L’expédition de Salah ad-Din contre Karak et
son retrait
Au
mois de Shawwal de cette année, Salah ad-Din quitta l’Egypte avec
toutes ses forces et se rendit sur les terres des croisés pour
joindre Nour ad-Din qui avait décidé d’attaquer et d’assiéger Karak.
Ils convinrent d’attaquer le territoire croisé de deux directions,
chacun commandant ses propres troupes. Cela s’explique par le fait
que Nour ad-Din avait blâmé Salah ad-Din pour son retrait du
territoire croisé durant l’année précédente. Nour ad-Din voulut
attaquer l’Egypte et la lui prendre mais Salah ad-Din envoya ses
excuses avec les promesses qu’il obéirait à tous les ordres que Nour
ad-Din déciderait. Il fut convenu entre eux que Salah ad-Din
bougerait de l’Egypte et Nour ad-Din de Damas et que le premier sur
place attendrait l’arrivée de l’autre. Ils fixèrent un jour bien
déterminé pour leur rendez-vous et Salah ad-Din quitta l’Egypte le
premier parce que sa route était plus difficile, plus longue et plus
fatigante. Il arriva à Karak et l’assiégea.
Nour
ad-Din, après avoir reçu la lettre de Salah ad-Din annonçant son
départ de l’Egypte, distribua de l’argent, prépara des provisions et
ce dont il aurait besoin et disposa pour Karak. Il atteignit
ar-Raqim, qui est à deux jours de voyage de Karak et quand Salah
ad-Din fut informé qu’il était à côté, lui et toute sa famille
furent effrayés de Nour ad-Din et ils tous furent d’accord pour un
retour en Egypte. Il renonça à son rendez-vous avec Nour ad-Din,
parce qu’ils se sont
tous rendus compte que si les deux hommes se rencontrait, il serait
facile pour Nour ad-Din de le renvoyer.
Après
son retour, il envoya son juriste ‘Issa auprès de Nour ad-Din pour
s’excuser de son départ pour la raison qu’il avait laissé son père
Najm ad-Din Ayyoub comme son député en Egypte mais qu’il était tombé
gravement malade sur le point de mourir et qu’il craignait de perdre
le pays. Il envoya avec lui des rares cadeaux au-delà de toute
description. L’envoyé vint chez Nour ad-Din et lui donna le message.
Nour ad-Din fut outragé et comprit quelle était la cause de son
retour bien qu’il ne montra pas de réaction à l’envoyé mais lui
dit : « Préserver l’Egypte est plus important pour nous que
n’importe quoi d’autre. »
Salah
ad-Din revint en Egypte pour constater que son père était déjà
décédé et parti pour rencontrer son Seigneur. La cause de la mort de
Najm ad-Din est due au fait
qu’il alla un jour au Vieux Caire et son cheval s’emporta de
façon très insensée. Il tomba et fut emmené dans sa résidence
mortellement blessé. Il agonisa quelques jours puis mourut le 27 du
mois de Dzoul Hijjah. Il était homme bon et sage, d’excellente
conduite, généreux, très gentil avec les pauvres savants et les
soufis ainsi qu’un habitué de leurs réunions. Ce que nous avons dit
de lui, du début de sa carrière et ce de son frère Shirkouh n’ont
pas besoin d’être répété ici.
Le
Tigre monta beaucoup cette année et particulièrement au mois de
Sha’ban
Baghdad fut sur le point d’être inondé et les portes des quartiers
furent bloquées. L’eau atteignit le mausolée dôme d’Ahmad Ibn
Hanbal, la Nizamiyah et l’Hospice du Sheikh. Les habitants
travaillèrent eux-mêmes sur le canal Qourij mais l’eau reflua et les
gens furent épargnés par le désastre.
Cette
année, il y eut un feu à Baghdad du quartier Bahrouz et qui
s’étendit aussi loin que
la porte de la mosquée du palais et dans l’autre direction de la
Pierre de Cuivre jusqu’à la résidence de la mère du calife.
Cette
année l’émir Yazdan, un des émirs les plus importants de Baghdad
mourut. Il avait des sympathies shiites et il y eut une épidémie de
discorde entre les Sounnis et les shiites dans Wassit à son sujet
parce que les shiites tinrent une séance de condoléance pour lui
tandis que les Sounni manifestèrent leur joie suite à sa mort. La
situation finit en bataille et plusieurs personnes furent tuées des
deux côtés. Après la mort de Yazdan son frère Tounamish fut assigné
à toutes ses possessions à savoir, la ville de Wassit et on lui
donné le titre honorifique de ‘Ala' ad-Din.
Comment Shams ad-Dawlah conquit Zabid, Aden et d’autres
endroits du Yémen
Nous
avons déjà raconté que Salah ad-Din, le seigneur de l’Egypte et sa
famille furent effrayés que Nour ad-Din Mahmoud puisse entrer dans
l’Egypte et la reprendre. Ils s’embarquèrent donc pour trouver un
royaume qu’ils pourraient envahir et conquérir pour leur servir
d’asile. Si Nour ad-Din les chassait d’Egypte, ils pourraient alors
aller résider là. Ils envoyèrent Shams ad-Dawlah Touranshah Ibn
Ayyoub, le plus vieux frère de Salah ad-Din en Nubie comme nous
l’avons déjà rapporté.
Quand
il revint en Egypte, il demanda la permission à Nour ad-Din d’aller
au Yémen attaquer ‘Abden-Nabi, le souverain de Zabid et saisir ses
terres parce que la
Khoutbah pour les Abbassides avait été supprimé. Il donna cette
permission en l’an 569 de l’Hégire (1173).
Il y
avait en Egypte un poète nommé ‘Oumara, qui était du Yémen et qui
encouragea Shams ad-Dawlah à envahir le Yémen avec les descriptions
du pays qu’il lui fournit et qui augmenta son importance à ses yeux
et ajoutèrent à son impatience. Il commença à faire ses préparatifs,
apprêta des provisions, des outres d’eau, des armes et d’autre
équipement. Il leva des troupes en grand nombre et quitta l’Egypte
le 1 du mois de Rajab. Il traversa La Mecque (puisse Allah la
glorifiée) et continua à Zabid dont le souverain qui tenait
l’endroit s’appelait ‘Abden-Nabi. Quand il arriva à proximité, il
fut aperçu par les habitants qui estimèrent sa suite peu nombreuse.
‘Abden-Nabi leur dit : « Je ne peux que vous voir juste affronter
ces hommes déjà terrassés par la chaleur et à demi-morts. Ils ne
sont qu’un simple souci ! » Il sortit donc à leur rencontre avec ses
troupes mais quand Shams ad-Dawlah et ses hommes les engagèrent, les
hommes de Zabid cédèrent et s’enfuirent.
Quand
les Egyptiens atteignirent la muraille de la ville, ils n’y
trouvèrent aucun défenseur. Ils déployèrent donc leurs échelles,
grimpèrent, prirent la ville par la force et la pillèrent
complètement. ‘Abden-Nabi fut prisonnier et aussi sa femme
al-Hourrah qui était une
femme dévote et très charitable particulièrement lors du Pèlerinage.
Elle était agréable et gentille avec les pauvres pèlerins et leur
donnaient d’abondantes aumônes.
Shams
ad-Dawlah livra ‘Abden-Nabi à un de ses émirs nommé Sayf ad-Dawlah
Moubarak Ibn Kamil des Banou Mounqid les seigneurs de Shayzar et lui
ordonna d’extraire les informations ou il cachait ses richesses.
‘Abden-Nabi lui donna un grand mal mais plus tard, il leur donna
l’emplacement où il avait enterré ses trésors à savoir le tombeau
qu’il avait fait pour son père et où il avait érigé un grand
bâtiment. L’argent fut extrait en quantité significative. Quant à
al-Hourrah, elle indiqua aussi où elle avait des dépôts et de
grandes sommes furent prises d’elle.
Ayant
pris Zabid et établi leur contrôle sur une population soumise, la
Khoutbah pour les Abbassides fut restituée et l’administration
locale mis en ordre. Ils procédèrent alors vers Aden sur la côte qui
était un grand point d’ancrage et le port pour l’Inde, le Zanj,
l’Abyssinie, l’Oman, Kerman, Kish, Fars et ailleurs. Du côté
intérieur, Aden était une des villes les plus fortifiées et si son
souverain était resté à l’intérieur et n’était pas sorti, Shams
ad-Dawlah se serait retiré sans victoire. Ce fut juste son ignorance
et la fin de son temps qui le poussa à faire une sortie et les
affronter dans la bataille ou Yassar et ses hommes s’enfuirent mais
un groupe de l’armée de Shams ad-Dawlah les dépassa et entra avant
eux dans la ville qu’ils prirent faisant ainsi prisonnier son
souverain Yassar. Ils voulurent piller la ville mais Shams ad-Dawlah
les arrêta et dit : « Nous ne sommes pas venus pour détruire le pays
mais plutôt pour prendre le pouvoir, le développer et bénéficier de
ses revenues. » Personne ne pilla rien, la ville resta intacte et le
souverain Shams ad-Dawlah devint fermement établi.
Quand
il partit pour Aden, ‘Abden-Nabi était avec lui prisonnier et
lorsqu’il entra dans Aden, il dit : « Gloire à Allah ! J’ai toujours
su que j’entrerais dans Aden en grande pompe. J’en avais la
certitude et était heureux à cette idée mais je ne savais pas que
j’entrerais dans ces circonstances. »
Après
avoir fini ses affaires à Aden, Shams ad-Dawlah revint à Zabid et
assiégea les forteresses dans les montagnes. Il prit Ta’izz, un des
plus puissants forts où les trésoreries du souverain de Zabid
étaient entreposées. Il prit aussi le château d’at-Ta’kour, de Janad
aussi que d’autres châteaux et forteresses.
Il
laissa à Aden son lieutenant ‘Izz ad-Din ‘Uthman Ibn az-Zanjili et
dans Zabid Sayf ad-Dawlah Moubarak Ibn Mounqid. Dans chaque fort il
nomma un de ses hommes comme son député.
Leur
règne au Yémen s’enracina et survécu. Shams ad-Dawlah fut
bon avec les gens du pays et gagna leur sincère allégeance
avec sa justice et sa bonté. Zabid devint un excellent état de
culture et de tranquillité.
De l’exécution de plusieurs Egyptiens qui projetèrent
d’assassiner Salah ad-Din
Le 2
du mois de Ramadan de cette année en Egypte, Salah ad-Din crucifia
plusieurs des disciples du calife ‘oubaydi qui planifièrent son
assassinat.
Cela
arriva parce qu’un groupe de ‘oubaydi ismaélien shi’i dont le poète
‘Oumara Ibn Abi al-Hassan
al-Yamani, ‘Abdes-Samad le secrétaire, le Qadi al-‘Ouwayris, des
chefs de l’armée ismaélienne, leur infanterie de Noirs, les
courtisans du palais avec l’accord de plusieurs des émirs Salah
ad-Din et des soldats acceptèrent d’appeler à l’aide les croisés de
Sicile et du littoral syrien en échange d’argent et de terres. S’ils
attaquaient l’Egypte, Salah ad-Din irait en personne à leur
rencontre et alors, ils se rebelleraient dans le Nouvel et Vieux
Caire et restitueraient la dynastie ‘oubaydi et les membres de son
armée qui étaient de connivence avec eux l’abandonnerait le laissant
ainsi incapable de faire face aux croisés. Et dans le cas ou si
Salah ad-Din restait en arrière et envoyait des troupes contre eux,
ils se rebelleraient contre lui et le saisiraient parce qu’il
manquerait d’aide et de soutien. ‘Oumara dit : « J’ai supprimé son
frère en l’envoyant au Yémen craignant qu’il puisse combler le vide
après lui et qu’il le choisisse comme successeur. »
Ils
envoyèrent des messages aux croisés de Sicile et du Levant avec
cette proposition et le plan déjà convenu, tout qu’il restait donc à
faire pour les croisés étaient de se mettre en route.
Cependant, par la grâce d’Allah sur les Musulmans, les conspirateurs
égyptiens impliquèrent l’émir Zayn ad-Din ‘Ali Ibn Najah le prêcheur
surnommé Ibn Noujiyah dans leur complot. Ils s’arrangèrent pour
nommer le calife, le vizir, le chambellan, le Qadi mais la famille
Rouzzik dit : « Le vizir sera l’un d’entre nous » et la famille de
Shawar dit : « Le vizir sera l’un d’entre nous. ». Quand Ibn Najah
apprit ce qui se préparait, il vint trouver Salah ad-Din et lui
raconta tout. Il lui ordonna de rester et de se mélanger avec eux et
de marcher avec leur complot tout en le gardant informé de tous les
développements. Il fit ce qui était demandé de lui et l’informa de
toutes leurs intentions.
Un
envoyé du roi des croisés du littoral syrien vint trouver Salah
ad-Din avec un cadeau et un message. Officiellement il vint chez lui
mais secrètement vint chez ces conspirateurs en leur envoyant un
chrétien local pour recevoir leurs messagers.
Salah
ad-Din fut informé de la véritable situation du territoire croisé et
prit des dispositions pour qu’un chrétien local à qui il faisait
confiance surveille l’envoyé. Il gagna sa confiance et l’envoyé lui
dévoila l’affaire. Sur ce, Salah ad-Din arrêta les leaders du
complot dont ‘Oumara, ‘Abdes-Samad, al-‘Ouwayris et d’autres et les
fit crucifié.
Il fut
dit dans le cadre de la découverte de leur complot que chaque fois
ou ‘Abdes-Samad rencontra al-Qadi al-Fadil, le secrétaire de Salah
ad-Din, il le salua respectueusement et fit son maximum pour bien se
faire voir de lui cependant, il le rencontra un jour et ne lui porta
aucune attention et al-Qadi al-Fadil se dit : « Il doit y avoir une
raison pour cela » et il craignit qu’il ait put avoir une
incompréhension personnelle avec Salah ad-Din. Il convoqua donc ‘Ali
Ibn Najah le prêcheur, l’informa de la situation et dit : « Je veux
que tu découvres pour moi ce qui est arrivé. » Par conséquence, il
vérifia l’affaire et ne trouva rien en ce qui concerne Salah ad-Din
qui aurait pu l’inquiété donc, il chercha de l’autre côté et
découvrit le complot puis vint trouver al-Qadi al-Fadil et
l’informa. « Va dès maintenant chez Salah ad-Din, » lui dit-il « et signale-lui
l’affaire. » Il alla retrouver Salah ad-Din qui était dans la
mosquée et lui dit tout. Salah ad-Din sortit et arrêta les
conspirateurs. Après leurs interrogatoires et leurs confessions, il
ordonna de les crucifier.
Il
existait entre ‘Oumara et al-Fadil une inimité qui datait des jours
d’al-‘Adid et quand sa crucifixion fut suggérée, al-Qadi al-Fadil se
leva et adressa une requête à Salah ad-Din pour sa libération.
‘Oumara pensa qu’il recommandait sa destruction et dit à Salah
ad-Din : « Mon seigneur, ne l’écoutez pas en ce qui me concerne. »
Al-Fadil devint furieux et abandonna. Salah ad-Din dit à ‘Oumara :
« Il intercédait pour toi, » après quoi il regretta. ‘Oumara fut
emmené pour être crucifié et il demanda qu’il soit emmené devant la
maison d’al-Fadil ce qu’ils firent mais ce dernier ferma sa porte et
ne le rencontra pas. ‘Oumara dit :
« ‘Abder-Rahim s’est caché ;
La
délivrance serait vraiment une merveille ! »
Lui et
les autres furent dûment crucifiés et une déclaration fut faite aux
soldats ‘oubaydi ismaéliens qu’ils devraient quitter le Caire et
partir dans les parties les plus éloignées de la Haute Egypte tandis
que la progéniture d’al-‘Adid
qui étaient dans le palais furent mis sous surveillance ainsi
que d’autres membres de sa famille.
Ceux
de ses troupes qui agirent traîtreusement envers Salah ad-Din furent
laissés mais il leur fit savoir qu’il savait tout d’eux. Quant au
croisés, qu’Allah les maudisse, de Sicile, ils attaquèrent
Alexandrie, ce que nous rapporterons si Allah Exalté le veut, parce
qu’il ne leur avait pas été communiqué que le complot avait été
révélé à Salah ad-Din tandis que les croisés du littoral syrien ne
firent aucun mouvement parce qu’ils avaient été informé de l’échec
du complot.
De la mort de Nour ad-Din Mahmoud Ibn Zanki (qu’Allah lui
fasse miséricorde)
Le
mercredi 11 Shawwal de cette année, Nour ad-Din Mahmoud Ibn Zanki
Ibn Aqsounqour, le seigneur de la Syrie, d’al-Jazirat et de
l’Egypte, mourut d’une angine et initialement enterré dans la
citadelle de Damas, son corps fut transféré à la Madrassah qu’il
avait construit à Damas près du marché des vendeurs de feuilles de
palmes.
Par
une étrange coïncidence,
le 2 Shawwal il chevaucha avec un de ses meilleurs émirs à ses côtés
qui lui dit : « Gloire à Celui qui sait si nous nous
rencontrerons ici l’année prochaine ou non ! » Nour ad-Din lui
répondit : « Dit plutôt Gloire à celui qui sait si nous nous
rencontrerons dans un mois ou non ! » Nour ad-Din (qu’Allah lui
fasse miséricorde) mourut onze jours plus tard et l’émir qui
l’accompagnait mourut avant que l’année soit écoulée. Chacun fut
pris selon ses mots.
Il
avait entrepris des préparations pour aller en Egypte et la
reprendre de Salah ad-Din car il avait vu son relâchement dans le
fait de mener la guerre contre les croisés et il se rendit compte
que ce qui avait prévenu Salah ad-Din de prendre des mesures
militaires était simplement la peur de lui et d’une rencontre. Il
préféra avoir en travers de sa route les croisés comme un tampon
contre Nour ad-Din et il envoya des messages à Mossoul, al-Jazirah
et Diyar Bakr pour demander des troupes pour l’expédition. Il avait
l’intention de laisser ses terres entre les mains de son neveu, Sayf
ad-Din Ghazi et aller en personne avec ses troupes en Egypte.
Pendant qu’il faisait ses préparations, il reçut le décret d’Allah
qui ne peut être évité.
Un
docteur surnommé le docteur de Rahbah, un médecin très qualifié qui
traita Nour ad-Din me dit la chose suivante :
« Au
cours de ce qui devint sa maladie fatale, Nour ad-Din me convoqua
avec d’autres docteurs. Nous sommes venus chez lui dans une petite
pièce dans la citadelle de Damas quand son angine s’était déjà bien
développée et qu’il était près de la mort. Sa voix était à peine
audible. C’était quand il se retira pour son culte privé. Sa maladie
commença là et il ne bougea pas. Quand nous entrâmes et virent son
état, je lui dis : « Tu n’aurais pas dû retarder notre convocation
jusqu’à ce que tu sois ainsi gravement malade. Tu devrais rapidement
bouger de cet endroit et aller dans un endroit lumineux et aéré car
cet endroit affecte cette maladie. » Nous commençâmes à le traiter
et avisâmes qu’il devait avoir une saignée. Il dit : « Une personne
de soixante ans ne doit pas être saignée » et il refusa. Nous lui
donnâmes d’autre traitement mais la médecine était inutile. Sa
maladie augmenta et il décéda (puisse Allah Exalté lui faire
miséricorde).
Il
était hâlé et de haute stature. Il n’avait pas de barbe à part sur
son menton et un large front. Il était un bel homme avec des yeux
attrayants. Son dominion s’étendit beaucoup et son nom était
prononcé dans la Khoutbah à La Mecque, à Médine et au Yémen après sa
conquête par Shams ad-Dawlah Ibn Ayyoub. Il naquit en l’an 511 de
l’Hégire (1118) et la renommée de son règne bon et juste couvrit le
monde. J’ai lu les règnes des princes précédents et après les
Califes Bien Guidés et ‘Omar Ibn ‘Abdel-‘Aziz, je n’ai vu de
meilleur règne, ni qui aspirait à plus de justice.
Nous
avons parlé de cela dans une grande partie de notre livre
al-Bahir sur la dynastie
des Zanki. Nous donnerons toutefois ici un bref compte rendu dans
l’espoir que ceux qui brandissent l’autorité le liront attentivement
et le prendront comme modèle. Il y avait par exemple son ascétisme,
sa piété et son apprentissage.
Il
avait l’habitude de manger, de s’habiller et suivre ses affaires
personnelles seulement de sa propre propriété qu’il avait achetée de
sa part du butin ou de l’argent désigné pour le bien général des
Musulmans. Sa femme se plaignit à lui des difficultés et il lui
donna trois magasins qu’il possédait dans Homs et dont il gagnait
environ vingt dinars annuellement. Quand elle estima que ce n’était
pas assez, il lui a dit : « C’est tout ce que j’ai. Pour tout ce qui
est entre mes mains, je suis un gardien pour les Musulmans et je ne
les trahirai pas ni m’embourberait dans les Tourments de l’enfer à
cause de toi. » Il avait l’habitude de prier beaucoup pendant la
nuit et avait quelques prières particulières parfaites.
Comme
il est dit :
« Il
réunit tant le courage que l’humilité devant son Seigneur.
Combien est excellent le guerrier dans le mihrab ! »
Il
était aussi instruit dans les lois Hanafi sans pour autant en être
un fanatique. Il étudia les Hadith et les a transmis à d’autres, en
cherchant la récompense pour cela. Quant à sa justice, il abolit
dans l’intégralité de ses terres, les taxes non canoniques ou les
dîmes de même qu’en Egypte, la Syrie, al-Jazirat et Mossoul. Il
révéra la Shari’ah et honora ses ordonnances. Un homme le convoqua à
la cour de justice, donc il alla avec lui et envoya un message au
Qadi Kamal ad-Din Ibn ash-Shahrazouri disant : « On m’a appelé pour
répondre à une affaire. Comporte-toi envers moi comme tu te
comportes avec d’autres plaideurs. » Il fut démontré que le droit
était sien mais il l’accorda à la partie qui l’avait emmené devant
la cour. Il dit : « J’ai voulu lui permettre ce qu’il réclamait. Ma
seule crainte était que mon égo puisse se sentir trop puissant ou
trop fier pour venir devant la cour de Shari’ah. Donc j’y ai assisté
et lui ai accordé ce qu’il demandait. »
Dans
sa terre il a construit le Hall de Justice, où lui et le Qadi
avaient l’habitude de s’asseoir pour rendre la justice aux lésés,
même s’il était Juif, contre les malfaiteurs, aurait-il été son
propre fils ou son plus grand émir.
Quant
à sa bravoure, elle était la plus haute. À la guerre il avait
l’habitude de prendre deux arcs et deux carquois pour lutter avec.
Le juriste Qoutb ad-Din an-Nissabouri lui dit : « Pour l’amour
d’Allah, ne te mets pas toi, l’Islam et les Musulmans en danger. Si
tu es touché dans la mêlée pas un seul Musulman n’échappera à
l’épée. » Nour ad-Din lui répondit : « Qui est ce Mahmoud pour
qu’une telle chose soit dite de lui ? Avant moi qui protégeait les
terres et l’Islam ? C’était Allah en dehors de qui il n’y nul autre
dieu. »
Quant
à ses ouvrages publics, il bâtit les murailles des villes et des
forts de toute la Syrie dont celles de Damas, Homs, Hama, Alep,
Shayzar, Baalbek et d’autres. Il édifia beaucoup de Madrassah pour
les Shafi’i et les Hanafi ainsi que la mosquée Nouri à Mossoul. Il
construisit des hôpitaux et des caravansérails sur les routes
principales et des institutions pour les soufis partout dans ses
terres et pour lesquelles il fit de grandes dotations. J’ai entendu
dire que le revenu mensuel de ses trusts de bienfaisance était 9 000
Tyrian, des dinars syriens.
Il
avait l’habitude d’honorer et respecter les ‘Oulama et les hommes de
religion. Il leur offrait des cadeaux et se levait pour les
recevoir. Il assistait à leurs séances, se détendait avec eux et ne
les contredits jamais. Il entretenait aussi une correspondance avec
eux de ses propres mains. Cependant, il était honoré et inspirait la
crainte révérencielle en dépit de son humilité. Bref, ses bonnes
qualités étaient nombreuses et ses vertus abondantes et bien plus
que ce livre peut contenir.
De la succession de son fils al-Malik as-Salih
Après
la mort de Nour ad-Din (qu’Allah lui fasse miséricorde), son fils
al-Malik as-Salih Isma’il devint souverain alors qu’il était âgé de
onze ans. Les émirs et les lieutenants lui portèrent allégeance à
Damas où il prit résidence.
En
Syrie les gens lui offrirent leur obéissance aussi bien que Salah
ad-Din en Egypte en faisant la Khoutbah et les pièces frappées à son
nom. Sa tutelle fut exercée par l’émir Shams ad-Din Muhammad Ibn
‘Abdel-Malik surnommé (ou connut sous le nom de) Ibn al-Mouqaddam
qui devint l’administrateur de son état. Kamal ad-Din Ibn
ash-Shahrazouri lui dit ainsi qu’aux émirs avec lui : « Tu sais que
Salah ad-Din, le souverain de l’Egypte, est un des Mamalik de Nour
ad-Din et ses lieutenants sont aussi des hommes de Nour ad-Din. La
meilleure politique pour nous serait de le consulter sur ce que
devrions faire et ne pas exclure sinon il cessera de nous obéir et
nous en fera sa justification. Il est plus fort que nous le
sommes parce qu’aujourd’hui il a le contrôle unique de l’Egypte. »
Ces paroles ne convinrent pas à leurs objectifs et ils craignirent
que Salah ad-Din puisse entrer en Syrie et les expulser. Ce fut
seulement quelques temps plus tard que les lettres de Salah ad-Din
parvinrent à al-Malik as-Salih avec ses condoléances et ses
félicitations pour sa succession. Il envoya des dinars égyptiens
frappés à son nom et l’informa que la Khoutbah et l’allégeance lui
avait été porté comme s’il avait été son père.
Quand
Sayf ad-Din Ghazi, le seigneur de Mossoul, marcha et prit les villes
d’al-Jazirah, ce que nous rapporterons, Salah ad-Din envoya un
nouveau message à al-Malik as-Salih, en le réprimandant pour ne
l’avoir informé de l’attaque Sayf ad-Din et de la saisie de son
territoire, car il aurait pu venir pour être à son service et
empêcher Sayf ad-Din. Il écrivit aussi à Kamal ad-Din et les émirs,
en disant : « Si Nour ad-Din avait vu qu’il y avait quelqu’un parmi
vous qui pourrait prendre ma place ou qu’il pourrait se fier comme
il se fia à moi, il lui aurait donné l’Egypte, qui est le plus grand
de son royaume et dominion. S’il n’était pas mort prématurément, il
n’aurait pas assigné l’éducation de son fils et la régence à
quelqu’un d’autre que moi. Je vois que vous avez monopolisé mon
seigneur et le fils de mon seigneur et m’avez ignoré. Je viendrai
sûrement pour le servir et je rendrais la bonté de son père avec un
service dont l’effet sera clair et récompensera chacun d’entre vous
pour ses mauvaises actions et d’avoir failli à protéger ses
terres. »
Ibn
al-Mouqaddam et le groupe d’émirs gardèrent al-Malik as-Salih et ne
l’envoyèrent pas à Alep, de peur que Shams ad-Din ‘Ali Ibn ad-Dayah
ne puisse le dominer et les exclure, du fait qu’ils étaient les plus
grand des émirs de Nour ad-Din. Il fut simplement empêché de le
rejoindre et prendre la régence par une maladie qui le toucha. Lui
et ses frères étaient dans Alep et contrôlaient la ville. Comme
Shams ad-Din était incapable de voyager, il envoya un messager à
al-Malik as-Salih en le convoquant à Alep pour que par lui, il
puisse sauver les terres d’al-Jazirah de Sayf ad-Din Ghazi, le fils
de son oncle Qoutb ad-Din mais les émirs qui étaient avec lui ne
permirent pas à al-Malik as-Salih de partir pour Alep pour les
raisons que nous avons données.
Comment Sayf ad-Din prit les terres d’al-Jazirah
Avant
qu’il ne tombe malade, Nour ad-Din envoya un message aux terres de
l’est, Mossoul, al-Jazirah et d’autres, convoquant leurs troupes
pour le Jihad bien que son but ait été autre et que nous avons déjà
mentionné.
Sayf
ad-Din Ghazi Ibn Qoutb ad-Din Mawdoud Ibn Zanki, le seigneur de
Mossoul, se mit en route avec ses troupes dont il donna le
commandement de l’avant-garde à son eunuque Sa’d ad-Din
Koumoushtakin, que Nour ad-Din avait placé dans la citadelle de
Mossoul au côté de Sayf ad-Din. Quand ils eurent couvert une partie
de la route, ils reçurent les nouvelles de la mort de Nour ad-Din.
Sa’d ad-Din, qui était avec l’avant-garde, s’enfuit en abandonnant
ses lourds bagages (en général le matériel de guerre). Sayf ad-Din
prit tout l’équipement et d’autres choses qu’il avait et se rendit à
Nisibis, dont il prit le contrôle. Il envoya des préfets à Khabour
qu’il saisit et prit comme fief. Alors il procéda à Harran qu’il
assiégea durant plusieurs jours et qui était tenue par un Mamelouk
de Nour ad-Din nommé Qaymaz al-Harrani qui lui résista. Plus tard,
il offrit son obéissance sur la base que Harran devrait être sienne
et descendit pour porter allégeance à Sayf ad-Din qui l’arrêta et
lui prit Harran. Sur ce, il alla à Edesse qu’il assiégea et prit le
contrôle. Un eunuque noir de Nour ad-Din qui en était
l’administrateur, livra la place en échange du fort d’az-Za’faran
dans le district de Jazirat Ibn ‘Omar qui lui fut donné et reprise
plus tard si bien qu’il fut réduit à la mendicité pour se nourrir.
Sayf
ad-Din partit ensuite pour Raqqah qu’il prit ainsi que Sarouj
achevant ainsi son acquisition de toutes les terres de Jazirat Ibn
‘Omar excepté l’imprenable forteresse de Qal’at Ja’bar et Ras
al-‘Ayn qui appartenait à Qoutb ad-Din, le seigneur de Mardin, qui
était le cousin de Sayf ad-Din et dont il se tint éloigné.
Shams
ad-Din ‘Ali Ibn ad-Dayah, l’émir aîné de Nour ad-Din, était dans
Alep avec ses troupes. Il fut incapable de traverser le fleuve pour
s’opposer contre Sayf ad-Din et prévenir sa prise des villes parce
qu’il avait une hémiplégie. Il envoya un message à Damas demandant
al-Malik as-Salih mais ils ne lui pas envoyèrent pas pour les
raisons que nous avons mentionnées.
De
Siwas, Fakhr ad-Din ‘Abdel-Massih rejoignit Sayf ad-Din après la
mort de Nour ad-Din. Il était la personne qui l’établit dans le
pouvoir après son père Qoutb ad-Din et il crut que Sayf ad-Din lui
serait reconnaissant pour cela cependant, il ne recueillit pas les
fruits qu’il avait planté car il était juste un de ses émirs.
Lorsque Sayf ad-Din conquit les terres de Jazirat, Fakhr ad-Din lui
dit : « La meilleure des choses que tu puisses faires est de passer
en Syrie car il n’y a personne pour résister. » Son émir aîné nommé
‘Izz ad-Din Mahmoud et surnommé Zoulfandar lui dit : « Tu as regagné
maintenant la plupart de ce que ton père avait et le meilleur plan
pour toi est de te retirer. » Il s’inclina devant ce qu’il dit et
retourna à Mossoul à fin « qu’Allah accomplisse un ordre qui avait
déjà été décrété. »
Comment les croisés assiégèrent Banyas et se retirèrent par
la suite
Après
la mort de Nour ad-Din Mahmoud le seigneur de la Syrie, les croisés,
qu’Allah les maudisse, se réunirent et marchèrent sur le fort de
Banyas dans le district de Damas qu’ils mirent sous siège. Shams
ad-Din Muhammad Ibn al-Mouqaddam rassembla les troupes qu’il avait à
Damas et sortit à leur rencontre. Il contacta affablement les
croisés puis utilisa un ton rude et leur dit : « Si vous faites la
paix avec nous et vous vous retirez alors nous resterons sur nos
anciens termes mais dans le cas contraire, nous écrirons à Sayf
ad-Din, le seigneur de Mossoul, pour parvenir à un agreement avec
lui et demander son soutien puis nous écrirons à Salah ad-Din en
Egypte et lui demanderons aussi son soutien. Ainsi nous envahirons
vos terres de toutes les directions et vous ne vous tiendrez pas
contre nous. Vous savez que Salah ad-Din était effrayé de rencontrer
Nour ad-Din mais maintenant que la peur est décédée si nous
l’appelons pour vos terres, il ne refusera pas. » Ils se rendirent
compte que ce qu’il disait était la vérité et ils parvinrent à un
règlement entre eux en échange d’un peu d’argent qu’ils reçurent et
de la libération de certains de leurs prisonniers et la trêve fut
arrangée.
Quand
Salah ad-Din fut informé de cela, il fut outragé et exprima sa
désapprobation. Il écrivit à al-Malik as-Salih et aux émirs autour
de lui en les blâmant pour ce qu’ils avaient fait et leur offrit de
sa propre part d’attaquer les terres des croisé, de les amener à
livrer bataille et pour les dissuader d’attaquer la plus petite
parcelle du territoire d’al-Malik as-Salih. Son but était de gagner
l’accès en Syrie pour conquérir le pays. Les émirs syriens firent la
paix avec les croisés seulement par peur de lui et de Sayf ad-Din
Ghazi, le seigneur de Mossoul, car ce dernier avait déjà pris les
terres d’al-Jazirat et ils craignaient qu’il passe en Syrie. Ils
considérèrent que la paix avec les croisés était meilleure que
d’avoir celui de l’ouest et de l’est qui les tiendraient trop
occupés pour repousser les croisés.
Au
mois de Mouharram de cette année, un feu se déclencha à Baghdad. La
plupart de Zafariyah et d’autres endroits furent incendiés. Le feu
dura jusqu’au jour suivant et ensuite le feu fut éteint.
Au
mois de Sha’ban, Ibn Sankah, qui était le neveu de Shoumlah le
seigneur du Khouzistan bâtit un fort près d’al-Mahki pour l’utiliser
comme une place forte pour dominer ces régions. Le calife envoya des
troupes de Baghdad pour le prévenir. Quand ils se rencontrèrent, il
chargea l’aile droite en personne et la mit en fuite. Une
féroce bataille fut alors livrée et le neveu de Shoumlah fut
capturé et sa tête prise à Baghdad où elle fut accrochée à la Porte
de Nubie tandis que son fort fut démoli.
Au
mois le Ramadan, des pluies continuelles tombèrent sur Diyar Bakr,
al-Jazirat et Mossoul qui durèrent quarante jours pendant lesquels
nous avons vu le soleil seulement dans deux occasions et chaque fois
juste le clignement d’un œil. Les maisons et d’autres structures
tombèrent en ruines. Les effondrements furent nombreux et beaucoup
de personnes moururent ensevelies.
Le
Tigre monta beaucoup surtout à Baghdad et plus d’une coudée
au-dessus du plus haut niveau qui avait précédemment été enregistrée
depuis la fondation de Baghdad. Les gens craignirent la noyade et
abandonnèrent la ville et restèrent sur les rives du Tigre craignant
qu’il y ait des brèches dans le canal Qourij et d’autres endroits.
Quand une brèche apparaissait, ils se dépêchaient de la colmater.
L’eau jaillit aussi des égouts et ruina beaucoup de maisons de même
qu’elle pénétra dans l’hôpital d’Adoudi ou les bateaux entrèrent par
ses fenêtres car les grilles en fer avaient été emportées par la
force des eaux. Allah Exalté montra de la compassion à Ses gens
quand l’eau reflua alors qu’ils étaient sur le point de se noyer.
Toujours durant ce mois, de gros grêlons tombèrent sur Baghdad dont
nuls pareils n’ont jamais été vus. Ils détruisirent des maisons et
tuèrent plusieurs hommes et beaucoup de bétail. Un grêlon fut pesé à
sept Rotls. La plupart d’entre eux étaient aussi gros que des
oranges et brisèrent les branches. C’est ce qu’Abou al-Faraj Ibn
al-Jawzi signale dans son recueil d’histoire et la responsabilité
(de cette information) est sienne.
Il y
eut aussi cette année une bataille importante entre les habitants de
Porte de Basra et de la Porte de Karkh car lorsque l’eau monta les
hommes de Karkh construisirent un barrage qui garda l’eau à distance
d’eux mais qui inonda une mosquée.
Il y
avait là un arbre qui fut déraciné et les hommes de Karkh crièrent :
« L’arbre a été déraciné. Qu’Allah maudisse les dix ! » Ce qui
entraîna des troubles communautaires et le calife ordonna à ‘Ala'
ad-Din Tounamish de les retenir mais il fut défavorable contre les
hommes de la Porte de Basra parce qu’il était un shiite. Il voulut
entrer dans le quartier mais les habitants l’en empêchèrent. Ils
fermèrent les portes et montèrent sur les murs. Il voulut incendier
les portes mais cela parvint aux oreilles du calife qui le
réprimanda durement. Il ordonna de rappeler Tounamish qui se retira.
Les troubles durèrent une semaine et se calmèrent sans
l’intervention d’une quelconque autorité.
Durant
cette année aussi, l’empereur de Byzance traversa le Bosphore et
envahit la terre de Kilij Arsalan. La guerre s’ensuivit au cours de
laquelle les Musulmans furent victorieux. Quand l’empereur vit sa
propre faiblesse, il retourna chez lui après qu’un grand nombre de
son armée fut tué ou fait prisonnier.
L’arrivée de la flotte sicilienne à Alexandrie et à son
départ vaincue
Au
mois de Mouharram de l’année 570 de l’Hégire, les habitants
d’Alexandrie et l’armée égyptienne furent victorieux sur la flotte
croisée de Sicile.
Cela
arriva parce que comme nous l’avons relaté, les ‘oubaydi ismaéliens
envoyèrent des messagers au roi des croisés sur le littoral syrien
et au souverain de Sicile pour les pousser à envahir l’Egypte pour
qu’ils puissent eux-mêmes se révolter contre Salah ad-Din et le
chasser d’Egypte. Le souverain de Sicile équipa une grande flotte de
deux cents galères pour transporter des hommes, trente-six pour les
chevaux, six grands navires pour le matériel de guerre et quarante
vaisseaux de provisions. La flotte comprenait donc 50 000
fantassins, 1 500 cavaliers et 500 turcoples[1] commandée
par le cousin du souverain de Sicile qui mit les voiles vers
l’Egypte et particulièrement Alexandrie.
Ils
arrivèrent le 26 du mois de Dzoul Hijjah de l’année 569 de l’Hégire
(1174) alors que les habitants ne s’attendaient pas à eux et se
croyaient à l’abri. Ils sortirent en avant avec leurs armes et
équipement pour prévenir leur débarquement et s’éloignèrent de la
ville mais leur commandant les arrêta et leur ordonna de rester près
du mur. Les croisés débarquèrent près de la mer et du phare et
avancèrent vers la ville où ils érigèrent des tours de siège et des
trébuchets et lancèrent une féroce attaque. Les habitants tinrent
ferme contre eux bien qu’ils aient seulement quelques troupes
régulières avec eux. Les croisés furent stupéfiés de la bravoure des
habitants et de leurs excellentes armes.
Des lettres rapportant la situation furent envoyées à Salah
ad-Din pour le sommer de repousser l’ennemi
Le
premier jour, le combat dura jusqu’à la fin de la lumière du jour et
ensuite les croisés la reprirent le deuxième jour. Ils firent de
grands efforts et continuèrent leurs assauts jusqu’à ce que les
tours soient placées près du mur. Ce jour-là, toutes les troupes
musulmanes qui étaient dans leurs fiefs près d’Alexandrie arrivèrent
ce qui remonta le moral des gens qui luttèrent bien et vaillamment.
Le
troisième jour, les Musulmans ouvrirent la porte municipale et
sortirent pour attaquer les croisés de tous les côtés alors qu’ils
n’étaient pas sur leur garde et grands furent les cris poussés. Les
croisés s’inquiétèrent le combat devint intense. Les Musulmans
atteignirent les tours de siège, mirent le feu et luttèrent
courageusement jusqu’à ce qu’Allah Exalté leur envoya Son aide et
Ses signes devinrent manifestes. Ils luttèrent jusqu’à la fin du
jour et rentrèrent dans la ville réjouit des signes de la victoire
et de leur domination comparé à l’effort militaire pusillanime et
faible des croisés et du nombre de leurs morts et blessé parmi leur
infanterie.
Quand
ces nouvelles atteignirent Salah ad-Din, il se mit en route avec ses
troupes et envoya un de ses Mamelouk avec trois chevaux de rechange
pour aller à toute vitesse à Alexandrie pour apporter les nouvelles
de son arrivée. Craignant aussi pour Damiette, il envoya aussi un
détachement de troupes par précaution. Le Mamelouk arriva à
Alexandrie ce même jour à la fin de l’heure de la prière de
l’après-midi, quand les gens s’étaient retirés de la bataille et
proclama dans la ville l’arrivée imminente de Salah ad-Din et de
l’armée. Quand ils entendirent cette nouvelles, les habitants
oublièrent leur fatigue et la douleur de leurs blessures et
sortirent pour reprendre le combat s’imaginant que Salah ad-Din
était avec eux quand ils luttaient toutefois regrettant qu’il ne
soit pas là pour voir leur combat.
Les
croisés furent informés que Salah ad-Din approchait avec son armée
et leur moral s’effondra et leur fatigue et leur faiblesse augmenta.
Alors que l’obscurité tombait, les Musulmans les chargèrent et
gagnèrent leurs tentes qu’ils saisirent et qui contenaient de
nombreuses armes et des bagages abondants. Les fantassins croisés
furent largement massacrés et beaucoup d’entre eux s’enfuirent vers
la mer et rapprochèrent leurs galères près du rivage pour qu’ils
puissent s’embarquer. Certains survécurent et montèrent à bord et
d’autres furent noyés. Un Musulman plongea dans l’eau et perça une
des galères qui coula. Les croisés restant furent effrayés et
s’enfuirent. Trois cents cavaliers croisés se refugièrent en haut
d’une colline ou les Musulmans les engagèrent jusqu’au jour suivant
et, après que le combat ait duré jusqu’à la mi-journée, les
habitants de la ville les submergèrent et les tuèrent ou les prirent
prisonniers. Ainsi Allah Exalté délivra les Musulmans de leur
cruauté et les mécréants, malédiction d’Allah sur eux, tombèrent
dans leur propre piège.
La révolte d’al-Kanz en Haute Egypte
Au
début de cette année, al-Kanz se rebella en Haute et une grande
foule de gens locaux, des Noirs, des Arabes et d’autres affluèrent.
Un des émirs de Salah ad-Din à savoir le frère de l’émir Abou
al-Hayja’ as-Samin se trouvait dans son fief et fut tué par al-Kanz.
Son frère, un des émirs les plus grands et les plus braves fut
outragé par son assassinat et sortit pour lutter contre al-Kanz.
Salah ad-Din lui envoya plusieurs émirs et un grand nombre de
soldats qui vinrent dans la ville de Tawd et qui luttèrent contre
les habitants, les écrasèrent et tuèrent un grand nombre d’entre eux
et le reste d’entre eux furent réduits à l’humiliation et la
soumission après avoir brandit le pouvoir.
Lorsqu’ils eurent fini avec Tawd, l’armée marcha vers al-Kanz, qui
fut perdu par sa tyrannie. Après l’avoir amené à combattre ainsi que
les Arabes et les autres avec lui tous furent tués. Après lui la
terre redevint sûre et ses gens vécurent dans la paix et la
sécurité.
Comment Salah ad-Din conquit Damas
Le
dernier jour du mois de Rabi’ Awwal de cette année, Salah ad-Din
conquit la ville de Damas et cela arriva comme suit.
Lorsque Nour ad-Din décéda, son fils al-Malik as-Salih lui succéda
et s’établit à Damas. Sa’d ad-Din Koumoushtakin s’était enfuit
devant Sayf ad-Din Ghazi et s’était rendu à Alep comme nous l’avons
déjà rapporté ou il resta avec Shams ad-Din
Ibn ad-Dayah. Quand Sayf ad-Din gagna le contrôle des terres
d’al-Jazirah, Ibn ad-Dayah qui craignit qu’il attaque Alep et la
prenne envoya Sa’d ad-Din à Damas pour appeler à l’aide al-Malik
as-Salih et ses troupes. Quand il approcha de Damas, Shams ad-Din
Muhammad Ibn al-Mouqaddam envoya un détachement contre lui qui le
pilla et il revint donc vaincu à Alep où Ibn ad-Dayah le compensa en
lui remplaçant tout ce qui lui avait été pris.
Par la
suite, les émirs à Damas se consultèrent pour leurs meilleurs
intérêts et se rendirent compte que son transfert à Alep serait
mieux pour lui que de rester à Damas. Ils envoyèrent donc un
messager à Ibn ad-Dayah pour lui demander d’envoyer Sa’d ad-Din pour
chercher al-Malik as-Salih qui fut dûment équipé et mit sur sa voie.
« (Ici un vers que je n’ai pas réussi à traduire) » Il partit donc
pour Damas au mois de Mouharram et ramena al-Malik as-Salih à Alep
et lorsqu’ils arrivèrent, Sa’d ad-Din arrêta Shams ad-Din Ibn
ad-Dayah et ses frères ainsi que Ra'is Ibn al-Khashshab, le chef
d’Alep et le chef de la milice et n’était-ce la maladie de Shams
ad-Din Ibn ad-Dayah, il n’aurait pas été capable de le faire.
Sa’d
ad-Din gagna ainsi le contrôle unique d’al-Malik as-Salih. Ibn
al-Mouqaddam et d’autres émirs à Damas furent effrayés et dirent :
« Quand la situation d’Alep sera stabilisée, il prendra al-Malik
as-Salih et marchera avec lui contre nous et agira de la même façon
qu’il agit dans Alep. » Donc ils écrivit à Sayf ad-Din Ghazi le
seigneur de Mossoul et lui suggéra de traverser l’Euphrate afin
qu’il lui remette Damas ce qu’il ne fit pas, croyant que cela puisse
être un piège pour le forcer à traverser l’Euphrate, d’aller à Damas
pour se voir refuser l’entrée et être attaqués sur ses arrières par
son cousin et l’armée permanente d’Alep et être ainsi détruit et
c’était le conseil que lui donna ‘Izz ad-Din Zoulfandar.
Un
lâche mesure la distance du mal comme étant proche et prend sa
lâcheté pour une prudence et comme il est dit :
« Les
lâches croient que la lâcheté est la prudence.
Tel
est la nature de l’homme lâche. »
Quand
Zoulfandar lui conseilla ce point de vue, il l’accepta et refusa
d’aller à Damas. Il écrivit à Sa’d ad-Din et à al-Malik as-Salih et
fit la paix avec eux et leur demanda de reconnaitre le territoire
qu’il avait pris. Après son refus d’aller à Damas, leur peur de
Damas s’accentua et ils dirent : « Maintenant que Sayf ad-Din a fait
des termes avec eux, il n’y a rien pour les arrêter de marcher
contre nous. » Alors ils, et à leur tête des Shams ad-Din Ibn
al-Mouqaddam, écrivirent à Salah ad-Din, seigneur de l’Egypte et
l’invitèrent à venir pour le nommer souverain sur eux.
Shams
ad-Din Ibn al-Mouqaddam se montra « tel père tel fils » et nous
avons mentionné comment son père agit faussement quand il abandonna
Sinjar en l’an 544 de l’Hégire (1149).
Quand
les messagers apportèrent cette invitation à Salah ad-Din, il
n’hésita pas et partit aussitôt sans s’encombrer de bagages mais
avec 700 cavaliers bien que les croisés étaient en travers de sa
route et à qui il n’accorda pas la moindre attention. Quand il foula
le sol syrien, il se dirigea vers Bosra dont le seigneur qui était
un du nombre de ceux qui lui avait écrit, sortit pour le rencontrer
et en voyant le petit nombre de soldats avec lui, craignit pour lui
et lorsqu’il rencontra al-Qadi al-Fadil lui dit : « Je ne vois pas
d’armée avec vous. C’est une grande terre qui ne peut pas être
envahit par une force telle que la vôtre. Si ceux d’ici s’opposaient
ne serait-ce qu’une heure du jour, les campagnards vous prendront et
si vous avez de l’argent avec vous, les affaires seront plus
faciles. » « Nous avons beaucoup d’argent, » répondit-il, « cela
pourraient être 50 000 dinars. » Le seigneur de Bosra applaudi en se
frappant la main sur sa tête et dit : « Vous êtes faits pour et vous
nous avez fait pour aussi. » Tout ce qu’ils avaient avec eux était
10 000dinars.
Salah
ad-Din continua à Damas où toutes les troupes sortirent pour le
rencontrer et pour lui payer leurs respects. Lorsqu’il fit son
entrée, il se logea dans la maison de son père connue comme la
maison d’al-‘Aqiqi. La citadelle était dans les mains d’un eunuque
nommé Rayhan. Salah ad-Din convoqua Kamal ad-Din Ibn al-Shahrazouri,
le Qadi et l’autorité dans toutes les affaires d’administration
publique, les associations de bienfaisance et d’autres affaires et
l’envoya à Rayhan pour l’amener à soumettre la citadelle. Salah
ad-Din dit : « Je suis le Mamelouk d’al-Malik as-Salih. Je suis venu
seulement pour l’aider, le servir et restituer les terres qui lui
ont été prises. » Et à cette époque, les Khoutbah au nom d’as-Salih
étaient lues dans toutes ses terres.
Kamal
ad-Din monta pour rencontrer Rayhan et conversa avec lui jusqu’à ce
qu’il renonce à la citadelle. Salah ad-Din y entra alors, saisit et
emporta du tout argent qui s’y trouvait ce qui le rendit riche,
établit sa position et renforca sa détermination. En dépit de cela,
il montra son obéissance à al-Malik as-Salih, en se désignant dans
la correspondance comme « son Mamelouk » en laissant la Khoutbah et
la monnaie à son nom.
Quand
la souveraineté de Salah ad-Din fut fermement établie à Damas et
qu’il organisa ses affaires, il laissa son frère Sayf al-Islam
Toughtakin Ibn Ayyoub député sur la ville et marcha sur Homs le 1 du
mois de Joumadah Awwal puis Hama, le fort de Ba’rin, Salamiyah, Tall
Khalid et Edesse dans al-Jazirah qui étaient dans le fief de l’émir
Fakhr ad-Din Mas’oud az-Za’farani qui, après la mort Nour ad-Din,
fut incapable de contrôler ces forteresses à cause de sa vile
souveraineté sur leurs habitants.
Ces
forts étaient tenus par les lieutenants de Nour ad-Din. Quand Salah
ad-Din descendit sur Homs le 11 de ce même mois, il se mit en
contact avec la garnison qui refusa de remettre le fort et il les
attaqua donc le jour suivant. La ville tomba et la sécurité fut
accordée aux gens mais la citadelle résista et le continua jusqu’au
retour de Salah ad-Din d’Alep, ce que nous rapporterons si Allah
Exalté le veut. Pendant ce temps, il laissa des hommes dans Homs
pour garder la ville et empêcher la garnison de la citadelle de
toute liberté d’action ainsi que de prévenir toute provisions de
leur parvenir.
Et
durant tout le temps et quoi qu’il fit, Salah ad-Din proclama sa
loyauté à al-Malik as-Salih Ibn Nour ad-Din et qu’il avait pris ces
dispositions seulement pour protéger les terres de ce dernier des
croisés et récupérer le territoire d’al-Jazirah que Sayf ad-Din, le
seigneur de Mossoul, avait saisi.
Salah
ad-Din partit donc pour Hama et lorsqu’il arriva, il prit la ville
le 1 du mois de Joumadah Thani alors que la citadelle était tenue
par l’émir ‘Izz ad-Din Jourdik, un des Mamalik de Nour ad-Din, qui
refusa de l’abandonner à Salah ad-Din. Salah ad-Din l’informa alors
qu’il n’agissait que par loyauté pour al-Malik as-Salih et qu’il
voulait seulement protéger ses terres pour lui. Jourdik le fit
porter serment pour cela ce que Salah ad-Din fit et qui l’envoya par
la suite à Alep pour obtenir une obéissance unie à al-Malik as-Salih
et la libération de Shams ad-Din ‘Ali, Hassan et ‘Uthman des Banou
ad-Dayah, de prison. Jourdik partit pour Alep et laissa son frère
député pour tenir la citadelle de Hama. Quand il arriva à Alep,
Koumoushtakin l’arrêta et l’emprisonna. Après avoir entendu cela,
son frère abandonna la citadelle à Salah ad-Din qui en prit le
contrôle. »
[1]
Les Turcopoles ou turcoples étaient des archers montés de
diverses origines, turque, bédouine, syrienne et d’Asie qui
étaient soit des apostats christianisés ou des chrétiens de
ces pays et Allah est Plus Savant.