La conquête de Mounaytirah

 

En l’an 561 de l’Hégire (1165), Nour ad-Din Mahmoud Ibn Zanki conquit la forteresse de Mounaytirah en Syrie qui était entre les mains des croisés. Il ne fit aucune grande mobilisation ni ne rassembla ses pleines forces. Il marcha juste légèrement muni et les prit par surprise. Il savait que, s’il avait rassemblé ses troupes, ils auraient été sur leur garde et auraient rassemblé leurs troupes. Il saisit donc l’occasion, marcha sur Mounaytirah et l’assiégea en attaquant énergiquement puis la prit d’assaut par la force armes et tua ou prit captifs ceux qui s’y trouvaient et prit une grande quantité de butin. Les défenseurs s’étaient sentis à l’abri mais la cavalerie d’Allah Exalté les submergea subitement avant qu’ils en aient conscience et les croisés ne se rassemblèrent pour le repousser seulement après qu’il l’eut déjà prise. S’ils avaient su qu’il était légèrement équipé avec un petit nombre de troupes, ils se seraient hâtés contre lui mais ils imaginèrent qu’il avait une grande armée. Après qu’il la captura, ils se dispersèrent et désespérèrent de la récupérer.

 

Cette année, les Géorgiens apparurent avec une grande armée et attaquèrent différentes terres. Ils allèrent aussi loin que Ganja, où ils tuèrent, capturèrent et asservirent beaucoup et prirent des quantités innombrables de butin.

 

 

Le retour d’Assad ad-Din Shirkouh d’Egypte

 

En l’an 559 de l’Hégire (1163), nous avons déjà rapporté l’expédition d’Assad ad-Din Shirkouh en Egypte, ce qui lui arriva et son retour en Syrie. Après son arrivée en Syrie, il resta comme autrefois au service de Nour ad-Din jusqu’à l’heure présente.

Après son retour d’Egypte, il continua de parler du projet de l’envahir et il était désireux impatient de le faire.

Quand cette année 562 de l’Hégire (1166) arriva, il équipa des troupes et disposa à la tête d’une puissante force au mois de dans Rabi’ Thani. Nour ad-Din envoya des messagers à plusieurs de ses émirs et total de sa force atteignit 2 000 cavalerie. Nour ad-Din n’aimait pas le projet mais quand il vit comment Assad ad-Din était sérieux pour y aller, il ne put rien faire d’autre que de lui envoyer une force de peur qu’un désastre ne puisse leur arriver et que l’Islam soit affaibli. Quand son armée fut prête, il se mit en route pour l’Egypte en laissant le territoire des croisés sur sa droite.

Lorsqu’il arriva en Egypte, il se dirigea vers Atfih ou il traversa le Nil pour la rive ouest et campa alors à Gizeh à l’opposé  du vieux Caire et exerça le contrôle total et la juridiction sur les provinces de l’ouest durant plus de cinquante jours.

 

Lorsque Shawar fut informé de l’arrivée d’Assad ad-Din, il envoya un messager pour demander l’assistance des croisés qui vinrent à sa disposition, ambitieux de conquérir l’Egypte et craignant que si Assad ad-Din l’a prenait, il n’y aurait aucun avenir pour eux dans leurs terres avec lui et Nour ad-Din. L’espoir les commandait et la peur les conduisait. Quand ils arrivèrent au Caire, ils passèrent sur la rive ouest.

Assad ad-Din et ses troupes étaient déjà partis dans la Haute Egypte et étaient parvenu à un endroit appelé Babayn. Les troupes égyptiennes et les croisés marchèrent sur ses traces et le rattrapèrent le 25 du mois de Joumadah Thani. Assad ad-Din avait envoyé des espions surveiller les Egyptiens et les croisés qui revinrent avec des renseignements sur leurs nombres, leurs équipement et leur détermination de le poursuivre. Il décida donc de livrer bataille bien qu’il craignit que le moral de ses hommes puisse être trop faible pour leur permettre de tenir fermement dans cette dangereuse situation où leur destruction était plus probable que leur survie, à cause de leurs petits nombres et la lointaine distance de leur base arrière, de leurs maisons et patries et des dangers de la route. Il les consulta et tous lui conseillèrent de traverser le Nil sur la rive Est et de revenir en Syrie. Ils lui dirent : « Si nous sommes vaincus et c’est le résultat le fort probable, où pourrons-nous alors nous réfugier et qui nous protégera sachant que dans ces terres chaque soldat, citoyen et paysan sont notre ennemi ? »

Un des Mamalik de Nour ad-Din nommé Sharaf ad-Din Bouzghoush le seigneur de Shaqif qui était un homme vaillant se leva et dit : « Ne permet pas à quiconque craint d’être tué ou capturé de servir les princes mais permet lui plutôt de rester à la maison avec sa femme. Par Allah, si nous revenons à Nour ad-Din sans une victoire ou sans un effort héroïque pardonnable, il nous retirera certainement nos fiefs ou nos salaire et nous fera rembourser ce que nous avons reçu depuis que nous sommes entrés dans son service jusqu’à ce jour. Il dira : « Vous recevez l’argent des Musulmans et vous vous enfuyez devant leurs ennemis et livrez un endroit tel que l’Egypte aux mécréants ! » La vérité est sur son côté. »

Assad ad-Din dit : « C’est la vérité et j’agirai ainsi. » Son neveu Salah ad-Din (al-Ayyoubi) dit la même chose et beaucoup manifestèrent leur accord si bien que la décision de lutter fut unanime. Assad ad-Din resta sur place jusqu’à ce que les Egyptiens et les croisés l’aient trouvé, déjà prêt pour la bataille. Il plaça sa caravane de bagages dans le centre pour la surveiller et parce qu’il était dans l’impossibilité de la laisser ailleurs où les gens locaux pourraient la piller. Il posta Salah ad-Din au centre et lui dit avec ses hommes : « Les Egyptiens et les croisés commenceront leur charge sur le centre en imaginant que je suis là. Quand ils vous chargeront, ne luttez pas de toutes vos forces et ne vous mettez pas non plus en danger. Reculez devant eux mais s’ils se retirent revenez sur leurs talons. »

Il sélectionna alors lui-même un groupe de ses hommes les plus braves, un groupe sur lequel il pourrait compter et dont il connaissait la ténacité dans la bataille et se positionna avec eux dans l’aile droite.

Quand les deux côtés s’affrontèrent, les croisés, qu’Allah les maudisse, firent comme il avait dit et chargèrent le centre. Les troupes luttèrent contre eux un peu de temps et se retirèrent ensuite mais pas dans le désordre. Les croisés les suivirent et à ce moment Assad ad-Din et les troupes avec lui chargèrent les Egyptiens, la cavalerie croisée et l’infanterie qui n’avait pas participé à la charge. Il les dispersa et les passa par le sabre tuant un très grand nombre d’entre eux capturant autant de prisonniers. Quand les autres croisés revinrent de leur poursuite et qu’ils virent leurs forces vaincues et le champ de bataille vide mais jonché de morts, ils s’enfuirent aussi. Ce fut un des événements les plus remarquables enregistrés ou 2 000 cavaliers mirent en déroute les armées réunies d’Egypte et des croisés du Levant.

 

Comment Assad ad-Din prit Alexandrie et revint ensuite en Syrie

 

Lorsque les Egyptiens et les croisés furent vaincu par Assad ad-Din à Babayn, il procéda vers Alexandrie et recueillit tout l’argent qui était dans les villages sur sa route. Lorsqu’il arriva à Alexandrie, il reprit la ville avec l’assistance des habitants qui la lui abandonnèrent. Il y nomma son neveu Salah ad-Din comme son député et revint en Haute Egypte qu’il prit et taxa avant de s’installer jusqu’au jeûne du mois de Ramadan.

Les Egyptiens et les croisés se regroupèrent au Caire où ils se réorganisèrent et réunifièrent leurs forces et marchèrent sur Alexandrie où ils exercèrent un implacable blocus sur Salah ad-Din. La nourriture se raréfia mais les gens endurèrent. Assad ad-Din les rejoignit alors de la Haute Egypte après que Shawar ait suborné certains des Turcomans qui le servaient. Des envoyés des croisés et des Egyptiens vinrent alors en cherchant la paix. Ils lui offrirent 50 000 dinars sans compter ce qu’il avait saisi du pays. Il accepta et stipula que les croisés ne devrait pas rester dans le pays, ni y prendre un simple village. Ils donnèrent leur accord et quand la paix fut faite, il revint en Syrie. Les Egyptiens reprirent Alexandrie au milieu du mois de Shawwal de cette même année et Shirkouh arriva à Damas le 18 du mois de Dzoul Qi’dah.

 

Néanmoins, les croisés et les Egyptiens conclurent entre eux que les croisés devaient avoir un préfet au Caire et que les portes de la ville devraient être sous le contrôle de leurs chevaliers pour prévenir Nour ad-Din d’envoyer une armée contre eux et qu’ils devraient aussi leur remettre 100 000 dinars du revenu annuel de l’Egypte et tout cela fut approuvé par Shawar. Al-‘Adid quant à lui n’avait aucune autorité à ses côtés car sa liberté était restreinte et toute les informations des affaires du pays lui était cachées.

 

Les croisés revinrent dans leur territoire au Levant mais ils laissèrent un détachement de leurs célèbres chevaliers en Egypte. Al-Kamil Shouja’, le fils de Shawar, envoya un message à Nour ad-Din avec un des émirs de ce dernier, lui disant son amour et son amitié pour lui et lui demandant s’il pouvait lui porter allégeance. Il lui garantit qu’il suivrait lui-même ce cours et qu’il unifierait l’Egypte soumise à lui. Il lui offrit aussi de payer un tribut chaque année. Nour ad-Din accepta et lui envoya une grande somme d’argent. La situation resta ainsi jusqu’à ce que les croisés attaquent l’Egypte en l’an 564 de l’Hégire (1168), et ce qui arriva nous le rapporterons en temps voulut si Allah Exalté le veut.

 

La prise de Safithah et ‘Ouraymah par Nour ad-Din

 

Cette année, Nour ad-Din appela ses forces à se réunirent. Son frère Qoutb ad-Din vint chez lui de Mossoul et d’autres vinrent aussi. Ils se rassemblèrent à Homs et ensuite Nour ad-Din emmena ses troupes dans le territoire croisé. Ils passèrent par Hisn al-Akrad ou ils réalisèrent des raids de pillage avant de se diriger vers ‘Arqa qu’ils assiégèrent. Ils firent de même à Halab qu’ils prirent et détruisirent. Les troupes musulmanes marchèrent tantôt à droite et tantôt à gauche sur leurs terres, attaquant et détruisant. Ils prirent ainsi ‘Ouraymah et Safithah puis revinrent ensuite à Homs, où ils observèrent leur jeûne de Ramadan.

 

Plus tard,  ils procédèrent à Banyas puis marchèrent pour attaquer la forteresse de Hounan qui était tenu par les croisés et une de leurs forteresses et forts les plus imprenables. Les croisés s’enfuirent et y mirent le feu. Le jour suivant de son arrivée, Nour ad-Din rasa complètement sa muraille. Il voulut alors envahir Beyrouth mais une dispute éclata parmi les troupes qui nécessitèrent leurs dispersions. Qoutb ad-Din revint à Mossoul et Nour ad-Din lui donna la ville de Raqqah sur l’Euphrate, qui avait été sienne. Qoutb ad-Din la prit sur son chemin de retour à Mossoul.

 

Cette année, Ghazi Ibn Hassan al-Manbiji se révolta contre Nour ad-Din Mahmoud Ibn Zanki le seigneur de Syrie. Nour ad-Din lui avait donné le fief de Manbij ou il se révolta. Nour ad-Din envoya une armée qui l’assiégea et prit la ville qu’il donna ensuite comme fief à son frère, Qoutb ad-Din Yinal Ibn Hassan, qui était juste, bon, gentil avec ses sujets et un homme d’excellente conduite. Il continua à la tenir jusqu’à ce que Salah ad-Din la prenne en l’an 572 de l’Hégire (1176).

 

 

Fakhr ad-Din Qara Arsalan Ibn Daoud Ibn Souqman Ibn Artouq, le seigneur de Hisn Kayfa et de la plupart de Diyar Bakr, mourut cette année. Quand sa maladie devint sérieuse, il envoya un messager à Nour ad-Din disant : « Nous sommes des camarades dans le Jihad contre les mécréants. Je souhaite que tu t’occupes de mon fils pour cette cause. » Après sa mort, son fils Nour ad-Din Muhammad lui succéda et Nour ad-Din Mahmoud Ibn Zanki s’engagea à l’aider et le protéger, depuis que son frère Qoutb ad-Din Mawdoud voulut envahir ses terres mais Nour ad-Din, son frère, lui envoya un message pour l’en empêché disant : « Si tu l’attaques ou interfère dans ses terres, je t’empêcherais par la force, » donc il se retint de l’attaquer.

 

 

Comment Nour ad-Din prit Qal’at Ja’bar

 

En l’an 564 de l’Hégire (1168), Nour ad-Din Mahmoud Ibn Zanki prit le contrôle de Qal’at Ja’bar après l’avoir ôté à son souverain Shihab ad-Din Malik Ibn ‘Ali Ibn Malik al-‘Ouqayli et qui avait été entre ses mains et celles de ses ancêtres avant lui depuis les jours du sultan Malik Shah, comme cela a déjà été rapporté. C’était un des forts les plus puissants et les plus fortifiés qui donnait sur la rive est de l’Euphrate.

Le fort tomba quand son souverain le quitta pour aller chasser et qu’il fut saisit par les Banou Kilab qui le ramenèrent à Nour ad-Din au mois de Rajab de l’année 563 de l’Hégire (1168). Il fut emprisonné mais bien traité et encouragé à accepter l’offre d’un fief et d’argent en échange du château mais comme il refusa, il y eut un changement dans son traitement qui devint dur et cruel suivit de menaces. Il refusa encore et Nour ad-Din envoya une armée commandée par l’émir Fakhr ad-Din Mas’oud Ibn Abi ‘Ali al-Za’farani qui assiégea le fort pendant quelque temps mais aucun succès. Nour ad-Din le renforca avec une autre armée et il donna le commandement des opérations à l’émir Majd ad-Din Abou Bakr plus connu sous le nom d’Ibn ad-Dayah, qui était son frère du lait et son émir aîné. Il poursuivit le siège mais ne voyant aucun espoir de prendre la place, il suivit une ligne douce avec le souverain et lui conseilla de prendre ce que Nour ad-Din lui offrait en échange et de ne pas risquer sa vie en s’y accrochant. Le souverain accepta son conseil et abandonna le château prenant en échange Sarouj, ses dépendances et al-Malalah, se situant entre le territoire d’Alep et la porte de Bouza’a ainsi que la somme de 20 000 dinars comme acompte. C’était un très grand fief sauf qu’il ne possédait aucun fort.

Cela marqua la fin du pouvoir des Banou Malik dans Qal’at Ja’bar. Chaque puissance atteint une limite et chaque souverain à une fin. J’ai entendu dire que l’on demanda à son souverain : « Quel fief préfères-tu et qui offre un meilleur rang, Sarouj et la Syrie ou Qal’at Ja’bar ? » Il répondit : « Celui-là est plus riche, mais pour l’honneur, celui que j’ai laissé à Qal’at Ja’bar. »

 

Les ruines de Qal'at Ja'bar en Syrie près d'ar-Raqqah

 

 

Récit de la conquête de l’Egypte par Assad ad-Din et de l’assassinat de Shawar

 

Au mois de Rabi’ Awwal de cette année, Assad ad-Din Shirkouh Ibn Shadi accompagné des troupes de Nour ad-Din alla en Egypte qu’il conquit.

Cela arriva parce que, comme nous l’avons rapporté, les croisés, qu’Allah les maudisse, prirent le pouvoir en Egypte et nommèrent leur propre préfet au Caire, qui prit les portes de la ville et y posta un corps de leurs guerriers et principaux chevaliers et établit un souverain tyrannique (exactement comme de nos jours dans tous les pays Musulmans sans aucune exception) sur les Musulmans qui leur causa beaucoup de torts. Quand les croisés virent qu’il n’y avait personne dans la terre pour s’opposer à eux, ils envoyèrent des messages à Amaury, le roi brave et rusé des croisés en Syrie pour lui demander de venir protéger sa conquête. Ils l’informèrent que le pays était dépourvu de tout défenseur et lui décrivirent sa prise comme une affaire facile. Cependant, il ne répondit pas favorablement.

Les chevaliers croisés et les décideurs politiques se réunirent chez lui et lui conseillèrent d’envahir et de conquérir l’Egypte. Il leur dit : « Mon opinion est que nous ne devrions pas l’envahir car elle nous nourrit, ses richesses sont drainées par nous et nous en tirons notre force contre Nour ad-Din. Si nous attaquons avec le but de conquête, son souverain, ses troupes, tout le pays et ses paysans, ne nous l’abandonneront pas mais lutteront contre nous et la peur qu’ils ont à notre égard les emmènera à remettre le pays à Nour ad-Din. S’il le prend et s’il a quelqu’un comme Assad ad-Din là, cela signifiera la mort des croisés et leur expulsion de la terre de Syrie[1]. » Cependant, ils n’acceptèrent pas sa décision et  répondirent : « Il n’y a personne là-bas pour s’opposer et le défendre. Avant que l’armée de Nour ad-Din puisse être prête et marcher sur l’Egypte, nous l’aurons pris et aurons fini l’affaire. Alors Nour ad-Din espèrera obtenir la sécurité de nous. » Il alla donc avec eux mais contre sa volonté.

 

Ils commencèrent à faire leurs préparatifs en firent courir la rumeur qu’ils avaient l’intention d’attaquer la ville de Homs. Quand Nour ad-Din en fut informé, il commença aussi à rameuter ses troupes et leur ordonna de le rejoindre. Les croisés se rendirent en toute hâte en Egypte et quand ils arrivèrent, ils assiégèrent Bilbays qu’ils prirent d’assaut le 1 du mois de Safar et qu’ils ravagèrent après avoir tué, capturé et asservi.

Un groupe de notables égyptiens avaient écrit aux croisés et leur avait promis de l’aide à cause de leur inimitié envers Shawar en incluant Ibn al-Khayyat et Ibn Farjala. Le moral des croisés fut encouragés et ils quittèrent Bilbays pour aller au Caire où ils arrivèrent le 10 du mois de Safar et mirent la ville sous siège. Les habitants craignirent qu’ils les traitent comme ils avaient traité les gens de Bilbays et leur peur d’eux se mua en résistance. Ils tinrent alors la ville en luttant de toutes leurs forces et firent tout leur possible pour la protéger. Si les croisés, qu’Allah les maudisse, s’étaient bien comporté envers les gens à Bilbays, ils auraient conquis le vieil et nouveau Caire, mais Allah Tout Puissant les a convaincus que ce qu’ils faisaient était le meilleur, « mais il fallait qu’Allah accomplît un ordre qui devait être exécuté. » (Qur’an 8/42)

 

Shawar ordonna d’incendier le Vieux Caire le 9 du mois de Safar et ordonna à ses habitants de se rendre au Caire et de piller la ville. Les gens déménagèrent mais furent laissés sur les routes. La ville fut pillée et ses habitants appauvris. Leur argent et leurs marchandises furent perdus un jour avant que les croisés ne descendent sur eux. Tout cela fut dû à cause de la peur que les croisés saisissent tout et le feu brûla durant cinquante-quatre jours.

 

Le calife al-‘Adid envoya un message à Nour ad-Din lui demandant son aide et lui disant que les Musulmans étaient trop faibles pour repousser les croisés. Avec les lettres, il envoya les bijoux de ses femmes en disant : « Ceux-ci sont les bijoux des femmes de mon palais suppliant votre aide de les sauver contre les croisés. » Nour ad-Din décida donc d’envoyer des troupes.

 

Pendant ce temps, les croisés, qu’Allah les maudisse, intensifièrent le siège du Caire et bloquèrent ses habitants. Shawar assumait la charge des affaires, des troupes et du combat. Sa situation devint difficile et étant trop faible pour y faire face, il utilisa la ruse. Il envoya un message au roi des croisés lui assurant sa bonne volonté et son vieil amour pour lui et que son cœur était avec lui à cause de sa peur de Nour ad-Din et d’al-‘Adid et que les Musulmans ne serait pas d’accord avec lui sur la soumission au roi. Il conseilla la paix et proposa le paiement d’un tribut pour prévenir Nour ad-Din de prendre le pays. Le roi fut d’accord avec cela à condition qu’il lui verse 1 000 000 dinars égyptiens avec un acompte immédiat et le reste en divers versement échelonné et un accord fut conclu sur cette base.

Les croisés virent que le pays s’était levé contre eux et qu’il serait peut-être abandonné à Nour ad-Din, donc ils acceptèrent à contrecœur et dirent : « Nous prendrons l’argent et l’utiliserons pour bâtir notre force. Nous reviendrons dans le pays de nouveau avec une force qui nous permettra de négliger Nour ad-Din. « Ils complotèrent et Allah complota et Allah est le meilleur des intrigants[2]. »

 

Shawar leur paya 100 000 dinars et leur demanda de se retirer pour qu’il puisse recueillir l’argent restant pour eux et ils se retirèrent mais seulement à proximité. Shawar commença à recueillir de l’argent pour eux des habitants du nouvel et vieux Caire mais il ne réussit seulement qu’à recueillir une somme inférieure à 5 000 dinars pour la bonne raison que les biens des gens du vieux Caire avaient soient été brûlés ou pillés. Ils étaient déjà incapables de pourvoir à leurs propres nourritures comment auraient-ils put a fortiori verser un tribut.

Quant au nouveau Caire, la majorité des habitants étaient des soldats et leurs domestiques, donc pour cette raison ils n’avaient pas de disponibilité d’argent. Toutefois entre temps, ils avaient envoyé des messages à Nour ad-Din pour l’informer de la situation dans laquelle ils étaient et lui offrirent un tiers des revenus de l’Egypte, qu’Assad ad-Din devrait résider parmi eux avec une armée et que leur soutien financier serait aussi à la charge de l’Egypte en plus du tiers des revenus convenu.

 

Quand il reçut les lettres d’al-‘Adid, Nour ad-Din qui se trouvait à Alep envoya un messager à Assad ad-Din pour le convoquer. Les messagers partirent à sa recherche et le rencontrèrent près des portes d’Alep ou il venait juste d’arriver de Homs qui était son fief. La raison de son arrivée est parce qu’il avait aussi reçu des lettres des Egyptiens sur la même affaire et sans attendre était parti trouver Nour ad-Din. Ils se rencontrèrent et Nour ad-Din fut stupéfié par son arrivée immédiate. Ravi de cela et le considérant comme un bon présage, il lui ordonna de se préparer et d’aller en Egypte. Puis, il lui donna 200 000 dinars, sans compter les vêtements, les montures, les armes, d’autres choses et la pleine autorité sur l’armée et les caisses du trésor. Assad ad-Din choisit 2 000 cavaliers de l’armée permanente et avec l’argent en recruta 6 000 autres.

Et avec Nour ad-Din, il disposa pour Damas, où il arriva à la fin du mois de Safar avant de procédé à Ra's al-Ma’in. Nour ad-Din donna à chaque homme avec Assad ad-Din vingt dinars comme extra non compté dans leur paie. Il attacha à Assad ad-Din un groupe de plusieurs émirs dont son Mamelouk ‘Izz ad-Din Jourdik, ‘Izz ad-Din Kilij, Sharaf ad-Din Bouzghoush, ‘Ayn ad-Dawlah al-Yarouqi, Qoutb ad-Din Yinal Ibn Hassan al-Manbiji et Salah ad-Din (Youssouf Ibn Ayyoub, le frère de Shirkouh) nommé contre son gré. « Or, il se peut que vous ayez de l’aversion pour une chose alors qu’elle vous est un bien. Et il se peut que vous aimiez une chose alors qu’elle vous est mauvaise. »  (Qur’an 2/216).

Nour ad-Din voulut que Salah ad-Din y aille et cela signifia la fin de sa dynastie tandis que Salah ad-Din ne voulut pas y aller et cela mena à sa bonne fortune et au pouvoir. Cela sera mentionné avec la mort de Shirkouh, si Allah Tout Puissant le veut.

 

Assad ad-Din quitta en toute hâte Ra's al-Ma’in au milieu du mois de Rabi’ Awwal et quand il approcha du Vieux Caire, les croisés partirent et revinrent dans leurs propres terres, déçus de leurs espoirs. Nour ad-Din informé de leur retour se réjouit et ordonna de battre les tambours de la victoire dans toutes ses terres. Il dépêcha des messagers au loin et au large pour répandre les bonnes nouvelles car c’était une reconquête de l’Egypte et une préservation de toutes les terres de Syrie et autres.

 

Assad ad-Din arriva au Caire le 7 du mois de Rabi’ Thani ou il entra et rencontra avec al-‘Adid Li-Dinillah, qui lui attribua une robe d’honneur. Il revint vers ses tentes portant la robe d’al-‘Adid à la joie des gens du Vieux Caire. Il reçut avec son armée de larges primes et des provisions abondantes. Shawar fut incapable d’empêcher cela après avoir vu que les forces de Shirkouh étaient nombreuses et que les sympathies d’al-‘Adid étaient avec lui et il n’ osa pas révéler ce qui était dans son cœur malade mais il commença à retarder le paiement de l’offre d’argent, d’assigner le revenu de l’armée et de mettre de côté le tiers des revenus des terres pour Nour ad-Din. Chaque jour, il se rendait chez Assad ad-Din, marchait avec lui en lui faisant des promesses et entretenait ses espoirs. « Et le diable ne leur fait que des promesses trompeuses. » (Qur’an 4/120)

Plus tard, il décida de donner un banquet et inviter Assad ad-Din et ses émirs pour les faire arrêter et recruter leurs troupes pour les utiliser pour défendre le pays contre les croisés. Son fils al-Kamil lui défendit de faire ainsi et lui dit : « Par Allah, si tu projettes de le faire, j’informerai Shirkouh. » Son père lui dit : « Par Allah, si nous ne le faisons pas, nous serons tous tués à coup sûr. » « Certes, » répondit-il « mais que nous soyons tués comme Musulmans quand la terre est tenue par l’Islam est mieux que nous soyons tués après que les croisés l’ait prise, car il leur prendrait seulement le temps d’apprendre que Shirkouh a été arrêté par toi pour les voir revenir. Alors, même si suite à cela al-‘Adid devraient aller à pied trouver Nour ad-Din, il n’enverrait pas le moindre cavalier avec lui et croisés conquerront le pays. » Il abandonna alors son plan.

 

Quand l’armée de Nour ad-Din vit la tergiversation de Shawar, ils craignirent qu’il provoque des problèmes. Salah ad-Din, ‘Izz ad-Din Jourdik et d’autres acceptèrent de tuer Shawar. Quand ils en informèrent Assad ad-Din, il leur interdit de le faire mais ils se turent et restèrent résolus de le tuer. Il arriva que Shawar visita les troupes d’Assad ad-Din  comme il en avait l’habitude mais ne le trouva pas dans ses tentes car il était parti voir le tombeau de l’Imam ash-Shafi’i (puisse Allah lui faire miséricorde). Salah ad-Din et Jourdik avec un détachement de l’armée rencontrèrent Shawar, le saluèrent et l’informèrent que Shirkouh était partit voir le tombeau de l’Imam ash-Shafi’i. Il dit : « Allons le rejoindre » et ils se mirent en route ensemble. Salah ad-Din et Jourdik chevauchèrent à ses côtés puis après un certain temps, le jetèrent à bas de son cheval. Ses compagnons s’enfuirent et il fut fait prisonnier. Ils étaient dans l’impossibilité de le tuer sans l’ordre d’Assad ad-Din, donc ils s’assurèrent qu’il était bien gardé et informèrent ensuite Assad ad-Din de la situation. Il vint les retrouver et n’eut d’autre choix que de finir ce qu’ils avaient commencé. Le calife al-‘Adid, le seigneur de l’Egypte fut informé et envoya un messager en lui demandant de lui envoyer la tête de Shawar et après un échange de messages, il fut exécuté et sa tête envoyée à al-‘Adid le 17 Rabi’ Thani de cette même année.

 

Assad ad-Din entra au Caire et vit une multitude de gens rassemblés et craignant pour sa vie, il dit : «  Le commandant des croyants (al-‘Adid) vous ordonne de piller la résidence de Shawar » et les gens se dispersèrent dans cette direction et la pillèrent. Assad ad-Din lui-même se rendit dans le palais d’al-‘Adid et il fut investi de la robe du vizirat et surnommé al-Malik al-Mansour, le commandant des armées. Il procéda dans sa robe d’office à la résidence du vizirat où avait habité Shawar pour constater qu’il ne restait même plus une chaise pour s’assoir. Il devint alors fermement établi dans sa fonction et eut le contrôle total. Il ne restait plus personne pour s’opposer à lui ou rivaliser avec lui. Il nomma aux provinces ses partisans en qui il avait confiance et assigna le pays comme fief à ses troupes.

 

Quand son père fut tué, al-Kamil Ibn Shawar et ses frères entrèrent dans le palais pour s’y réfugier et ce fut la dernière fois que l’on entendit parler d’eux. Shirkouh regretta la perte d’al-Kamil, parce qu’il  entendit comment il s’était opposé à son père pour l’empêcher de tuer Shirkouh. Il avait l’habitude de dire : « Je regrette qu’il n’ait pas survécu pour que je puisse lui donner une récompense généreuse pour sa bonne action. »

 

 

 

De la mort d’Assad ad-Din Shirkouh

 

Quand Assad ad-Din fut fermement établi et qu’il estima qu’il n’avait aucun rival, son destin le rattrapa et il décéda le samedi 22 Joumadah Awwal de l’année 564 de l’Hégire (1169) après un règne de deux mois et cinq jours, puisse Allah Exalté lui faire miséricorde.

 

A propos du début de sa carrière et sa relation avec Nour ad-Din, lui et son frère Najm ad-Din Ayyoub, les deux fils de Shadi, étaient de la ville de Dvin et étaient d’origine kurde Rawadi qui est le lignage le plus noble des Kurdes. Ils vinrent tous les deux en Irak et servirent Moujahid ad-Din Bahrouz, le préfet de Baghdad qui vit dans Najm ad-Din qui était plus vieux que Shirkouh, de l’intelligence, beaucoup de bon sens et une excellente conduite. Il en fit le châtelain de la citadelle de Tikrit ou Najm ad-Din se rendit dûment accompagné par son frère Shirkouh. Quand le martyr Atabeg Zanki Ibn Aqsounqour fut vaincu en Irak par Qarajah as-Saqi, comme nous l’avons raconté en l’an 526 de l’Hégire (1131), il entra dans sa déroute à Tikrit où Najm ad-Din le servit bien et lui fournit des bateaux sur lesquels il traversa le Tigre. Ses hommes le suivirent ils furent aussi bien reçus par Ayyoub qui les mit sur leur voie.

Plus tard, Shirkouh tua un homme à Tikrit à cause des insultes qu’ils avaient échangées entre eux. Bahrouz expulsa les deux frères de la citadelle qui se rendirent chez le martyr Zanki, qui les reçut aimablement et reconnu dûment leur précédent service en donnant à chacun d’entre eux des fiefs généreux. Et quand il prit la citadelle de Baalbek, il y nommé Ayyoub comme châtelain.

Quand le martyr fut tué, l’armée de Damas assiégea Baalbek alors qu’Ayyoub s’y trouvait et sa situation devint difficile. Sayf ad-Din Ghazi Ibn Zanki était trop occupé à s’établir sur ses terres pour l’aider si bien qu’Ayyoub fut contraint d’abandonner Baalbek aux Damascènes en échange d’un fief qu’il spécifia. Cela lui fut accordé et il devint un des plus grands émirs à Damas.

 

Son frère Assad ad-Din Shirkouh rejoignit Nour ad-Din Mahmoud après que Zanki fut tué, puisqu’il l’avait servi pendant le règne de son père. Nour ad-Din le favorisa et le fit progresser car il vit en lui une bravoure dont les autres étaient incapables. Il le combla de récompenses jusqu’à ce qu’il vienne à tenir Homs, Rahbah et d’autres endroits et le rendit le commandant effectif de son armée. Quand Nour ad-Din voulut prendre Damas, il lui ordonna de se mettre en contact avec son frère Ayyoub, qui était là et lui demander de coopérer dans sa conquête. Il accepta ce qui lui était demandé en échange d’un fief qu’il nomma pour lui et son frère ainsi que quelques villages. Nour ad-Din leur donna tout ce qu’ils demandèrent et conquit Damas, comme nous l’avons rapporté. Il tint sa parole à leurs égards et ils devinrent les plus grands émirs de son état. Quand il projeta d’envoyer des troupes en Egypte, il vit que seul Shirkouh était capable pour cette grande affaire et cette position importante. Il l’envoya donc et il accomplit ce que nous avons décrit.

 

Comment Salah ad-Din devint le souverain d’Egypte

 

Quand Assad ad-Din Shirkouh décéda (qu’Allah lui fasse miséricorde), Salah ad-Din, le fils de son frère Ayyoub Ibn Shadi, était avec lui, ayant voyagé en dépit de sa réticence de continuer l’expédition. Un de nos amis qui était un de leur proche et intime m’a raconté ce que Salah ad-Din lui dit :

« Quand les lettres d’al-‘Adid arrivèrent chez Nour ad-Din lui demandant son aide contre les croisés et l’envoi de troupes, il me convoqua et m’informa de la situation puis dit : « Tu iras chez ton oncle Assad ad-Din à Homs avec mon messager pour lui demander de venir. Conseille-lui toi-même de se dépêcher. Cette affaire ne requiert aucun retard. »

Je me suis conformé et quittait Alep. Nous n’étions pas à un mile d’Alep avant que nous avons rencontrâmes Shirkouh qui venait pour cette même affaire. Nour ad-Din lui ordonna de se mettre en route et quand Nour ad-Din lui dit cela, mon oncle se tourna vers moi et dit : « Prépares-toi, Youssouf ! » Je répondis : «  Par Allah, même si on me donnait le dominion de l’Egypte, je n’irais pas. J’ai enduré à Alexandrie et ailleurs ce que je n’oublierai jamais. » Il dit à Nour ad-Din : « Il est essentiel qu’il vienne avec moi. Ordonne-lui de faire ainsi. » Nour ad-Din me donna l’ordre bien que je demandais d’être excusé et il fut mis fin à notre audience.

Assad ad-Din avait fait sa préparation et se prépara à se mettre en route quand Nour ad-Din me  dit : « Tu dois aller avec ton oncle. » Je me plaignis de difficultés financières et du manque d’équipement mais il me donna les moyens de me munir. Ce fut comme si j’étais conduit à ma mort mais je suis allé avec lui et il conquit l’Egypte. Alors il est mort et Allah Tout Puissant m’a donné le grand dominion dont je n’avais même pas espéré la moindre parcelle. »

 

Quant à savoir comment il obtint l’office, plusieurs émirs de Nour ad-Din qui étaient en Egypte ambitionnèrent le commandement des troupes et le vizirat d’al-‘Adid après Shirkouh. Ces émirs étaient ‘Ayn ad-Dawlah al-Yarouqi, Qoutb ad-Din, Sayf ad-Din al-Mashtoub al-Hakkari et Shihab ad-Din Mahmoud al-Harimi l’oncle maternel de Salah ad-Din. Chacun d’entre eux sollicita l’office et avaient rassemblé des partisans pour le prendre de force. Cependant, al-‘Adid fit venir Salah ad-Din, l’introduit en sa présence, lui donna les robes d’office et le fit vizir pour suivre son oncle.

Ce qui le persuada de faire ainsi est que ses hommes lui dirent : « Dans cette compagnie il n’y a personne de plus faible ni plus jeune que Youssouf. La meilleure solution est qu’il soit nommé car il n’échappera pas à notre contrôle. Alors nous infiltrerons ses troupes avec des gens pour les convaincre de notre côté. Nous obtiendrons suffisamment des troupes pour défendre notre pays et ensuite arrêter ou expulser Youssouf. »

 

Après sa nomination, il reçut le titre d’al Malik an-Nassir et aucun des émirs qui avaient désiré le poste lui obéit ou lui porta allégeance. Le juriste ‘Issa al-Hakkari était avec lui et convainquit al-Mashtoub de le joindre après des efforts ardus. Il lui dit : « Tu n’auras jamais ce poste avec les semblables de ‘Ayn ad-Dawlah, al-Harimi et les autres. » Alors il alla trouver al-Harimi et lui dit : « Ici nous avons Salah ad-Din, qui est ton neveu et son pouvoir et dominion sont à tes avantages. Sa position est sûre. Ne sois pas le premier à t’efforcer de l’en évincer car tu ne l’auras pas. » Alors il lui donna aussi son soutien. Par la suite ‘Issa fit de même avec le reste et tous lui offrirent l’obéissance excepté ‘Ayn ad-Dawlah al-Yarouqi qui dit : « Je ne servirai jamais Youssouf, » et il revint en Syrie chez Nour ad-Din avec autres émirs.

 

Le pied (pouvoir) de Salah ad-Din devint fermement établi bien qu’il soit encore un député de Nour ad-Din qui dans sa correspondance avec lui s’adressait à lui comme Amir Isfahsalar et il signait avec sa devise en tête de ses lettres trop fier d’écrire son nom personnel. Il ne lui envoya pas non plus de lettre individuelle mais avait l’habitude d’écrire « Émir Isfahsalar Salah ad-Din et tous les émirs en Egypte devront faire ceci et cela. »

 

Salah ad-Din essaya d’apaiser les cœurs des gens et distribua de larges sommes d’argent. Ils se tournèrent donc vers lui et lui donnèrent leur affection tandis que la position d’al-‘Adid s’affaiblit. Plus tard, Salah ad-Din envoya une demande à Nour ad-Din pour lui demander de lui envoyer ses frères et sa famille. Ce que fit Nour ad-Din qui avait stipulé qu’ils lui portent allégeance, qu’ils soutiendraient sa cause et lui fourniraient toute l’aide, ce qu’ils consentirent. Salah ad-Din prit les fiefs des émirs égyptiens et les donna à sa famille et les émirs qui étaient avec lui. Il augmenta leur bonne fortune et ils augmentèrent son amour pour lui et sa fidélité.

 

J’ai attentivement lu les histoires et ai vu beaucoup d’événements de l’histoire islamique qui peuvent être documentées de manière fiable. J’ai vu le cas de nombreuses personnes qui commencèrent une dynastie et qui transférèrent le pouvoir à leur progéniture immédiate, d’autres membres de leur  famille et ses proches d’autre famille et parents. Par exemple, dans les premières années de l’Islam, Mou’awiyah Ibn Abi Soufyan (qu’Allah soit satisfait d’eux) fut le premier de sa famille à régner. Le pouvoir est passé de ses descendants au Banou Marwan, ses cousins. Plus tard, as-Saffah, le premier des Abbassides à prendre le pouvoir, le transféra de sa ligne à celle de son frère al-Mansour. Considérez les Samanides (une dynastie perse) ; le premier membre de famille à avoir gagné l’indépendance du pouvoir fut Nasr Ibn Ahmad qui transmis le pouvoir à son frère Isma’il Ibn Ahmad et ses descendants. Prenez alors Ya’qoub as-Saffar, la première de sa maison à régner qui légua le pouvoir à son frère ‘Amr et ses descendants. Alors ‘Imad ad-Dawlah Ibn Bouwayh, la première de sa famille à régner passa le pouvoir à ses frères, Roukn ad-Dawlah et ‘Izz ad-Dawlah et retourna ensuite chez les descendants de Roukn ad-Dawlah et de Mou’iz ad-Dawlah et finit avec ceux de Roukn ad-Dawlah seulement. Considérez la dynastie Seljouks : le pouvoir a passé de son premier membre à gouverner Toughroul Beg aux descendants de son frère Daoud. Prenez finalement ce Shirkouh : comme nous l’avons déjà rapporté, le pouvoir fut transféré aux descendants de son frère Ayyoub et de Salah ad-Din aussi, après qu’il eut établi la dynastie et qu’il en fut le fondateur, le pouvoir passa à la progéniture de son frère al-’Adil et dans les mains de sa propre progéniture est resta seulement à Alep.

Ceux-ci sont les plus grandes dynasties islamiques et si ce n’était par crainte de prolixité, nous aurions donné plus d’exemples. La raison que je crois est que la première personne d’une dynastie prend le pouvoir par des mesures extrêmes tandis que les cœurs de ses prédécesseurs y sont seulement profondément attachés. Ainsi Allah comme une punition pour lui le nie à ses descendants et ceux pour qui il agit.

 

Récit de la bataille des Noirs au Vieux Caire

 

Au début du mois de Dzoul Qi’dah cette année, Mou’tamin al-Khilafah fut tué. Il était un eunuque dans le palais d’al-‘Adid qui avait de l’autorité et commandait tous les gens qu’il contenait. Lui et un groupe d’Egyptiens, acceptèrent d’écrire aux croisés pour les inviter dans le pays et utiliser leur puissant soutien contre Salah ad-Din et ses partisans. Il envoya les lettres avec un homme à qui il faisait confiance et resta en attente d’une réponse. Ce messager alla à al-Bir al-Bayda où il rencontra un Turcoman qui vit qu’il portait deux sandales neuves. Il les lui prit et se dit à lui-même : « Si celles-ci ont faisait partie des vêtements normaux de cet homme, elles seraient en pièce puisqu’il est vêtu comme une loque. » Il se méfia de l’homme et des sandales puis les ramena à Salah ad-Din, qui les déchiqueta et trouva les lettres dedans qu’il lit mais garda le silence.

 

Le plan de Mou’tamin al-Khilafah  consistait en ce que les croisés, qu’Allah les maudisse, devait aller en Egypte et que lorsqu’ils seraient arrivés, Salah ad-Din marcherait pour lutter contre eux avec ses troupes et ensuite Mou’tamin al-Khilafah se lèverait avec ses Egyptiens contre ceux qui étaient restés en arrière et les tueraient puis avec toutes ses forces, ils poursuivraient Salah ad-Din et tomberait sur ses arrières pendant que les croisés étaient devant lui et personne ne serait épargné.

Lorsque Salah ad-Din lut la lettre, il demanda qui l’avait écrite et il lui fut répondu : « Un Juif[3]. » Il fut alors convoqué et battu pour avouer. Il déclara immédiatement sa conversion à l’Islam pour sauver sa peau et raconta l’histoire entière que Salah ad-Din garda secrète. Cependant, Mou’tamin al-Khilafah devint inquiet et resta dans le palais, trop effrayé pour sortir. Quand il le fit, il n’alla pas loin et pendant ce temps Salah ad-Din ne lui fit aucune allusion que Mou’tamin aurait voulu pour éviter la critique.

Quand cette situation dura quelque temps, il quitta le palais pour aller dans un de ses villages appelé al-Kharqaniyah pour quelques loisirs. En apprenant cela, Salah ad-Din lui envoya quelques hommes qui le saisirent et le tuèrent puis envoyèrent sa tête à Salah ad-Din qui renvoya alors tous les eunuques qui dirigeaient les affaires du palais califal et nomma à leur place Baha ad-Din Qaraqoush, un eunuque blanc. Rien de petit ou de grand ne fut alors entreprit dans le palais sans son ordre ou sur son autorité.

 

Les esclaves noirs dans le Vieux Caire furent furieux de l’assassinat de Mou’tamin al-Khilafah par loyauté et parce qu’il les avait fortement soutenus. Ils rassemblèrent leurs forces qui s’élevèrent à plus de 50 000 avec l’intention de faire la guerre aux troupes Salah ad-Din dont les armées se rassemblèrent et les affrontèrent à Bayn al-Qasrayn ou il y eut beaucoup de tués de chaque côté. Salah ad-Din envoya un escadron vers leur quartier connut sous le nom d’al-Mansourah qu’ils incendièrent sur leurs biens, leurs femmes et leurs enfants. Quand ils en furent informés, ils s’enfuirent et furent harcelés par les sabres mais comme les entrées et les sorties des voies d’accès étaient fermés contre eux, ils furent stoppés et demandèrent des termes après qu’un très grand nombre d’entre eux périrent. Les conditions furent accordées et ils furent renvoyés du Vieux Caire à Giza. Ensuite Shams ad-Dawlah Touranshah, le frère de Salah ad-Din traversa le Nil avec un détachement de l’armée et les passa par le sabre si bien que seuls quelques rares fugitifs s’enfuirent. Allah Tout Puissant se chargea de leur malice, et Il est le Plus Savant !

 

 

Cette année, un étranger fut aperçu avec un petit couteau sur son avant-bras et un autre grand couteau dans sa main sur une route que le calife al-Moustanjid Billah avait l’habitude d’emprunter près du palais califal, Il fut saisi et questionné puis répondit : « Je suis d’Alep. » Il fut emprisonné et le portier puni, bien qu’il ne sut pas comment par où il était entré.

 

Ibn al-Baladi, le vizir du calife arrêta al-Houssayn Ibn Muhammad surnommé Ibn as-Sibi et son plus jeune frère. Ils étaient des cousins de ‘Adoud ad-Din, le majordome. Le plus jeune qui était le garçon de l’hôpital eut sa main et son pied tranchés. On prétendit qu’il avait des poids (de balance) qui étaient plus lourds que la norme et c’est pour cette raison qu’il fut arrêté. Ils furent emportés au Diwan pour les comparer avec les vrais poids standard. D’autres raisons furent aussi données. Il fut emmené à l’hôpital où il mourut. Il était un poète et parmi ses poésies sont ces vers qu’il écrivit durant son incarcération :

« Salutations à ma famille, mes amis et mes compagnons,

Dont la mémoire est fixée et ancrée dans mon cœur.

Avec vous je fais face à chaque problème et ne vois pas

Pour la maladie de mes soucis d’autre consolation que votre vue.

Le destin a suscité pour moi tous les malheurs,

Qui rendent les foies gris, sans parler de la tête.

O fille de ‘AbdAllah, patiente à supporter mon sort.

Ce jugement est celui du Souverain de l’humanité.

Si vos yeux pouvaient voir mon humiliation, vous pleureriez pour moi des larmes jaillissantes comme des fontaines.

Je parle à mon cœur alors que les soins s’en emparent

Et mon esprit lui a parlé de détresse et de désespoir.

Si un fantôme de mon imagination voulait vous visiter,

Mes gardes l’arrêteraient avant les portes fermées.

Mon souci est seulement pour moi et pas pour autre chose,

Parce que je suis un allié de la pauvreté et de la misère. »



[1] C’est exactement ce qui se passe dans tous les pays musulmans de nos jours.

[2] « Et ils [les autres] se mirent à comploter. Allah a fait échouer leur complot. Et c’est Allah qui sait le mieux leur machination ! » Qur’an 3/54.

[3] Louange à Allah, ces gens furent toujours dans l’histoire dans tous les coups fourrés et les complots !