Haroun al-Wathiq Billah, le neuvième calife abbasside

  

Au mois de Rabi’ Awwal de l’année 227 de l’Hégire (841), décéda le calife al-Mou’tassim qui à cause de son ignorance en matière juridique, continua à propager l’idée que le Qur’an était créé et fit fouetté l’Imam Moujahid Ahmad Ibn Hanbal le 25 Ramadan 221 de l’Hégire (835) pour avoir refusé de reconnaître que le Qur’an était créé.

Quand le calife al-Mou’tassim Billah décéda, son fils Haroun al-Wathiq Billah, dont la mère est une romaine du nom de Qaratiss, prit la succession.

Avec la mort du calife al-Mou’tassim, le règne des Abbassides entra dans une nouvelle ère. Les califes qui allaient se succéder étaient loin d’être comme leurs prédécesseurs, ils allaient devenir plus faibles et leur dynastie allait connaître un certain nombre de très graves événements qui viendront secouer l’état islamique comme nous allons le voir par la suite.

 

 

En l’an 228 de l’Hégire (842), les prix sur la route de La Mecque atteignirent des records et une livre[1] de pain coûta un dirham et une outre d’eau quarante dirhams. À l’endroit de la Station[2], les gens furent d’abord frappés par une chaleur intense puis par une lourde pluie mélangée à de la grêle, si bien qu’en une heure, ils furent simultanément soumis à une sévère chaleur suivie d’un froid intense. Le Jour de Sacrifice, il tomba à Mina une pluie sans précédent. Un glissement de montagne eut lieu aux Jamarat al-‘Aqabah qui tua un certain nombre de pèlerins.

 

 

En l’an 231 de l’Hégire (845), au moins de Mouharram, un échange de 4362 prisonniers musulmans, organisé par Khaqan al-Khadim, eut lieu entre les Musulmans et les Byzantins.

 

Cette même année, Wassif, le Turc, arriva de la région d’Ispahan, al-Jibal et de Fars ou il partit à la poursuite des Kurdes qui avaient tenté de s’infiltrer dans ces régions. Il captura environ 500 d’entre eux qu’il ramena enchaînés et Wassif ordonna de les emprisonner. Il lui fut décerné 75.000 dinars et il fut investi d’une épée et de vêtements.

 

Toujours cette année, il y eut un échange de prisonnier entre les musulmans et le souverain Byzantin près du Fleuve Lamos en Séleucie, à un jour marche du Tarse.

 

L’échange de prisonniers

 

Il est rapporté sur l’autorité d’Ahmad Ibn Abi Qahtabah, un associé de Khaqan al-Khadim[3], un domestique (khadim) d’ar-Rashid qui avait été élevé dans une ville frontière, que ce Khaqan s’est présenté à al-Wathiq, en compagnie d’un groupe des gens proéminents de Tarse et d’autres endroits, pour présenter des plaintes contre un de leurs fonctionnaire coupable d’injustice envers eux du nom d’Abou Wahb. Le fonctionnaire fut convoqué et Muhammad Ibn ‘Abdel Malik le confronta à Khaqan et ses compagnons dans le Hall d’Audience Public, et le fonctionnaire fut déposé.

Al-Wathiq ordonna d’enquêter sur les habitants des villes de frontière (ahl ath-thoughour) concernant le Qur’an. Tous, excepté quatre individus, déclarèrent qu’il était créé et al-Wathiq ordonna que les quatre soient décapités à moins qu’ils n’admettent le contraire. Il ordonna alors d’attribuer des allocations à tous les habitants des villes de frontière si bien que beaucoup de gens revinrent y habiter.

 

Les émissaires du souverain byzantin Michael Ibn Théophile, Ibn Michael, Ibn Léo, fils de George, vinrent trouver al-Wathiq, pour rançonner les captifs musulmans qui étaient sous la juridiction du souverain byzantin. Al-Wathiq envoya par conséquent Khaqan pour réaliser la transaction. Khaqan et ses compagnons partirent pour payer la rançon des captifs musulmans à la fin de l’année 230, conformément à l’emploi du temps convenu avec les émissaires byzantins le jour de ‘Ashoura, soit le 10 Mouharram 231 de l’Hégire (845).

Al-Wathiq nomma par la suite Ahmad Ibn Sa’id Ibn Salm Ibn Qoutaybah al-Bahili gouverneur des villes de frontière et de leurs provinces (‘awassim) et lui ordonna d’être présent lors de l’échange des prisonniers. Il partit avec dix-sept courriers postaux. Il y eut une dispute sur la forme entre les émissaires byzantins venu demander l’échange de prisonnier et Ibn az-Zayyat. Les Byzantin déclarèrent qu’ils n’accepteraient pas en échange de vieilles femmes, d’hommes âgés ou des enfants. Cette dispute dura un certain temps entre les émissaires et Ibn az-Zayyat jusqu’à ce qu’ils consentent à un échange égal.

Al-Wathiq envoya des gens à Baghdad et ar-Raqqah pour acheter des esclaves mameloukes[4] disponibles à la vente. Ils achetèrent tous ceux qu’ils trouvèrent sans atteindre pour autant le nombre requis pour l’échange de prisonnier. Al-Wathiq apporta donc de son palais des femmes byzantines assez âgées et d’autres jusqu’à ce que le bon nombre fut atteint. Il envoya alors deux hommes qui étaient associés à Ibn Abi Douwad, l’un du nom de Yahya Ibn Adam al-Karkhi, surnommé Abou Ramlah et l’autre du nom de Ja’far Ibn al-Hadda’. Il envoya avec eux un des secrétaires de l’administration militaire du nom de Talib Ibn Daoud. Al-Wathiq ordonna à Yahya et Ja’far d’interroger les captifs. Ceux qui déclareraient que le Qur’an était créé devait être échangé et ceux qui disaient le contraire devaient être laissés aux mains des Byzantins. Al-Wathiq ordonna de donner 5.000 dirhams à Yahya afin qu’il donne à tous ceux qui affirmerait que le Qur’an était créé un dinar de l’argent qui lui avait été confié et le groupe partit.

 

Il a été rapporté sur l’autorité d’Ahmad Ibn al-Harith qui a dit : « J’ai questionné Ibn Abi Qahtabah, un associé de Khaqan al-Khadim, qui était l’intermédiaire entre les Musulmans et les Byzantins qui avait été envoyé pour déterminer le nombre de Musulmans dans le territoire byzantin qui a dit que leur nombre était de 3.000 hommes et 500 femmes ».

Al-Wathiq ordonna par la suite qu’ils soient rançonnés. Il dépêcha Ahmad Ibn Sa’id à toute vitesse pour réaliser l’échange de prisonnier et il envoya aussi des hommes pour interroger les prisonniers musulmans. Ceux qui prétendirent que le Qur’an était créé et que Dieu ne pourrait pas être vu dans la vie après la mort, furent rançonnés et ceux qui ne prétendirent pas cela furent laissés aux mains des Byzantins. Il n’y avait pas eu d’échange de prisonnier depuis les jours de Muhammad Ibn Zoubaydah en 194 ou 195 de l’Hégire (810).

 

Ahmad Ibn al-Harith a dit : « le Jour de ‘Ashoura, le 10 du mois de Mouharram de l’année 231 (845), les Musulmans et les paysans non-arabes se rencontrèrent avec deux officiers byzantins, l’un appelé Anqas et l’autre Talassious. Les musulmans et les volontaires au nombre de 4.000 comprenant des cavaliers et une infanterie se rencontrèrent dans un endroit près de Lamos ».

Il a été rapporté que Muhammad Ibn Ahmad Ibn Sa’id Ibn Salm Ibn Qoutaybah al-Bahili reçut une lettre de son père l’informant que les Musulmans rançonnés et les Dhimmis qui étaient avec eux étaient au nombre de 4.600. Six-cents d’entre eux étaient des femmes et des enfants et un peu moins de cinq-cents étaient des Dhimmis. Le reste était des hommes de régions différentes.

Abou Qahtabah a rapporté qu’il était l’émissaire de Khaqan al-Khadim au souverain byzantin dont la tâche était d’évaluer le nombre de prisonniers et de vérifier l’exactitude des propos de Michael, le souverain byzantin, qui affirmait que le nombre de Musulmans avant l’échange était de 3.000 hommes, 500 femmes et enfants qui étaient dans Constantinople et ailleurs, dont Muhammad Ibn ‘AbdAllah at-Tarsoussi qui était sous leur garde.

Abou Sa’id Ibn Salm envoya Muhammad Ibn ‘AbdAllah at-Tarsoussi et Khaqan, avec un certain nombre de captifs proéminents, à al-Wathiq. Al-Wathiq donna à chacun d’entre eux un cheval et 1.000 dirhams.

 

Muhammad Ibn ‘AbdAllah at-Tarsoussi rapporta qu’il était captif sous la garde des Byzantins depuis trente ans et qu’il avait été pris captif lors de la prise de Ramiyah. Il était un vendeur de fourrage quand il fut pris captif et était parmi les rançonnés dans cet échange.

Muhammad Ibn ‘AbdAllah a dit : « Nous fûmes rançonnés le jour de ‘Ashoura, sur le fleuve Lamos à Séleucie, près de la mer. Le nombre de captifs rançonnés fut de 4.460. Il y avait 800 femmes, avec leurs maris et enfants et plus de cent Dhimmis des musulmans. L’échange survint sur la base de un pour un, un jeune pour un jeune et un vieux pour un vieux etc. Khaqan s’efforça d’évacuer tous les Musulmans qui purent être localisés dans le territoire byzantin ».

Muhammad Ibn ‘AbdAllah continua : « Quand ils furent rassemblés pour l’échange, les Musulmans étaient sur le côté Est du fleuve et les Byzantins sur le côté ouest. Le fleuve était guéable. Chaque parti envoyait en avant un homme et les deux se rencontreraient dans le milieu du fleuve. Quand un Musulman rejoignait les Musulmans, lui et eux s’exclamaient « Allah est le Plus Grand[5] ». Et quand un Byzantin rejoignait les Byzantins, ils disaient quelque chose dans leur langue équivalente à « Allah est Plus Grand » pour copier les Musulmans ».

 

Il a été rapporté sur l’autorité d’as-Sindi, le Mawlah de Houssayn al-Khadim : « Les Musulmans et les Byzantins ont construit des ponts sur le fleuve. Nous envoyons un Byzantin sur notre pont et les Byzantins envoyaient un Musulman sur leur pont. Le premier venait chez nous et le second chez eux. Il renia que le fleuve était guéable ».

 

Il a été rapporté sur l’autorité de Muhammad Ibn Karim : « Quand nous avons été restitués aux Musulmans, Ja’far et Yahya nous ont interrogés. Nous avons répondu convenablement et un dinar nous fut donné ».

Muhammad Ibn Karim a dit : « Les Byzantins furent gênés par le nombre de Musulmans, puisqu’ils étaient peu et les Musulmans beaucoup, mais Khaqan les rassura à cet égard. Il établit une trêve de quarante jours entre les Byzantins et les Musulmans, pendant laquelle les Byzantins ne seraient pas attaqués, pour qu’ils puissent atteindre leur territoire en toute sécurité. L’échange dura quatre jours. Un grand nombre de captifs byzantins resta avec Khaqan, que le commandant des croyants avait envoyés pour être échangés contre les Musulmans. Khaqan retourna aux Byzantins cent personnes supplémentaires qui étaient restés avec lui. Ainsi, les Byzantins auraient des arriérés si un nouvel échange de prisonnier devait avoir lieu avant que la période de rançonnage soit expirée. Il ramena le reste à Tarse, où ils  furent vendus ».

Muhammad Ibn Karim a dit : « Environ trente Musulmans rançonnés qui s’étaient convertis au christianisme dans le territoire byzantin sont partis avec nous. Quand la période de quarante jours de trêve entre Khaqan et les Byzantins fut écoulée, Ahmad Ibn Sa’id Ibn Salm Ibn Qoutaybah entreprit un raid d’hiver. La neige et la pluie affligea ses hommes et environ 200 d’entre eux moururent. Beaucoup se noyèrent dans le fleuve Boudandoun et environ 200 furent pris prisonniers. Le commandant des croyants fut très furieux après Ahmad Ibn Sa’id pour cela. Le nombre total de Musulmans qui moururent ou furent noyés furent de 500.

Un Patricio, qui était un des commandants byzantins avança sur Ahmad Ibn Sa’id, qui était accompagné par 7.000 hommes. Ahmad Ibn Sa’id se retira devant lui, après quoi les Musulmans notables lui dirent : « Une armée de 7.000 hommes ne devrait pas être effarouchée. Si tu ne peux pas leur faire face de front, pénètre au moins leur territoire ». Il saisit donc environ 1.000 têtes de bétail et 10.000 moutons avant de repartir. Par conséquent, al-Wathiq le désista et nomma à sa place Nasr Ibn Hamzah al-Khouza‘i, le mardi 16 Joumadah Awwal de cette année.

 

 

Sous le règne d’al-Wathiq Billah, en 232 l’Hégire (846), un certain nombre de tribus, se révoltèrent dans la péninsule arabique et se mirent à brigander (couper les routes). Parmi celles-ci, certaines tribus de Moudar comme les Banou Soulaym et les Banou Kinanah, certaines d’entre elles de Ghatafan comme les Banou Fazarah et les Banou Mourra, d’autres des Bani ‘Amir comme les Banou Hilal, d’autres des Qahtan comme les Banou Tayyi participèrent à ces brigandages. L’armée abbasside marcha contre eux et après un certain nombre de batailles, le brigandage cessa et la tranquillité revint pour un certain temps.

 

Cette année, les pèlerins de retour furent frappés par une féroce soif à quatre stations d’ar-Rabadah. Une boisson coûta quelques dinars et beaucoup de personnes moururent de soif.

 

Cette même année, le froid fut si sévère au mois d’avril que l’eau gela le cinquième jour du mois.


Ja’far al-Moutawakkil ‘Alallah, le dixième calife abbasside

 

 Sous le règne d’al-Wathiq Billah, l’affaire du Qur’an créé se poursuivit du fait que les mou’tazilah prirent les postes-clés du gouvernement.

À la fin du mois de Dzoul Hijjah de l’année 238 de l’Hégire (852), le calife al-Wathiq Billah décéda et il fut remplacé par son frère Ja’far al-Moutawakkil ‘Alallah Ibn Mou’tassim dont la mère s’appelait Shouja’.

Lorsque Ja’far al-Moutawakkil ‘Alallah devint calife, il exerça de lourdes représailles contre Muhammad Ibn ‘Abdel Malik Ibn Abban Zayyat qui disait : « Je n’ai jamais fait miséricorde à quelqu’un si peu soit-il ». Le calife châtia durement le vizir Ibn Zayyat car à la fin du règne d’al-Wathiq, il ne valut plus rien à ses yeux car il espérait faire succéder le petit-fils du calife Muhammad Ibn al-Wathiq et le vizir mourut en prison sous la torture.

 

Sous le règne du calife al-Moutawakkil, la sédition du « Qur’an créé », relancée par le calife al-Ma'moun, par laquelle furent éprouvés les savants de la Communauté (oummah), puis poursuivit par les califes al-Mou’tassim et al-Wathiq, prit fin en 234 de l’Hégire (848). Le calife al-Moutawakkil fut un des califes qui travailla pour le succès de la Sounnah du Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui). Il respecta, honora grandement et favorisa les savants du Hadith. Sous son règne, le juge mou’tazili Ahmad Ibn Abi Douwad al-Iyyadi perdit son statut et mourut avilit pour la plus grande joie de la communauté musulmane.

 

 

En l’an 235 de l’Hégire (849), le calife al-Moutawakkil ‘Alallah réussi à venir à bout du grand général turc Itakh al-Khazari qui était un Mamelouke qui avait été acheté par al-Mou’tassim an 199 de l’Hégire (814) ou ses qualités militaires apparurent et où il fut élevé en grade par le calife al-Mou’tassim. Il fut aussi sous le règne d’al-Wathiq le commandant général des armées abbassides et de la garde personnelle du calife ainsi que responsable de son département de communication (poste) et des services de renseignements. Ce grand général avait donc accès à la résidence et au palais gouvernemental du fait qu’il possédait tous les postes-clés et c’était lui qui dirigeait l’état derrière le calife.

Un jour, lors d’un de ses conseils privés, le calife se querella avec lui et Itakh voulu le tuer. Alors le calife réalisa le danger que représentait cet homme qui menaçait les califes abbassides et se décida à se débarrasser de lui. Al-Moutawakkil ‘Alallah demanda à l’un de ses proches de suggestionner à son général d’accomplir le pèlerinage cette année 235 de l’Hégire (845). Lorsqu’Itakh partit avec toute sa suite au pèlerinage, le calife se dirigea vers Samarra, le bastion de ses forces ou il nomma alors Wassif at-Turki pour remplacer Itakh pendant son absence.

Lorsqu’Itakh finit le pèlerinage et qu’il voulut se diriger vers Samarra, le chef de la police (ou le ministre de l’intérieur de nos jours)  Ishaq Ibn Ibrahim Ibn Mous’ab al-Khouza’i lui écrivit et l’informa de se diriger vers Baghdad, afin de rencontrer les différents chefs des grandes personnes pour le congratuler. Et à Baghdad, le calife avait ordonné son arrestation aussitôt qu’il entrerait dans la ville. Il fut donc arrêté, emprisonné et devait mourir dans sa prison.

 

Les Dhimmis

 

Cette même année, al-Moutawakkil ordonna que les Chrétiens et tous les autres Dhimmis portent des capuchons jaunes et des ceintures Zounnar, de voyager sur des selles avec des étriers de bois, et que deux pommeaux, l’un devant et l’autre derrière, soient placés sur leurs selles et de mettre deux boutons aux coiffes (qalanis) de ceux qui les portaient et d’une couleur différente de celles portées par les Musulmans. Il leur ordonna aussi de mettre deux pièces sur les vêtements extérieurs de leurs esclaves, dont la couleur devait différer de celle du vêtement extérieur, qu’une des pièces être devant sur la poitrine et d’autre sur le dos. Chacune de ces pièces devait avoir un diamètre de 8 centimètres et être de couleur jaune. Les Dhimmis qui portaient un turban devraient être de couleur jaune et leurs femmes qui sortaient en public devaient être vêtues aussi de jaune. Al-Moutawakkil ordonna aussi que leurs esclaves portent des ceintures Zounnar mais leur interdits de porter celles y étaient décorées. De plus, il ordonna de détruire leurs lieux de culte rénovés et qu’un dixième de leurs résidences soit saisis. Si l’endroit était suffisamment spacieux, il devait être transformé en mosquée et s’il n’était pas convenable pour une mosquée, alors il devait être détruit et devenir un lopin de terre vide. Il ordonna aussi que des sculptures en bois de démons soient clouées aux portes de leurs maisons pour distinguer leurs résidences et celles des Musulmans.

Al-Moutawakkil interdit l’emploi des Dhimmis dans les bureaux gouvernementaux et dans les fonctions officielles, qui devaient être réservé exclusivement aux Musulmans. Il interdit leurs enfants de suivre leurs études dans les écoles primaires musulmanes ou d’être enseigner par les musulmans. Il leur interdit aussi d’afficher publiquement leurs croix lors de manifestations religieuses. En plus, il ordonna que leurs tombes soient nivelées pour ne pas ressembler aux tombes des Musulmans. Et il écrivit ainsi à ses gouverneurs régionaux :

« Au nom d’Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux.

Allah Bénis soit-Il et Exalté par Sa force, qui ne peut pas être démenti et par Son pouvoir de faire ce qu’Il veut a choisi l’Islam et l’a souhaité pour Lui. Par l’Islam Il a honoré Ses anges, envoyé Ses messagers et aidé Ses saints. Il a supporté l’Islam avec la droiture, l’a cerné avec le secours et l’a protégé de l’infirmité. Il a donné la victoire à l’Islam sur les autres religions, l’a rendu libre de doutes, à abri des fautes et doté de vertus exceptionnelles. Il l’a distingué parmi les lois religieuses en le faisant le plus pur et le plus vertueux, parmi les préceptes en le faisant le plus immaculé et le plus noble, parmi les statuts en le faisant plus juste et le plus convaincant et parmi les actions en le faisant le plus beau et le mieux adapté. Il a honoré ses professeurs par ce qu’Il a permis et a interdit pour eux. Il a exposé pour eux Ses lois et statuts, déposés (assit) pour eux Ses règles et usages (traditions, habitudes) et leur a préparé Sa récompense expansive et Sa rétribution.

Il dit dans Son Livre, par lequel Il ordonne et interdit, préconise et conseille : « Certes, Allah commande l’équité, la bienfaisance et l’assistance aux proches. Et Il interdit la turpitude, l’acte répréhensible et la rébellion. Il vous exhorte afin que vous vous souveniez ».[6]

Il dit, en interdisant à Ses gens de prendre de la nourriture offensive, de la boisson et les relations sexuelles, en les exaltant au-dessus de cela, en purifiant leur religion et en faisant Ses gens supérieurs aux autres : « Vous sont interdits la bête trouvée morte, le sang, la chair de porc, ce sur quoi on a invoqué un autre nom que celui d’Allah, la bête étouffée, la bête assommée ou morte d’une chute ou morte d’un coup de corne, et celle qu’une bête féroce a dévorée - sauf celle que vous égorgez avant qu’elle ne soit morte -. (Vous sont interdits aussi la bête) qu’on a immolée sur les pierres dressées ».[7]

Alors Il conclut, en faisant allusion à ce qu’Il leur a interdit de prendre, avec ce verset, en protégeant Sa religion de quiconque Lui est opposé et en faisant bénéficier avec perfection Ses gens choisis. Allah Exalté et Puissant dit : « Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous votre religion, et accompli sur vous Mon bienfait. Et J’agrée l’Islam comme religion pour vous ».[8]

Allah Puissant et Exalté soit-Il dit aussi : « Vous sont interdites vos mères, filles, sœurs, tantes paternelles et tantes maternelles, filles d’un frère et filles d’une sœur, mères qui vous ont allaités, sœurs de lait, mères de vos femmes, belles-filles sous votre tutelle et issues des femmes avec qui vous avez consommé le mariage ; si le mariage n’a pas été consommé, ceci n’est pas un péché de votre part ; les femmes de vos fils nés de vos reins ; de même que deux sœurs réunies - exception faite pour le passé ».[9] 

Et Allah Exalté dit aussi : « Ô les croyants ! Le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées, les flèches de divination ne sont qu’une abomination, œuvre du Diable. Écartez-vous en, afin que vous réussissiez ».[10] 

Dieu interdit ainsi aux Musulmans de prendre les aliments les plus abominables et impurs des membres d’autres religions et de boire leur boisson qui réveille l’inimitié et la haine et entrave la mention du nom de Dieu et de prier. Et Il interdit le plus coupable et le plus illégal de leurs mariages aux yeux du perspicace.

Il donne des bonnes qualités et des nobles vertus aux Musulmans et les rends enseignants de la foi, de la fidélité, de la vertu, de la clémence, de la certitude et de la véracité. Et Il n’a pas établi leur division de religion, leur opposition, leur fanatisme, leur arrogance, leur traîtrise, leur perfidie, leur oppression et leur injustice. Au contraire, Il leur ordonne plutôt les bonnes qualités des premiers et leur défends les mauvaises des seconds et leur promet Son paradis et Son feu, Sa récompense et Sa punition.

Les Musulmans, à travers les faveurs d’Allah par lesquelles, Il les a élus et la supériorité qu’Il leur a donnée par la religion qu’Il a choisie pour eux, se distinguent des membres des autres religions par leurs lois vertueuses, leurs statuts droits et parfaits et leurs preuves évidentes. Ils sont distingués par Allah à travers leur religion purifiante par ce qu’Il leur permet et leur interdit, par le décret de Dieu de renforcer Sa religion, par Sa détermination de manifester Sa vérité décisivement et par Sa volonté à parfaire Ses avantages à Ses gens : « Mais il fallait qu’Allah accomplît un ordre qui devait être exécuté, pour que, sur preuve, pérît celui qui (devait) périr, et vécût, sur preuve, celui qui (devait) vivre. Et certes, Allah est Audient et Omniscient ».[11] Et qu’Allah peut donner la victoire et une fin heureuse au dévot et le déshonneur dans ce monde et dans l’autre aux mécréants.

Le commandant des croyants décide, puisse son succès et son conseils être par Allah Exalté, de contraindre tous les Dhimmis, élitaires ou ordinaires, en sa présence, de près ou dans les lointaines provinces, de faire leur coiffes, de leurs négociants, secrétaires, leurs vieux et jeunes, de tissu jaune et nul n’est excepté ni ne doit l’être.

Et ceux de leurs hommes humbles ou dessous cette station, dont la circonstance les empêche de porter des coiffes, doivent apposer deux morceaux de tissu de la même couleur à leurs vêtements. La circonférence de chaque morceau doit être de la même taille pour et doit être apposée de la même manière pour tous sur le vêtement extérieur qu’il porte, devant et derrière. Et tous les Dhimmis doivent attacher des boutons d’une couleur différente de leur coiffe. Ils doivent être apparents quand ils sont attachés, et ne doivent pas être dissimulés.           

Ils doivent aussi attacher des étriers de bois à leurs selles et de fixer des pommeaux proéminents sur le devant et l’arrière de leurs selles. On ne doit pas les autoriser à enlever ces pommeaux ni même de les mettre ailleurs qu’à l’endroit désigné. Leurs selles doivent être inspectées pour garantir que les ordres du commandant des croyants sont exécutés conformément à ses directives. Les inspecteurs doivent pouvoir remarquer immédiatement l’accomplissement des directives.

Leurs mâles et leurs esclaves et ceux de cette classe doivent porter des corsets, des ceintures Zounnar et des serres tailles Koustij à la place ceux qu’ils ont sur leur tailles.

Vous devez instruire vos officiers sur ordres du commandant des croyants et faire de telle façon qu’ils soient motivés dans l’exécution de leurs taches. Et vous devez les prévenir du contournement et de la déviation de l’application de ces règlements et de punir quiconque des Dhimmis enfreignant ces règles, ne soyez pas opposé, ou négligé ou n’importe quoi d’autre sans tenir compte de la classe ou de la profession, pour appliquer les ordres que le commandant des croyants a ordonné, avec la volonté d’Allah Exalté.

Quiconque considère le commandant des croyants et de son ordre doit le savoir. Dépêchez vos officiers dans les régions de votre province avec la lettre contenant les ordres du commandant des croyants et Allah dispose.

Le commandant des croyants demande à Allah Exalté, son Seigneur et son Patron, de bénir Son servant et Son Messager Muhammad et Ses anges, de le protéger, l’ayant fait calife pour Sa religion. Puisse-t-il réaliser la commission d’Allah, qui ne peut être exécuté correctement seulement avec l’aide d’Allah, pour qu’il réalise ce qu’Allah l’a chargé pour atteindre Sa parfaite et plus excellente récompense. Car Allah Exalté est le Noble, le Compatissant ».

Ibrahim Ibn al-‘Abbas écrivit ceci au mois de Shawwal, 235 (850).

 

 

Cette même année, un homme appelé Mahmoud Ibn al-Faraj an-Nayssabouri apparut à Samarra. Il prétendit être Dzoul al-Qarnayn[12]. Il avait avec lui vingt-sept hommes dans les environs de Khashabat Babak. Deux de ses compagnons apparurent à Bab al-‘Ammah. Et à Baghdad, dans la mosquée de son centre administratif, il y en avait deux d’autres qui prétendirent que Mahmoud était un prophète et qu’il était Dzoul al-Qarnayn. Lui et ses compagnons furent envoyés à al-Moutawakkil, qui ordonna que Mahmoud soit battu avec des fléaux. Il fut sévèrement flagellé et mourut des suites de cette flagellation.

Les compagnons de Mahmoud furent emprisonnés. Ils étaient venus de Nayssabour et avaient avec eux certains textes qu’ils récitaient. Ils apportèrent leurs familles avec eux. Parmi eux était un shaykh qui témoigna de la prophétie de Mahmoud, et prétendait que ce dernier avait reçu une révélation de Gabriel. Mahmoud fut flagellé cent coups et ne renia pas sa prophétie sous les coups. Le shaykh qui témoigna pour lui fut flagellé quarante fois, après quoi, il désavoua la prophétie de Mahmoud sous la correction. Mahmoud fut apporté à Bab al-‘Ammah où il se rétracta. Quant au shaykh, il déclara que Mahmoud l’avait dupé et avait ordonné à ses compagnons de lui donner chacun une claque et que chacun d’entre eux en avait donné dix. Un texte fut pris de Mahmoud contenant des mots de mécréances qu’il avait composé. Il avait déclaré que c’était son Qur’an et que Gabriel, paix sur lui, le lui avait révélé. Il est mort par la suite le mercredi 3 Dzoul Hijjah de cette année et fut enterré dans al-Jazirah.

 

Cette même année, Les eaux du Tigre devinrent jaunes durant trois jours et les gens s’inquiétèrent. Puis l’eau tourna à la couleur de d’eau d’inondation au mois de Dzoul Hijjah.

 

 

En l’an 236 de l’Hégire (850), al-Moutawakkil ordonna que la tombe d’al-Houssayn Ibn Tous, les résidences et les palais l’entourant soient détruits. Le site de sa tombe devait être labouré, semé et irrigué et l’on devait empêcher les gens de visiter cet endroit. Il a été rapporté qu’un agent du chef de la police de sécurité annonça dans la région : « Quiconque sera trouvé après trois jours près de la tombe d’al-Houssayn sera envoyé au Matbaq[13] ». Les gens fuirent et se retinrent d’aller à la tombe. Cet endroit fut labouré et toute la région ensemencée.

 

Cette même année, le calife fit la même erreur que ses ancêtres abbassides en nommant à la succession au califat après lui ses trois enfants : Muhammad al-Mountassir Billah, az-Zoubayr al-Mou’taz Billah et Ibrahim al-Mouayyad Billah et leur fit porter allégeance pour la succession après lui.

 

 

En l’an 237 de l’Hégire (851), les habitants de l’Arménie se révoltèrent contre Youssouf Ibn Muhammad.



[1] 500 grammes.

[2] ‘Arafat ?

[3] Al-Khadim veut dire aussi énuque.

[4] Esclaves. De l’arabe « mamalik » qui veut dire possédé dans le sens d’acheté. Par la suite, les mamelouks allaient jouer un grand rôle dans l’histoire musulmane.

[5] Allahou Akbar.

[6] Qur’an 16:90.

[7] Qur’an 5:3.

[8] Qur’an 5:3.

[9] Qur’an 4:23.

[10] Qur’an 5:90.

[11] Qur’an 8:42.

[12] Voir Qur’an Sourate 18, versets 83 à 98. Dzoul al-Qarnayn est souvent identifié à tort à Alexandre le Grand par les exégètes musulman qui le considèrent comme un croyant prévenant les gens de la récompense et de la punition de Dieu alors qu’il ne l’était pas et était plutôt un tyran.

[13] Prison.