De la capture de Sinjar

 

Quand Salah ad-Din quitta Mossoul pour aller à Sinjar, Moujahid ad-Din y envoya une force pour la défendre et la renforcer. Salah ad-Din en fut informé, les empêcha d’approcher, leur infligea une défaite et prit leurs armes et chevaux.

Alors il arriva à Sinjar et l’assiégea. La ville était tenu par Sharaf ad-Din Amir Amiran Hindaw, le frère de ‘Izz ad-Din, le seigneur de Mossoul, avec une garnison. La ville fut assiégée de près et violemment assaillie. Un des émirs kurdes, un membre de la tribu Zarzariyah écrivit à Salah ad-Din et conspira avec lui en lui conseillant d’attaquer la section où il était posté pour qu’il puisse lui soumettre la ville. Quand Salah ad-Din vint le trouver dans nuit, il céda sa section qui conduisit à la chute de la barbacane mais rien de plus. Cependant, ayant entendu ces nouvelles, Sharaf ad-Din désespéré et découragé demanda des conditions qui furent accordés. Aurait-il résisté dans cette section, il aurait repoussé les forces de Salah ad-Din de force et s’il avait résisté dans la citadelle, il l’aurait surement tenue mais il était incompétent. Quand il demanda des conditions, Salah ad-Din accepta de les lui accorder. Il lui donna des garanties et prit la ville. Sharaf ad-Din et ses hommes partirent alors à Mossoul.

 

Avec la conquête de Sinjar, tout ce que Salah ad-Din avait pris fut sécurisé car il avait en tête que s’il partait, le souverain de Mossoul le récupérerait depuis qu’il ne possédait aucune forteresse autre qu’Edesse. Cependant, quand il prit Sinjar, elle devint comme une muraille pour protéger ses prises. Il y nomma alors comme député Sa’d ad-Din Ibn Mou’in ad-Din Ounour, un de ses émirs aînés et un des meilleurs d’entre eux en apparence et en substance.

 

Du retour de Salah ad-Din à Harran

 

Après avoir pris Sinjar et administré ses affaires, il alla à Nisibis où les habitants sortirent à sa rencontre pour se plaindre d’Abou al-Hayja’ as-Samin et pleurèrent sur sa tyrannie, regrettant le règne de ‘Izz ad-Din et sa justice vers eux. Quand cela fut porté à son attention Salah ad-Din, blâma le souverain tyrannique Abou al-Hayja’ qu’il démit de ses fonctions et l’emmena avec lui quand il alla à Harran ou il arriva dans la première partie du mois de Dzoul Qi’dah. Il dispersa aussi l’armée pour que ses soldats puissent prendre un peu de repos et resta avec une force limitée parmi son personnel et ses fidèles compagnons.

 

De la victoire sur les croisés dans la Mer Rouge

 

Cette année, le seigneur de Karak fit construire une flotte de vaisseaux qu’il compléta à Karak et il ne resta plus qu’à rassembler les différentes pièces ensembles. Il les transporta au Golfe d’Aylah et les assembla en un temps record. Lorsqu’il eut fini, il les chargea de combattants et les envoya en mer en deux groupes. L’un resta au fort d’Aylah pour assiéger les Musulmans qui le tenait et les empêcher d’avoir accès à l’eau. Les défenseurs subirent de grandes difficultés et beaucoup de détresse. Le deuxième groupe navigua vers ‘Aydab et causèrent beaucoup de préjudice le long de la côte qu’ils pillèrent et saisirent tous les navires musulmans qu’ils trouvèrent et les marchands à leurs bords. Ils surprirent les gens dans ces régions, en les prenant par surprises car ils n’avaient jamais rencontré de croisés, qu’Allah les maudisse, dans cette mer, ni en tant que commerçants ou soldats.

 

Al-Malik al-‘Adil Abou Bakr Ibn Ayyoub qui était le lieutenant de Salah ad-Din en Egypte construisit et dépêcha une flotte avec une grande armée de Musulmans sous le commandement de Houssam ad-Din Lou'lou', l’amiral de la flotte égyptienne qui était un homme brave et noble avec un grand nombre de victoires à son actif. Lou'lou' partit à leur poursuite toute voile dehors pour les rattraper. Il commença par ceux d’Aylah et fondit sur eux comme un aigle sur sa proie. Il les engagea, en tua certains et captura le reste. Puis immédiatement dans l’après-midi, il navigua pour suivre ceux qui avaient attaqué ‘Aydab mais il ne put les voir. Ils avaient attaqué tout ce qu’ils avaient trouvé et tué ceux qui avaient eu le malheur de se trouver sur leur route puis avaient navigué vers un autre port pour faire ce qu’ils avaient fait à ‘Aydab. Leur plan était d’entrer dans le Hijaz, La Mecque et Médine (puisse Allah Tout Puissant les protéger), saisir les pèlerins et empêcher de se rendre à Maison Sacrée puis de se rendre au Yémen.

 

Quand Lou'lou' arriva à ‘Aydab et ne les trouva pas là, il repartit sur leurs pistes, arriva à Rabigh puis la côte d’al-Hawra et d’autres endroits. Il les rattrapés alors sur la côte d’al-Hawra ou il tomba sur eux. Lorsqu’ils virent la mort en face et leur misérable situation, ils débarquèrent et se refugièrent dans un ravin. Lou'lou' débarqua à son tour et lutta violemment contre eux. Il prit les chevaux des bédouins de la place qu’il monta et engagea les croisés tant à cheval qu’à pied. Il les écrasa alors et tua la majorité de la vermine. Le reste fut pris le prisonnier et certains d’entre eux furent envoyés à Mina pour y être exécuté comme une punition exemplaire pour ceux qui tenteraient de provoquer la terreur dans le sanctuaire d’Allah et de Son Prophète (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui). Lou'lou' ramena alors le reste en Egypte où ils furent tous exécutés.

 

 

Au mois de Joumadah Awwal de cette année, ‘Izz ad-Din Farroukhshah, le neveu de Salah ad-Din décéda. Il était son lieutenant à Damas, un membre fiable de sa famille sur qui il dépendit plus que tous ses parents et émirs. Il était brave, généreux, érudit, instruit dans la littérature et d’autres affaires et l’auteur d’une excellente poésie parmi ce qui a été écrit par les princes. Sa maladie commença quand il quitta Damas pour attaquer les croisés. Son mal s’aggrava sur la route et il revint chez lui et mourut.

Les nouvelles de sa mort parvinrent à Salah ad-Din après qu’il eut traversé l’Euphrate pour les terres d’al-Jazirat et il envoya Shams ad-Din Muhammad Ibn al-Mouqaddam à Damas pour prendre le commandement des forces locales.

 

 

De la prise d’Amid et de sa remise au seigneur de Hisn Kayfa

 

Nous avons mentionné que Salah ad-Din campa à Harzam en-deçà de Mardin et n’ayant trouvé aucun moyen d’accomplir son but, quitta la place pour aller à Amid via al-Bari’iyah. Nour ad-Din Muhammad Ibn Qara Arsalan insistait constamment pour qu’il attaque Amid, la prenne et la lui assigne comme il avait été convenu entre eux. Il arriva donc à Amid le 17 du mois de Dzoul Hijjah de l’année 579 de l’Hégire (1183), établit son camp et s’apprêta à mettre le siège.

L’homme qui gouvernait la ville et exerçait l’autorité était Baha' ad-Din Ibn Nissan tandis que le souverain de la ville n’avait aucune autorité à ses côtés.

Quand Salah ad-Din imposa le siège Ibn Nissan ne prit pas de bonnes mesures. Il ne donna ni argent, ni provisions et ni nourritures aux habitants et leur dit : « Luttez pour vos vies, » à quoi un de ses hommes répondit : « L’ennemi n’est pas un mécréant pour qu’ils aient à combattre contre lui pour leurs vies, » et ils ne firent rien.

Salah ad-Din commença l’attaque, monta ses trébuchets et réalisa ensuite un assaut bien que la place soit extrêmement puissante et particulièrement défendable et que ses murailles étaient proverbiaux. Ibn Nissan resta pingre avec l’argent et son comportement était celui d’un homme sur qui la fortune avait tourné son dos et le pouvoir discrètement quitté. Quand les gens virent cela, ils ne déployèrent aucun effort et s’inclinèrent vers l’auto-préservation.

Le règne d’Ibn Nissan avait été assez long et pesé lourdement sur les gens à cause de son mauvais traitement à leurs égards, sa prise sur eux et qu’il rendit difficile l’acquisition de bien. Il était donc détesté et les gens voulaient mettre un terme à son règne.

Salah ad-Din ordonna que des messages soient attachés aux flèches et envoyés aux habitants leur promettant un traitement bon et généreux s’ils lui obéissaient et des menaces s’ils lui résistaient. Cela les rendit plus oisifs et découragés. Ils voulurent que Salah ad-Din règne et renoncèrent à lutter. Ses sapeurs atteignirent alors le mur et des mines furent creusées et sous lui. Quand la garnison et les habitants le réalisèrent, ils devinrent plus audacieux vers Ibn Nissan et extrêmes dans leurs demandes.

À ce moment, Ibn Nissan envoya sa famille à al-Qadi al-Fadil, le vizir de Salah ad-Din, en lui demandant de le protéger et de lui donner des garanties à lui, sa famille et ses biens et de lui donner trois jours de délai pour qu’il puisse transporter son argent et ses richesses qu’il avait dans la ville. Al-Fadil lui accorda ce service et Salah ad-Din donna son accord.

Ibn Nissan abandonna donc la ville pendant le premier tiers du mois de Mouharram, déplaça ses tentes à l’extérieur de la ville et voulut déplacer ses biens ce qu’il fut incapable de faire à cause de sa perte d’autorité sur ses hommes et leur refus d’obéir. Il en informa alors Salah ad-Din et lui demanda son assistance. Salah ad-Din lui fournit des bêtes de somme et des hommes pour la tâche et certaines de ses richesses furent emportées tandis que le reste fut pillé. Les trois jours s’écoulèrent avant qu’il ait eu le temps de tout sortir si bien que le reste lui fut dénié. Les tours de la ville étaient pleines de toutes les sortes de marchandises mais il les laissa intacts. Aurait-il distribué une partie aux habitants, ils auraient tenu la ville et tous ses biens. Cependant, quand Allah à Lui les Louanges et la Gloire, veut une chose, Il met en place les causes.

 

Quand Salah ad-Din reçut la ville, il l’a rendit à Nour ad-Din le seigneur de Hisn Kayfa mais avant qu’il ait fait ainsi, on lui dit : « Cette ville contient des marchandises d’une valeur de plus de 1 000 000 de dinars. Si tu les prenais et les distribuait à ton armée et tes partisans puis que tu lui remettais la ville dans l’état, il restera content et n’attend pas plus que cela. » Salah ad-Din refusa et répondit : « Je ne suis pas un homme qui donne les fondements et tergiverse sur les accessoires. »

Lorsque Nour ad-Din prit la ville, il donna un grand festin auquel il invita Salah ad-Din et ses émirs. Salah ad-Din n’était pas précédemment entré dans la ville et Nour ad-Din lui présenta ainsi qu’à ses hommes un grand nombre de cadeaux.

 

De la prise de Tall Khalid et de ‘Ayntab en Syrie

 

Quand il eut finit avec Amid, Salah ad-Din partit pour la Syrie et particulièrement Tall Khalid qui faisait partie du district d’Alep qu’il assiégea et bombarda avec ses trébuchets[1]. Les défenseurs descendirent et demandèrent des conditions qu’il leur accorda avant de recevoir la capitulation toujours durant ce même mois de Mouharram.

De là, il procéda à ‘Ayntab qu’il assiégea aussi tandis que la forteresse était tenu par Nassih ad-Din Muhammad, le frère du Sheikh Isma’il, qui était le trésorier de Nour ad-Din Mahmoud Ibn Zanki et son ami. Nour ad-Din la lui avait confiée et elle était restée dans ses mains jusqu’à présent.

Quand Salah ad-Din l’investit, il demanda à ce que l’autorité de la forteresse lui soit confirmée en échange de sa soumission. Salah ad-Din accepta et lui en fit le serment. Nassih ad-Din descendit donc et se mit à son service et cela toujours au mois de Mouharram de cette année.

 

Récit de deux batailles avec les croisés, l’une en mer et l’autre en Syrie

 

Le 10 du mois de Mouharram, la flotte musulmane leva l’ancre d’Egypte et rencontra un vaisseau transportant environ 300 croisés complètement armés avec de l’argent et des armes à destination du Levant. Les Musulmans les engagèrent et les deux côtés luttèrent obstinément jusqu’à ce ces derniers soient victorieux. Ayant pris les croisés prisonniers, ils en tuèrent certains et gardèrent les autres en captivité puis ils saisirent tout qui était avec eux et est revinrent Egypte sains et saufs.

 

De même cette année, une grande compagnie de croisés quitta la région de Daroum pour attaquer et piller l’Egypte.

Les musulmans furent informés et sortirent à leur rencontre par la route de Sadr et d’Aylah. Les croisés se retirèrent devant eux et campèrent près d’un point d’eau appelé al-’Oussaylah après être arrivés avant les Musulmans qui arrivèrent assoiffés et sur le point de mourir pour voir que les croisés avait occupé la source d’eau mais Allah à Lui les Louanges et la Puissance dans Sa clémence forma un grand nuage qui déversa sa pluie sur eux et étancha leur soif. C’était en plein été et la chaleur était intense et mortelle. Lorsqu’ils virent cela leur moral se renforca et ils furent convaincu qu’Allah Exalté leur accorderaient la victoire. Ils engagèrent alors les croisés et Allah leur accorda effectivement la victoire. Ils les tuèrent et seuls quelques fugitifs isolés s’enfuirent. Les Musulmans saisirent leurs armes et leurs chevaux et retournèrent triomphants par la grâce d’Allah Exalté.

 

 

 

De la prise d’Alep par Salah ad-Din

 

Cette année, de nouveau durant le mois de Mouharram, Salah ad-Din marcha de ‘Ayntab à Alep devant laquelle il campa dans l’Hippodrome Vert. Il y resta un certain nombre de jours et se rendit ensuite sur le mont Jawsham au sommet duquel il établit son camp et précisa qu’il avait l’intention de construire des habitations pour lui, ses compagnons et ses troupes. Il resta occupé un certain nombre de jours pour finir ces abris tandis que des affrontements avaient lieu quotidiennement entre les deux armées.

 

Le seigneur d’Alep, ‘Imad ad-Din Zanki Ibn Mawdoud Ibn Zanki, avait avec lui l’armée de Nour ad-Din, qui combattit sans réserve. Cependant, quand il vit les grands frais, il devint avare avec l’argent.

Un jour un de ses soldats vint chez lui et lui demanda quelque chose mais il fit l’excuse qu’il n’avait que peu d’argent. Un autre homme lui dit : « Quiconque espère tenir un endroit tel qu’Alep dépenserait son argent même s’il devait pour cela vendre les bijoux de ses femmes. »

C’est alors qu’il préféra la capitulation d’Alep capitulant en prenant quelque part dans l’échange. Il envoya donc un message avec l’émir Touman al-Yarouqi qui était en faveur de Salah ad-Din et dont les sympathies étaient avec lui, et ce sont les raisons pour lesquelles il l’envoya. Ils conclurent donc un arrangement à savoir que ‘Imad ad-Din abandonnerait Alep à Salah ad-Din et qu’en échange, il recevrait Sinjar, Nisibis, Khabour, Raqqah et Sarouj. Les serments furent jurés et ainsi il vendit la ville pour le plus misérable des prix. Il renonça à une ville forteresse comme Alep et reçut en échange quelques villages et des champs !

‘Imad ad-Din Zanki Ibn Mawdoud Ibn Zanki quitta donc la ville le 18 du mois de Safar et Salah ad-Din l’a repris. Chacun fut stupéfié et condamna ce qu’il avait fait. Effectivement, certains habitants d’Alep apportèrent un bac d’eau et le renversèrent sur lui en lui lançant à haute voix : « Tu es indigne de régner et juste bon à laver des vêtements » ainsi que d’autres insultes.

 

Avec ce gain de pouvoir de Salah ad-Din devint bien établi, et après avoir été vacillant, son pied devint fermement fixé par la capitulation de cette place bien qu’il ait été au bord d’un précipice. Quand Allah Exalté décide d’une chose, nul ne peut la détourner.

 

‘Imad ad-Din partit dans les villes que Salah ad-Din lui avait données pour le prix d’Alep et qu’il prit en charge tandis que Salah ad-Din prit Alep. Il fut convenu entre eux que ‘Imad ad-Din se présenterait en personne et avec son armée au service Salah ad-Din s’il était convoqué et qu’il ne devait faire aucune excuse. C’était un fait surprenant que Mouhyi ad-Din Ibn az-Zaki, le Qadi de Damas, loua Salah ad-Din avec une ode qui disait :

« Ta conquête d’Alep avec le sabre dans Safar

Est un bon augure pour la conquête de Jérusalem dans Rajab. »

Et la conquête de Jérusalem eut lieu effectivement au mois de Rajab de l’année 583 de l’Hégire, ce que nous rapporterons si Allah Exalté le veut.

 

Parmi ce qu’al-Qadi al-Fadil écrivit sur ce sujet de la part de Salah ad-Din est la chose suivante : «  Nous lui avons donné les endroits  untel et un tel pour Alep. C’est un échange en vérité ! Nous avons pris des dinars de lui et lui avons donné des dirhams. Nous avons renoncé aux villages et avons acquis des villes importantes. »

Il écrivit aussi : « Nous lui avons donné ce qui n’a pas quitté nos mains, » ce qui voulait dire que lorsque Salah ad-Din le voulait, il pourrait les reprendre à cause du manque de fortifications. 

 

Parmi ceux qui furent tués à Alep, il y eut Taj al-Moulouk Bouri, le plus jeune frère de Salah ad-Din.

Il était un brave soldat, noble et doux qui unit toutes les bonnes qualités et les traits admirables. Il reçut un coup d’estoc dans son genou, qui fut disloqué et qui provoqua sa mort après que la paix avait été faite entre ‘Imad ad-Din et Salah ad-Din sur la base de la capitulation d’Alep et avant que Salah ad-Din ne soit entré dans la ville.

Quand la paix avait été arrangée Salah ad-Din vint pour rendre visite à son frère et lui dit : « Bien, nous avons pris Alep et la ville est tienne. » Il répondit : « Ainsi elle a été (prise) de mon vivant. Par Allah, tu l’as prise pour un lourd prix en perdant un homme comme moi ». Salah ad-Din pleura et fit pleurer les autres.

 

Quand ‘Imad ad-Din vint trouver Salah ad-Din et un festin lui avait été préparé, Salah ad-Din y participa. Pendant que tous se réjouissaient, un homme vint et chuchota à Salah ad-Din que son frère était mort. Il ne trahit aucun choc ou chagrin, mais lui ordonna de se préparer pour un enterrement secret. ‘Imad ad-Din et ceux qui étaient avec lui ignorèrent tout de l’affaire. Il supporta sa tristesse seul afin que le plaisir des autres ne soit pas gâté et ce fut en vrai un exemple d’une grandiose endurance.

 

De la conquête de Harim par Salah ad-Din

 

Après la prise d’Alep, il y avait dans la citadelle de Harim, une des dépendances d’Alep, un certain Mamelouk de Nour ad-Din nommé Sarkhak qu’al-Malik as-Salih avait nommé gouverneur là. Il refusa de la remettre à Salah ad-Din qui lui avait écrit pour la lui remettre et lui avait dit : « Demande n’importe quel fief que tu souhaites. » Il lui fit les promesses équitables mais Sarkhak fit des demandes excessives. Des envoyés furent échangés mais Sarkhak contacta les croisés pour demander leur protection.

Les troupes qui étaient avec lui furent informées qu’il était en communication avec les croisés et craignirent qu’il leur abandonne la citadelle. Ils tombèrent donc sur lui, l’arrêtèrent et l’emprisonnèrent puis écrivirent à Salah ad-Din demandant sécurité et récompense ce qu’il accepta. Après qu’ils lui aient remit la forteresse, il y plaça un de ses proches émirs comme châtelain.

 

Quant aux forteresses restantes d’Alep, Salah ad-Din laissa ‘Ayntab dans les mains de son seigneur, comme nous l’avons mentionné auparavant et il assigna Tall Khalid à un émir appelé Dildirim al-Yarouqi, qui était le seigneur de Tall Bashir. La citadelle d’A’zaz avait été déjà démolie par ‘Imad ad-Din Ghazi. Salah ad-Din l’a donna comme un fief à un émir appelé ‘Alam ad-Din Souleyman Ibn Jandar qui l’a reconstruit.

Salah ad-Din resta dans Alep jusqu’à ce qu’il ait établit son organisation, ses affaires et son administration, assigna ses différents districts et envoya des messages et rassembla ses forces de toutes ses terres.

 

Du raid sur Bayssan

 

Quand Salah ad-Din eut fini avec Alep, il installa son fils, al-Malik az-Zahir Ghazi qui était un jeune et plaça à ses côtés l’émir Sayf ad-Din Yazkouj, l’émir aîné de l’Assadiyah. Puis il alla alors à Damas et fit des préparations pour un raid avec les forces de Syrie, d’al-Jazirat et de Diyar Bakr. Il marcha sur le territoire croisé et traversa le Jourdain au mois de Joumadah Thani pour constater que les habitants de ces régions les avaient déjà abandonnés par peur.

Il se rendit alors à Bayssan qu’il ravagea, détruisit et brûla entièrement. Pendant ce temps les croisés concentrèrent leurs forces et sortirent pour s’opposer à lui mais quand ils virent le grand nombre de ses troupes, ils ne l’engagèrent pas. Salah ad-Din resta en contact visuel avec eux après qu’ils aient pris position sur une colline proche et creusé des fossés défensifs.

Salah ad-Din les encercla puis les troupes musulmanes les harcelèrent avec des flèches et des accrochages. Cependant, ils ne quittèrent pas leurs lignes et restèrent ainsi durant cinq jours.

Les Musulmans se retirèrent le 17 Joumadah Thani espérant que les croisés les suivrait et qu’ils pourraient ainsi les attirer et accomplir quelque chose de décisif contre eux et réalisant cela, les croisés n’eurent d’autre ambition que la survie.

Les Musulmans attaquèrent ces régions dans toutes les directions et pénétrèrent des zones qu’ils n’auraient jamais espéré atteindre hormis à un risque extrême. Quand la quantité de butin qu’ils avaient collectée devint grande, ils jugèrent qu’il valait mieux revenir victorieusement dans leurs propres terres avec ce qu’ils avaient saisi. Ils revinrent donc avec l’espoir de conduire de nouveaux raids.

 

Du raid sur Karak et de la nomination d’al-‘Adil comme souverain d’Alep

 

Lorsque Salah ad-Din et les Musulmans revinrent du raid sur Bayssan, il fit des préparatifs pour attaquer Karak et se mit en route avec ses troupes. Il écrivit à son frère al-‘Adil Abou Bakr Ibn Ayyoub, qui était son député en Egypte, en lui ordonnant de marcher avec toutes ses forces à Karak. Al-’Adil avait écrit à Salah ad-Din pour lui demander la ville et la citadelle d’Alep. Cela avait été accepté et il lui avait ordonné de se mettre en route avec sa famille et ses trésors.

Salah ad-Din arriva à Karak pendant le mois de Rajab où il fut rejoint par son frère al-’Adil avec l’armée égyptienne. Son armée combinée était nombreuse et il imposa un blocus serré. Les Musulmans entrèrent dans la banlieue et en prirent le contrôle, en appuyant sur le siège de la forteresse depuis la banlieue et en ayant la main supérieure dans la bataille. Sept trébuchets furent déployés qui pilonnèrent la forteresse nuit et jour avec des pierres.

Salah ad-Din croyait que les croisés ne lui permettrait pas d’assiéger Karak, qu’ils exerceraient tous leurs efforts le pousser à se retirer et c’est la raison pour laquelle, il n’emmena pas un nombre suffisant de machines de siège pour une si grande et imprenable forteresse. Il se retira donc au dans le milieu du mois de Sha’ban.

 

Il envoya son neveu Taqi ad-Din en Egypte pour y être son député et pour prendre la position que son frère al-’Adil avait tenue. Salah ad-Din prit avec lui son frère al-‘Adil à Damas et lui donna la ville ainsi que la citadelle d’Alep avec ses districts et la ville de Manbij avec ses dépendances ou il l’envoya durant le mois de Ramadan et appela son fils az-Zahir à Damas.

 

 

Du raid de Salah ad-Din sur Karak

 

Au mois de Rabi’ Thani de l’année 580 de l’Hégire (1184), Salah ad-Din quitta Damas pour mener un raid.

Il convoqua ses troupes et ils vinrent le rejoindre toutes les directions et parmi eux se trouvait Nour ad-Din Muhammad Ibn Qara Arsalan, le seigneur de Hisn Kayfa. Salah ad-Din écrivit en Egypte pour convoquer ses troupes à Karak ou il descendit et assiégea en bloquant de près les défenseurs. Il ordonna de déployer des trébuchets pour attaquer la banlieue. Après une féroce lutte, les Musulmans prirent la banlieue mais la citadelle résista parce qu’elle se trouvait sur le plateau au sommet d’une seule colline et protégée par un grand fossé d’environ soixante coudées de profondeur (27.5m).

Salah ad-Din ordonna de le remplir de pierres et de terre mais personne ne fut capable de s’approcher à cause des volées intenses de flèches d’arbalètes et d’arcs ainsi que des pierres lancées par les trébuchets. Il ordonna donc la construction d’un bouclier en bois et en brique de boue sous lequel les hommes seraient capables de s’approcher du fossé sans être inquiétés par les flèches ou les pierres. Cela fut exécuté et ils commencèrent à avancer sous cette couverture et lancer des matières dans le fossé pour le remplir tandis que pendant tout ce temps, les catapultes musulmanes bombardaient la citadelle nuit et jour et le jour.

 

Les croisés assiégés demandèrent de l’aide à leur roi et chevaliers et les informèrent de leur état alarmant et leur incapacité de tenir la citadelle. Les croisés rassemblèrent jusqu’au dernier homme et marchèrent en toute hâte à leur secours. Quand Salah ad-Din fut informé de leur marche, il quitta Karak pour les intercepter et les combattre et revenir à Karak après qu’il les aurait vaincus. Lorsqu’il les vit, il établit son camp et prit position mais il fut incapable de les approcher à cause de l’impraticabilité du terrain et de la route difficile et étroite pour les atteindre. Il resta un jour à les attendre pour qu’ils quittent cette position pour qu’il puisse les attaquer mais ils ne bougèrent pas le plus petit doigt craignant pour leur sécurité.

Voyant cela, Salah ad-Din se retira à plusieurs centaines de mètres tout en laissant en face d’eux des hommes pour l’informer du moindre mouvement qu’ils feraient. Cependant, les croisés partirent pour Karak durant la nuit et quand Salah ad-Din l’apprit, il se rendit compte qu’il n’aurait pas la main supérieure à cette occasion ni n’atteindrais un but quelconque. Il procéda alors à Naplouse et pilla tout ce qui tomba sous sa main en route.

Lorsqu’il y arriva, il ravagea, détruisit et mit le feu à la ville, tuant et asservissant un très grand nombre de gens. Il se rendit alors à Sébastée, le site du tombeau de Zakariyyah (paix sur lui) où il y avait une église et un certain nombre de prisonniers musulmans qu’il libéra avant de procéder à Jenin, qu’il pilla et ruina puis retourna à Damas. Il ravagea et détruisit tout ce qui était sur sa route et dépêcha des escadrons à droite et à gauche pour ramasser du butin et dévaster jusqu’à ce qu’il parvienne à Damas.

 

 

Du siège de Mossoul par Salah ad-Din et de son départ à cause de la mort de Shah Arman

 

En l’an 581 de l’Hégire (1186), Salah ad-Din assiégea Mossoul pour la deuxième fois.

Il laissa Damas au mois de Dzoul Qi’dah de l’année précédente pour Alep ou il resta jusqu’à la fin de cette année qu’il quitta ensuite et traversa pour les terres d’al-Jazirah. Après être arrivé à Harran, il arrêta Mouzaffar ad-Din Koukbouri Ibn Zayn ad-Din, l’homme qui avait été derrière son acquisition des territoires mésopotamiens.

La raison de son arrestation est dû au fait que Mouzaffar ad-Din écrivait tout le temps à Salah ad-Din et lui conseillait d’attaquer Mossoul, en en soulignant les avantages et en renforçant son ambition. Finalement il lui offrit 50 000 dinars s’il viendrait. Cependant, quand Salah ad-Din vint à Harran, il ne remplit pas sa promesse mais l’a désavoua. Salah ad-Din l’arrêta donc et le mit sous garde mais il le libéra plus tard et lui restitua les deux villes de Harran et d’Edesse, qu’il lui avait pris. Il le libéra seulement parce qu’il craignit que les gens se retournent contre lui dans les terres de Mésopotamie puisqu’ils connaissaient tous le rôle de Mouzaffar ad-Din qui l’avait rendu souverain d’al-Jazirat. C’est donc pour cette raison qu’il le libéra.

 

Au mois de Rabi’ Awwal, Salah ad-Din quitta Harran et il fut rejoint par les troupes de Hisn Kayfa, de Dara et de Mou’iz ad-Din Sanjar Shah, le seigneur d’al-Jazirat Ibn ‘Omar, qui était le neveu de ‘Izz ad-Din, le seigneur de Mossoul qui abandonna son allégeance à son oncle après l’arrestation de Moujahid ad-Din et marchait maintenant avec Salah ad-Din sur Mossoul. Quand ils arrivèrent à Balad, l’Atabeg ‘Izz ad-Din envoya sa mère à Salah ad-Din avec la fille de son oncle Nour ad-Din Mahmoud Ibn Zanki, ainsi que d’autres de sa famille avec un certain nombre de notables de son état pour lui demander de faire la paix. Ils offrirent une alliance et le soutien de leurs troupes s’il se retirerait. Il envoya seulement des femmes parce qu’il et tout autour de lui croyait que, s’ils demandaient la Syrie, il leur accorderait leur demande, d’autant plus que la fille de son maître et patron, Nour ad-Din, était avec eux. Quand elles arrivèrent, il leur fourni des logements puis convoqua ses conseillers et leur demanda ce qu’il devrait faire et dire. La plupart d’entre eux avisèrent que l’on devrait leur accorder ce qu’elles voulaient mais le juriste ‘Issa et ‘Ali Ibn Ahmad al-Mashtoub, tous les deux des terres de Hakkari dans la province de Mossoul, dirent : « Ce qui est similaire à Mossoul n’est pas renoncé pour une femme et ‘Izz ad-Din les a simplement envoyé parce qu’il est trop faible pour tenir la ville. »

Ce qui était en ligne avec sa propre préférence et il congédia donc les dames en arrière déçues après avoir donné différentes excuses inacceptables. Ce n’était par faiblesse et relâchement qu’elles avaient été envoyée, mais plutôt parce que l’Atabeg voulait éviter le mal pour quelque chose de meilleur.

Lorsqu’elles furent retournées, Salah ad-Din marcha vers Mossoul, confiant qu’il prendrait la ville, mais les choses tournèrent tout à fait différemment. Lorsqu’il approcha, il campa à environ trois-cent mètres de la ville tandis que ses troupes s’étendirent dans la plaine jusqu’aux régions habitées de Maraqiyah.

Il y eut quelques escarmouches entre les deux armées à l’extérieur de la Porte d’al-‘Imadi et j’étais à cette époque à Mossoul. Les habitants offrirent leur aide, fâchés et courroucés du rejet de Salah ad-Din de la délégation des femmes.

Salah ad-Din rencontra une réception inattendue et fut plein de regrets mais le regret était inutile depuis qu’il avait renvoyé les femmes et perdit ainsi sa bonne réputation et la chance de contrôler la ville. Il blâma alors ceux qui lui avaient avisé de repousser les femmes.

Il reçut alors des lettres d’al-Qadi al-Fadil et d’autres qui n’avait aucun désir pour Mossoul et qui désapprouvèrent ce qu’il avait fait et le considérèrent comme fautif.

De même, pendant qu’il était à Mossoul, Zayn ad-Din Youssouf Ibn Zayn ad-Din, le seigneur d’Irbil, vint le trouver et il le posta avec son frère Mouzaffar ad-Din Koukbouri et d’autres émirs sur le flanc oriental de Mossoul puis envoya ‘Ali Ibn Ahmad al-Mashtoub al-Hakkari loin du camp à la citadelle d’al-Joudaydah dans les terres de Hakkari qu’il assiégea et ou se réunirent autour lui beaucoup de Kurdes et de Hakkari. Il resta là jusqu’à ce que Salah ad-Din se retire de Mossoul.

 

Les habitants de Mossoul avaient l’habitude de traverser le Tigre de combattre les troupes qui s’y trouvaient avant de revenir. Pendant le siège de Mossoul par Salah ad-Din, l’Atabeg ‘Izz ad-Din, son seigneur, entendu dire que Zoulfandar, son lieutenant dans la citadelle, était en correspondance avec lui. Il l’empêcha alors de monter dans la citadelle et suivit de nouveau le conseil de Moujahid ad-Din, qu’il avait reconduit, comme nous l’avons rapporté et à agir conformément à son opinion. Moujahid ad-Din assuma la charge des affaires et répara les choses qui avaient mal tourné et qui conduisirent en fin de compte à la paix, ce que nous rapporterons si Allah Exalté le veut.

 

Un homme de Baghdad, qui était résident à Mossoul, se présenta à Salah ad-Din. Il fut admis en sa présence et lui suggéra de détourner le cours du Tigre de Mossoul vers Ninive. Il dit : « Si le Tigre est détourné de Mossoul, la population aura soif et nous la conquerrons sans une lutte. » Salah ad-Din crut que ce qu’il avait dit était crédible et fut déterminé à le faire mais se rendant compte finalement qu’il ne serait pas possible de le détourner entièrement, car cela prendrait trop de temps, la tâche serait immense et qu’il ne s’ensuivrait aucun avantage. Ses associés exprimèrent leur désapprobation du plan et il y renonça donc.

 

Il resta dans sa position du début du mois de Rabi’ Thani jusqu’à près de sa fin puis se retira alors vers Mayafariqin pour la bonne raison que Shah Arman, le seigneur de Khilat y mourut le 9 du mois de Rabi’ Thani et les nouvelles de son décès arrivèrent le 27 de ce même mois.

Salah ad-Din décida de s’y rendre et la prendre depuis que Shah Arman ne laissa aucun fils ni aucun membre de sa famille qui pourrait gouverner la ville après lui qui avait été saisie par un de ses Mamelouk appelé Baktimour et dont le titre était Sayf ad-Din.

Quand Salah ad-Din consulta ses émirs et vizirs, ils eurent des opinions différentes. Ceux qui étaient avides de Mossoul lui conseillèrent de rester et de persévérer dans le siège mais ceux qui déplorèrent les dommages causés à la Maison Atabeg recommandèrent le départ. Salah ad-Din dit : « Le royaume de Khilat est plus grand et plus important et c’est un animal égaré sans gardien. Ce royaume a un sultan pour garder et le protéger. Si nous conquérons l’autre, celui-là et d’autres seront facile à gagner. »

Il hésitait encore mais il arriva qu’il reçut des lettres de plusieurs notables de Khilat, des habitants et des émirs qui l’invitèrent pour qu’ils puissent lui remettre la ville. Il quitta donc Mossoul mais les lettres de ces correspondants étaient une astuce et un subterfuge, car Shams ad-Din Fahlawan Ibn Ildikiz, le seigneur d’Azerbaïdjan, de Hamadan et ses régions, avait déjà marché contre eux pour prendre leurs terres. Il avait auparavant marié Shah Arman à une de ses filles, en dépit de son grand âge, pour pouvoir prendre le pouvoir dans Khilat et ses dépendances. Quand ils entendirent dire qu’il avait marché, ils écrivirent à Salah ad-Din pour l’inviter à recevoir la capitulation de la ville pour dissuader Bahlawan et utiliser Bahlawan pour le dissuader tandis que la ville resterait dans leurs mains.

Salah ad-Din disposa et envoya en avant-garde son cousin Nassir ad-Din Muhammad Ibn Shirkouh, Mouzaffar ad-Din Ibn Zayn ad-Din et d’autres. Ils parvinrent à Khilat et campèrent à at-Taytouwanah près de Khilat. Salah ad-Din quant à lui, alla à Mayafariqin.

Fahlawan marcha aussi sur Khilat et campa près de la ville. Des envoyés des habitants de Khilat allèrent d’avant en arrière entre Salah ad-Din et Fahlawan. Par la suite ils s’arrangèrent avec ce dernier, rejoignirent son alliance et établirent le sermon en son nom.

 

De la mort de Nour ad-Din, le seigneur de Hisn Kayfa

 

Cette année, Nour ad-Din Muhammad Ibn Qara Arsalan Ibn Daoud, le seigneur de Hisn Kayfa et d’Amid mourut alors que Salah ad-Din assiégeait Mossoul. Il laissa deux fils et fut succédé par l’aîné dont le nom était Souqman et son titre Qoutb ad-Din. La direction des affaires fut assumée par son vizir, Qiwam ad-Din Ibn Samaqah al-Is’ardi.

‘Imad ad-Din Ibn Qara Arsalan avait été envoyé par son frère Nour ad-Din avec ses troupes à Salah ad-Din pendant que ce dernier assiégeait Mossoul et il était avec lui quand il entendit les nouvelles de la mort de son frère. Il entreprit donc de reprendre ses terres comme son successeur parce que ses enfants étaient jeunes. Mais cela s’avéra impossible et il alla à Khartbirt dont il prit le contrôle et qui resta entre les mains de ses descendants jusqu’à l’année 620 de l’hégire (1223).

 

Quand Salah ad-Din assiégea Mayafariqin, le fils Nour ad-Din se présenta devant lui et il le confirma dans le royaume de son père en incluant Amid. Ils avaient craint que Salah ad-Din puisse la prendre d’eux mais il ne le fit pas. Il leur restitua leurs terres en stipulant qu’ils devraient le consulter dans les actions qu’ils entreprendraient et obéiraient à ses ordres et ses interdictions. Il installa à ses côtés un émir dont le titre était Salah ad-Din, un des hommes de son père.

 

De la prise de Mayafariqin par Salah ad-Din

 

Quand Salah ad-Din se rendit à Khilat, il voyagea via Mayafariqin qu’il voulait prendre depuis que son seigneur, Qoutb ad-Din, le souverain de Mardin, était mort, comme nous l’avons rapporté et qui avait été succédés par son fils, encore un bébé. Shah Arman y avait l’autorité et ses troupes l’occupèrent. Quand il mourut, Salah ad-Din ambitionna de prendre la ville et quand il y descendit, il constata quelle était bien pourvue en homme et que la femme de ce dernier Qoutb ad-Din avec les filles qu’elle avait eu de lui se trouvaient dans la place. Elle était la sœur de Nour ad-Din Muhammad. Salah ad-Din maintint le siège qui avait commencé au début du mois de Joumadah Awwal.

 

Le commandant des forces locales, un émir nommé Assad ad-Din Yarounqoush, était brave, déterminé et sa défense excellente. Les attaques sur la ville s’intensifièrent. Des trébuchets[2] et des catapultes[3] furent érigés mais Salah ad-Din n’obtint pas ce qu’il voulut.

Voyant cela, il abandonna la force et la guerre et employa la ruse. Il se mit en contact avec la veuve de Qoutb ad-Din qui résidait dans la ville en lui dit : « Assad ad-Din Yarounqoush semble d’accord pour nous abandonner la ville. Nous respecterons les droits de ton frère à travers toi après sa mort et nous voulons que tu aies une part dans cette affaire. Je marierai tes filles à mes fils et Mayafariqin et d’autres endroits seront votre et sous ton autorité. » Il prit des dispositions pour l’envoi d’un messager à Assad ad-Din pour lui dire que la Dame s’était inclinée pour faire une alliance et se soumettre au sultan et que les gens dans Khilat lui avaient écrit pour lui remettre la ville et qu’il devait donc faire attention.

Il arriva qu’un envoyé de Khilat vint trouver Salah ad-Din avec une offre de soumission à lui et l’invita à venir chez eux pour lui remettre la ville. Salah ad-Din ordonna à cet envoyé d’entrer dans Mayafariqin qui dit à Assad ad-Din : « Pour qui luttes-tu ? Je suis venu pour remettre Khilat à Salah ad-Din. » Il devint alors abattu et sa volonté s’affaiblit. Il demanda donc qu’un fief et de l’argent lui soit remis en échange ce qui fut accepté et il abandonna la ville le dernier jour du mois de Joumadah Awwal.

Salah ad-Din engagea le mariage pour l’un de ses fils à une des filles de de la Dame et lui donna le fort d’al-Hattakh pour résidence ainsi qu’à ses filles.

 

Du retour de Salah ad-Din à Mossoul et de la paix entre lui et l’Atabeg ‘Izz ad-Din

 

Lorsque Salah ad-Din eut terminé les affaires de Mayafariqin et qu’il eut fermement établit son administration et ses fiefs, il décida de revenir à Mossoul vers qui il se dirigea via Nisibis. Il arriva à Kafar Zammar en hiver ou il campa avec ses troupes avec l’intention d’y rester pour s’octroyer les terres de Mossoul en fiefs, pour prendre leurs récoltes et leurs revenus pour affaiblir ainsi Mossoul sachant qu’il ne pourrait par prendre la ville par la force.

Il campa donc du mois de Sha’ban jusqu’au mois de Ramadan durant lesquels, il y eut une échange d’envoyés entre Salah ad-Din et ‘Izz ad-Din, le seigneur de Mossoul et Moujahid ad-Din pour des démarches conciliantes. Sa parole fut acceptée par tous les princes parce qu’ils savaient que c’était vrai.

 

Pendant que les envoyés allaient d’avant en arrière pour faire la paix, Salah ad-Din tomba malade et se retira de Kafar Zammar pour Harran. Les envoyés le rattrapèrent avec l’approbation de ses demandes, la paix fut conclue et son serment donné. Les conditions étaient que ‘Izz ad-Din devrait lui abandonner Shahrazour et ses dépendances, la région d’al-Qarabouli et tous les districts au-delà du fleuve Zab et que le sermon devrait être au nom de Salah ad-Din sur toutes les chaires de ses terres et la monnaie frappée à son nom. Quand il jura, il envoya ses envoyés qui reçurent le serment de ‘Izz ad-Din et prirent les terres stipulées par le traité de paix.

Salah ad-Din arriva à Harran où il resta malade. Un état de sécurité régna, les gens étaient généralement tranquilles et les racines de la discorde furent oubliées et cela grâce aux efforts intermédiaires de Moujahid ad-Din Qaymaz (puisse Allah lui faire miséricorde).

 

Salah ad-Din resta longtemps malade à Harran. Les membres de sa famille présents avec lui étaient son frère al-‘Adil qui tenait Alep à cette époque et son fils al-‘Aziz ‘Uthman. Sa maladie devint si sérieuse qu’il désespéra de guérir. Il fit porter allégeance à ses gens en faveur de son fils et assigna à chacun d’entre eux une partie spécifique de ses terres puis nomma son frère al-‘Adil gardien sur eux tous.

 

Plus tard, il se rétablit et revint à Damas au mois de Mouharram de l’année 582 (1186).

 

Pendant sa maladie à Harran son cousin, Nassir ad-Din Muhammad Ibn Shirkouh qui tenait le fief de Homs et Rahbah, était avec lui. Il quitta Salah ad-Din et retourna à Homs en passant par Alep où il convoqua un groupe de la milice et leur donna de l’argent. Lorsqu’il arriva à Homs, il écrivit à plusieurs des hommes de Damas et fit un accord avec eux pour qu’ils lui remettent la ville si Salah ad-Din venait à mourir.

Il resta à Homs, attendant qu’il meure pour aller à Damas et y prendre le pouvoir. Cependant, Salah ad-Din récupéra et il fut informé de tous les détails de cette affaire. Cependant, peu de temps après Ibn Shirkouh mourut à la veille de la fête de ‘Id al-Adhah après avoir bu excessivement du vin et avant le matin il était mort.

Certains ont rapporté, et la responsabilité de cette information leur incombe, que Salah ad-Din prit des dispositions pour qu’un homme appelé an-Nassih Ibn al-‘Amid, qui était de Damas, aille chez lui et s’enivre avec lui et lui donne une boisson empoisonnée. Quand le matin arriva, an-Nassih ne fut vu nulle part et lorsqu’il fut demandé de ses nouvelles, on répondit : « Il s’est rendu chez Salah ad-Din durant la nuit, »  ce qui renforca les soupçons.

Après sa mort, Salah ad-Din donna son fief à son fils Shirkouh qui était alors âgé de douze ans. Nassir ad-Din laissa une grande quantité d’argent, de nombreux chevaux et des équipements (pour la guerre).

Salah ad-Din arriva alors à Homs et reconsidéra son domaine dont il prit la plupart et ne laissa que ce qui n’était d’aucun bien.

 

J’ai entendu dire que Shirkouh Ibn Nassir ad-Din vint trouver Salah ad-Din une année après la mort de son père. Salah ad-Din lui demanda : « Où es-tu arrivé dans la mémorisation du Qur’an ? » Il répondit : « Jusqu’à où Allah Tout-puissant dit : « Ceux qui mangent [disposent] injustement des biens des orphelins ne font que manger du feu dans leurs ventres. Ils brûleront bientôt dans les flammes de l’Enfer. » (Qur’an 10/4) Salah ad-Din et ceux qui étaient présents furent vraiment étonnés par sa sagacité.



[1] Vous vous demandez certainement pourquoi tous les différents sultans cherchèrent à s’accaparer du territoire des autres. Premièrement c’est un trait commun à tous les sultans donc si l’un ne le fait pas, l’autre le fera et la logique veut qu’il vaille mieux attaquer que défendre. De la même manière pour protéger ses terres, l’Islam dut sans cesse repousser ses frontières et c’est une nécessité incontournable. D’autre part, Allah Exalté à Lui les Louanges et la Gloire puis le Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions sur lui) ont insisté sur l’obligation de l’unité et l’interdiction de la division. C’est pourquoi, l’unification des terres islamiques était le principal objectif des sultans avant de pouvoir faire face à l’ennemi car comment peut-on combattre l’ennemi en ayant son dos exposé ! Cela a été prouvé dans de nombreux exemples et il convient de remarquer que Salah ad-Din a largement bénéficié des actions de ses prédécesseurs ‘Imad ad-Din Zanki et son fils Nour ad-Din, Puisse Allah Exalté leur faire miséricorde, qui furent les premiers à unifier les Musulmans pour faire face aux croisés.

[2] Le trébuchet ou mangonneau est un engin de siège utilisé soit pour détruire les murs ou pour lancer des projectiles par-dessus les fortifications.

[3] La catapulte est une machine de guerre beaucoup plus petite utilisée pour lancer des projectiles à grande distance.