La position d’al-Jad Ibn Qays et d’Ibn ‘Oubay

 

Malgré la réduction, tel une peau de chagrin, de l’influence des chefs de file des hypocrites, ‘AbdAllah Ibn ‘Oubay et al-Jad Ibn Qays qui étaient encore en vie, ils ne cessèrent de déployer de grands efforts pour diviser l’unité des Musulmans en répandant leurs rumeurs néfastes.

 

Al-Jad Ibn Qays en tant que chef (en apparence) parmi les chefs des Musulmans répondit à la demande du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) en ces termes : « Permets- moi (de rester) car par Allah, nos gens savent que j’aime beaucoup les femmes et j’ai peur de ne pas patienter si je vois les belles femmes des Banou al-Asfar (les Byzantins). »

Cette réponse ne plut certes pas au Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) qui se retint et préféra lui accorder sa permission en lui disant : « Je t’accorde la permission[1]. »

 

Il faut dire que cet hypocrite avait un fils appelé ‘AbdAllah, qui, paradoxalement était un fervent et sincère musulman et le frère de Mou’az Ibn Jabal du côté maternel. Ce jeune musulman à qui les propos de l’entretien parvinrent, alla conseiller son père afin qu’Allah lui accorde son pardon et lui demanda aussi d’intégrer l’armée du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Il dit à son père hypocrite :

- «Pourquoi as-tu répliqué (ainsi) au Messager d’Allah ? Par Allah, il n’y a pas parmi les Banou Salamah d’homme aussi riche que toi et malgré cela, tu ne sors pas et tu n’aides personne avec au moins une monture pour qu’il participe à cette expédition. »

- « O fils, pourquoi veux-tu que je sorte avec ce vent, cette chaleur et ces conditions difficiles ?, » répondit son père.

Puis, il poursuivit pour tenter d’influencer son fils : « Par Allah, je n’ai pas confiance de marcher contre les Byzantins. Pour quelle raison les combattrais-je, par Allah, je sais que cela va mal tourner. »

- « C’est de l’hypocrisie plutôt, » répliqua le fils pour qui la cause de l’Islam primait avant toute chose, je jure qu’Allah va descendre sur le Prophète, des Versets que les gens liront. »

A cette réplique, le grand hypocrite frappa son fils au visage avec son soulier. Ce qui mit un terme à la rencontre puisque le fils se retira sans réagir et sans dire un mot[2].

 

Al-Jad Ibn Qays redoubla ses actions dans la voie de l’incroyance et de l’entêtement, en incitant sournoisement à la désertion tout en essayant de cultiver le doute parmi les Musulmans quant à la finalité de cette campagne durant cette saison des chaleurs.

 

Les chroniqueurs dont al-Waqidi et biographes ont rapporté que l’hypocrite al-Jad Ibn Qays demanda à sa tribu (les Banou Salamah et leur tête chef Jabbar Ibn Sakhr) de ne pas accompagner le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

Cependant, cet hypocrite échoua dans la réalisation de son dessein puisque Allah, à Lui les Louanges et la Gloire, fit descendre ces Versets dans lesquels Il le démasqua ainsi que tous ses semblables : « Ceux qui ont été laissés à l’arrière se sont réjouis de pouvoir rester chez eux à l’arrière du Messager d’Allah, ils ont répugné à lutter par leurs biens et leurs personnes dans le sentier d’Allah, et ont dit : « Ne partez pas au combat pendant cette chaleur ! » Dis : « Le feu de l’Enfer est plus intense en chaleur. » S’ils comprenaient ! Qu’ils rient un peu et qu’ils pleurent beaucoup en récompense de ce qu’ils se sont acquis. » (Qur’an 9/81 et 82)

 

Et, en réponse aux propos tenus par al-Jad au Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), Allah à Lui les Louanges et la Gloire dit : « Parmi eux il en est qui dit : « Donne-moi la permission (de rester) et ne me mets pas en tentation. » Or, c’est bien dans la tentation qu’ils sont tombés ; l’Enfer est tout autour des mécréants. » (Qur’an 9/ 49)

 

A la descente de ce Verset, ‘AbdAllah Ibn al-Jad alla répéter ses reproches à son père : « Ne t’ai-je pas averti que Allah ferait descendre un Verset que les Musulmans liront ? » Ce qui provoqua la colère du père qui coupa toute relation avec son fils : « Tais-toi ! Par Allah, tu n’auras jamais rien de moi. Par Allah, tu es pire que Muhammad[3] ! »

 

Le rôle de ‘AbdAllah Ibn ‘Oubay

 

Quant au rôle de ‘AbdAllah Ibn Oubay, il fut aussi dangereux que celui d’al-Jad Ibn Qays. Si celui-ci appela uniquement sa tribu à ne pas accompagner le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) à Tabouk, l’autre ne se contenta pas d’effrayer les gens mais alla plus loin en simulant un mouvement de rébellion dans les rangs de l’armée pour provoquer la scission entre les Musulmans.

‘AbdAllah Ibn ‘Oubay et son groupe rejoignirent les rangs dès l’appel à la mobilisation non pas pour renforcer les Musulmans mais dans le but de provoquer la division et ce, quand ils se détachèrent de l’armée et revinrent à Médine alors que les Musulmans marchaient sur Tabouk.

 

‘AbdAllah Ibn ‘Oubay joua dans l’armée musulmane le même rôle que celui qu’il perpétra le jour d’Ouhoud, lorsqu’il se retira avec sa cinquième colonne qui représentait alors le tiers de l’armée du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Avec son geste prémédité, il faillit provoquer une dangereuse scission parmi les Compagnons du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et deux tribus Ansar faillirent être tentées par la rébellion, n’était-ce l’intervention d’Allah, à Lui les Louanges et la Gloire[4].

 

Dans cette expédition, ‘AbdAllah Ibn Oubay et ses acolytes simulèrent au début, une participation sincère mais lorsque l’armée du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) marcha vers le nord, ils désertèrent en plein jour au vu et su de tout le monde et retournèrent à Médine.

 

Le but de ‘AbdAllah Ibn ‘Oubay était on très clair et son geste réfléchit. Non seulement, il voulut provoquer la division dans l’armée musulmane mais en plus il appela et invita les gens à suivre son geste inqualifiable cependant, sa tentative se solda par un cuisant échec car seul ses acolytes hypocrites le suivirent.

 

En dépit de tout cela, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), comme à son habitude, ne prit aucune mesure à l’encontre de ces hypocrites bien qu’ils montrèrent clairement leurs viles desseins.

 

« ‘AbdAllah, Ibn ‘Oubay arriva avec son groupe d’auxiliaires juifs et ses alliés hypocrites et installa son camp à Hiza’ Zibab[5], près de Thaniyah al-Wada’. Lorsque le le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) leva le camp et se mit en marche, ‘AbdAllah Ibn ‘Oubay se retira avec ses acolytes en disant avec un air moqueur : « Muhammad part en expédition contre les Banou al-Asfar dans cet état et sous cette chaleur ! Il semble ignorer que le pays est très loin et que combattre les Byzantins est un simple jeu. » Et ses compères qui étaient avec lui exprimèrent la même idée.

Puis souhaitant la défaite au Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et de son armée, il dit : « Par Allah, je vois déjà ses Compagnons ligotés les uns près des autres dans des cordes[6]. »

 

La majorité de l’armée du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) perçut les propos de ‘AbdAllah Ibn ‘Oubay offensifs et il est fort probable que certains chefs croyants auraient souhaité une ferme réaction du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) avant de quitter Médine. Mais, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), tolérant, indulgent et surtout obéissant à la parole d’Allah ne prit aucune mesure coercitive, bien que sachant la gravité de la tentative de ‘AbdAllah et ses acolytes et les ignora tout simplement en restant silencieux.

 

Les évènements prouvèrent que le silence du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) fut la meilleure réplique car que ce serait-il passé si ces hypocrites avaient accompagné les Musulmans dans cette expédition ? Allah, à Lui les Louanges et la Gloire, purifia l’armée musulmane de ces éléments subversifs pour la cause de l’Islam et la réussite de l’opération comme Il le mentionna dans le Noble Qur’an dans le verset 47 de la Sourate du Repentir : « S’ils étaient sortis avec vous, ils n’auraient fait qu’accroître votre trouble et jeter la dissension dans vos rangs, cherchant à créer la discorde entre vous. Et il y en a parmi vous qui les écoutent. Et Allah connaît bien les injustes. »

 

Certains autres hypocrites au nombre de plus de quatre-vingts hommes par contre n’eurent pas l’effronterie de ‘AbdAllah Ibn ‘Oubay et d’al-Jad Ibn Qays mais demandèrent toutefois au Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) l’autorisation de retourner.

 

La destruction d’un nid des comploteurs

 

Vu leurs essais infructueux et leurs menées sournoises, ce n’était un secret pour personne que les hypocrites désiraient l’affaiblissement de l’Islam et sa fin mais comme ils extérieurement soumis à l’identité musulmane, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) se montra tolérant à chacune de leurs tentatives tant qu’elles ne causaient pas de tort effectif à la communauté musulmane. Cependant, il réagit énergiquement en cas de réel danger et sur la base d’informations fiables, il ordonna de bruler le gite secret, la maison de Souwaylim le Juif, où des hypocrites s’étaient réunis pour comploter contre la sécurité de l’armée et de toute la communauté musulmane et cet ordre fut exécuté par une force commandée le Compagnon Talha Ibn ‘Oubaydallah.

 

Dans la Sirah d’Ibn Hisham, il est rapporté :

« On informa le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) que des hypocrites se réunissaient chez le Juif Souwaylim et décourageaient les gens à participer à l’expédition de Tabouk. Ceci décida le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) à envoyer Talha Ibn ‘Oubaydallah avec un groupe de Compagnons afin d’incendier la maison de Souwaylim. Talha et son groupe exécutèrent l’ordre et la maison fut brulée. Dans l’attaque, le Compagnon ad-Dahhak Ibn Khalifa se cassa la jambe et les comploteurs réussirent à s’échapper. »

 

Malgré ce que projetaient de commettre ces hypocrites, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et en dehors de l’action de Talha Ibn ‘Oubaydallah, ne prit aucune mesure punitive à l’encontre de ce Juif et de ces comploteurs. Néanmoins, à son retour de l’expédition, il ordonna aussi de détruire un autre lieu de réunion encore plus dangereux que le précédent puisqu’il avait l’apparence d’une mosquée (la mosquée du Dirar mentionnée dans le Noble Qur’an) et que les hypocrites pensaient donc intouchables.

 

L’émir intérimaire de Médine

 

Avant chaque expédition à laquelle participait le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), il prenait soin de désigner un de ses Compagnons pour veiller à la bonne administration de Médine et sa sécurité et cette fois, il désigna comme émir intérimaire Siba’ Ibn ‘Arfata al-Ghifari qui n’était pas un Médinois mais de la tribu bédouine de Ghifar dont le territoire se situait dans la région de Badr entre La Mecque et Médine pour montrer le principe d’égalité des hommes dans l’Islam et pour signifier la fin du fanatisme tribal païen.

 

De même, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) chargea aussi son cousin ‘Ali Ibn ‘Abi Talib de s’occuper de sa famille. Ce qui fut une nouvelle occasion pour les hypocrites de dirent alors : « Muhammad ne l’a laissé à Médine que pour éviter d’être encombré par sa présence. » Ces mots sournois blessèrent ‘Ali à tel point qu’il se rendit chez le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) qui se trouvait encore à Thaniyah al-Wada’ et lui rendit compte de ce qui s’était passé à Médine. La réponse du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) vint alors tel un démenti cinglant : « Ils mentent ! Je t’ai laissé pour ce que j’ai laissé derrière moi. Retourne donc et occupe-toi de ma famille comme tu t’occupes de la tienne[7]. »

 

Les croyants qui pleurèrent

 

Pendant la mobilisation et les préparatifs de l’armée, un autre événement eut lieu totalement opposé à ceux des hypocrites qui s’ils refusèrent de prendre part à l’expédition pour des motifs douteux bien qu’ils furent physiquement et matériellement aptes, certains Musulmans sincères, au contraire, exprimèrent leur profonde désir de sortir avec le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) mais qui par manque de ressources, ne purent y prendre part.

 

Ces Musulmans sincères, au nombre de sept, vinrent trouver le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et lui demandèrent de les aider mais à son grand regret, il répondit qu’il ne pouvait pas les aider du fait qu’il n’avait tout simplement pas ce que ces Compagnons lui avaient demandé.

 

A ce propos Ibn Ishaq a rapporté :

« Et quelques Musulmans, qu’on allait appeler désormais les Pleureurs, contactèrent le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Ils étaient au nombre de sept Ansar : Salim Ibn ‘Oumayr ; ‘Alaba Ibn Zayd, le frère des Banou Haritha ; Abou Leyla ; ‘Abd ar-Rahman Ibn Ka’b, le frère des Banou Mazin ; ‘Amrou Ibn Hamam Ibn al-Jamouh, le frère des Banou Salamah ; ‘AbdAllah Ibn al-Moughaffal al-Mazini, Harami Ibn ‘AbdAllah, le frère des Banou Waqif et Arbaz Ibn Sariyah al-Fizari. Etant tous dans le besoin, ils demandèrent des montures mais le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) leur répondit : « Je ne trouve pas de quoi vous porter. » Et ainsi, ils retournèrent sur leurs pas, les larmes aux yeux pour ne pas avoir trouvé de monture. »

 

Allah Exalté, dans son Noble Qur’an excusa ces Musulmans tout en fustigeant les hypocrites : « Nul grief sur les faibles, ni sur les malades, ni sur ceux qui ne trouvent pas de quoi dépenser (pour la cause d’Allah), s’ils sont sincères envers Allah et Son messager. Pas de reproche contre les bienfaiteurs. Allah est Pardonneur et Miséricordieux. (Pas de reproche) non plus à ceux qui vinrent te trouver pour que tu leur fournisses une monture et à qui tu dis : « Je ne trouve pas de monture pour vous. » Ils retournèrent les yeux débordant de larmes, tristes de ne pas trouver de quoi dépenser. » (Qur’an 9/92, et 93)

 

Vers Tabouk

 

Les préparatifs terminés, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) distribua alors les étendards. Il donna l’étendard de l’armée à Abou Bakr as-Siddiq, le deuxième à az-Zoubayr Ibn al-‘Awwam, le troisième drapeau, celui des Aws à Oussayd Ibn Houzayr, celui des Khazraj au héros d’Ouhoud, Abou Doujana et celui des Banou Malik Ibn an-Najjar à Zayd Ibn Thabit.

 

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)  donna d’abord l’étendard des Banou Malik à ‘Oumara Ibn Hazm puis il le lui retira pour le donner à Zayd Ibn Thabit. Quand ‘Oumara demanda : «O Messager d’Allah, peut-être que tu es furieux contre moi, » le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) lui donna la raison véritable : « Non, par Allah. C’est plutôt parce qu’ils connaissent plus de Qur’an. Et il (Zayd) a appris plus de Qur’an que toi. Le Qur’an donne plus de mérite à celui qui en apprend le plus, même si c’est un esclave. »

 

En ce qui concerne la remise des drapeaux et des étendards, les historiens n’ont pas mentionné les détails concernant les chefs des compagnies et les porteurs d’étendards, comme ils le firent pour l’expédition de La Mecque. Cependant, ils rapportèrent que le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) passa la consigne que chaque tribu remette son drapeau à celui qui connaissait plus de Qur’an. Ainsi, Abou Zayd prit celui des Banou Amrou Ibn ‘Awf et Mou’az Ibn Jabal celui des Banou Salamah[8].

 

La cavalerie de l’armée

 

A l’époque, les chevaux étaient considérés comme une arme très puissante et très fiable pour toutes les nations et plus particulièrement les Arabes qui excellaient dans le type de bataille-éclair. De plus, l’impact de la cavalerie peut être comparé à celui de blindés des temps modernes d’où son importance décisive dans les batailles.

 

Face à l’importance de cette expédition ainsi que pour faire face à la puissance militaire de l’Empire byzantin, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) veilla à ce que la cavalerie soit particulièrement bien équipée, puissante et efficace et qu’elle constitue le tiers de l’armée, le reste étant des méharistes. S’il apparait que le chameau semble moins efficace que le cheval, il est toutefois d’un apport non-négligeable même s’il n’a pas les avantages de ce dernier comme la rapidité et l’agilité et sa présence sur les champs de bataille fut décisive tout au long de l’Histoire des Musulmans comme contre les Perses ou en Andalousie avec les Mourabitines.

 

Même s’ils étaient encore incomparables aux Perses et aux Byzantins, une armée dont le tiers était des cavaliers démontrait le rapide développement des capacités guerrières des Musulmans surtout lorsque l’on sait que lors de la première bataille de Badr, les Musulmans ne disposaient qu’un ou deux chevaux et qu’à Ouhoud, juste un seul !

 

Le précédent plus grand rassemblement de cavaliers du vivant du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) avant celui de Tabouk fut celui des expéditions de La Mecque et de Hounayn en l’an 08 de l’Hégire ou 2480 cavaliers prirent part aux expéditions et l’accroissement du nombre de cavaliers découla de la conversion à l’Islam des nomades, réputés pour leur habileté équestre. Ainsi en moins d’une année, entre l’expédition de La Mecque et celle de Hounayn en l’an 8 et l’expédition de Tabouk en l’an 9 de Hégire, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) vit sa cavalerie passer de 2480 à 10000 cavaliers.

 

Ces 10000 cavaliers furent d’une grande utilité pour la cause de Islam car après la réalisation de tous les objectifs de l’expédition, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) en tira d’autres avantages comme par exemple, l’envoi Khalid Ibn al-Walid à la tête de 400 cavaliers contre Douma al-Jandal qui lui permirent de battre les troupes du royaume et capturer son roi al-Oukaydar.

 

De même pour montrer l’importance de l’expédition de Tabouk, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) avant le départ interdit expressément la participation à tout Musulman insuffisamment équipé en vivres, armes et monture, à cause du nombre de l’ennemi, sa force, la grande distance et l’intense chaleur estivale.

Les chroniqueurs et biographes ont rapporté l’avertissement du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) qui mis en garde : en disant : « Ne sort avec nous que celui qui est équipé. »

 

Les quatre Croyants qui hésitèrent à accompagner le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)

 

Aucun Musulman ne manqua l’occasion d’accompagner le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) sauf quatre Ansar, Ka’b Ibn Malik, Hilal Ibn Oumayyah, Marara Ibn ar-Rabi’ et Abou Khaythama, non parce qu’ils avaient un doute quelconque mais plutôt qu’ils se laissèrent aller à la faiblesse humaine.

 

Quant à Abou Khaythama, il fit finalement appel à ses profondes ressources morales pour vaincre les tentations de la vie ce qui l’aida à rejoindre un peu plus tard l’armée musulmane tandis que les trois autres se laissèrent aller et restèrent à Médine en se disant chaque jour qu’ils allaient rejoindre le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) le jour suivant mais ils repoussèrent de jour en jour leurs intentions si bien que finalement ils ne bougèrent pas jusqu’au retour victorieux du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et de ses Compagnons.

 

Ainsi par mesure disciplinaire, ils furent placés en quarantaine durant un peu plus de cinquante nuits et durant cette période, personne ne leur adressa la parole jusqu’à ce qu’Allah, à Lui les Louanges et la Gloire, leur pardonne via la révélation[9].

 

Abou Khaythama qui ne céda pas aux tentations de la vie, raconta plus tard comment il se rattrapa et vaincu ses instincts et son histoire est riche en enseignements et nous montre que même les meilleurs Compagnon n’étaient pas à l’abri des suggestions de Satan mais que le plus important était de savoir résister aux tentations aux moments cruciaux. Mais la plus importante leçon montre que lorsqu’il s’agit d’une affaire de Jihad fi Sabilillah Allah, à Lui les Louanges et la Gloire, peut être extrêmement sévère pour ceux qui délaissent cette obligation alors qu’ils en sont capables quand bien même, ils étaient les Compagnons du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), que dire alors de nous !

 

Abou Khaythama qui était un croyant revint sur ces pas dix jours après le départ des Musulmans pour profiter des délices de la vie terrestre. Par une chaude journée d’été, il entra chez lui et trouva que ses deux femmes avaient rafraichi leurs chambres et préparé leurs repas. Lorsqu’il vit cela, il s’écria : « Gloire à Allah ! Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) à qui Allah a pardonné toutes ses fautes se trouve maintenant sous un soleil de plomb, respirant un air aussi chaud que les rayons du soleil et avec ses armes sur le dos alors que moi, Abou Khaythama, je suis ici à l’ombre rafraichissante avec deux belles femmes qui m’ont préparé deux bons repas ! Ce n’est pas juste. Par Allah, je n’entrerai dans aucune de vos chambres qu’après avoir accompli mon devoir avec le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). »

 

Puis, immédiatement il reprit son chameau en direction du nord. A Wadi al-Qoura, il rencontra ‘Oumayr Ibn Wahb al-Joumahi qui allait aussi au front et tous deux se tinrent compagnie jusqu’à l’approche de Tabouk ou ‘Oumayr, à la demande d’Abou Khaythama, laissa ce dernier le devancer en lui disant : « O ‘Oumayr, j’ai commis des fautes alors que toi, tu n’as pas de faute. Tu ne craindras rien si tu me laisses aller seul à la rencontre du Messager d’Allah. »

A l’approche du camp, à Tabouk, les gens dirent : « Voilà un méhariste su la route. »

- « C’est Abou Khaythama, » leur dit le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

- « Oui, ô Messager d’Allah, c’est bien lui, » répondirent-ils après vérification.

 

A son arrivée, il salua le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) qui lui dit : « Tu as bien fait Abou Khaythama, » qui lui raconta toute l’histoire.

 

Parmi ceux qui s’attardèrent aussi à rejoindre le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) ce jour-là, il y eut ‘Abi Dar al-Ghifari qui laissa son chameau faible en chemin pour rejoindre à pied ses Compagnons.

 

A ce propos, al -Waqidi a rapporté : Abou Dar a dit : « Je fus en retard pour l’expédition de Tabouk à cause de mon chameau qui s’affaibli. J’ai décidé de l’entretenir quelques jours puis de rattraper le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Je le nourris puis sortit mais à Dzoul Mourouwah[10], mon chameau s’affaiblit dramatiquement. J’attendis alors un jour supplémentaire pour qu’il reprenne des forces avant de conclure qu’il n’avait aucune force pour continuer le chemin. Je pris donc mes affaires sur mon dos et me suis mis en marche sous une extrême chaleur. Il n’y avait personne sur la route et aucun Musulman ne m’a rejoint.

Quand je me suis rapproché du camp du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), il était midi et j’avais très soif. On me dit plus tard que quelqu’un s’écria en me voyant : « O Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), il y a un homme qui marche tout seul sur la route. »

- « C’est Abou Dar, » leur répondit le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

- « O Messager d’Allah, c’est Abou Dar, » dirent les gens après s’être assurés de mon identité.

Quand je me suis retrouvé devant le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) il dit :

« Bienvenue à Abou Dar... il marche seul, il mourra seul et il sera ressuscité seul. » Puis il me demanda : « Qu’est-ce qui t’a retardé, ô Abou Dar ? »

Je lui racontai alors l’histoire du chameau et il (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) me dit alors : « Tu m’es plus cher que ma famille. O Abou Dar, Allah Exalté t’a pardonné à chaque pas une faute que tu as commise jusqu’à l’endroit où tu m’as retrouvé. »

Puis Abou Zar posa ses affaires et se désaltéra. »

 

Tabouk


[1] Al-Maghazi d’al-Waqidi, t.III, p.992.

[2] Al-Maghazi d’al-Waqidi, t.III, p.992.

[3] Maghazi al-Waqidi, t. III, p.992.

[4] Maghazi al-Waqidi, t. III, p.993.

[5] Hiza’ Zibab, un mont près de Médine.

[6] Note manquante.

[7] Maghazi al-Waqidi, t. III, p. 996.

[8] Maghazi al-Waqidi, t. III.

[9] Al-Boukhari a rapporté cette histoire dans un long Hadith et elle est aussi mentionnée dans le Noble Qur’an Sourate 9 versets 117, 118 : « Allah a accueilli le repentir du Prophète, celui des Emigrés et des Auxiliaires qui l’ont suivi à un moment difficile, après que les cœurs d’un groupe d’entre eux étaient sur le point de dévier. Puis Il accueillit leur repentir car Il est Compatissant et Miséricordieux à leur égard.

Et [Il accueillit le repentir] des trois qui étaient restés à l’arrière si bien que, toute vaste qu’elle fût, la terre leur paraissait exiguë; ils se sentaient à l’étroit, dans leur propre personne et ils pensaient qu’il n’y avait d’autre refuge d’Allah qu’auprès de Lui. Puis Il agréa leur repentir pour qu’ils reviennent [à Lui], car Allah est l’accueillant au repentir, le Miséricordieux. » 

[10] Un village dans la vallée d’al-Qoura.








 
Tabouk