Comment les croisés attaquèrent Hama de nouveau

 

Au mois de Rabi’ Awwal de l’année 574 de l’Hégire (1178), un grand corps de croisés de Syrie marcha de nouveau sur Hama. Ils rassemblèrent beaucoup de cavaliers et une large infanterie dans leur impatience d’attaque et de pillage. Ils lancèrent alors leurs raids, pillèrent et ruinèrent les villages, tuant, capturant et incendiant. Quand les troupes stationnées dans Hama entendirent leurs faits, ils sortirent contre eux bien qu’ils soient peu nombreux plaçant leur confiance en Allah Tout Puissant qui leur donna la victoire tandis que les croisés furent vaincus après qu’un grand nombre d’entre eux furent tués ou fait prisonniers. Les Musulmans récupérèrent ce que les croisés avait saisi comme butin de la campagne.

 

Salah ad-Din était revenu en Syrie d’Egypte durant le mois de Shawwal de l’année précédente et il campait à l’extérieur de Homs. Les têtes des tués, les prisonniers et ce qui avait été saisi d’eux lui furent amenés. Il ordonna alors d’exécuter les prisonniers et cela fut fait.

 

De la rébellion d’Ibn al-Mouqaddam contre Salah ad-Din, le siège de Baalbek et la prise de sa ville

 

Cette année, Shams ad-Din Muhammad Ibn ‘Abdel-Malik al-Mouqaddam se révolta contre Salah ad-Din dans Baalbek qu’il tenait depuis que Salah ad-Din la lui avait donné après l’avoir conquise, en récompense pour lui avoir abandonné Damas.

Shams ad-Dawlah Ibn Ayyoub, le frère de Salah ad-Din, lui avait demandé Baalbek et avait persisté dans sa demande parce que c’était la ville il avait été élevé et grandit et qu’il aimait et préférait à toute autre ville. Il était le frère aîné et Salah ad-Din était incapable de s’opposer à lui. Il ordonna donc à Shams ad-Din de l’abandonner à son frère afin qu’il puisse lui donner quelque chose en échange cependant, Ibn al-Mouqaddam n’accepta pas et lui rappela ses engagements et qu’il lui avait autorisé la remise de la ville. Salah ad-Din ne lui accorda aucune attention et resta inflexible pour la reprendre.

Ibn al-Mouqaddam s’y rendit alors et se fortifia dedans mais Salah ad-Din le poursuivit et l’assiégea pendant quelque temps avant de se retirer sans l’avoir prise. Il laissa une force sur place pour continuer le blocus et après une longue période, Ibn al-Mouqaddam envoya un message à Salah ad-Din pour lui demander un échange pour lui permettre de renoncer à Baalbek. Salah ad-Din lui donna dûment quelque chose pour remplacer Baalbek, qu’il retourna et que Salah ad-Din assigna comme fief à son frère Shams ad-Dawlah.

 

Récit d’une crise de famine et de maladie généralisée

 

Cette année, les pluies faillirent totalement dans toutes les terres de la Syrie, d’al-Jazirah, d’Irak, de Diyar Bakr, Mossoul, des Hautes Terres, de Khilat et ailleurs. La famine devint sévère et se répandit dans toutes les terres. Un Ghirara de blé, soit  douze Makkouk des mesures de Mossoul fut vendu à Damas pour vingt vieux dinars Tyrian. À Mossoul l’orge coûta un dinar Amiri pour chaque trois Makkouk. Dans toutes les autres terres les prix furent comparables.

Les gens de toutes les régions de la terre prièrent pour la pluie mais leurs prières ne furent pas exaucées. La nourriture diminua dramatiquement et les gens mangèrent les charognes et les choses semblables.

 

Cette situation dura jusqu’à la fin de l’année 575 de l’Hégire (1180) puis fut suivie par une sévère maladie qui se répandit si bien que le taux de mortalité s’éleva et tous eurent la même maladie à savoir le délire. Les gens ne purent plus enterrer les morts et certains endroits furent plus affectés que d’autres. Finalement Allah Tout Puissant eut pitié de Ses serviteurs et des animaux et descendit les pluies. Les prix devinrent alors moins chers.

 

Voici une des choses que je vis quand j’allai trouver un des ‘Oulama dévots dans al-Jazirat Ibn ‘Omar pour entendre de lui un Hadith du Prophète (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) pendant le mois de Ramadan de l’année 575 de l’Hégire alors que les gens étaient à leur pire stade de la famine et dans le besoin le plus désespéré des pluies. C’était au milieu du printemps et pas une seule goutte de pluie n’était tombée.

Alors que moi et plusieurs autres étions assis attendant le Sheikh, un Turcoman s’approcha avec tous les signes de la faim. Il regardait comme s’il était près du tombeau, pleura et se plaignit de la faim. J’ai envoyé quelqu’un pour lui acheter un peu de pain qui mit très longtemps pour en ramener à cause de l’extrême rareté et pendant ce temps le Turcoman pleurait en se tortillant sur la terre et en se plaignant de la faim. Il n’y eut pas l’un d’entre nous qui ne pleura pas par compassion pour lui et pour les autres. Juste à ce moment-là, le ciel se couvrit de nuages et fit tomber des gouttes de pluie. Chacun poussa des cris et levèrent leurs voix en priant. Le pain arriva alors, le Turcoman en mangea un peu, prit le reste et parti. La pluie devint alors lourde et continue à partir de ce moment.

 

Récit de raids croisés sur le territoire musulman

 

Au mois de Dzoul Qi’dah de cette année, les croisés se réunirent et marchèrent avec leur roi sur Damas ou ils attaquèrent la banlieue, pillèrent et prirent des prisonniers, tuèrent et asservirent.

Salah ad-Din envoya Farroukhshah, son neveu, avec un corps de troupes pour s’opposer à eux et lui ordonna de lui envoyer des nouvelles par pigeon voyageur aussitôt qu’ils les rencontreraient afin qu’il puisse le rejoindre. Il lui ordonna aussi d’enjoindre aux habitants de partir avant l’arrivée des croisés. Farroukhshah partit avec sa force à leur rencontre mais avant qu’il se rende compte de ce qui arrivait, les croisés étaient sur lui. Il fut forcé de livrer bataille et ils luttèrent plus violemment qu’il n’a jamais été vu. Farroukhshah se jeta sauvagement sur eux et les engagea dans la bataille et ne la laissa à personne d’autre. Les croisés furent mis en déroute et les Musulmans remportèrent la victoire. Plusieurs de leurs nobles furent tués dont Humphrey. Comment puissions-nous vous faire juste réaliser ce qu’était ce Humphrey ? Sa bravoure et son habileté dans la bataille étaient proverbiales. Il fut une épreuve qu’Allah infligea aux Musulmans et qu’Il soulagea aussi de sa cruauté. Quelques autres de la sorte furent aussi tués tandis que la force de Farroukhshah était moins de mille hommes montés.

 

Cette année aussi, le seigneur d’Antioche et de Lattaquié razzia les chevaux musulmans en pâturage à Shayzar et les emmena. Le seigneur de Tripoli attaqua un grand rassemblement de Turcomans et saisit leurs troupeaux.

Salah ad-Din qui était alors à Banyas, ce que nous rapporterons si Allah Exalté le veut, envoya son neveu Taqi ad-Din ‘Omar à Hama et son cousin Nassir ad-Din Muhammad Ibn Shirkouh en Egypte et leur ordonna tant de garder et de défendre les terres et les frontières contre l’ennemi, puisse Allah Tout Puissant les détruire.

 

À la veille du milieu du mois de Rabi’ Thani, la lune fut dans le dernier tiers de la nuit et fut cachée à la vue.

 

Le 29 de ce même mois aussi, il y eut une éclipse du soleil dans la soirée qui resta dans cet état.

 

 

Le compte de la destruction du fort que les croisés construisirent à Bayt al-Ahzan

 

Les croisés avait construit un fort semblable à Banyas à Bayt Ya’qoub (paix sur lui)  dans un endroit nommé Bayt al-Ahzan. Quand Salah ad-Din en fut informé, il quitta Damas pour Banyas où il resta quelques temps et envoya des escadrons razzier les terres occupées par les croisés. Puis, il marcha vers le fort ou il campa près de celui-ci pour collecter des renseignements afin d’y revenir ultérieurement quand ses troupes se seraient de nouveau rassemblées.

Plus tard, il descendit une nouvelle fois sur le fort, engagea les défenseurs croisés avant de se retirer de nouveau. 

Quand l’année 575 de l’Hégire (1179) arriva, il ne quitta pas Banyas mais y resta pendant que sa cavalerie attaquait le territoire de l’ennemi. Il envoya un détachement de ses troupes avec des fourrageurs mais ils furent pris au dépourvu par l’apparition surprise des croisés avec leur roi. Ils informèrent aussitôt Salah ad-Din qui partout à toute allure avec son armée et les trouva encore retenu dans la bataille.

Les croisés luttèrent violemment et firent un certain nombre de charges contre les Musulmans en les reconduisant presque de leurs positions. Alors Allah Exalté descendit la victoire sur S serviteurs et dispersa les polythéistes qui furent massacrés. Leur roi s’enfuit tout seul et un très grand nombre d’entre eux furent fait prisonnier dont le seigneur de Ramlah et Naplouse, le plus haut croisé après le roi ainsi que le frère du seigneur de Joubayl, le seigneur de Tibériade, le maître des Templiers, le maître des Hospitaliers, le seigneur de Jenin et d’autres chevaliers despotes et notoires. Baudouin le seigneur de Ramlah et Naplouse se rançonna lui-même pour 150 000 dinars Tyrian et la libération de 1 000 prisonniers musulmans. Et la plupart de ce qui fut achevé ce jour fut dû à ‘Izz ad-Din Farroukhshah, le neveu de Salah ad-Din.

Salah ad-Din quitta le site de la bataille pour Banyas et se prépara pour attaquer et assiéger ce fort vers lequel il se rendit au mois de Rabi’ Awwal et l’encercla. La défaite croisée que nous avons mentionnée renforca son impatience de surmonter l’obstacle. Il envoya ses troupes attaquer le territoire croisé ce qu’ils firent dûment et recueillirent beaucoup de bois et des ceps pour les utiliser comme des écrans protecteurs pour les trébuchets.

Jawouli al-Assadi, le commandant de l’Assadiyah et un émir aîné dit à Salah ad-Din : « Le meilleur plan est de les tester avec un assaut immédiat. Regardons comment ils se défendront et qu’ils voient comment nous serons avec eux. Si nous les trouvons faibles cela nous arrangera et dans le cas contraire, il nous restera l’option de monter les trébuchets. » Il accepta son conseil et donna l’ordre pour un assaut vigoureux. Ils attaquèrent et le combat fut furieux et intense. Un des habitants dans une chemise en loques grimpa la barbacane du fort et lutta sur le mur quand il l’atteignit suivit par certains de ses camarades qui furent rejoints par les troupes et la barbacane fut prise. Alors les croisés se retirèrent derrière les murs du fort pour se défendre ainsi que leur fort en attendant les renforts.

Les croisés s’étaient rassemblés à Tibériade. Les Musulmans accentuèrent leur attaque sur le fort de peur que les croisés ne viennent et ne les forcer à lever le siège. La nuit tomba et Salah ad-Din leur ordonna de rester dans la barbacane jusqu’au jour suivant. Ils firent ainsi et avant le matin, ils avaient sapés la muraille et approfondi la mine. Ils allumèrent alors les feux et attendirent l’effondrement du mur mais il ne s’effondra pas à cause de son épaisseur qui était de neuf coudées Najjari (environ 7m) et une telle coudée est une fois et demie la coudée commune. Ils attendirent durant deux jours mais il ne tomba pas alors Salah ad-Din ordonna d’éteindre le feu de la mine. De l’eau fut amenée et le feu éteint. Les sapeurs  recommencèrent à creuser et avancèrent plus profondément sous la muraille puis y mirent de nouveau le feu et l’enceinte tomba le jeudi, six jours avant la fin du mois de Rabi’ Awwal.

Les musulmans firent une entrée forcée dans le fort et prirent les défenseurs prisonniers et libérèrent tous les captifs musulmans qui étaient là. Salah ad-Din tua un grand nombre de prisonniers croisés et envoya le reste à Damas. Il resta sur place jusqu’à ce qu’il ait démoli le fort et l’ait rasé.

Il avait offert précédemment 60 000 dinars Tyrian aux croisés pour le démolir sans combat mais ils refusèrent pensant que, si l’édifice restait, il leur permettrait de contrôler plus de territoire musulman.

 

Lorsque les croisés qui s’étaient rassemblés  à Tibériade reçurent les nouvelles de sa chute, ils furent démoralisés et se dispersèrent sur leurs terres (occupées).

 

Les poètes écrivirent beaucoup sur cette chute. Il y a par exemple les vers de notre ami, an-Nashw Ibn Nafadah (qu’Allah lui fasse miséricorde) :

« La destruction des croisés vint rapidement.

Maintenant c’est l’heure de fracasser leurs croix.

L’instant de leur mort n’ayant pas été proche,

Ils n’auraient pas construit leur maison des lamentations. »

 

Un autre exemple est celui de ‘Ali Ibn Muhammad al-Sa’ati de Damas :

« Habiteront dans la patrie des Prophètes des gens qui trahissent leurs serments pendant qu’ils les jurent ?

Je vous donne un bon conseil (et le conseil est un devoir en religion) :

Quittez la Maison de Jacob car Joseph[1] est venu. »

 

 

 

Récit d’une bataille entre les troupes de Salah ad-Din et de ceux de Kilij Arsalan

 

Cette année, il y eut une bataille entre les troupes de Salah ad-Din, commandé par son neveu Taqi ad-Din ‘Omar Ibn Shahinshah Ibn Ayyoub et les troupes du prince Kilij Arsalan Ibn Mas’oud Ibn Kilij Arsalan, le seigneur de Konya et d’Aqsaray.

Cela arriva parce que Nour ad-Din Muhammad Ibn Zanki Ibn Aqsounqour (qu’Allah lui fasse miséricorde) avait autrefois pris de Kilij Arsalan la forteresse de Ra’ban qui était resté dans les mains de Shams ad-Din Ibn al-Mouqaddam jusqu’à présent. Kilij Arsalan l’eut alors en vue parce qu’al-Malik as-Salih était dans Alep, situé entre lui et Salah ad-Din. Il envoya des hommes pour l’assiéger et une grande armée s’y réunit, soit 20 000 soldats d’après ce qui a été dit.

Salah ad-Din envoya contre eux Taqi ad-Din avec 1 000 cavaliers qui les engagea dans le combat, les vainquit et organisa la situation dans cette région, avant de revenir à Salah ad-Din. Comme, il n’était pas avec lui lors de la destruction du fort à al-Ahzan, il avait l’habitude de se vanter, en disant : « Avec 1 000 guerriers, j’en ai vaincu 20 000. »

 

 

Cette année un sombre vent noir souffla dans les terres d’al-Jazirat, en Irak et ailleurs. Il se déchaina sur toutes les terres de la mi-journée jusqu’après le premier quart de la nuit. Il fit si sombre qu’un homme pourrait à peine voir la personne avec qui il était. J’étais à Mossoul à ce moment-là et nous avons prié le ‘Asr, le Maghrib et al-‘Isha par supposition. Les gens se tournèrent vers la soumission, le repentir et la demande du pardon car ils crurent que le Jour de Jugement était arrivé. Quand le premier quart de la nuit  passa, les ténèbres et l’obscurité qui avaient éclipsés le ciel cessèrent. Nous levâmes alors les yeux et purent voir les étoiles. Nous réalisâmes combien la nuit était avancée parce qu’il n’y eut aucune augmentation de l’obscurité par rapport au début de la nuit. Tous ceux qui arrivèrent de n’importe quelle direction racontèrent tous la même histoire.

 

Au mois de Dzoul Qi’dah de cette année, Shams ad-Dawlah, le frère de Salah ad-Din renonça à Baalbek et demanda Alexandrie en échange. Salah ad-Din accepta cette demande et donna Baalbek en fief à ‘Izz ad-Din Farroukhshah, son neveu, qui s’y rendit, rassembla ses hommes et attaqua le territoire sous occupation croisée aussi loin que le fort de Safad qui domine Tibériade. Il ravagea largement, prit des captives, des prisonniers et du butin et agit puissamment parmi les croisés.

Quant à Shams ad-Dawlah, il partit pour l’Egypte et prit résidence à Alexandrie. Quand Allah Exalté veut amener à lui un homme dans une certaine terre, il crée quelques affaires pour l’y attirer. Cela devint son endroit de résidence jusqu’à sa mort.

 

Cette année, la mosquée que Moujahid ad-Din Qaymaz construisit à l’extérieur de Mossoul vers Bab al-Jisr approcha de son achèvement. Les cinq prières quotidiennes et la prière de vendredi y furent alors instituées et c’était l’une des plus belles mosquées.

 

 

De la marche de Salah ad-Din contre Kilij Arsalan pour lui faire la guerre

 

En l’an 576 de l’Hégire (1180), Salah ad-Din marcha de la Syrie aux terres de Kilij Arsalan Ibn Mas’oud Ibn Kilij Arsalan, à savoir Malatya, Siwas avec tous ce qui se trouve entre eux et Konya pour lui faire la guerre.

C’est arriva parce que Nour ad-Din Muhammad Ibn Qara Arsalan Ibn Daoud, le seigneur de Hisn Kayfa et d’une partie de Diyar Bakr, se maria avec la fille de Kilij Arsalan qui est resté avec lui durant un certain temps avant de tomber alors amoureux d’une chanteuse avec qui il se maria et la préféra. Elle exerça l’autorité sur sa terre et sa trésorerie tandis que pendant ce temps, il négligea, oublia et abandonna la fille de Kilij Arsalan. Lorsque son père fut informé, il se décida à attaquer Nour ad-Din et prendre ses terres.

Nour ad-Din envoya un message à Salah ad-Din pour lui demander protection et le défendre contre Kilij Arsalan. Salah ad-Din écrivit à Kilij Arsalan sur l’affaire qui répondit : « J’ai cédé à Nour ad-Din un certain nombre de forteresses adjacentes à ses terres quand il se maria avec ma fille. Maintenant que la situation est parvenue dans l’état que tu connais, je veux qu’il rende ce qu’il a reçu de moi. »

 

Les messagers allèrent d’avant en arrière entre eux mais ils ne parvinrent à aucun règlement de l’affaire. Salah ad-Din fit donc une trêve avec les croisés et marcha avec ses troupes.

Al-Malik al Salih Isma’il Ibn Nour ad-Din Mahmoud qui était le souverain d’Alep quitta donc la ville en la laissant sur sa gauche et marché vers Tall Bashir à Ra’ban où Nour ad-Din Muhammad le rejoignit. Quand Kilij Arsalan entendu dire qu’il était à côté, il lui envoya son émir aîné, en disant : « Cet homme a fait ceci et cela à ma fille. Il est urgent d’attaquer ses terres et de lui donner une leçon. »

Lorsque l’envoyé arriva, il rencontra Salah ad-Din et lui livra son message. Salah ad-Din fou de rage dit à l’envoyé : « Dis à ton  maître, par Allah en dehors de qui il n’y a nul autre dieu, s’il ne se retire pas, je me mettrai en route pour Malatya qui est seulement à deux jours de marche et que je descendrais de ma monture seulement quand je serais dans la ville. Alors j’attaquerai toutes ses terres et les lui prendrai. » L’envoyé reconnut la situation sérieuse. Il monta et quitta Salah ad-Din après avoir vu son armée, sa force et ses rangs, la quantité de ses armes, de ses montures et les autres choses et il n’avait rien de similaire pour y faire face. Il se rendit compte que si Salah ad-Din les attaquait, il prendrait leurs terres.

Le jour suivant il demanda un entretien et il fut donc appelé et dit à Salah ad-Din : « Je veux dire quelque chose de ma propre initiative et qui n’est pas une communication de mon maître. » « Parle, » dit Salah ad-Din. Il continua : « Mon seigneur, n’est-il pas mauvais pour quelqu’un comme toi, un des plus grands et plus puissants sultans, que les gens sachent que tu as fait la paix avec les croisés, abandonné le Jihad et les intérêts du royaume, que tu t’es détourné de tout ce t’apporte le salut ainsi que pour tes sujets et les Musulmans en général, que tu aies réunis des troupes de tous les horizons, prit le champ (de bataille) et dépensés des sommes énormes tant pour toi que pour tes troupes pour une chanteuse prostituée ? Quelle sera ton excuse devant Allah Tout Puissant, le calife, les princes de l’Islam et tout le monde ? Fais que personne ne te confrontes pour cela mais ils ne savent pas qu’ainsi est l’affaire. Suppose que Kilij Arsalan est mort et que c’est sa fille qui t’a envoyé un message demandant la protection et de lui faire justice contre son mari. Si elle faisait ainsi, on s’attendrait à ce que tu ne la rejettes pas. »

Salah ad-Din dit : « Par Allah, la vérité est avec toi et l’affaire est comme tu dis mais cet homme est venu chez moi, a compté sur moi et c’est mal pour moi de l’abandonner. Va le rencontrer et règle ce différend avec lui comme tu veux. Je t’aiderai avec lui et le critiquerai pour ce qu’il a fait. »

Il lui fit des promesses équitables et l’envoyé rencontra le seigneur de Hisn Kayfa. Ils discutèrent l’affaire entre eux et ensuite il fut convenu que le seigneur de Hisn Kayfa devrait répudier la chanteuse dans une année. S’il manquait de faire ainsi, Salah ad-Din lui retirerai alors son soutien et avec Kilij Arsalan, ils seraient les deux contre lui. Il fut d’accord sur ces conditions et Salah ad-Din se retira de Syrie. Nour ad-Din revint sur ses terres et lorsque la période fut écoulée, il licencia la chanteuse qui partit pour Baghdad ou elle resta jusqu’à sa mort.

 

Comment Salah ad-Din envahit les terres du fils de Leon l’Arménien

 

Cette année, Salah ad-Din envahit les terres du fils de Leon l’Arménien après avoir réglé l’affaire avec Kilij Arsalan.

Cela arriva parce que le fils de Leon l’Arménien avait convaincu un groupe de Turcomans, leur avait offert des garanties de sécurité et leur avait demandé de conduire leurs troupeaux dans les pâturages de sa terre qui était un puissant pays aux forteresses imprenables et d’accès difficile, à cause de ses défilés étroits et ses farouches montagnes. Plus tard, il les trahit, captura leurs familles et saisit leurs troupeaux. Il  fit prisonniers les hommes après qu’il eut tué ceux dont le temps était venu.

Salah ad-Din campa près de la rivière noire et envoya ses escadrons pour razzier les terres dans toutes les directions. Le fils de Leon craignant qu’une de ses forteresses en haut d’une montagne puisse être prise, la détruisit et y mit le feu. Salah ad-Din fut informé et s’empressa de s’y rendre et arriva avant que le contenu des échoppes et les provisions soient emportées. Il prit tout cela comme butin et les Musulmans profitèrent de ce qui avait été pris. Le fils de Leon offrit de libérer les prisonniers et les captives qu’il tenait et de leur restituer leur propriété à condition qu’ils se retirent. Cela fut accepté par Salah ad-Din et les conditions entérinées. Les prisonniers furent libérés, leurs propriétés rendues et Salah ad-Din se retira durant le mois de Joumadah Thani.

 

Cette année aussi, Shams ad-Dawlah Touranshah Ibn Ayyoub, le plus vieux frère de Salah ad-Din mourut à Alexandrie qu’il avait reçu en fief de son frère et où il resta depuis là jusqu’à sa mort. Il possédait la plupart des terres du Yémen et ses lieutenants avaient l’habitude là de lui ramener de l’argent de Zabid, d’Aden et des terres des forteresses situées entre ces villes. Il était le plus généreux des hommes, le cœur sur la main, et distribuait tout l’argent du Yémen qui avait l’habitude de recevoir. Il vint à Alexandrie quand son autorité sur les terres Salah ad-Din et la richesse étaient efficace, mais en dépit de cela, quand il mourut, il devait 200 000 dinars égyptiens. Quand il arriva en Egypte, son frère Salah ad-Din le libéra de ses dettes et lorsqu’il entendit les nouvelles de sa mort, il retourna en Egypte au mois de Sha’ban de cette année laissant derrière lui député sur la Syrie ‘Izz ad-Din Farroukhshah, le fils de son frère Shahinshah qui était sage, déterminé et brave.

 

 

Du raid depuis la Syrie sur le territoire de Karak

 

En l’an 577 de l’Hégire (1181), Farroukhshah, le député de Salah ad-Din à Damas se rendit sur les terres de Karak qu’il pilla.

La raison pour cela est que Renaud[2] le seigneur de Karak, qu’Allah le maudisse, un des croisés le plus diabolique, le plus intraitable et le plus hostile aux Musulmans, se prépara pour une campagne, rassembla ses troupes et tout ce qu’il put rassembler pour marcher sur Tayma puis de là vers la ville du Prophète (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) pour prendre le contrôle de ces augustes régions.

‘Izz ad-Din Farroukhshah en fut informé et réunit les troupes de Damas puis marcha vers la terre de Renaud, qu’il pilla et ravagea avant de se retirer à la frontière de ses terres où il resta  pour défendre le territoire musulman du maudit et pour cette raison, ce dernier fut incapable de mener à bien son projet. Ils restèrent longtemps face à face et quand le vil se rendit compte que les Musulmans ne se retireraient pas avant qu’il ait dissous ses forces rassemblées, ce qu’il fit et renonça à son ambition de réaliser sa campagne. Farroukhshah revint alors à Damas et ainsi Allah Exalté sauva les Musulmans du vil plan des mécréants.

 

 

Cette année, il y eut beaucoup de comportement immoral à Baghdad. Le chambellan du palais mit sur pied un groupe pour répandre les boissons intoxicantes et arrêter les femmes légères. Alors qu’une de ces femmes était dans un certain endroit, elle se rendit compte que les hommes du chambellan de palais arrivaient. Elle s’allongea et prétendit qu’elle était malade et poussa un gémissement. Lorsqu’ils la virent dans cet état, ils la laissèrent en paix et partirent. Quand ils furent partis, elle essaya de se lever mais ne le put pas. Elle commença à pousser des cris, « ô malheur, ô malheur » jusqu’à ce qu’elle expira. Ce fut une des plus étranges histoires à être rapportée.

 

La marche Salah ad-Din en Syrie et de son raid sur les croisés

 

Le 5 du mois de Mouharram de l’année 578 de l’Hégire (1182), Salah ad-Din quitta l’Egypte pour la Syrie. Voici une histoire surprenante d’une remarque de mauvais augure.

Quand il quitta le Caire, il campa dans sa tente jusqu’à ce que ses troupes, son personnel, ses principaux conseillers, les ‘Oulama, les poètes et littérateurs se soient rassemblés, certains d’entre eux pour lui dire au revoir et d’autres pour voyager avec lui. Chacun d’entre eux avait quelque chose à dire pour l’adieu, la séparation et l’expédition qu’ils allaient entreprendre. L’un d’entre ceux était un tuteur d’un des enfants de Salah ad-Din qui se leva dans l’assemblée et récita :

« Apprécie la douce odeur des astéracées du Najd,

Car après ce soir il n’y aura plus de fragrance. »

 

Salah ad-Din qui avait été dans une humeur détendue devint déprimé et tira un mauvais présage de ces mots et pour ceux qui étaient présents, l’assemblée tourna au vinaigre. Jusqu’au jour où il mourut et bien que ce soit après une longue période, Salah ad-Din ne revint jamais en Egypte.

Salah ad-Din se mit alors en route de l’Egypte, suivit par une grande foule de marchands, de gens du pays et ceux qui avaient quitté la Syrie pour l’Egypte à cause de la famine là et ailleurs. Quand il se mit en route, il prit celle d’Aylah quand il entendit dire que les croisés s’étaient rassemblés pour s’opposer à lui et bloquer son passage. En arrivant près de leur territoire,  il envoya les faibles et les bagages avec son frère Taj al-Moulouk Bouri à Damas et resta lui-même avec les troupes combattantes. Il lanca des raids sur leur territoire périphérique et particulièrement sur les régions de Karak et de Shawbak. Personne ne vint pour le rencontrer et personne n’osa s’approcher de lui. Alors il poursuivit sa marche vers Damas ou il arriva le 11 du mois de Safar.

 

De la prise d’une grotte forteresse par les Musulmans

 

Durant cette année et toujours au mois de Safar, les Musulmans prirent aux croisés une grotte-forteresse[3] en Syrie, connue sous le nom de Habis Jaldak dans le district de Tibériade donnant sur le Sawad. Sa capture arriva comme suit.

Quand les croisés furent informés de la marche de Salah ad-Din de l’Egypte vers la Syrie, ils se  rassemblèrent pour s’opposer à lui, appelèrent leur cavalerie et infanterie et se réunirent à Karak, près de sa route dans l’espoir qu’ils pourraient saisir une opportunité ou gagner une victoire, qu’ils pourraient peut-être même empêcher le passage des Musulmans en se postant dans des passages montagneux étroits, ce qu’ils firent, laissant ainsi leur territoire face à Damas vide.

Farroukhshah informé, réunit les forces de Damas qu’il avait avec lui et marcha ensuite sur les terres des croisés et les attaqua. Il pilla Dabouriyah et les villages voisins, prit ou tua un grand nombre d’hommes, asservit les femmes et prit du butin. Il conquit aussi cette forteresse de roches qui avait été une source de mal pour les Musulmans qui se réjouirent énormément de sa chute.

Farroukhshah envoya un rapport du succès à Salah ad-Din et le rejoignit ensuite en cours de route. Cela affaiblit le pouvoir des croisés et leur potentiel offensif fut brisé.

 

Des raids de Salah ad-Din sur la vallée jordanienne et d’autres territoires croisés

 

Lorsque Salah ad-Din arriva à Damas, il y resta quelques jours pour se reposer et reposer ses troupes. Alors au mois de Rabi’ Awwal, il marcha sur le territoire croisé en direction de Tibériade et campa dans le voisinage. Il dressa ses tentes à Ouqhouwanah sur le Jourdain.

Les croisés arrivèrent avec leurs détachements et s’arrêtèrent à Tibériade. Salah ad-Din envoya son neveu Farroukhshah à Bayssan, ou il entra par la force des armes et pilla tout en tuant et en asservissant. Il entreprit dans la vallée jordanienne un raid de grande envergure ou il tua et captura à vaste échelle les habitants. Les bédouins arrivèrent et attaquèrent Jenin, Lajin et sa région et s’approchèrent même de la plaine d’Acre.

Les croisés quittèrent Tibériade et campèrent au pied de la colline de Kawkab. Salah ad-Din avança vers eux et envoya des archers pour les couvrir de flèches mais ils tinrent leur position et ne firent aucun mouvement pour livrer bataille. Il ordonna alors à ses deux neveux, Taqi ad-Din ‘Omar et ‘Izz ad-Din Farroukhshah de charger les croisés avec leurs troupes. Ils combattirent férocement et ensuite les croisés se retirèrent en ordre de bataille et établirent leur camp à ‘Afrabalah. Quand Salah ad-Din vit l’étendue des dommages qu’il leur avait infligé ainsi qu’à leurs terres, il se retira à Damas.

 

Du siège de Beyrouth

 

De Damas, Salah  ad-Din alla à Beyrouth et ravagea sa banlieue. Il avait ordonné à la flotte égyptienne de naviguer à Beyrouth. Ils vinrent, bloquèrent la ville et attaquèrent celle-ci et les régions avoisinantes. Salah ad-Din arriva alors et se joignit à eux et pilla tout ce qui ne l’avait pas été par la flotte. Puis, il assiégea Beyrouth un certain nombre de jours avec l’intention de poursuivre le siège jusqu’à ce qu’il la prenne. Alors qu’il attaquait la ville, des nouvelles lui parvinrent que la mer avait rejeté à Damiette un navire de croisé portant beaucoup de personnes qui comptaient faire le Pèlerinage à Jérusalem. Ils réussirent à prendre un grand nombre de captifs avant que le navire ne sombre et que le reste de ses occupants périssent noyés. Le nombre de prisonniers s’éleva à 1 676 et cela fut une occasion pour battre les tambours de la victoire.

 

 

 

De la traversée de l’Euphrate et de la prise des terres d’al-Jazirah par Salah ad-Din

 

Cette année, Salah ad-Din traversa l’Euphrate pour les terres d’al-Jazirah et les conquit.

Cela arriva parce que Mouzaffar ad-Din Koukbouri Ibn Zayn ad-Din ‘Ali Ibn Baktakin, le propriétaire du fief de Harran, à savoir la ville et la citadelle qui lui avait été assigné par l’Atabeg ‘Izz ad-Din parce qu’il était digne de confiance et fiable, contacta Salah ad-Din pendant qu’il assiégeait Beyrouth, pour l’informer du fait qu’il était avec lui, un ami de son gouvernement et il lui promit de le soutenir s’il traversait l’Euphrate en l’encourageant et le pressant de venir à lui. Salah ad-Din quitta Beyrouth, pendant que les envoyés de Mouzaffar ad-Din arrivaient chez lui les uns après les autres en lui conseillant de venir, si bien qu’il se dépêcha faisant courir la rumeur qu’il projetait d’assiéger Alep pour dissimuler sa destination réelle.

Alors qu’il se trouvait près de l’Euphrate, Mouzaffar ad-Din arriva, traversa le fleuve et rencontra Salah ad-Din. Ils marchèrent ensemble à Bira qui est une puissante forteresse sur la rive est de l’Euphrate. Son seigneur avait déjà rejoint Salah ad-Din et offert sa soumission pour la raison que nous avons déjà mentionnée. Lui et son armée traversèrent alors l’Euphrate par le pont qui est à Bira.

 

Quand ‘Izz ad-Din, le seigneur de Mossoul et Moujahid ad-Din entendirent parler de l’arrivée de Salah ad-Din en Syrie, ils rassemblèrent leurs armées et se rendirent à Nisibis, prêts à prévenir Salah ad-Din d’interférer avec Alep. Ils avancèrent alors à Dara, où ils campèrent et ce qu’ils n’avaient pas pris en compte arriva. Les nouvelles que Salah ad-Din avait traversé l’Euphrate leur parvinrent et ils se retirèrent alors à Mossoul et envoyèrent une force à Edesse pour tenir la ville et la protéger.

Entendant cela, l’impatience de Salah ad-Din grandit. Après avoir traversé le fleuve, il écrivit aux princes de ces régions et leur fit de belles promesses en leur offrant des cadeaux généreux pour leur soutien.

Nour ad-Din Muhammad Ibn Qara Arsalan, le souverain de Hisn Kayfa répondit à sa demande à cause de l’accord qui avait été conclu entre eux quand Nour ad-Din était avec lui en Syrie et il fut convenu que Salah ad-Din assiégerait Amid, la prendrait et la lui remettrait ensuite.

 

Salah ad-Din marcha sur Edesse qu’il mit sous siège au mois de Joumadah Awwal de cette année et l’attaqua violemment. Un soldat qui participa à cet assaut m’a raconté qu’il compta quatorze trous sur une surface de la longueur d’une lance que les flèches avaient percée. Les assauts se poursuivirent  régulièrement. Le détenteur de ce fief était à l’époque l’émir Fakhr ad-Din Mas’oud az-Za’farani. Quand il vit l’intensité de l’assaut, il admit qu’il devrait se soumettre, demanda des conditions et abandonna la ville en rejoignant le service de Salah ad-Din.

Ayant pris la ville, Salah ad-Din attaqua la citadelle qui lui remise par le châtelain en échange d’un peu d’argent. Après sa chute, il la remit à Mouzaffar ad-Din avec Harran. Puis il se rendit à Raqqah via Harran. Quand il arriva, le souverain du fief, Qoutb ad-Din Yinal Ibn Hassan al-Manbiji, l’abandonna et se rendit chez l’Atabeg ‘Izz ad-Din. Salah ad-Din reprit la ville et procéda ensuite à Khabour, Qarqissiyah, Maksin et ‘Araban, dont il prit le contrôle.

Lorsqu’il eut pris tout Khabour, il alla à Nisibis où il prit aussitôt la ville. La citadelle résista mais après un siège de quelques jours, il la prit aussi. Il resta dans la place le temps de mettre ses affaires en ordre et l’assigna comme fief à un émir qui était avec lui, nommé Abou al-Hayja’ as-Samin avant de partir, accompagné par Nour ad-Din le souverain de Hisn Kayfa.

C’est alors qu’il reçut des nouvelles que les croisés avaient attaqué Damas, pillé ses villages et atteint Darayah ou ils projetèrent de détruire sa mosquée. Le gouverneur de Damas leur envoya un groupe de chrétiens locaux pour leur dire : « Si vous détruisez la mosquée nous la reconstruirons de nouveau mais nous démolirons chaque église que vous avez dans nos terres et ne permettrons à personne de les reconstruire. » Ils la laissèrent donc en paix.

Quand ces nouvelles atteignirent Salah ad-Din, ceux qui étaient dévoués pour l’honneur de la religion lui conseillèrent de retourner mais il dit : « Ils peuvent ruiner quelques villages mais nous conquerrons des terres pour les remplacer et nous les revivifierons de nouveau et gagnerons de la force pour attaquer leurs terres. » Il ne revint donc pas et les choses arrivèrent comme il l’avait dit.

 

Du siège de Mossoul

 

Lorsqu’il eut pris Nisibis, il réunit ses émirs et ses conseillers et leur demanda leur avis sur quelle ville il devrait d’abord attaquer, Mossoul, Sinjar ou al-Jazirat Ibn ‘Omar et ils donnèrent des opinions opposées. Mouzaffar ad-Din Koukbouri Ibn Zayn ad-Din dit : « Un départ ne devrait être fait avec nulle autre destination que celle de Mossoul. C’est dans notre pouvoir et elle est sans défenseur. Quand ‘Izz ad-Din et Moujahid ad-Din seront informé de notre marche, ils l’abandonneront et iront dans un de leurs forts dans les Hautes terres. » Nassir ad-Din Muhammad Ibn Shirkouh, le neveu de Salah ad-Din agréa car il avait offert à Salah ad-Din une grande somme d’argent pour recevoir Mossoul en fief et s’il prenait la ville, Salah ad-Din satisferai sa demande  c’est pourquoi, il proposa ce point de vue à cause de son propre intérêt.

 

Salah ad-Din marcha donc sur Mossoul. Son souverain, ‘Izz ad-Din et Moujahid ad-Din y avaient rassemblé de larges forces, des cavaliers et des fantassins, des quantités d’armes et des engins de siège suffisants pour stupéfier le spectateur. Ils dépensèrent beaucoup d’argent et Moujahid ad-Din la plupart de ses biens. Il se chargea personnellement des affaires et fit d’excellentes préparations. Ils équipèrent aussi les places qui étaient entre leurs mains comme al-Jazirat Ibn ‘Omar, Sinjar et Irbil parmi d’autres avec des hommes, des armes et de l’argent.

Salah ad-Din avança jusqu’à ce qu’il arrive près de Mossoul. Alors il laissa l’armée et avec Mouzaffar ad-Din, son neveu Nassir ad-Din et un petit groupe de ses commandants, ils se rapprochèrent de la ville pour la voir et l’évaluer et ce qu’il vit le stupéfia et l’intimida lui et ses compagnons car il vit une grande et puissante ville, sa muraille et ses fortifications bondées d’hommes et pas un créneau sans un combattant derrière. En voyant cela,  Salah ad-Din réalisa qu’il serait incapable de la prendre et qu’il se retirerait déçu. Il dit à son neveu Nassir ad-Din : « Quand nous reviendrons au camp, je te rendrais ton argent car je retire ce que je t’ai dit. » Nassir ad-Din répondit : « Je rétracte donc mon offre d’argent. Cette ville est trop puissante pour être attaquée. »

Salah ad-Din lui dit alors ainsi qu’à Mouzaffar ad-Din : « Vous m’avez trompé tous les deux. Vous m’avez incité pour une tâche impossible. Si j’avais attaqué en premier ailleurs cela aurait été plus facile de la prendre par la réputation et la frayeur que nous aurions acquis. Si nous l’assiégeons et nous retirons ensuite, notre réputation sera ébranlée, notre avantage et pouvoir atténué. »

Il revint donc dans son camp et le matin suivant dans la ville qu’il assiégea au mois de Rajab et investi la ville de près. Il prit position face à la Porte de Kinda, posta le seigneur de Hisn Kayfa à la Porte du Pont et son frère Taj al-Moulouk à la Porte de ‘Imadi.

L’assaut débuta et il ne gagna aucun avantage. Un jour, certains habitants firent une sortie et leur infligèrent des pertes. ‘Izz ad-Din et Moujahid ad-Din ne permirent à aucune troupe régulière d’aller lutter car ils les avaient confinés à la défense sur les murs. Taqi ad-Din conseilla à son oncle Salah ad-Din d’ériger un trébuchet mais Salah ad-Din dit : « Aucun trébuchet ne peut être monté contre une ville comme cela et si nous le faisons, ils le saisiront. Si nous devions détruire une tour et une partie de la muraille, qui pourrait entrer dans la ville avec cette telle multitude à l’intérieur ? » Taqi ad-Din insista et dit : « Permet-moi de les tester avec, » et finalement une catapulte fut déployée. En réponse à cela, neuf trébuchets furent érigés dans la ville et ensuite un groupe d’habitants émergea et l’a saisi après un lourd combat auprès d’elle. Un des habitants prit une pièce de bois avec quantité de clous qu’il lanca sur un émir appelé Jawouli al-Assadi, le commandant et membre aîné de l’Assadiyah, qui l’atteignit sur la poitrine et lui causa une sévère douleur. Il ramassa la pièce, se retira de la bataille, se rendit chez Salah ad-Din et lui dit : « Les gens de Mossoul luttent maintenant contre nous avec des masses dont nous n’avons jamais vu de pareille. » Il la jeta alors et jura qu’il ne combattrait pas de nouveau, outragé d’avoir été frappé par une telle chose.

 

Après cela, Salah ad-Din se déplaça de sa position près de la ville et campa à distance de peur de sorties nocturnes car il ne pouvait pas être sûr d’eux. L’autre raison est que Moujahid ad-Din envoya une nuit un groupe d’hommes par la poterne de la citadelle portant des flambeaux. L’un d’entre eux partit par la porte et descendit dans l’Euphrate près de la source de soufre ou il diffusa la lumière. L’armée vit alors des gens sortir et furent convaincu d’une attaque surprise ce qui conduisit à leur départ et à leur retrait pour que les sorties nocturnes soient impossibles pour les défenseurs de Mossoul.

 

Le Sheikh Sadr ad-Din (puisse Allah lui faire miséricorde) était venu trouver Salah ad-Din avant la bataille avec Bashir un des eunuques du calife an-Nassir Li-Dinillah, pour lui proposer la paix. Ils restèrent avec Salah ad-Din devant Mossoul et les envoyés allèrent d’avant en arrière entre ‘Izz ad-Din et Moujahid ad-Din pour discuter de la paix. ‘Izz ad-Din demanda la restauration des terres qui lui avaient été prises à quoi Salah ad-Din répondit favorablement à condition qu’Alep lui soit remise. ‘Izz ad-Din et Moujahid ad-Din refusèrent et Salah ad-Din abandonna cette clause et accepta de renoncer aux terres à condition qu’ils ne fournissent aucune aide au seigneur d’Alep contre lui mais ils n’acceptèrent pas non plus. ‘Izz ad-Din dit : « Il est mon frère et il a des engagements et des pactes qu’il m’est impossible de rompre. »

Des envoyés de Qizil Arsalan, le seigneur d’Azerbaïdjan et de Shah Arman, le seigneur de Khilat arrivèrent aussi pour s’entretenir de la même affaire mais rien ne fut arrangé et aucune paix ne fut conclue.

 

Quand Salah ad-Din vit qu’il n’accomplirait rien en ce qui concerne Mossoul et qu’il obtiendrait seulement des problèmes et la fatigue et que les troupes de Mossoul qui étaient à Sinjar bloquaient la route de ses troupes et de ses hommes qui essayaient de le rejoindre, il quitta Mossoul pour aller à Sinjar.



[1] Youssouf en arabe est aussi le nom de Salah ad-Din.

[2] Un coupeur de route et un bandit sanguinaire qui avait particulièrement l’habitude de s’attaquer aux pauvres civils désarmés et les faibles.

[3] Les grottes forteresses sont des séries de grottes imprenables dans des montagnes d’accès difficile et le meilleure exemple de grotte-forteresse qui me vient à l’idée est certainement celui de la montagne de Tora Bora en Afghanistan ou se réfugièrent environ 200 combattants d’al-Qa’idah avec leur fameux chef Oussama Ibn Laden (puisse Allah Exalté lui faire miséricorde) lors de l’invasion de l’Afghanistan en décembre 2001. La chaine de montagnes fut lourdement pilonnée avec des bombes de pénétrations (bunker buster) et ce n’est que bien plus tard, après que les combattants eurent quittés les lieux que les Américains envoyèrent des soldats afghans qui pénétrèrent les premiers dans le réseau de grottes qui s’avérèrent n’être que des séries de petites grottes ordinaires vides et non pas la caverne d’Ali Baba Ultra Tech comme on a pu le lire dans les quotidiens à deux sous. (http://en.wikipedia.org/wiki/Tora_Bora et http://en.wikipedia.org/wiki/Battle_of_Tora_Bora)

Je vous rappelle que le Sheikh Oussama Ibn Laden trouva la mort en activant son gilet piégé qu’il ne quittait jamais lors d’un assaut à Abbottābād en 2011, d’où l’absence de photos. (http://washington.cbslocal.com/2013/05/29/former-bin-laden-bodyguard-claims-terror-leader-blew-himself-up-during-raid/)