petite croisade et débarqua avec ses armées à Acre au mois de Rajab
de l’année 625 de l’Hégire (1227) pour trouver que son épouse
Yolande était morte deux mois auparavant après lui avoir donné un
successeur nommé Conrad dont le père de l’empereur se chargea de sa
tutelle.
Le sultan al-Malik al-Mou’addam ‘Issa, le
gouverneur de Damas, décéda au mois de Dzoul Qi’dah de l’année 624
de l’Hégire (1226) et son fils an-Nassir Daoud lui succéda et au
mois de Shawwal de l’année 625 de l’Hégire (1227), al-Malik al-Kamil
Muhammad arriva avec ses armées pour combattre le fils de son frère
qui avait refusé de lui donner le fort de Shawbak en Jordanie
actuelle et qui n’était qu’un prétexte pour s’approprier le royaume
du fils de son frère.
Al-Kamil réussit à lui enlever Bayt al-Maqdis,
Nablous (Naplouse) quand arriva son frère et allié al-Malik
al-Ashraf avec son armée et ensemble ils entrèrent à Damas et se
saisirent du Royaume d’an-Nassir Daoud Ibn al-Malik al-Mou’addam
‘Issa et lui reléguèrent un infime domaine.
La
remise de Jérusalem aux croisés par al-Malik al-Kamil
Au mois de Rabi’ Awwal de l’année 626 de
l’Hégire (1228) fut signé un traité de paix entre l’empereur
allemand du saint imperium romain et le sultan d’Egypte al-Malik
al-Kamil qui comprenait plusieurs clauses dont trois essentielles :
- Une validité de dix années,
- La remise de Bayt al-Maqdis aux croisés et le
laisser en l’état des fortifications de la ville qui avaient été
détruites par al-Malik al-Mou’addam ‘Issa et,
- La mosquée d’al-Aqsa et d’as-Sakhra laissée
aux soins des Musulmans.
L’empereur s’engagea aussi à fournir toute
l’aide nécessaire à al-Kamil contre tous ses ennemis musulmans ou
chrétiens.
Quelle différence entre al-Malik al-Mou’addam
‘Issa qui voulut donner une leçon aux croisés lors de la cinquième
croisade et sa réponse à l’empereur et al-Kamil dont le plan était
d’offrir gratuitement aux mécréants ce qu’ils étaient venu
chercher !
Lorsqu’al-Qouds fut remise à Frederick II
l’ennemi du pape Grégoire IX, cet empereur se comporta avec les
Musulmans d’une manière stupéfiante qui laissa pantois à l’heure où
la rage et la haine des croisés envers les Musulmans étaient à leurs
points culminants. Le chercheur et docteur Sa’id ‘Abdel-Fatah
‘Ashour, chef du département de recherche historique de l’Université
du Caire et spécialisé dans l’étude des croisades, auteur du
Tarikh al-‘Oussour al-Wasta, considéré comme une référence
primordiale et incontournable sur les croisades, a beaucoup écrit
sur la personnalité de Frederik II, né en Sicile ou il grandit et
fut éduqué et au contact des civilisations islamiques et byzantines,
il apprit et parlait couremment six langues dont la langue arabe. Il
était éprit de poésie y compris celle des Arabes mais aussi de la
philosophie, des mathématiques de la géographie et de la médecine.
Il fut d’ailleurs surnommé par les historiens « l’émerveillé du
monde (ourjoubat dounia) »
L’historien musulman al-‘Ayni décédé en l’an
855 de l’Hégire (1451) a rapporté dans son livre ‘Aqd
az-Zaman fit-Tarikh ahl az-Zaman que Frederik II était un athée
qui se moquait de la Chrétienté.
De même, lorsque Frederik se trouvait à ‘Akka,
il demanda à l’émir Fakhr ad-Din Youssouf Ibn Sheikh, l’envoyé
d’al-Malik al-Kamil, de lui dire ce qu’était le califat. Je vous
rappelle qu’à tort, les Chrétiens considèrent le calife comme le
pape chrétien, le représentant de Dieu sur la terre ce qui est bien
évidemment faux comment un calife pourrait-il pardonner les péchés
de ses citoyens et leur promettre le Paradis quand lui-même ne sait
pas s’il lui sera pardonné ! Et Fakhr ad-Din expliqua à l’empereur
allemand ce qu’était le calife et le califat et ce dernier lui dit
alors : « Oui, c’est la position saine contrairement à celle du pape
antéchrist qui n’a absolument rien à voir avec le Massih et malgré
cela, il a tous les droits sur les chrétiens ![1] »
Ce fut donc la sixième croisade, une étrange
croisade, qui vit la perte de tous les territoires acquis par Salah
ad-Din sans qu’une seule guerre ne soit livrée au profit d’un homme
athée excommunié et non pas un croisé enragé et haineux ! Et
louanges à Allah Exalté qui fait ce qu’Il veut ! Les croisés
auraient-ils unis tous leurs efforts qu’ils ne seraient pas arrivés
à ce résultat inespéré puisque c’est al-Malik al-Kamil qui partit en
Sicile demander de l’aide à l’empereur allemand et lui offrit les
terres d’Islam et il y a là une claire leçon pour les gens doués
d’intelligence.
L’empereur Frederik pacifiquement victorieux
s’embarqua à Acre pour retourner dans son pays au mois de Joumadah
Thani de cette même année tandis que l’armée musulmane humiliée
d’al-Malik al-Kamil rentra en Egypte et Gloire à Allah qui élève et
humilie qui Il veut d’autant plus qu’à cette époque une terrible
menace pesait sur les Musulmans et il est évident qu’un tel homme et
qu’une telle armée n’aurait jamais pu y faire face.
La fuite de Jalal ad-Din Minkobarti Ibn Khawarizm Shah
Après l’assaut des hordes sans fin, comparable
aux destructives hordes de Gog et Magog, de Shinjiz Khan sur le
Khwarezm et sa destruction, après la fuite de Khawarizm Shah puis de
son fils Jalal ad-Din Minkobarti Ibn Khawarizm Shah, ce dernier sous
la pression des Mongols (ou les Tatars), attaqua à son tour les
terres musulmanes qui n’avaient pas été touchées par les Mongols.
C’est aussi le moment que choisirent les Seljouks Roum d’Asie
Mineure et leur sultan de Konya ‘Ala ad-Din Kaykoubad Awwal (I) pour
attaquer aussi les terres musulmanes.
Jalal ad-Din Minkobarti Ibn Khawarizm Shah
s’attaqua aussi au territoire musulman d’al-Jazirah et assiégea la
grande ville d’Akhlat du royaume de Moussa Ashraf ‘Adil durant six
mois avant d’y entrer au mois de Joumadah Thani de l’an 627 de
l’Hégire (1229) ou il passa tous les habitants sous le fil du sabre
après le viol des musulmanes.
Cette sauvagerie poussa les Seljouks sous le
commandement de ‘Ala ad-Din Kaykoubad et les Ayyoubi d’Ashraf Moussa
Ibn ‘Adil à s’allier pour faire face à la menace et leur armée se
dirigèrent vers Akhlat ou ils écrasèrent l’armée de Khwarizm lors
d’une terrible bataille près d’Arzanjan au mois de Shawwal de cette
même année. Jalal ad-Din Minkobarti Ibn Khawarizm Shah s’enfuit en
Azerbaïdjan ou il fut tué par un paysan kurde près de Mayafariqin
qui ne le connaissait même pas, châtiment d’Allah Exalté pour ses
vils crimes en plus qu’il fut responsable de l’attaque des Mongols
des territoires musulmans comme nous l’avons vu dans le premier
volume.
Lorsque Jalal ad-Din Minkobarti fut tué en l’an
628 de l’Hégire (1230), un conflit s’éleva entre les Ayyoubi et les
Seljouks parce que ces derniers voulurent ajouter ses terres à leur
dominion dont les villes d’Akhlat, Rouha et Harran mais le sultan
d’Egypte al-Kamil Muhammad se leva contre ‘Ala ad-Din Kaykoubad et
envoya des messagers aux Ayyoubi pour leur demander de lever une
armée contre les Seljouks, incapable qu’il était lui-même.
Les Ayyoubi marchèrent donc contre les Seljouks
en Anatolie actuelle mais l’armée se dispersa en cours de route du
fait de la division de ses commandants qui craignaient leur retour
en cas de défaite !
Il est évident qu’une armée qui part avec cette
état d’esprit est défaite avant même de combattre remarque quand le
dirigeant est lui-même un traitre, il est difficile pour son armée
d’être mieux que lui. Ainsi les Seljouks mirent la main sur une
partie du royaume des Ayyoubi.
Ainsi, on ne peut pas dire que les Musulmans
étaient unis à cette époque et encore moins les Ayyoubi et
lorsqu’une dynastie dépérit, elle doit être remplacée. Au mois de
Mouharram de l’année 635 de l’Hégire (1237), le gouverneur de Damas
al-Malik al-Ashraf mourut et la succession revint à son frère
as-Salih Isma’il Ibn Abi Bakr al-‘Adil Ibn Ayyoub Ibn Shadi qui
poursuivit la politique d’animosité d’al-Ashraf envers son frère
al-Kamil Muhammad qui quitta l’Egypte avec son armée et assiégea
Damas ou il entra et chassa as-Salih Isma’il à qui il offrit tout de
même un infime dominion avant de mourir au mois de Rajab 635 de
l’Hégire dans cette même ville et il fut porté allégeance à son
petit-fils Abi Bakr al-‘Adil qu’il avait laissé comme son lieutenant
en Egypte avant son départ.
Ce jeune sultan se retrouva donc gouverneur
d’Egypte et de Syrie et son frère Najm ad-Din Ayyoub Ibn Kamil, qui
était son ainé, gouverneur d’al-Jazirah, la presqu’île de l’Euphrate
mais les affaires ne pouvaient qu’aller de mal en pire et Salih
Ayyoub attaqua la Syrie et prit Damas au mois de Joumadah Thani de
l’année 636 de l’Hégire et le royaume Ayyoubi se retrouva divisé en
deux, une partie gouverné par Salih Ayyoub et l’autre par Abi Bakr.
Salih Isma’il Ibn al-‘Adil Abi Bakr Awwal (I)
le gouverneur de Ba’labek réussit au mois de Safar de l’année 637 de
l’Hégire (1239) à reprendre Damas qui était gouvernée avant sa mort
par son frère Ashraf Moussa qui chassa al-Kamil. Salih Isma’il Ibn
al-‘Adil Abi Bakr chassa Salih Najm ad-Din Ayyoub le fils de son
frère al-Kamil et avec son expulsion de Damas, la plupart des
soldats le quittèrent et Salih Isma’il resta seuls avec son épouse
Shajarah ad-Dour, la mère de son fils Khalil, et quelques Mamalik de
Khwarizm.
Al-Malik an-Nassir Daoud ‘Issa al-Mou’addam, le
gouverneur du fort de Shawbak profita de l’occasion pour capturer
Salih Ayyoub et l’emmena humilié et déchu monté sur une jument sans
selle avec sa suite dans la forteresse de Karak et l’emprisonna pour
une durée de sept mois quand le sultan d’Egypte al-‘Adil Thani (II)
lui envoya un messager pour lui demander de le libérer pour la somme
de 1 000 dinars mais il refusa et le libéra sans contrepartie en lui
faisant simplement promettre de retirer l’Egypte à ‘Adil II.
Lorsque ‘Adil fut informé de ce complot, il
leva l’armée égyptienne pour aller combattre Salih Isma’il en Syrie
mais les principaux commandants de son armée se retournèrent contre
lui, le capturèrent et l’envoyèrent à Salih Najm ad-Din Ayyoub qui
partit aussitôt pour l’Egypte et entra dans la capitale égyptienne
au mois de Dzoul Qi’dah de cette même année. Ainsi Salih Najm ad-Din
Ayyoub devint sultan d’Egypte et entra en conflit avec les sultans
Ayyoubi de Syrie et particulièrement avec son oncle Salih Isma’il,
le gouverneur de Damas.
Reprise de la chronologie d’Ibn Athir
De la
conquête de Maraghah par les Tatars
Au mois de Safar de l’année 618 de l’Hégire
(1221), les Tatars conquirent Maraghah en Azerbaïdjan et cela arriva
comme suit.
Nous avons mentionné sous l’année 617 de
l’Hégire (1220) ce que les Tatars firent aux Géorgiens. L’année prit
fin alors qu’ils se trouvaient encore dans les terres des Géorgiens
mais quand l’année 618 commença, ils quittèrent le territoire
géorgien car ils virent qu’ils étaient confrontés à une puissante
force et que les passages étroits (des cols de montagnes) devaient
être combattus et pris (pour qu’ils puissent passer). Ils se
détournèrent donc de leur objectif ce qui était leur pratique
normale. S’ils attaquaient une ville et voyaient qu’elle était
fortement défendue, ils l’abandonnaient.
Ils se rendirent donc à Tabriz et leur maître
leur acheta avec de l’argent, des vêtements et des chevaux puis, ils
marchèrent sur la ville de Maraghah qu’ils mirent sous siège. La
ville n’avait pas de souverain qui pourrait la défendre parce que le
dirigeant était une femme qui résidait dans le château de Rouyindiz.
Le Prophète (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) a dit : « Aucun
peuple qui nomme une femme pour régner sur eux ne prospérera. »
Quand ils assiégèrent la ville, les habitants
résistèrent et ils érigèrent donc des trébuchets pour l’attaquer et
lancer des assauts. Ils avaient l’habitude, quand ils attaquaient
une ville, d’envoyer les prisonniers musulmans sur la ligne de front
devant eux pour attaquer et combattre. Si les prisonniers
reculaient, ils étaient tués et malheureux comme ils étaient, ils
furent utilisés pour lutter contre leur gré et comme dit le dicton :
« Si le cheval alezan avance, il sera abattu et s’il reste en
arrière, son jarret sera tranché. » Les Tatars se battaient donc
derrière les Musulmans qui leur servaient de bouclier et qui
supportaient les pertes tandis qu’eux-mêmes restaient en sécurité.
Ils maintinrent le siège durant quelques jours
et finalement prirent la ville par la force des armes le 4 de mois
de Safar de cette année. Ils passèrent tous les habitants par
l’épée, tuèrent plus qu’il n’était possible de compter, pillèrent
tout ce qui était utile pour eux et tout ce qui ne le fut pas fut
brûlé. Certaines personnes se cachèrent alors ils amenèrent leurs
prisonniers et leur dirent : « Lancez des appels que les Tatars ont
quitté la ville dans les quartiers. » Quand ils le firent, ceux qui
s’étaient cachés sortirent, furent saisis et mis à mort.
On m’a dit qu’une femme tatare entra dans une
maison et tua plusieurs de ses habitants qui pensèrent qu’elle était
un homme. Elle déposa alors ses armes et son armure et
c’était une femme. Un homme qu’elle avait fait prisonnier se
leva alors et la tua.
J’ai aussi entendu parler de quelqu’un qui
vécut là, qu’un Tatar entra dans un quartier qui contenait une
centaine d’hommes. Il continua à les tuer un par un jusqu’à ce qu’il
les élimine tous et personne ne leva un doigt pour essayer de lui
faire du mal. Les gens étaient totalement subjugués et ne pouvaient
pas se défendre même au plus infime degré. Nous cherchons refuge
auprès d’Allah contre un tel avilissement.
Ils partirent alors dans la direction d’Irbil.
Ces nouvelles nous atteignirent à Mossoul et nous devinrent
craintifs de sorte que certaines personnes prévirent de devenir des
réfugiés (quitter leur ville) par crainte de la violence. Des
lettres de Mouzaffar ad-Din le seigneur d’Irbil parvinrent à Badr
ad-Din le gouverneur de Mossoul, demandant des renforts de troupes.
Il lui envoya dûment un détachement considérable de son armée et
prévu de passer la frontière de ses terres en direction des Tatars
pour garder les passages et arrêter tous ceux qui passeraient à
travers eux. Ces régions étaient toutes des montagnes escarpées et
étroites qui ne pouvaient être empruntée que par des cavaliers, les
uns derrière les autres ainsi, il pourrait les empêcher
de de passer.
Les lettres et les envoyés du calife arrivèrent
à Mossoul et à Mouzaffar ad-Din ordonnant à tous de se réunir avec
leurs troupes dans la ville de Daqouqah pour résister aux Tatars car
il y avait l’éventualité qu’ils pourraient se détourner des
montagnes d’Irbil en raison de leurs obstacles dans cette région et
pénétrer ainsi en Irak.
Mouzaffar ad-Din quitta Irbil au mois de Safar
et il fut rejoint par un détachement de l’armée de Mossoul suivie
par de nombreux volontaires civils.
Le calife envoya également un messager à
al-Ashraf, lui ordonnant de se présenter en personne avec ses
troupes afin que tous puissent s’unir et marcher pour combattre les
Tatars. Il arriva qu’al-Mou’azzam Ibn al-‘Adil arriva de Damas chez
son frère al-Ashraf, qui était à Harran pour lui demander son aide
contre les croisés en Egypte. Il lui demanda de venir en personne
afin qu’ils puissent ensemble marcher sur l’Egypte pour récupérer
Damiette des croisés. Al-Ashraf fit ses excuses au calife, plaidant
la situation de son frère, la force des croisés et que s’il ne
prenait pas de mesures pour y faire face, Damiette et d’autres
endroits seraient perdus. Il entreprit donc des préparatifs pour
marcher de Syrie pour entrer en Egypte. Et la reprise de Damiette
fut la suite que nous avons déjà rapportée.
Quand Mouzaffar ad-Din et les troupes se
rassemblèrent à Daqouqah, le calife leur envoya
son Mamelouk Qashtimour, l’émir principal d’Irak, accompagné
par d’autres émirs, à la tête d’environ 800 cavaliers. Ils se
réunirent là pour permettre au reste de l’armée du calife de faire
la jonction avec eux.
Mouzaffar ad-Din rapporta ce qui suit : «
Lorsque le calife m’envoya pour m’occuper de la lutte contre les
Tatars, je lui dis : « L’ennemi est puissant et je n’ai pas de
troupes suffisantes pour leur faire face. Si j’étais rejoint par
10.000 cavaliers, je pourrais récupérer les terres qu’ils ont
prises. » Il m’ordonna de partir et me promit que les troupes
arriveraient. Quand je fus sur le point de marcher, seul un nombre
inférieur à 800 Tawashis (eunuques complètement et lourdement
équipés) s’étaient présentés à moi. Je restais donc pour ne pas me
mettre en péril ainsi que les Musulmans ».
Lorsque les Tatars entendirent que les troupes
s’étaient rassemblées pour les rencontrer, ils se retirèrent en
pensant que l’armée allait les suivre mais quand ils virent que
personne ne s’était lancé à leur poursuite, ils s’arrêtèrent là où
ils étaient. La force musulmane resta à Daqouqah et, quand ils
virent que l’ennemi ne bougeait pas contre eux et qu’ils ne
recevaient pas de renforts, ils se dispersèrent et retournèrent dans
leurs propres terres.
Comment les
Tatars prirent Hamadan et massacrèrent les habitants
Lorsque la force musulmane se dispersa, les
Tatars retournèrent à Hamadan et campèrent à proximité. Il y avait
dans la ville un préfet qui gouvernait et à qui ils envoyèrent un
messager pour lui demander de l’argent et des vêtements car ils
avaient épuisés leurs ressources depuis longtemps. Le chef de
Hamadan était un Sharif Alid, un membre d’une famille qui tenait la
position de chef de cette ville depuis longtemps. Il gérait les
affaires des citoyens concernant les Tatars et leur envoya l’argent
qu’il avait recueilli (puisque les Tatars étaient déjà venus dans la
ville comme nous l’avons rapporté précédemment). Quand ces derniers
demandèrent de nouveau de l’argent, les habitants de Hamadan ne
trouvèrent rien à leur apporter. Les gens vinrent trouver le
gouverneur de la ville au côté de qui se trouvait un juriste qui
avait entrepris d’une manière louable d’unir les gens contre les
mécréants. Les gens leur dirent donc : « Ces mécréants ont consommé
nos ressources. Nous n’avons plus rien à leur donner. Nous avons été
ruinés quand ils prirent nos biens et par le traitement honteux de
leur député à notre égard. »
Les Tatars avaient nommé un préfet dans Hamadan
pour gouverner la population de la manière qu’il voulait. Le Sharif
déclara : « Si nous sommes impuissants contre eux, que devrions-nous
faire ? Nous pouvons seulement les acheter avec de l’argent. » Ils
dirent alors : « Tu es plus dur envers nous que les mécréants » et
ils l’injurièrent. « Je suis l’un de vous, » reprit-il, « faite ce
que vous voulez. » Le juriste suggéra alors d’expulser le préfet des
Tatars, de se fortifier dans la ville et de lutter. Là-dessus, les
habitants attaquèrent et tuèrent le préfet puis se préparèrent à
résister dans la ville. Les Tatars arrivèrent et mirent la ville en
état de siège.
Les provisions étaient difficiles à trouver
dans toutes ces régions en raison de la ruine qui s’était abattue
sur elles, des massacres des habitants et de la fuite des
survivants. Seule une petite quantité pouvait être trouvée
individuellement tandis que d’un autre côté, les Tatars n’étaient
pas incommodées par le manque de denrées alimentaires car ils ne
mangeaient que la chair de leurs montures et ces dernières ne
mangeaient que des plantes et creusaient le sol avec leurs sabots
pour déterrer les racines des plantes dont elles se nourrissent.
Quand ils assiégèrent Hamadan, les habitants
luttèrent âprement contre eux avec à leur tête le gouverneur et le
juriste. Un grand nombre des Tatars furent tués. Le juriste reçut
plusieurs blessures avant que les deux côtés ne se séparent. Le
lendemain, les gens firent une sortie et se battirent plus
farouchement que lors de la première rencontre. En outre, plus de
Tatars furent tués que le premier jour et le juriste fut de nouveau
blessé plusieurs fois mais il resta résolu. Le troisième jour, ils
voulurent sortir de nouveau pour se battre, mais le juriste fut
incapable de monter à cheval. Les gens cherchèrent le Sharif Alid
mais ils ne purent le trouver car lui et sa famille avait fui par un
tunnel qu’il avait creusé et qui menait à l’extérieur de la ville
vers un fort sur une colline dans lequel il se réfugia. Quand les
gens constatèrent sa disparition, ils se sentirent abandonné et ne
surent pas quoi faire sauf qu’ils étaient convaincus qu’il devait se
battre jusqu’à la mort. Ils restèrent dans la ville et ne firent pas
de sortie.
Les Tatars avaient décidé de lever le siège en
raison de leurs lourdes pertes mais quand ils virent que personne ne
sortit de la ville pour les engager, leur avidité l’emporta et ils
déduisirent que la population s’était affaiblie. Ils poursuivirent
leurs attaques durant le mois de Rajab de l’année 618 de l’Hégire
(1221) et entrèrent dans la ville par la force des armes ou ils
combattirent les gens dans les différents quartiers. Les lourdes
armes étaient inutiles à cause de la foule dense et ils se battirent
à coups de couteau. Un très grand nombre fut tué des deux côtés que
seul Allah Tout Puissant connait. Les Tatars écrasèrent les
Musulmans et les anéantirent. Les seuls survivants furent ceux qui
se réfugièrent pour se cacher dans une cave
qu’ils avaient fait tandis que le massacre des Musulmans se
poursuivit pendant plusieurs jours. Ensuite, les Tatars mirent le
feu à la ville qui s’embrasa et ils partirent vers la ville
d’Ardabil.
La raison de la prise de Hamadan fut que
lorsque les habitants se plaignirent auprès du gouverneur Sharif de
leur traitement par les mécréants, il leur conseilla d’écrire au
calife pour lui demander de leur envoyer des troupes avec un émir
qui les unirait. Ils acceptèrent cela et écrivirent au calife et lui
firent part de leur peur, de leur humiliation, de la honte et de
l’ignominie que l’ennemi leur faisait subir et lui demandèrent de
l’aide, environ mille cavaliers dirigé par un émir avec lesquels ils
pouvaient se battre et derrière lesquels ils pourraient se rallier.
Quand les messagers partirent avec les lettres, quelqu’un qui savait
ce qui se passait, informa les Tatars. Ils les interceptèrent, les
saisirent et leur prirent les lettres. Ils envoyèrent ensuite un
messager au gouverneur pour lui reprocher la situation mais il nia
tout cela alors, ils lui envoyèrent ses lettres et celles des autres
et cela les découragea totalement. Puis, les Tatars arrivèrent et
les engagèrent dans la bataille qui aboutit à ce que nous avons déjà
décrit.
De la
marche des Tatars vers l’Azerbaïdjan et leur conquête d’Ardabil et
ailleurs
Lorsque les Tatars finirent avec Hamadan, ils
procédèrent vers l’Azerbaïdjan et arrivèrent à Ardabil qu’ils
conquirent avec un très grand massacre, ruinant la plupart de la
ville. De là, ils allèrent à Tabriz où l’affaire fut prise en main
par Shams ad-Din at-Toughra’i qui rassembla sa population après que
la ville fut abandonnée par son souverain Ouzbak Ibn Bahlawan, un
émir incapable qui était noyé dans la consommation, nuit et jour, de
boisson enivrante et qui
n’apparaissait en public qu’une fois ou deux par mois et qui à
chaque fois qu’il entendait une nouvelle alarmante, prenait la fuite
paniqué. Il possédait tout l’Azerbaïdjan et Arran, alors qu’il était
le moins capable de toutes les créatures d’Allah pour défendre les
terres dont il avait la charge.
Quand il apprit que les Tatars avaient quitté
Hamadan, il abandonna Tabriz pour Nakhitchevan et envoya sa famille
et ses femmes à Khoy pour les éloignées des Tatars. At-Toughra’i
prit en charge des affaires de la ville, créa un esprit d’unité,
encouragea les gens à résister et les mit en garde contre le
résultat du défaitisme et de lenteur à agir. Il fortifia la ville à
la mesure de sa capacité et de sa puissance. Lorsque les Tatars
s’approchèrent, ils furent informé de la volonté unies des habitants
de lutter contre eux, qu’ils avaient fortifié la ville, réparé les
murs et les douves. Ils envoyèrent donc un messager pour demander de
l’argent et des vêtements. Un arrangement fut conclu entre eux sur
un montant fixe qui leur fut envoyé et lorsqu’ils l’eurent reçu, ils
partirent pour Saraf qu’ils ravagèrent après avoir tué toutes les
créatures vivantes dans la ville.
De là, ils se rendirent à Baylaqan, une région
des terres d’Arran en saccageant toutes les villes et tous les
villages qu’ils traversèrent. Ils causèrent la dévastation et
tuèrent tous les habitants sur qui ils mirent la main. Quand ils
atteignirent Baylaqan, ils assiégèrent la ville. Les habitants leur
demandèrent d’envoyer un émissaire avec qui ils pourraient régler
les conditions de paix
mais quand ils envoyèrent un de leurs chefs comme émissaire, ils le
tuèrent de sorte que les Tatars assaillirent la ville qu’ils prirent
par la force des armes durant le mois de Ramadan de l’année 618 de
l’Hégire (1221). Ils passèrent tous les habitants par l’épée et
n’épargnèrent ni jeune, ni vieux et ni femelle. Ils éventrèrent le
ventre des femmes enceintes et tuèrent même les fœtus. Ils violèrent
également les femmes avant de les tuer. L’un d’eux serait entré dans
un quartier contenant un certain nombre de gens et les aurait tué un
par un jusqu’au dernier d’entre eux sans qu’un seul n’aurait osé
lever le plus petit doigt contre lui.
Quand ils eurent fini avec la ville, ils
saccagèrent et ravagèrent complètement tout le voisinage. Puis ils
se rendirent à Ganja, la ville principale d’Arran dont il avait été
informé de la large population, de leur bravoure résultant de leurs
guerres fréquentes contre les Géorgiens et de la puissance de sa
position. Ils ne firent donc aucun mouvement contre elle mais
envoyèrent un messager à ses habitants pour demander de l’argent et
des vêtements. Lorsque ce qu’ils demandèrent leur fut apporté, ils
s’en allèrent.
De
l’invasion des terres géorgiennes par les Tatars
Après avoir terminé avec les pays musulmans
d’Azerbaïdjan et d’Arran, en partie conquis et en partie soumis à
des conditions, ils marchèrent sur le territoire géorgien qui était
également dans ces régions. Les Géorgiens s’étaient préparé en
conséquence et avaient envoyé une large force à la frontière de leur
pays pour empêcher les Tatars d’y pénétrer. Les Tatars vinrent
contre eux et dans l’affrontement qui s’ensuivit, les Géorgiens ne
tinrent pas fermes mais tournèrent le dos et s’enfuirent. Ils
devinrent alors la proie des épées et seuls les quelques fugitifs
survécurent.
J’ai entendu dire qu’environ 30 000 d’entre eux
furent tués. Les Tatars ravagèrent et dévastèrent toutes les terres
dans lesquelles ils entrèrent comme cela était leur coutume. Lorsque
les fugitifs arrivèrent à Tiflis où se trouvait leur chef, ils
levèrent d’autres corps de soldats qu’ils envoyèrent aussi contre
les Tatars pour les empêcher de pénétrer dans le centre de leur
territoire. Cependant, ils virent que ces derniers étaient déjà
entrés dans le pays, ralentis par aucun obstacle que ce soit les
montagnes, les passes et les cols étroits et voyant de surcroit ce
qui était arrivé, ils se retirèrent en arrière à Tiflis et vidèrent
le pays de troupes. Les Tatars firent ce qu’ils voulurent,
pillèrent, massacrèrent et détruisirent. Néanmoins, quand ils virent
que le pays avait beaucoup de routes et de cols étroits, ils ne
prirent pas le risque de pénétrer plus profondément et se
retirèrent.
Une grande frayeur d’eux saisit alors les
Géorgiens, de sorte que j’entendis ce qui suit d’un des nobles
géorgiens qui était venu en tant qu’émissaire : « Si quelqu’un vous
dit que les Tatars ont été vaincus et fait prisonnier ne le croyez
pas mais, s’il vous dit qu’ils ont été tués, croyez-le car c’est un
peuple qui ne s’enfuit jamais. Nous avons déjà pris l’un d’entre eux
prisonnier mais il refusa de se laisser prendre et se jeta de sa
monture et se frappa la tête avec une pierre jusqu’à ce qu’il meure.
»
[1]
Voici ce qu’a rapporté le philosophe Nietzsche sur Frederik
II dans son livre
Der Antichrist
(1888) (traduit en français chez Gallimard sous le titre
l’Antéchrist) : « Le christianisme nous a frustrés de la
moisson de la culture antique, et, plus tard, il nous a
encore frustrés de celle de la culture islamique.
La merveilleuse civilisation maure d’Espagne, au fond plus
proche de nous, parlant plus à nos sens et à notre
goût que Rome et la Grèce, a été foulée aux pieds
(et je préfère ne pas penser par quels pieds!) – Pourquoi?
Parce qu’elle devait le jour à des instincts
aristocratiques, à des instincts virils, parce qu’elle
disait oui à la vie, avec en plus, les exquis
raffinements de la vie maure!… Les croisés combattirent plus
tard quelque chose devant quoi ils auraient mieux fait de se
prosterner dans la poussière [...] Voyons donc les choses
comme elles sont! Les croisades? Une piraterie de grande
envergure, et rien de plus! La noblesse allemande, au fond
une noblesse de Vikings, y était dans son élément: l’Eglise
ne savait que trop bien comment on tient la
noblesse allemande… [...] La noblesse allemande est à peu
près absente de l’histoire de la culture
supérieure: on en devine la cause… Le christianisme,
l’alcool – les deux grands moyens de corruption… En
soi, on ne devrait même pas avoir à choisir entre l’islam et
le christianisme, pas plus qu’entre un Arabe et un Juif. La
réponse est donnée d’avance: ici, nul ne peut choisir
librement. Soit on est un tchandala, soit on ne
l’est pas. « Guerre à outrance avec Rome! Paix et
amitié avec l’Islam. » C’est ce qu’a senti, c’est ce qu’a
fait ce grand esprit fort, le seul génie parmi les
empereurs allemands, Frédéric II [Hohenstauffen]. »