La
région de Saragosse, au nord-est de l’Andalousie, était en contact
direct avec les royaumes espagnols du nord et en l’an 431 de
l’Hégire (1039), Souleyman Ibn Muhammad Ibn Houd al-Joudami
qui se fit appeler al-Mousta’in Billah devint gouverneur de
Saragosse et entra en conflit avec al-Ma'moun Ibn Zi Noun le
gouverneur de Tolède.
Avant
son décès, Souleyman Ibn Muhammad Ibn Houd, procéda au
partage de son royaume entre ses cinq fils. Ahmad devint
gouverneur de la région de Saragosse, Muhammad se vit
attribuer la région de la forteresse d’Ayyoub (qal’at ayyoub),
Moundir la région de Fatilah, Youssouf la région de Laridah et Loub,
la région de Washaqah.
Ce
partage ne pouvait conduite qu’à des troubles puisqu’il est dans la
nature humaine de vouloir toujours plus que ce que l’on a et
effectivement les frères se menèrent une guerre sanglante. Ahmad,
qui se fit surnommer al-Mouqtadir, captura et emprisonna ses trois
frères Loub, Muhammad et Moundir qu’il fit aveugler dans leur
geôle. Son autre frère Youssouf al-Mouzaffar se leva contre lui et
après un long conflit réussit à mettre la main sur le royaume de
Saragosse.
En
l’an 453 de l’Hégire (1060), une immense armée de croisés Normands
venant d’al-Ard al-Kabirah, communément appelé la France, mit
le siège sur la ville de Barbastro sur les ordres du pape de Rome
Alexandre. Le siège dura quarante jours et les deux frères en
conflit abandonnèrent la
ville musulmane à son destin. Les habitants se défendirent
farouchement mais se contraignirent à accepter l’offre de leur
reddition selon certaines conditions que les Normands acceptèrent.
Ces
derniers permirent à Ibn Tawil, le chef de Barbastro, Ibn ‘Issa et
quelques familles de quitter la ville et accordèrent la sécurité aux
habitants de la ville s’ils déposaient leurs armes et se rendaient
pacifiquement pour mieux être égorgés. Et comme à leurs habitudes,
les mécréants rompirent leurs promesses et la suite fut une
inimaginable horreur sans nom.
« Lorsque leur chef décida de repartir », comme l’a rapporté
l’historien Yaqout al-Hamawi, « il emmena avec lui 7.000
jeunes filles vierges musulmanes enchainées et laissa dans la ville
blessée 1.500 cavaliers et 2.000 fantassins. Il emporta avec lui un
très large nombre d’enfants prisonniers ainsi qu’un immense butin ».
Fin de la citation de Yaqout.
Question : La mort au combat n’est-elle pas préférable que de
déposer les armes et se rendre pour finir ainsi et pour les
survivants de porter l’éternel fardeau du regret ?
La
ville resta neuf mois aux mains des croisés avant qu’elle ne soit
reprise au mois de Joumadah Awwal de l’année 457 de l’Hégire (1064).
Le
royaume de Saragosse était ceint de trois royaumes espagnols, celui
de Castille, d’Aragon et de Navarre et soumit à une intense pression
des croisés si bien que le gouverneur de la ville perdit un nombre
considérable des forteresses et dut payer la Jizyah au roi de
Castille Fernando pour se préserver de son mal.
Quand
ce dernier mourut en l’an 457 de l’Hégire, il fut succédé par son
fils Sancho qui envoya contre Saragosse, en l’an 459 de l’Hégire
(1066), une armée commandée par Rodrigo Diaz Devidiar surnommé
al-Cambidor (al-qambitour), qui veut dire le farouche
combattant, ou le Cid selon le folklore andalou. Rodriguo assiégea
la ville et ne leva le siège, que lorsqu’une immense somme d’argent
lui fut versé (al-jizyah).
En
l’an 472 de l’Hégire (1079), les relations entre al-Mouqtadir et son
frère s’améliorèrent et il en profita pour le capturer et
l’emprisonner et al-Mouzaffar mourut en prison en l’an 475 de
l’Hégire (1082).
Alfonsh VI, après l’assassinat de son frère Sancho, devint le roi du
royaume de Castille en l’an 464 de l’Hégire (1071) et entra en
conflit avec Rodrigo al-Qambitour et l’expulsa de Castille. Ce
dernier avec ses partisans devinrent des mercenaires (mourtaziqa)
qui offrirent leurs services au plus offrant qu’ils soient
mécréants, croisés ou Musulmans. Et lorsque les croisés mirent la
pression sur Saragosse, al-Mouqtadir fit appel à ses services mais
ce dernier mourut après qu’il fut mordu par un chien enragé, en l’an
474 de l’Hégire (1081).
Avant
de mourir, il fit exactement la même erreur que son père, et
partagea son royaume entre ses deux enfants al-Mou’tamid et
al-Moundir qui ne tardèrent pas à s’entretuer et firent comme les
gouverneurs des royaumes indépendants qui pour conserver le pouvoir
étaient prêt à apostasier et à appeler leurs ennemis les croisés, à
l’aide.
Rodrigo al-Qambitour prit la défense d’al-Mou’tamid tandis
qu’al-Moundir demanda de l’aide à Sancho Ramirez, le roi d’Aragon et
Ramon Brinji, le gouverneur de Barcelone.
Al-Mou’tamid mourut en l’an 478 de l’Hégire (1085) et fut succédé
par son fils Ahmad al-Mousta’in tandis que son oncle
al-Moundir contrôlait toujours ce que son père lui avait légué.
Ahmad
al-Mousta’in connut des périodes difficiles quand Alfonsh VI le
castillan attaqua Tolède comme nous allons le voir et qu’il mit le
siège sur Saragosse pour prendre la ville quoi que cela puisse lui
couter. Mais lorsque Youssouf Ibn Tashfine, l’émir des Mourabitine
vint du Maghreb à l’aide des Andalous, Alfonsh leva le siège pour
faire face aux Fauves du Maghreb (oussoud al-maghreb) ce qui
permit à al-Moundir de respirer librement. Ce dernier entra en
conflit avec son oncle al-Moundir et aussi contre Sancho Ramirez, le
roi d’Aragon, qui assiégeait la ville de Washaqah, profitant de la
division des gouverneurs Musulmans au dépend des pauvres populations
musulmanes qui payaient le plus lourd prix de leurs divisions.
Sancho Ramirez, le roi d’Aragon, mourut au mois de Joumadah Awwal de
l’année 487 de l’Hégire (1093) alors qu’il assiégeait la ville de
Washaqah et son commandant Pedro poursuivit le siège jusqu’à
l’arrivée d’al-Mousta’in pour lever le blocus.
Au
mois de Dzoul Qi’dah de l’année 489 de l’Hégire (1095) eut lieu une
bataille sous les murs de la ville entre les deux armées ou celle
d’Ahmad al-Mousta’in subit de très lourdes pertes et fut
battue. Après un siège de trente mois, la ville se rendit seulement
trois jours après la défaite et Pedro I entra dans la ville où il
transforma la mosquée en église et fit de la forteresse sa capitale.
Après
sa mort, Sancho Ramirez fut succédé par son frère Alfonsh surnommé
« al-mouharrib » le guerrier et que les Musulmans
appelèrent Bibin Rodmir. Alfonsh leva une armée et se dirigea
vers la ville de Thaqilah près de Saragosse, ou il mit le siège.
Al-Mousta’in partit au secours de la ville et au mois de Rajab de
l’année 503 de l’Hégire (1109), les deux armées s’affrontèrent près
d’une ville du nom de Baltirah ou il fut tué et son armée vaincue.
‘Abdel Malik Ibn al-Mousta’in lui succéda et prit le nom de ‘Imad
ad-Dawlah qui fut désisté par l’émir des Mourabitine ‘Ali Ibn
Youssouf Ibn Tashfine qui entra dans la ville de Saragosse, cette
même année.
‘Abdel Malik Ibn al-Mousta’in se réfugia dans la forteresse
imprenable de Rawtah ou il attendit le déroulement des évènements,
faible et sans pouvoir.
En
l’an 512 de l’Hégire (1118), Alfonsh Rodmir, le roi d’Aragon prit
Saragosse et ‘Imad ad-Dawlah ‘Abdel Malik Ibn al-Mousta’in lui porta
allégeance.
En
l’an 524 de l’Hégire (1124), ‘Abdel Malik Ibn al-Mousta’in mourut et
son fils Ahmad, surnommé Sayf ad-Dawlah al-Moustansir Billah,
un nom bien pompeux pour un traitre, prit sa succession et remit la
forteresse de Rawtah au roi de Castille, Alfonsh Rimondez appelé par
les Musulmans Soulaytine, et d’autres territoires dans la région de
Tolède an l’an 534 de l’Hégire (1135).
Au
mois de Sha’ban de l’année 540 de l’Hégire (1145), une force alliée
de Musulmans de Valence, de Murcie et celle de Sayf ad-Dawlah
rencontra une force de croisés castillane près de Loudj dans l’est
de l’Andalousie ou les Musulmans furent vaincus et ce dernier tué
après avoir été fait prisonnier sans qu’ils le sachent.
Et
peu après le dernier gouverneur des Bani Houd al-Joudami de
Saragosse mourut.
La Royauté de Tolède (mamlakat toleytela)
La
royauté de Tolède était la plus grande royauté des états
indépendants et après la chute de la dynastie des Omeyyades en
Andalousie, les Banou Zi Noun, de la tribu berbère de Ghwar,
s’établirent à Tolède.
Le
premier gouverneur d’entre eux fut Isma’il Ibn ‘AbderRahmane
Ibn Zi Noun en l’an 427 de l’Hégire (1035) et trois ans plus tard,
son fils al-Ma'moun lui succéda et entra en conflit avec Souleyman
Ibn Houd, le gouverneur de Saragosse, et de sanglantes batailles
eurent lieu entre les deux.
Al-Ma'moun demanda de l’aide au roi croisé de Castille Fernando I
contre Ibn Houd et lui paya la Jizyah en échange de son aide.
Le roi croisé entra à Saragosse et saccagea la ville et Souleyman
Ibn Houd lui paya à son tour la Jizyah en échange de ses
services pour qu’il attaque le Royaume de Tolède et effectivement
peu de temps après, il saccagea la banlieue de la ville.
Al-Ma'moun envoya alors des cadeaux et de l’argent à Garcia, le roi
de Navarre qui était le frère de Fernando, le roi de Castille, qui
envoya ses forces contre Saragosse et le conflit entre les deux
Musulmans dura trois années.
Lorsque Souleyman Ibn Houd mourut, la royauté de Saragosse fut
secoué par les conflits que se menèrent ses enfants pour le pouvoir
et en l’an 457 de l’Hégire (1064), al-Ma'moun réussit à capturer
Valence (bolensia) de l’épouse de son fils ‘Abdel Malik Ibn
‘Abdel ‘Aziz Ibn Houd.
Lorsque Fernando I le castillan mourut en l’an 458 de l’Hégire
(1065), ses enfants Alfonsh roi de Léon, Sancho le roi de Castille
et Garcia, le roi de Galice (ou de Navarre) entrèrent en guerre les
uns contre les autres pour le pouvoir. Le conflit prit fin lorsque
Sancho vainquit ses frères.
Garcia s’enfuit et demanda protection à al-Mou’tamid Ibn
‘Abbad le roi de Séville tandis qu’Alfonsh se réfugia chez
al-Ma'moun Ibn Zi Noun, le roi de Tolède ou il resta neuf mois et
durant lesquels, il put connaitre à loisir la ville, comme nous
l’avons déjà rapporté et qui l’aida beaucoup lorsqu’il captura la
ville par la suite.
Lorsque son frère Sancho mourut en l’an 464 de l’Hégire (1071), il
retourna en hâte à Léon ou il devint de nouveau roi.
En
l’an 467 de l’Hégire (1074), al-Ma'moun mourut et Yahya, qui
se fit appeler al-Qadir, le fils de Hisham fils d’al-Ma'moun prit la
succession.
Sous
son règne, le Qadi Abou Bakr Muhammad Ibn ‘Abdel ‘Aziz Ibn
‘Amir devint gouverneur de Valence et rechercha de l’aide auprès
d’Alfonsh VI auquel il donna des sommes faramineuses d’argent, lui
paya la Jizyah et lui remit un très large nombre de
possessions musulmanes, de forts et de forteresses stratégiques.
En
l’an 470 de l’Hégire (1077), Alfonsh se prépara à attaquer Tolède,
une des places fortes la plus fortifiée des Musulmans. Comme il
avait vécu plusieurs mois dans la ville, il en connaissait toutes
les faiblesses et savait donc que pour pouvoir la conquérir, il
devait d’abord affaiblir ses occupants en brûlant toutes leurs
cultures. Pendant sept années consécutives, il envoya régulièrement
des troupes chargées de détruire les stocks agricoles si bien qu’il
affaiblit considérablement les Musulmans de la ville.
Les
habitants de Tolède se rendirent compte que leur gouverneur al-Qadir
Billah était incapable de protéger leurs intérêts et ne faisait rien
pour empêcher les croisés d’agir. Un groupe de savants et de
familles importantes se consultèrent à propos de ce grave danger qui
les menaçaient et se dirent : « Si nous attendons que la situation
s’aggrave, nous serons alors bientôt incapable de nous défendre et
de supporter le poids d’une attaque. Que devons-nous faire ? »
Alors
ils décidèrent de demander de l’aide à al-Moutawwakil Ibn Akhtas, le
gouverneur de Badajoz (batalios) proche de Tolède, qui était
un homme pieux et respecté, et le préférèrent à tous les autres
gouverneurs. Al-Moutawwakil leur accorda son aide et ils se
débarrassèrent d’al-Qadir Billah qui s’enfuit avec sa famille. Mais
ce dernier qui était vraiment obnubilé par le pouvoir demanda de
l’aide à Alfonsh qui répondit à son appel et dix mois après al-Qadir
Billah revint au pouvoir à Tolède sous la protection des épées des
croisées.
Tolède devint encore plus faible à cause de la traîtrise du
gouverneur mais aussi à cause des divisions intérieures. Al-Qadir
Billah était dorénavant ami avec Alfonsh et il devint évident qu’il
ne ferait rien pour défendre sa ville. Quant à Alfonsh, il devenait
obligatoire pour lui de donner une leçon à al-Moutawwakil.
Il
lui envoya un messager lui ordonnant de lui payer immédiatement
l’impôt de guerre (jizyah) et le menaça rudement s’il ne
payait pas. Et parmi tous les gouverneurs des villes-états
indépendants, il n’y avait pas de meilleur homme qu’al-Moutawwakil
et malgré la petitesse de Badajoz, une toute petite ville incapable
d’affronter une grosse armée, son gouverneur, un homme pieux et un
brave homme d’honneur, répondit à Alfonsh sur le même ton.
La réponse d’al-Moutawwakil à Alfonsh
« De
Moutawwakil à Alfonsh :
Il
nous est parvenu du magnat de Rome, un lettre agressive et
menaçante, qu’il est capable de tout faire et que ses soldats sont
innombrables.
Et
s’il savait que le Seigneur Glorifié soit-Il à des soldats qu’Il a
honoré avec la parole de l’Islam et qu’il a fait valoir la religion
de Son Messager Muhammad (Saluts et bénédictions d’Allah sur
lui), puissant envers les mécréants et qui combattent dans la voie
d’Allah sans peur, connus pour leur piété et la recherche du
repentir.
Si
ton affaire pour l’instant te semble assurée alors avec la
permission d’Allah le Très Haut, sache qu’Allah différencie le
mauvais du bon en éprouvant Ses serviteurs par des gens comme toi
pour distinguer qui d’entre nous est fort et qui est faible.
Quand
à tes propos insultants concernant notre faiblesse, cela est dut
uniquement à cause de nos trop nombreux péchés et de notre division.
Si nous nous réconcilions avec les autres gouverneurs, tu verras
alors quels funestes malheurs s’abattront sur toi comme ils
s’abattirent sur tes ancêtres. Rappelle-toi hier quand al-Hajib
al-Mansour fit payer l’impôt de guerre à un des tes ancêtres qui lui
donna en plus ses filles comme cadeau.
Quant
à nous, si notre nombre est infime et que personne ne nous accordera
de l’aide, cela n’est pas un problème. Comme il n’a pas de mer à
traverser et qu’il n’y a personne entre nous, viens car il n’y a
entre nous que les sabres.
Les
cous de ton peuple témoigneront alors ainsi que leurs corps que tu
verras durant tes nuits et tes jours. Et Par le Seigneur Magnifié
soit-Il, et Ses anges alignés, nous deviendrons forts grâce à toi,
car nous ne recherchons que Son agrément, qu’à Lui ne demandons et
que de Lui attendons.
Qu’attends-tu de nous, sinon les deux excellences : la victoire sur
vous et ce qu’elle engendre de grâce ou le martyr dans la voie
d’Allah qui n’a de récompense que le Paradis ! Allah le Très Haut
est notre Secours et Il nous protégera. »
Il
restait donc parmi les gouverneurs des états indépendants encore
quelques âmes fières, préoccupées du sort des Musulmans et
accrochées à la foi. Nous verrons le grand rôle qu’allait jouer
al-Moutawwakil, le gouverneur de Badajoz, dans la suite des
évènements. Il refusa de se soumettre et d’être humilié par des
mécréants, ce que tous les Musulmans devraient faire.
En
l’an 474 de l’hégire (1081), le renommé savant al-Baji sentit
l’imminence de sa mort. Il convoqua les ‘Oulémas (savants religieux)
et leur fit part de ses volontés et leur dit :
-
« La situation générale des Musulmans et des royaumes indépendants
est catastrophique. J’ai appelé à l’unité toute ma vie et personne
ne tient en compte de mes recommandations. Partez au Maghreb et
demandez de l’aide aux Musulmans là-bas et demandez-leur de venir en
Andalousie et d’unifier le pays par la force s’il le faut ».
Et
c’est grâce à ses recommandations que les Mourabitine vont enter en
Andalousie. Al-Mourabitine, un puissant nom en vérité ! Mais
avant de parler d’eux, nous devons finir avec l’histoire du royaume
de Tolède.
La
chute de Tolède ne fut pas une simple affaire. Ce fut l’évènement
mondial le plus important de l’époque et de l’histoire de
l’Andalousie et un jour de deuil pour tous les Musulmans du monde.
«
Faites vos bagages et l’Andalousie quittez,
L’erreur serait d’y rester,
Les
perles se retirent par l’un des bouts du collier,
Et je
vois le collier de son centre se détacher,
Celui
qui vient après le mal, au futur ne peut faire confiance,
Comment pouvez-vous vivre alors que la fin s’annonce
».
Ces
vers du poète ‘AbdAllah Ibn Faraj al-Ya’soubi Ibn ‘Assal appelaient
les habitant de l’Andalousie à partir et nous montre l’état d’esprit
corrompu des gens de l’époque, leur profond état d’humiliation et
leur lâcheté. A la place de les appeler au combat dans la voie
d’Allah le Très Haut et à la puissance (‘izza), il les
appelait à partir !
Heureusement beaucoup de poèmes appelant les gens au sursaut furent
écrit sur la chute de Tolède toutefois les jours étaient désormais
comptés. Les habitants du Maghreb furent particulièrement peinés du
fait qu’ils étaient les plus proches voisins et les évènements
prirent de plus large proportions après la chute de Tolède qui eut
lieu en l’an 478 de l’Hégire (1085).
Les
Banou Razine, gouverneurs de Santa Maria, proposèrent à Alfonsh de
payer la Jizyah en échange de rester au pouvoir. Il accepta
et ils payèrent la dîme. Puis Alfonsh se dirigea sur Saragosse, la
capitale musulmane du nord et mit le siège.
Al-Qadir Billah le traître, le pire personnage de l’histoire de
l’Andalousie comme les historiens l’ont rapporté, gouvernait Tolède
qu’il remit sans combattre fut nommé gouverneur de Valence (bolensia)
au profit d’Alfonsh. Comme ce dernier lui demandait des sommes
d’argent de plus en plus élevées, il mit la pression sur les
habitants de la ville et les fit battre violemment.
Un
homme du nom d’al-Mousta’in Billah, sentant l’opportunité du
pouvoir, avec quatre-cent cavaliers et trois-mille mercenaires
croisés débauchés intéressés que par l’argent, sous le commandement
d’al-Qambitour attaquèrent Valence.
Al-Qadir pour ne pas perdre son poste, lui envoya un messager lui
demandant de ne pas rester avec al-Mousta’in mais plutôt de le
rejoindre ou il serait mieux payé. Voulant prendre l’argent des deux
côtés, al-Qambitour fit savoir à al-Mousta’in qu’il ne pouvait pas
attaquer al-Qadir parce qu’il était l’allié d’Alfonsh et ainsi il se
joua des deux.
Puis,
il alla voir al-Qadir pour réclamer son argent du fait qu’il avait
stoppé l’attaque. Secrètement al-Qambitour, envoya un messager à
Alfonsh lui demandant de l’aide et lui proposant de se débarrasser
des Musulmans à la condition qu’il garderait ce qu’il capturerait.
Alfonsh accepta car il n’était intéressé ni par l’un et ni par
l’autre mais uniquement le pouvoir et bientôt al-Qambitour se
retrouva à la tête d’une force de sept-mille hommes.
Ce
dernier captura Santa Maria et les habitants de la ville durent
payer la Jizyah. Puis il se dirigea vers Valence ou al-Qadir,
traîtrise après traîtrise, lui ouvrit les portes se soumit à lui et
lui paya aussi la Jizyah, la même année que la chute de
Tolède.
Comme
nous l’avons précédemment mentionné, les savants religieux
préoccupés du sort des Musulmans et de leur futur, et juste avant la
mort d’al-Baji, envoyèrent une délégation aux Mourabitine,
gouverneurs du Maghreb, pour leur demander de l’aide.
Quant
à Alfonsh, il parvint à cette époque au seuil de sa gloire et de sa
puissance. Il poursuivit sa politique d’humiliation des Musulmans et
attaqua Séville et Cordoue.
Comme
nous l’avons vu, pour affaiblir Tolède, dont il connaissait tous les
secrets, il pratiqua la politique de la terre brûlée durant sept
années. Et tandis qu’il affaiblissait Tolède, il attaqua Séville.
En
l’an 478 de l’Hégire (1085), voulant toujours plus des Musulmans,
Alfonsh se rapprocha de Tolède, la capitale musulmane du centre de
l’Andalousie et mit le siège sur la ville. Il envoya des messagers à
al-Qadir Billah lui demandant de lui remettre la ville. Al-Qadir
demanda de l’aide aux autres états mais tous refusèrent pour
diverses raisons.
Alors
le 15 Mouharram de l’année 478 de l’Hégire (13 mai 1085),
al-Qadir agréa de soumettre la plus grande ville et la place la plus
fortifiée d’Andalousie à l’ennemi sous certaines conditions (et Dieu
sait qu’ils vont immanquablement trahir leurs promesses) :
-
Qu’Alfonsh ne devrait pas faire de tort aux gens, ni entrer dans
leur demeure, ni prendre leur bien (ce même Alfonsh que les
Musulmans avaient honoré et protégé lorsqu’il fut chassé par son
frère Sancho qui voulait le tuer) et de respecter les lieux de
cultes.
Et
Alfonsh, bienheureux de la naïveté des Musulmans, accepta et bien
sur aucune promesse ne fut tenue. Il transforma la mosquée en église
et mit une statue à la place du minbar puis il commit encore une
fois les pires barbaries envers les Musulmans et conquit tous les
villages des alentours amassant un énorme butin.
Il
est important de mentionner que si al-Qadir fut un gouverneur
incompétent, il n’avait non plus rien d’un homme d’état. C’était un
être faible qui avait été élevé dans l’entourage des femmes du
palais et des esclaves. Après avoir remis la ville aux croisés sans
même tirer la moindre flèche, il quitta la ville en compagnie de sa
famille et de ses proches pour la ville de valence qui lui avait été
promise en échange.
Le Royaume de Valence (mamlakat bolensia)
Comme
nous l’avons déjà mentionné, ce sont les as-Saqalibah ou les
Fityan ‘Amiriyah, membres de la garde rapprochée d’al-Hajib
al-Mansour, qui prirent le contrôle du Royaume de Valence (mamlakat
bolensia). Deux d’entre eux, al-Mouzaffar et al-Moubarak, se
partagèrent le pouvoir et gouvernèrent Valence.
Al-Mouzaffar fut le premier à mourir suivit par al-Moubarak en l’an
408 de l’Hégire (1017) et al-Moujahid al-‘Amiri, aussi un des
Fityan, lui succéda. Nous avons mentionné que les Fityan
se divisèrent en deux groupes al-Foukhoul et al-Makhziyine.
Néanmoins, le reste des ‘Amiri ne furent pas satisfait de sa
nomination, l’expulsèrent et nommèrent à sa place, en l’an 411 de
l’Hégire (1020), ‘Abdel ‘Aziz Ibn Shanjoul, Shanjoul qui était
‘AbderRahmane Ibn al-Mansour Ibn Abi al-‘Amiri.
‘Abdel ‘Aziz Ibn Abi al-‘Amiri gouverna Valence jusqu’à sa mort, au
mois de Dzoul Hijjah de l’année 452 de l’Hégire (1060), tout
en préservant la stabilité du frêle état au regard des évènements
nationaux qui déchiraient l’Andalousie à cette époque. Son fils
‘Abdel Malik Ibn ‘Abdel ‘Aziz lui succéda et parmi les villes qui
dépendaient de Valence à l’est de l’Andalousie, il y avait Shatibah
et Murcie.
Lorsque ‘Abdel Malik Ibn ‘Abdel ‘Aziz prit la succession, il était
encore jeune et c’est Abou ‘Abdillah Ibn Muhammad Ibn Marwan
Ibn ‘Abdel ‘Aziz al-Qourtoubi, surnommé Ibn Rawbash, qui prit en
charge l’administration de la région.
‘Abdel Malik Ibn ‘Abdel ‘Aziz était marié à la fille du gouverneur
de Tolède, al-Ma'moun Ibn Zi Noun, et ne traitait pas celle-ci des
meilleures manières, de même qu’il refusa d’aider les Zi Noun lors
de leurs conflits avec al-Mou’tadid Ibn ‘Abbad. Ainsi les Zi Noun
conçurent des griefs à son égard et attendirent l’occasion pour
ajouter Valence à leur territoire qui se présenta lorsque Fernando I
y mit le siège et se retira après avoir failli à saisir la ville.
Al-Ma'moun Ibn Zi Noun marcha aussitôt sur Valence ou il entra et
captura ‘Abdel Malik Ibn ‘Abdel ‘Aziz qu’il emprisonna.
D’autres historiens ont rapporté que c’est à l’occasion d’une visite
à sa fille qu’al- Ma'moun lui tendit un piège dans lequel il tomba
et que lorsqu’il fut capturé, ‘Abdel Malik Ibn ‘Abdel ‘Aziz fut
alors envoyé à Santa Maria au mois de Dzoul Hijjah de l’année
457 de l’Hégire (1065).
Le
ministre de l’époque Abou ‘Abdillah Ibn Muhammad Ibn Marwan
Ibn ‘Abdel ‘Aziz al-Qourtoubi, alias Ibn Rawbash, mourut peu avant
ces événements et al-Ma'moun, qui ne pouvait laisser Tolède sans sa
présence, nomma le fils du ministre Abou Bakr Ibn Muhammad
Ibn Marwan, gouverneur de Valence.
Al-Ma'moun Ibn Zi Noun leva une grande armée pour capturer Cordoue
et il lui était important d’avoir un homme de main à Valence pour
surveiller ses intérêts en son absence. Comme nous l’avons déjà
mentionné, il réussit à entrer à Cordoue en l’an 467 de l’Hégire
(1074) et Abou Bakr le fils d’Ibn Rawbash profita qu’il était occupé
pour annoncer sa rébellion contre lui.
Al-Ma'moun Ibn Zi Noun mourut au mois de Dzoul Qi’dah de cette même
année et la menace qui pesait sur les épaules du gouverneur de
Valence se dissipa. Abou Bakr le fils d’Ibn Rawbash resta au pouvoir
durant approximativement onze années et son fils ‘Uthman Ibn Abou
Bakr lui succéda quelques jours à peine après la chute de Tolède aux
croisés. Et Lorsqu’Alfonsh VI promit au gouverneur de Tolède,
al-Qadir Zi Noun, de lui offrir la royauté de Valence s’il l’aidait,
ce dernier lui remit alors la ville de Tolède.
Al-Qadir Zi Noun, escorté de l’armée de Castille commandée par
Oliver Hands, se dirigea vers Valence ou il se fit précéder de
messagers et la population accepta de le nommer gouverneur de la
ville à cause de la présence de l’armée des croisée et pour se
préserver de leur mal.
‘Uthman Ibn Abou Bakr se désista et al-Qadir Zi Noun entra à Valence
en l’an 478 de l’Hégire (1085) accompagné par les croisés qui
restèrent dans la ville et qui contraignirent énormément la
population musulmane à fournir des sommes d’argents toujours de plus
en plus élevées. Quant au gouverneur al-Qadir Zi Noun, il n’était
pas préoccupé le moindre du monde par ce qui arrivait aux Musulmans
qui étaient durement opprimés et requit de remettre leurs biens.
Les
Mourabitine voulurent mettre fin à leur misère cependant la ville
était aussi convoitée par al-Moundir Ibn Houd, le gouverneur de
Merida et de Tartoshah, al-Mousta’in Ibn Houd de Saragosse et aussi
les croisés, sous le commandement d’Alfonsh VI le castillan et le
comte de Brinjil gouverneur de Barcelone qui voulait mettre la main
sur toutes les possessions musulmanes avant qu’ils ne partent. Mais
le pire d’entre eux était certainement le Cid Rodrigo al-Qambitour,
le mercenaire et son armée de débauchés. Ce fameux « Cid » qui
n’était rien d’autre qu’un vulgaire criminel et bandit que la
littérature a transformé en héros fantasque après lui avoir attribué
quantités d’histoires mensongères pour redorer son blason, une autre
histoire d’horreur transformée en conte et berceuse par les
spécialistes du mensonge.
Les
gens de cette époque cherchèrent donc tous les moyens de se
débarrasser des Zi Noun, le pur produit des croisés et l’équivalent
des dirigeants des pays musulmans actuels, et lorsqu’ils furent
informés de l’approche des Mourabitine de leur ville après leur
capture de Murcie, ils furent très contents. Au nom des habitants de
Valence, le Qadi Ja’far Ibn ‘Abdillah Ibn al-Jahhaf
al-Moughafiri al-Qahtani alla trouver leur commandant Muhammad
Ibn ‘Ayshah à qui il demanda de les sauver de Rodrigo et des croisés
ainsi que leur gouverneur, le traître al-Qadir.
Lorsque les croisés furent informés de l’arrivée imminente des
Mourabitine, ils quittèrent aussitôt la ville et l’humeur populaire
enfla à Valence contre le gouverneur si bien que bientôt son palais
fut assaillit et il fut trouvé caché dans les toilettes. Et au mois
de Ramadan de l’année 485 de l’Hégire (1092), sa tête fut tranchée
et élevée à la pointe d’une lance et il n’y eut personne pour le
pleurer, exceptés les hypocrites et le Qadi Ja’far Ibn ‘Abdillah
administra la ville.
Lorsque Rodrigo al-Qambitour fut informé de l’assassinat de son
larbin, il revint mettre le siège sur la ville aidé par les
partisans de son valet. Ce fut un siège très dur ou les mercenaires
croisés détruisirent tout ce qui se trouvait à l’extérieur de la
ville, les constructions, les irrigations et les cultures mais le
courageux Qadi Ibn Jahhaf se prépara pour le siège et envoya
secrètement un messager aux Mourabitine pour demander de l’aide mais
aussi au roi (malik) de Saragosse, al-Mousta’in In Houd.
Le
siège de Valence dura vingt mois durant lesquels les gens
souffrirent cruellement et les historiens ont rapporté « que les
gens se mirent à manger les rats et les souris, puis les chiens et
enfin la chair de cadavres humains. Une fois, un croisé tomba dans
la fosse qui entourait la ville fortifiée alors ils le coupèrent en
morceaux et se le partagèrent entre eux » fin de citation.
Mais
personne ne put venir à leur secours et le Qadi chercha à obtenir
des gains contre une éventuelle reddition et au mois de Joumadah
Awwal de l’année 487 de l’Hégire (1093), Valence ouvrit ses portes à
Rodrigo al-Qambitour et ce dernier ordonna de brûler vif le Qadi Ibn
Jahhaf pour lui avoir résisté. Ils lui creusèrent une fosse
dans laquelle ils allumèrent un feu et le jetèrent dedans, puisse
Allah Exalté lui faire miséricorde.
Ce
maudit chien[1]
al-Qambitour ne s’arrêta pas là, et voulut aussi faire suivre le
même chemin à l’épouse du Qadi mais Allah Exalté la sauva de son
mal. Ce maudit chien ordonna aussi de brûler vifs les nobles de la
ville. Un groupe d’apostats rejoignit ses rangs et pour lui montrer
leur allégeance, commirent envers les Musulmans des actes plus
barbares que les croisés eux même comme c’est toujours le cas, peu
importe le siècle et le pays.
Les
exemples les plus récents de ces apostats traitres sont certainement
les shiites d’Iraq dont j’ai pu voir dans les médias leurs atrocités
envers les Musulmans sounnites exécutés sous les yeux de leur maitre
mais aussi en Afghanistan avec la fameuse alliance du nord et le
massacre des prisonniers de Qal’ah i-Jangi en l’an 2001. Leurs
crimes ont de loin dépassé toutes les notions d’humanité et comme
vous le savez ne resteront pas impunis.
Lorsque l’émir des Mourabitine au Maghreb, Youssouf Ibn Tashfine,
entendit ce qui était arrivé aux habitants de Valence, il leva une
grande armée dont il confiât le commandement à son fils Muhammad
Ibn Tashfine, le fils de son frère. L’armée traversa le détroit de
Gibraltar et débarqua à Valence mais ne put secourir la ville du
fait d’évènements plus graves qui demandèrent leurs attention.
Une
autre armée de Mourabitine vint à bout de l’armée des castillans
d’Alfonsh VI ainsi que celle de Rodrigo al-Qambitour dont l’unique
fils Don Diego trouva la mort au court de la bataille.
Une
autre armée des Mourabitine sous le commandement de Muhammad
Ibn ‘Ayshah vainquit aussi une autre armée castillane sous le
commandement d’Oliver Hand avant de marcher sur Valence ou il
rencontra l’armée du maudit et vil Rodrigo al-Qambitour qui s’était
retranché dans la ville et qu’il écrasa. Al-Qambitour ne commandait
pas cette armée ni même se trouvait sur le champ de bataille car
après qu’il fut informé du décès de son fils Don Diego, il devint
malade, s’apitoya son sort et ce vil mercenaire croisé finit par
mourir de chagrin en l’an 489 de l’Hégire (1095).
Son
épouse se retrancha deux année dans Valence avant qu’Alfonsh VI ne
vienne dans la ville où il resta un mois avant de la quitter ayant
entendu parler de l’avancée vers lui des Mourabitine sous le
commandement d’Abou Muhammad al-Mazdari.
Avant
de quitter Valence, Alfonsh VI ordonna de brûler la ville dans
laquelle entrèrent les Mourabitine dans les derniers jours du mois
de Rabi’ Thani au mois de l’année 495 de l’Hégire (1101).
C’est
sur ces tristes nouvelles et pas les dernières, que nous finissons
l’histoire de la Royauté indépendante de Valence. Ces royautés
indépendantes furent nombreuses et nous ne pouvons pas mentionner
l’histoire de chacune d’entre elle indépendamment. C’est pourquoi
nous avons choisi seulement les cinq principales qui suffiront à
nous donner un aspect général de l’Andalousie à cette époque
particulièrement difficile.
La Royauté de Séville (mamlakat ashfillia)
La
Royauté de Séville (mamlakat ashfillia) fut fondée par le
Qadi Muhammad Ibn Isma’il Ibn ‘Abbad qui mourut en l’an 433
de l’Hégire (1041) et qui entra en violent conflit avec un grand
nombre de gouverneurs. Il s’allia avec Muhammad Ibn ‘Abdillah
al-Barzali, un Berbère des Bani Yafran az-Zinnati, le gouverneur de
Carmona, et combattit sans succès les Berbères des Bani Akhtas de
Badajoz pour s’approprier la ville de Baja.
Muhammad
Ibn Isma’il Ibn ‘Abbad fut succédé par son fils ‘Abbad qui prit le
nom d’al-Mou’tamid et qui était âgé de vingt-six ans. Al-Mou’tamid
fut considéré comme l’un des plus puissant, sinon le plus puissant
gouverneur de ces royautés indépendantes.
Il
débuta son règne en assassinant Habib, le ministre de son
père avant de renforcer son emprise sur sa royauté et sur ses gens.
Puis, il combattit les autres gouverneurs de l’ouest de l’Andalousie
pour s’approprier leurs royaumes pour les unifier sous son
commandement et c’était un homme qui utilisait tous les moyens pour
parvenir à ses fins.
Il
commença par attaquer les Bani Ya’soubi de Wuebla et ‘Iz ad-Dawlah
demanda de l’aide à al-Mouzaffar Ibn Akhtas le gouverneur de
Badajoz. Il s’ensuivit un certain nombre de batailles que chacun
d’entre eux remporta à tour de rôle, jusqu’à ce qu’al-‘Abbad
réussissent enfin son objectif en capturant Wuebla, en l’an 443 de
l’Hégire (1051) après un arrangement avec al-Mouzaffar Ibn Akhtas.
Puis,
al-Abbad mit la pression sur les villes de Walba et l’île de
Shaltish y faisant face dans l’océan Atlantique dont le gouverneur
‘Abdel ‘Aziz al-Bakri s’enfuit à son arrivée et que ‘Abbad prit
aussi ainsi que la ville estuaire de Santa Maria, toujours cette
même année, après avoir vaincu le gouverneur Muhammad Ibn
Sa’id Ibn Houd. Quelques temps plus tard, il prit la ville de Shilb
après avoir tué son gouverneur, ‘Issa Ibn Muhammad Ibn
Mouzayr.
En
l’an 445 de l’Hégire (1053), ‘Abbad al-Mou’tadid opprima certains
chefs berbères après les avoir utilisés à ses fins dont Abou Nour
Ibn Abi Qourrah al-Yasrani le gouverneur de Ronda, Muhammad
Ibn Nouh ad-Doumari le gouverneur de Ghour et ‘Abdnoun Ibn
Khazroun le gouverneur d’Arqoush ainsi que les Emirats Berbères de
Carmona gouvernés par les Banou Birzan, Malaga et Algésiras
gouvernés par les Banou Hamoud al-Adarissah et la Royauté de
Grenade gouvernée par Badis Ibn Habous.
Al-Mou’tadid invita les trois gouverneurs à Séville qui arrivèrent
avec leurs suite et les fit habiter dans des appartements de son
palais puis trois jours après les convia à un entretien ou il leur
reprocha de ne pas l’avoir assisté dans ses conflits avec ses
voisins. Il ordonna alors de les emprisonner et quelques temps après
leur permit de se rendre au bain turc[2]
(hammam), comme s’il voulait leur pardonner. Il les
enferma alors et augmenta la chaleur du bain si bien qu’ils ne
tardèrent pas à mourir. Suite à ces injustices, les Berbères se
levèrent tous comme un seul homme contre al-Mou’tamid al’Abbad.
En
l’an 455 de l’Hégire (1062), al-Mou’tadid al-‘Abbad rencontra le roi
croisé castillan, Fernando I, à qui il demanda la paix en échange
d’une large Jizyah et de lui offrir ce qu’il désirerait s’il
le laissait combattre les gouverneurs des autres royautés
indépendantes. Et lorsque Fernando I mourut en l’an 457 de l’Hégire
(1064), al-Mou’tadid envoya la faramineuse Jizyah à son
successeur Sancho le roi de Galice puis après lui à Alfonsh VI, qui
réussit à chasser ses deux frères Sancho et Garcia et devint roi de
toute la Castille.
Lorsque al-Mou’tamid en finit avec les chefs berbères, il captura
les villes d’Arqoush et de Sidonie en l’an 458 de l’Hégire (1065),
puis Moror, l’émirat de Randa et Carmona en l’an 459 de l’Hégire
(1066) ainsi qu’Algésiras quelques temps auparavant. Ainsi sa
Royauté s’agrandit sensiblement comme nous le témoignons.
Al
Mou’tadid accrochait les têtes de ses ennemis dans un jardin spécial
appelé « le jardin des têtes » (hadiqat rou'ous) ou il
aimait s’assoir tandis que du vin lui était servi et où il éprouvait
la plus grande satisfaction devant ses trophées. Il aimait y emmener
ses invités qui, vous le pensez bien, à la vue de ses têtes ne
penseraient pas le moindre du monde à lui désobéir ou se lever
contre lui.
Lorsque al-Mou’tadid al-‘Abbad mourut en l’an 461 de l’Hégire
(1068), son fils Abou al-Qassim Muhammad Ibn al-‘Abbad prit
sa succession et se fit nommer al-Mou’tamid ‘Alallah qui est célèbre
dans l’histoire de l’Andalousie.
Al-Mou’tadid al-‘Abbad était entré en conflit avec les Bani Zi Noun,
les gouverneurs de Tolède, du fait qu’ils cherchaient aussi à mettre
la main sur Cordoue aux mains des Bani Ja’war mais il réussit
toutefois à l’ajouter à ses conquêtes et à la soustraire de la
Royauté de Séville. Il entra alors en conflit avec le gouverneur de
Grenade aux mains des Berbères et dirigée par ‘AbdAllah Ibn
al-Boullouqine.
Pour
les même raisons que son défunt père, al-Mou’tamid ‘Alallah entra en
conflit avec ses voisins.
La délégation d’Alfonsh IV à al-Mou’tamid ‘Alallah Ibn
al-‘Abbad de Séville
En
l’an 475 de l’Hégire (1092), Alfonsh VI envoya une délégation
collecter la Jizyah d’al-Mou’tamid ‘Alallah Ibn al-‘Abbad.
Cette délégation était sous le commandement du ministre d’Alfonsh,
un Juif du nom d’Ibn Shalit, qui établit son campement à l’extérieur
de Séville.
Al-Mou’tamid leur prépara la Jizyah et la leur envoya par une
délégation consulaire à la tête de laquelle se trouvait son ministre
Abou Bakr Ibn Zaydoun, le fils du renommé poète Ibn Walid Ibn
Zaydoun.
Le
Juif, après un rapide coup d’œil, la jugea insuffisante et refusa
d’accepter la Jizyah. Puis il menaça la délégation d’envahir
la banlieue de Séville si plus d’argent ne lui était pas amené sur
le champ et chose humiliante il demanda à l’envoyé de laisser la
femme d’Alfonsh accoucher dans la grande mosquée de Cordoue et la
grande mosquée de Cordoue (qortoba)
était la plus grande mosquée de toute l’Andalousie.
Il
fit cette demande parce que les prêtres et les sorciers avaient
prédit à Alfonsh que si son enfant successeur naissait dans la
grande mosquée, il serait alors vainqueur sur les Musulmans.
Non
seulement le Juif fut intransigeant mais il parla rudement tel un
malotru et les Musulmans n’étaient pas habitués à ce qu’on leur
parle sur ce ton. Demander que la femme accouche dans la mosquée et
que ce Juif prenne parti ce fut trop pour al-Mou’tamid qui ne put
supporter ce malappris qui dépassa toutes les bornes de
discourtoisie.
Alors
il envoya un groupe de cavalier qui fit prisonnier la délégation et
tua le malotru de ministre qu’il fit crucifier car nul roi ou chef
ne supporterait une telle offense.
Al-Mou’tamid ne prit pas cette décision seul mais il consulta les
savants préalablement pour leur demander leur avis. L’un d’entre eux
très intelligent, lui dit qu’il n’y avait aucun mal à faire cela et
lorsqu’ils quittèrent al-Mou’tamid, il dit aux autres savants :
-
« Je me suis hâté de rendre cet arrêté juridique avant vous de peur
que cet homme ne réponde favorablement aux demandes de l’ennemi en
espérant qu’Allah fasse de sa conviction un bien pour les
Musulmans ».
D’autres historiens ont rapporté que le Juif entra dans le palais et
qu’il s’adressa à al-Mou’tamid sur un ton insolent et ce dernier
saisit un encrier (mihbaratan) qui se trouvait près de
lui et lui fracassa la tête.
Lorsqu’Alfonsh fut informé de ce qui était arrivé à la délégation,
il jura de se venger, leva une innombrable armée et marcha sur
Séville, détruisant et brûlant tout ce qu’il trouva sur son passage
jusqu’à ce qu’il arrive devant la ville de Tarif ou il envoya une
lettre à al-Mou’tamid lui demandant d’ouvrir les portes de la ville
sans quoi, il la détruirait sur la tête de ses habitants.
Puis,
il entra dans la mer avec son cheval, voulant faire comme ‘Ouqbah
Ibn Nafi’ qu’Allah Exalté lui fasse miséricorde, regarda vers le
Maghreb islamique et menaça oralement les Mourabitine en prétendant
que s’il avait eu des navires, il aurait traversé pour leur faire la
guerre. Nous verrons par la suite si son défi était à la hauteur de
ses prétentions.
Puis
il repartit vers Tolède ou il mit le siège sur la ville qui lui fut
remis gracieusement par le traitre al-Qadir en l’an 478 de l’Hégire
(1085) comme nous l’avons mentionné. Tolède qui fut non seulement la
première royauté mais aussi la première métropole de l’Islam en
Andalousie et qui avait une importance stratégique pour les croisés
(salibiyine). Et après sa chute Alfonsh VI décida de chasser
tous les Musulmans d’Andalousie.
Voici
un passage du livre « douwal at-tawa'if » de ‘Allamah Muhammad
‘AbdAllah al-‘Inan
extrait lui-même du livre « rawd al-kirtass » de Qiyyam Ibn
Abi Zar’, de la ville de Fès : « Alfonsh VI dit à l’envoyé
d’al-Mou’tamid Ibn al-‘Abbad, un Juif du nom d’Ibn Mish’al : «
Comment puis-je laisser un peuple de possédés (qawm majanine)
qui se sont tous donnés pour nom ceux de leur califes, rois et
émirs, al-Mou’tadid, al-Mou’tamid, al-Mou’tassim, al-Moutawwakil,
al-Mousta’in, al-Mouqtadi', al-Amine et al-Ma'moun tandis qu’aucun
d’entre eux ne peut se défendre ni même défendre ses gens. Ils ont
propagé la corruption et la désobéissance et se vautrent dans le
plaisir et les fêtes. Et pire, comment les gens ont-ils put
supporter d’avoir de tels méprisables personnes pour défendre leurs
intérêts ? » Ces paroles sont les paroles d’Alfonsh traduites par
l’envoyé Mish’al. Fin de citation.
Puis
Alfonsh VI (alfonsh) envoya une lettre à al-Mou’tamid lui
demandant d’ouvrir les portes de la ville sans quoi, il la
détruirait sur la tête de ses habitants.
Al-Mou’tamid réfléchit et se demanda ce qu’il devait faire sachant
qu’aucun des autres états indépendants ne lui viendrait en aide.
Même s’ils voyaient Séville tomber, aucun ne se lèverait pour aider
leur frère tout en sachant pertinemment que leur tour viendrait
aussi.
La
lettre disait aussi : « Envoie moi un éventail afin que je puisse
rafraîchir mon âme et mon visage car la poussière du voyage m’a
incommodé ».
Et la
réponse d’al-Mou’tamid fut une réponse tranchante et sans précédent
qui fit aussitôt lever et partir l’armée d’Alfonsh. Al-Mou’tamid
prit la lettre et écrivit au dos : « Je fais le serment par Allah le
Très Haut, si jamais tu ne pars pas nous allons te rafraîchir avec
un éventail des Mourabitine qui rafraîchira ton âme
».
Puis
il décida que si Alfonsh ne partait pas, il donnerait la ville aux
Mourabitine.
Lorsqu’Alfonsh lut la réponse, il eut peur à la seule mention des
Mourabitine. Et effectivement, si les Mourabitine venaient à se
mêler de ses affaires, ils deviendraient une grave menace pour lui.
Alors, il leva son armée et partit et Allah le Très Haut libéra les
Musulmans pour un certain temps, de la menace qui pesait sur eux.
Face
au grand danger qui pesait sur la Royauté de Séville, al-Mou’tamid
et ses alliés ne trouvèrent pas d’autre solution que d’en appeler à
l’aide aux Lions du Maghreb, les Héros du Désert de Shanguit, les
Mourabitine…
[1]
Nous ne faisons que traduire ce que les Sheikhs ont
rapporté.
[2]
Les Hammams ou bains turcs servaient
communément non seulement de centre hygiénique ou les gens
pouvaient se laver mais aussi de système de chauffage
central qui permettait aux gens d’avoir de l’eau chaude à
leur disposition en tout temps et de chauffer leurs
appartements, ce qui représentait pour l’époque, une
certaine avancée technologique.