Al-Mou’tassim Billah, le huitième calife abbasside 

 

Le calife al-Ma'moun mourut après un nombre important de graves événements durant son règne et son frère al-Mou’tassim Billah alias Muhammad Ibn Haroun ar-Rashid prit la succession. Sa mère, d’origine turque et née à Koufa, se nommait Marida. Elle était originaire de Sourad du Turkestan. Et contrairement à ce que les ragots rapportent, les concubines du palais ne passaient pas leur temps à chanter et à se pavaner mais elles devaient être parfaitement éduquées tant en religion que sur les affaires civiles mais aussi sur les protocoles de la cour. Leur gynécée appelé en arabe « al-Haram » était un lieu clos interdit à la présence masculine du fait que leurs habitantes étaient la famille du calife et leurs servantes. Les occidentaux ont transformé ce mot en « harem ».

N’oublions pas que les enfants de ces femmes étaient les futurs califes et qu’ils se devaient d’avoir une excellente éducation pour prendre la succession au pouvoir. Et pour pouvoir enseigner les bonnes manières aux autres, il faut d’abord les posséder soi-même. Certaines d’entre elles, assistèrent même leur mari et s’assirent dans leur conseil où elles donnaient leurs avis comme ce fut le cas pour Khayzran dont le professeur fut l’Imam juriste al-Awza’i, que nous avons déjà mentionné. Elles devaient donc apprendre l’arabe, mémoriser le Qur’an, connaître la jurisprudence, connaître les étiquettes de la cour, comment s’adresser aux membres de la cour, etc.

Sur trente-sept califes abbassides, trois seulement d’entre eux as-Safah, al-Mahdi et al-Amine avaient des mères arabes. Tous les autres eurent des mères non arabes, qui au début étaient des mères d’enfants, à savoir des esclaves, et quand elles accouchaient d’un enfant du calife, elles devenaient des femmes libres.

Il existait un réel danger pour l’état dans la proximité et nous avons vu qu’al-Ma'moun était très proche de ses oncles au Khorasan. Al-Mou’tassim eut pour mère une Turque. Regardons quels étaient les hommes de l’état sous son règne, le célèbre général al-Afshin Khaydar Ibn Qaous, le Caïd Itakh, le Caïd Bougha al-Kabir, le Caïd Simak Dimashk Daoud Siyyah sont des gens différents de ceux que étaient responsables sous le règne des premiers califes abbassides et bien que le mouvement des Abbassides soit né au Khorasan. Même si quelques-uns d’entre eux, avait dans leur nom « al-Khorassani », la plupart des hommes clés du gouvernement, des responsables, des gouverneurs et des chefs militaires étaient des Arabes : Ma’an Ibn Zayd ash-Shaybani, Houmayd Ibn Qahtabah at-Tayyi, Khazim Ibn Khouzaymah an-Nahshali ad-Darimi at-Tamimi, Jarir Ibn Yazid Ibn Jarir Ibn ‘AbdAllah al-Bajali étaient des chefs parmi les Arabes.

Donc, le calife al-Mou’tassim se pencha vers ses oncles turcs et leur distribua les postes principaux de l’état. Il avait des milliers de Mameloukes[1] qui faisaient partie de sa garde personnelle et de cette manière, le calife fit entrer dans les traditions arabes des Abbassides, des centaines de protocoles propres à ces peuples et qu’ils utilisaient dans leur castes régnantes. Baghdad se remplit de Turcs et cela engendra des frictions avec les habitants arabes et bientôt la ville devint trop étroite et le calife al-Mou’tassim ordonna de construire la ville de Sour Marhaha ou Samarra en l’an 219 de l’Hégire (834). Lorsque la construction de la ville prit fin, il y déplaça son palais et fit amener tous ses partisans en l’an 221 de l’Hégire (836) et Samarra devint sa capitale personnelle et celle de sept califes après lui, le dernier d’entre eux fut al-Mou’tamid ‘Alallah qui décéda en l’an 279 de l’Hégire (892). Et seulement après, la capitale des califes abbassides revinrent à Baghdad.

Ar-Rashid avait laissé la succession à al-Amine, puis à al-Ma'moun puis à al-Mou’tamid mais il ne l’avait pas laissé à al-Mou’tassim. Il a été rapporté que la cause de cela est qu’al-Mou’tassim n’aimait pas étudier et qu’il n’était pas assidu dans son apprentissage. Et s’il n’était pas au même niveau que ses frères, il était considéré comme ignorant (jahilan). Mais Allah Exalté voulut que vingt-neuf de ses enfants soient des califes abbassides.

 

Sous le règne d’al-Mou’tassim, le grand général al-Afshin Khaydar Ibn Qaous qui était un de ses Mamalikes[2] réussi à vaincre l’athée Babak al-Khourrami surnommé « Shaytan al-Khorasan » (le diable du Khorasan) qui fut l’un des plus grands corrupteurs que la terre porta, au Khorasan et au-delà du Khorasan, ou il propagea sa doctrine athée depuis l’an 201 de l’Hégire (816) sous le règne d’al Ma'moun.

Voici son histoire intégrale rapportée  par at-Tabari.

En l’an 220 de l’Hégire, al-Mou’tassim nomma Afshin Khaydar Ibn Qaous gouverneur d’al-Jibal et l’envoya lui combattre Babak, le jeudi 02 Joumadah Thani. Il établit son camp dans la Moussallah[3] de Baghdad avant de partir à Barzand.

 

La seconde rebellions de Babak

 

La première rébellion de Babak eu lieu en l’an 201 (816) à al-Badh ou il mit en fuite les forces gouvernementales et tua un certain nombre de ses commandants. Quand le pouvoir suprême passa à al-Mou’tassim, ce dernier envoya Abou Sa’id Muhammad Ibn Youssouf à Ardabil et lui ordonna de reconstruire les forteresses entre Zanjan et Ardabil que Babak avait détruit, d’y mettre des garnisons d’hommes armés pour protéger les routes afin de garantir la sûreté du passage pour les provisions apportées à Ardabil. Abou Sa’id fit ce qu’on lui demandait et reconstruit les forteresses que Babak avait détruit. Lors d’une de ses incursions Babak envoya un détachement de troupes, sous le commandement d’un homme appelé Mou’awiyyah, contre Abou Sa’id. Mou’awiyyah attaqua alors certains des régions avoisinantes avant de se retirer dans sa base. Lorsque Abou Sa’id Muhammad Ibn Youssouf fut informé de ses exactions, il rassembla ses forces et marcha contre Mou’awiyyah, pour l’intercepter à un point donné le long de la route. Abou Sa’id attaqua Mou’awiyyah, tua un certain nombre de ses compagnons, prit certain d’entre eux captifs et récupéra ce que Mou’awiyyah avait amassé dans ses raids. Ce fut le premier revers que les partisans de Babak subirent. Abou Sa’id  envoya les  têtes de l’ennemi tombé et les prisonniers à al-Mou’tassim Billah.

 

La seconde défaite de Babak eu lieu par l’intermédiaire de Muhammad Ibn al-Ba’ith qui était dans une forteresse particulièrement bien défendue appelée Shahi qu’il captura d’al-Wajna Ibn ar-Rawwad. Cette large forteresse était perchée sur une arête rocheuse et dépendait de l’Azerbaïdjan[4]. Il avait dans cette province une autre forteresse du nom de Tabriz, mais Shahi était la moins imprenable des deux. Ibn al-Ba’ith avait fait la paix avec Babak et lorsque Babak organisait des raids, lui et ses troupes avaient l’habitude de s’arrêter chez lui. Il leur offrait alors l’hospitalité et les traitait bien si bien qu’il ne les craignait pas du fait qu’il était habitué à leur visite. Lors d’une occasion, Babak envoya un de ses commandants du nom de ‘Ismah avec un détachement. Il s’arrêta près de chez Ibn al-Ba’ith qui le traita comme il était de coutume et lui envoya des moutons, des chèvres ainsi que d’autres denrées alimentaires. Ibn al-Ba’ith lui envoya un message pour le convier ainsi que sa garde personnelle et ses principaux commandants. Lorsqu’ils arrivèrent, ‘Ismah les nourrit généreusement et leur offrit de la boisson si bien qu’ils devinrent ivres. Alors il bondit sur ‘Ismah, l’attacha fermement et tua tous ses compagnons qui étaient avec lui. Puis il demanda à ‘Ismah d’énumérer le nom de tous ses hommes qui étaient restés dans le camp. Chacun d’entre eux fut donc appelé un par un et lorsqu’il pénétrait dans la forteresse il était aussitôt tué. Cela dura jusqu’à ce que le reste d’entre eux se rendirent compte de l’astuce et s’enfuirent.

Ibn al-Ba’ith envoya ‘Ismah à al-Mou’tassim. Abou Muhammad al-Ba’ith, le père de Muhammad Ibn al-Ba’ith avait été l’un des bandits et coupeurs de route d’Ibn ar-Rawwad. Al-Mou’tassim interrogea ‘Ismah du territoire de Babak et ce dernier lui fournit des renseignements sur les routes d’accès ainsi que sur les modes possibles de combat dans ces régions. ‘Ismah resta en captivité jusqu’au règne d’al-Wathiq.

 

Quand al-Afshin arriva à Barzand, il établit son camp et répara les forteresses entre Barzand et Ardabil. Il posta Muhammad Ibn Youssouf à un endroit appelé Khoush qui creusa aussitôt une tranchée protectrice. Il posta al-Haytham al-Ghanawi, un commandant originaire d’al-Jazirah, dans une région du nom d’Arshaq ou al-Haytham répara la forteresse et creusa tout autour une fosse protectrice. Al-Afshin posta ‘Alawayh al-A’war, un des commandants d’Abna’ une forteresse près d’Ardabil appelé Hisn an-Nahr[5]. Les voyageurs et les caravanes avaient l’habitude de partir d’Ardabil accompagné d’une escorte jusqu’à ce qu’ils atteignent Hisn an-Nahr et ensuite le commandant de Hisn an-Nahr les escorterait à al-Haytham al-Ghanawi. Al-Haytham, en retour, partait avec ceux qui étaient venus de son propre district jusqu’à ce qu’il les remet aux forces armées de la garnison de Hisn an-Nahr, qui escortait ces voyageurs venant d’Ardabil jusqu’à ce qu’ils arrivent chez al-Haytham. Selon cet arrangement le commandant de Hisn an-Nahr arrivait exactement à mi-chemin de la route ou il remettait ceux qui étaient sous sa protection à al-Haytham qui à son tour prenait ceux qui étaient sous la protection du commandant de Hisn an-Nahr et ainsi il y avait un commandant pour chaque groupe. Si un groupe arrivait au lieu de rencontre avant l’autre, il arrêtait et ne dépassait pas le point de rencontre jusqu’à ce que l’autre groupe soit arrivé. Alors chaque commandant confiait son propre groupe de voyageurs à l’autre. Ainsi Abou Sa’id et ses hommes escortaient la caravane à Khoush, pendant qu’al-Haytham et ses hommes retournaient à Arshaq avec les voyageurs qui lui avaient été confiés.

 

Chaque fois qu’un espion venait chez Abou Sa’id ou dans n’importe laquelle des garnisons, il le dépêchait à al-Afshin qui avait l’habitude de ne pas les tuer ou les battre mais leur donnait au contraire des sommes d’argent et des cadeaux et les questionnait sur les sommes habituelles d’argent que Babak leur donnait. Alors il leur doublait la somme d’argent et leur disait : « Espionne maintenant pour nous ! »

 

Cette même année, une grande bataille eut lieu à Arshaq entre Babak et Afshin lors de laquelle al-Afshin tua un grand nombre des soldats de Babak dont on a rapporté qu’ils furent plus de mille. Babak fuit à Mouqan et de là, il partit pour la ville d’al-Badh.

 

La bataille entre al-Afshin et Babak

 

Il a été rapporté que la cause de cette bataille est qu’al-Mou’tassim envoya avec Bougha al-Kabir une somme d’argent à al-Afshin pour que ce dernier puisse payer ses troupes et les entretenir. Bougha apporta cet argent à Ardabil ou il s’arrêta et Babak et ses hommes furent informés. Ils s’apprêtèrent donc à l’intercepter avant qu’il n’atteigne al-Afshin. L’espion Salih vint trouver al-Afshin et l’informa que Bougha al-Kabir était arrivé avec une somme d’argent et que Babak et ses hommes se préparaient à l’intercepter avant qu’il n’atteigne al-Afshin. On a aussi rapporté que Salih approcha Abou Sa’id qui l’envoya alors à al-Afshin.

Babak prépara des embuscades à différents endroits. Al-Afshin écrivit à Abou Sa’id, et lui ordonna d’employer des stratagèmes pour vérifier l’authenticité des renseignements sur Babak. Abou Sa’id et un groupe de ses hommes sortirent déguisés jusqu’à ce qu’ils virent des lumières et des feux dans les endroits décrits par Salih. Pendant ce temps, al-Afshin écrivit à Bougha et lui donna l’ordre de rester dans Ardabil jusqu’à ordre du contraire. Abou Sa’id écrivit à al-Afshin, en lui disant que les renseignements de Salih étaient authentiques ; et al-Afshin promit des largesses à Salih et le couvrit de faveurs. Puis il écrivit à Bougha et lui ordonna d’attacher la somme d’argent sur le dos de chameaux, d’attacher les bêtes ensemble en file, de sortir d’Ardabil et de faire comme s’il se dirigeait vers Barzand. Et lorsqu’il approcherait de la forteresse d’an-Nahr, ou de ses environs, il devrait retenir le convoi d’animaux jusqu’à ce que les voyageurs qui accompagnaient d’argent atteignent Barzand et quand la caravane était passée, de revenir avec l’argent à Ardabil.

Bougha fit cela et la caravane voyagea jusqu’à ce qu’elle arrive à an-Nahr. Les espions de Babak aux aguets retournèrent et l’informèrent que l’argent était arrivé à an-Nahr et qu’il l’avait vu du fait qu’il était passé sur leurs propres yeux. Mais la réalité était que Bougha revint à Ardabil avec l’argent.

Al-Afshin quitta Barzand l’après-midi du jour qu’il convînt précédemment avec Bougha et au coucher du soleil atteignit Khoush, où il établit son camp avec ses forces à l’extérieur de la tranchée protectrice (khandaq) creusée par Abou Sa’id. Quand le matin arriva, il partit secrètement, sans faire battre les tambours, après avoir ordonné que la bannière devait être gardée ferlée et que les soldats devaient rester silencieux et voyager rapidement. La caravane sortie ce même jour d’an-Nahr en direction d’al-Haytham et al-Afshin pris la même direction pour pouvoir rencontrer al-Haytham le long de la route qui ignorait son déplacement. Al-Haytham et la caravane de voyageurs sortirent et partirent en direction d’an-Nahr. Babak déploya sa cavalerie et ses fantassins en formation de guerre et procéda vers an-Nahr, imaginant qu’il entrerait en possession de l’argent. Le commandant d’an-Nahr sortit pour escorter ceux qui était à sa charge quand la cavalerie de Babak, convaincu que sa caravane transportait l’argent, lança une attaque contre lui. Le commandant d’an-Nahr lutta contre eux mais les hommes de Babak le tuèrent ainsi que tous ceux qui l’accompagnaient y compris les voyageurs. Ils saisirent tous leurs bagages et leurs marchandises et se rendirent compte que l’argent réel leur avait échappé. Alors, ils prirent la bannière du commandant d’an-Nahr ainsi que les vêtements de la garnison d’an-Nahr dont-ils se vêtirent pour tromper al-Haytham al-Ghanawi et ses compagnons. Ils étaient à ce point, ignorant le départ d’al-Afshin et ils procédèrent comme s’ils étaient la garnison d’an-Nahr. Quand ils arrivèrent, ils ignoraient l’endroit où la bannière et les insignes du commandant d’an-Nahr se plaçaient habituellement et ils prirent des positions différentes.

Lorsqu’al-Haytham arriva et prit sa position; il fut inquiété par ce qu’il vit et envoya donc en avant le fils de son oncle et lui dit : « Va trouver cet homme détestable et demande lui pourquoi il s’est arrêté là ? » Le cousin d’al-Haytham partit, s’approcha des gens qu’il ne reconnut pas avant de revenir à al-Haytham et de lui dire : « Effectivement, je ne reconnais pas ces gens! » Al-Haytham lui dit : « Puisse Allah Exalté te confondre ! Quel lâche tu es ! » Et il envoya cinq cavaliers qu’il détacha de son entourage. Quand ils approchèrent de Babak, deux hommes des khourramiyah sortirent en avant. Ils rencontrèrent les deux hommes mais ne les reconnurent pas tout en laissant croire aux hommes de Babak qu’ils les avaient reconnus comme étant apparemment des membres de la caravane musulmane. Ils galopèrent en arrière à Al-Haytham et lui dirent : « Le mécréant a tué ‘Alawayh et ses compagnons et il a pris leurs bannières et leurs vêtements ».

Al-Haytham retourna dans son camp vers la caravane qu’il avait apportée sous son escorte et leur ordonna de repartir immédiatement aussi vite qu’il le pouvait pour ne pas être capturés. Quant à lui, il resta avec ses troupes, voyagea avec eux durant une certaine distance et s’arrêta ensuite avec eux pendant quelque temps, pour détourner l’attention des khourramiyah loin de la caravane et agissant comme une force protectrice pour eux, jusqu’à ce que la caravane ait atteint la base forteresse d’al-Haytham à Arshaq. Il dit alors à ses compagnons : « Qui parmi vous ira trouver l’émir (al-Afshin) et Abou Sa’id et les informa de ce qui est arrivé recevra 10.000 dirhams ainsi qu’un nouveau cheval pour remplacer le sien. Si son cheval revient épuisé, il en recevra immédiatement un autre, comparable à celui avec lequel il est parti ! » Deux de ses hommes se mirent aussitôt en route au galop sur des coursiers tandis qu’al-Haytham retourna à l’intérieur de la forteresse.

Babak, accompagné par ses troupes, avança jusqu’à la forteresse ou un siège sur lequel il s’assit fut déposé pour lui sur une éminence en face de la forteresse. Il envoya un message à al-Haytham, disant : « Vide la forteresse et part car j’ai l’intention de la démolir ». Mais al-Haytham refusa et lui livra plutôt une bataille. Al-Haytham avait avec lui dans la forteresse 600 fantassins et 400 cavaliers et la forteresse avait une tranchée solidement fortifiée, donc il attaqua Babak. Ce dernier s’assit, au beau milieu de ses hommes ou du vin lui fut présenté comme de coutume  pendant que la bataille faisait rage.

Les deux cavaliers envoyés par al-Haytham rencontrèrent al-Afshin à moins d’un Farsakh[6] d’Arshaq et quand il les vit au loin il dit au commandant de son avant-garde : « J’aperçois deux cavaliers galopant à bride abattue ». Alors il ajouta : « Battez les tambours et déroulez  les bannières, galopez vers les deux cavaliers et dites-leur : À votre service, à votre service ! ». Donc ses hommes firent ce qu’il ordonna et partirent à toute allure en avant. Les troupes galopèrent en avant, en rivalisant de vitesse avec leurs chevaux, se bousculant les uns les autres jusqu’à ce qu’ils arrivent à Babak, qui était encore assit. Il n’eut pas le temps de s’enfuir avant que les cavaliers et le corps de troupes ne soient sur eux et que s’ensuivit une close bataille. Pas un seul des fantassins de Babak ne réussit à s’enfuir et ils furent tous abattus. Quant à Babak, il réussit à s’enfuir avec un petit groupe de cavaliers et se retira à Mouqan, ou après un certain temps, ses compagnons se séparèrent de lui. Al-Afshin resta dans cet endroit où il passa la nuit avant de revenir dans son camp à Barzand.

Babak resta dans Mouqan un certain nombre de jours d’où, il envoya un message à al-Badh et pendant la nuit une force de troupes, incluant des fantassins, vint le retrouver et il voyagea avec eux jusqu’à ce qu’ils atteignent al-Badh. Al-Afshin, pendant ce temps, resta à Barzand.

 

Quelques jours plus tard, une caravane allant de Khoush à Barzand transportant de l’eau et des provisions pour al-Afshin, sous le commandement de Salih Abkash un homme désigné par Abou Sa’id, passa près de Babak. Le général de Babak l’attaqua, saisit la caravane et tua pratiquement tous les hommes y compris la force de Salih. Salih et quelques hommes réussirent à s’enfuir à pied mais la caravane fut perdue et leurs marchandises pillées. Ainsi l’armée d’al-Afshin manqua d’eau et de provisions à cause de la capture de la caravane. Al-Afshin écrivit au commandant d’al-Maraghah, et lui ordonna d’apporter des réserves et des provisions et les lui envoyer avec toute la vitesse possible parce que les troupes souffraient du manque d’eau et de nourriture. Le commandant d’Al-Maraghah lui envoya une énorme caravane, d’environ mille montures transportant des réserves et des provisions et accompagné par une escorte. Mais encore une fois, un détachement des forces de Babak, commandées par Tarkhan ou par Adin, les attaqua et traitèrent la caravane entière comme un pillage légal, laissant les hommes d’al-Afshin réduit aux extrêmes. Alors Al-Afshin écrivit au commandant d’as-Sirawan, et lui ordonna d’envoyer de la nourriture et le commandant de la garnison lui dépêcha en conséquence une grande quantité de nourriture et soulagea ainsi les gens cette année. Quant à Bougha, il rejoignit al-Afshin avec l’argent et des hommes.

 

 

En l’année 221 de l’Hégire (835), il y eut une bataille dans les environs d’Hashtadsar, une région montagneuse d’Azerbaïdjan du Nord, entre Babak et Bougha al-Kabir, au cours de laquelle Bougha fut vaincu et son camp pillé. Durant cette même année, al-Afshin tomba sur Babak et le vaincu.

 

Les batailles entre Bougha al-Kabir et al-Afshin contre Babak

 

Il a été précédemment mentionné que Bougha al-Kabir rejoignit al-Afshin avec l’argent des troupes envoyé par al-Mou’tassim pour al-Afshin pour subvenir à ses besoins et ceux de ses troupes. Bougha arriva avec des renforts envoyés pour soutenir al-Afshin et ceux qui étaient avec lui. Al-Afshin pu ainsi payer ses troupes et après les célébrations du nouvel an musulman[7], il équipa hâtivement ses troupes et envoya Bougha avec une force pour encercler Hashtadsar et établir son camp à la Tranchée de Muhammad Ibn Houmayd, de l’approfondir, de la renforcer et de s’y établir avec ses hommes. Bougha marcha aussitôt de son camp à la Tranchée de Muhammad Ibn Houmayd. Al-Afshin quitta Barzand et Abou Sa’id quitta Khoush à la recherche de Babak. Ils se rencontrèrent près d’un lieu du nom de Darwad. Là, al-Afshin creusa une tranchée, construisit un rempart autour d’elle et ensemble avec Abou Sa’id et les volontaires qui l’avait rejoint ses forces, établirent le camp dans le périmètre de la tranchée, à 10 km à peu près d’al-Badh.

Bougha fit ses préparations et prit avec lui des provisions de voyage différentes de ceux qu’al-Afshin lui avait conseillé de prendre. Il patrouilla tout autour d’Hashtadsar jusqu’à ce qu’il entra dans la région habitée d’al-Badh et s’arrêta dans son centre, ou il resta durant un jour. Alors il envoya mille hommes recueillir des fourrages mais un détachement de Babak sortit et tua tous ceux qui s’opposèrent à eux tandis que le reste furent capturés prisonniers. Babak choisit parmi les captifs deux hommes, qui étaient particulièrement proches d’al-Afshin, et les instruisit ainsi : « Allez trouver al-Afshin et informez-le de ce qui est arrivé à vos camarades ». Lorsque les deux hommes arrivèrent en vue du camp d’al-Afshin, les gardes placés sur les sommets les aperçurent. Ils agitèrent le drapeau de signal et les troupes dans le campement crièrent : « Aux armes, aux armes ! » et ils partirent en direction d’al-Badh. Les deux hommes, réduits à l’état de nudité, les rencontrèrent et le commandant de l’avant-garde les prit et les apporta à al-Afshin à qui, ils racontèrent la calamité qui leur était arrivée. Et al-Afshin dit : « Bougha a fait quelque chose sans notre autorisation ».

Bougha revint à la Tranchée de Muhammad Ibn Houmayd et écrivit à al-Afshin, en lui demandant des renforts, en lui expliquant que son armée avait été pulvérisée. Al-Afshin lui envoya à son frère al-Fadl Ibn Kawous, Ahmad Ibn al-Khalil Ibn Hisham, Ibn Jawsham, Janah al-A’war as-Soukkari, le commandant de la garde de police d’al Hassan Ibn Sahl et un de deux frères de la famille d’al-Fadl Ibn Sahl. Ils patrouillèrent autour d’Hashtadsar et les troupes du camp de Bougha retrouvèrent le moral en les voyants. Alors al-Afshin écrivit à Bougha, et lui ordonna de conduire une expédition contre Babak un jour spécifique ou al-Afshin conduirait lui-même une autre expédition ce même jour pour attaquer Babak sur deux fronts.

Al-Afshin partit en conséquence le jour indiqué de Darwad ayant l’intention d’attaquer Babak tandis que Bougha quitta la Tranchée de Muhammad Ibn Houmayd, pour Hashtadsar et établit son camp pas très loin de la tombe de Muhammad Ibn Houmayd. Mais un vent froid et une violente pluie firent rage et les troupes furent incapables de tenir leur position à cause du vent fort et glacé et Bougha revint dans son camp.

Le matin suivant, alors que Bougha était déjà retourné dans son camp, al-Afshin tomba sur les troupes de Babak les poussant à s’enfuir et al-Afshin captura son camp, sa tente et aussi une femme qui était avec lui dans le camp et s’établit alors dans le camp de Babak.

Le matin, ses forces de nouveau prêtes, Bougha retourna à Hashtadsar pour constater que la force qui s’était établie en face de lui à Hashtadsar était déjà partie rejoindre Babak. Bougha avança vers le camp vide ou il trouve seulement des ustensiles et des morceaux de vêtements. Il descendit d’Hashtadsar vers al-Badh et sur la route, il trouva un homme et un jeune dormant. Daoud Siyyah, le commandant de l’avant-garde de Bougha, les saisit et les interrogea. Ils lui racontèrent qu’un envoyé de Babak était venu chez eux la nuit dans laquelle Babak avait fui défait et leur avait ordonné d’aller le rencontrer à al-Badh. L’homme et le jeune étaient si ivres que le sommeil les avait terrassés et ils n’avaient aucun autre renseignement à lui donner. Cet incident survint avant la prière de l’après-midi. À ce point, Bougha envoya un message à Daoud Siyyah, lui disant : « Nous sommes maintenant au beau milieu de l’endroit avec lequel nous sommes déjà familier (l’endroit où ils s’étaient trouvés la première fois). C’est maintenant le soir et les fantassins sont épuisés ; cherche donc une un emplacement montagneux sécurisé qui logera notre armée, où nous pourrons établir le camp pour cette nuit ». Daoud Siyyah rechercha un tel site en grimpant au sommet de l’une des montagnes et lorsqu’il regarda vers le bas, il vit la bannière d’al-Afshin et son campement presque en face et dit « Ce sera notre endroit jusqu’au début du matin suivant et à ce moment-là nous fondrons sur les mécréants (c’est-à-dire, Babak et ses hommes), si Allah Exalté le permet ».

Cependant, la nuit, les nuages descendirent sur eux accompagné par le froid, la pluie et une lourde neige, si bien que lorsque le matin arriva, personne ne fut capable de descendre la montagne pour aller chercher de l’eau ou pour abreuver les bêtes à cause de la neige et de l’intense froid. Le ciel était si lourdement chargé et le brouillard tellement intense que c’était comme s’ils étaient encore dans la nuit. Le troisième jour, les troupes dirent à Bougha : « Les provisions que nous avions avec nous sont maintenant épuisées et le froid nous a peiné. Descend donc, quoi que tu choisisses de faire, revenir ou marche sur les mécréants ». Les jours restèrent brumeux tandis que Babak harcela al-Afshin la nuit et martela son armée si bien que qu’al-Afshin désengagea ses forces et se retira dans son campement.

Bougha fit battre alors ses tambours et descendit, cherchant encore à atteindre al-Badh, jusqu’à ce qu’il atteigne la plaine ou le ciel était clair et le terrain dégagé. Alors Bougha déploya ses troupes en formation de bataille, avec une aile droite, une aile gauche, une avant-garde et avança en direction d’al-Badh, sans savoir qu’al-Afshin était retourné dans son camp. Il procéda en avant jusqu’à ce qu’il arrive sur le flanc de la montagne d’al-Badh et il ne restait qu’une une ascension d’à peu près d’un kilomètre avant qu’il puisse voir la ville d’al-Badh à leurs pieds. Il y avait dans son avant-garde un certain nombre de soldats, dont un jeune, qui avait des parents dans al-Badh. Les éclaireurs de Babak les rencontrèrent et le jeune en reconnut un et lui dit : « Ainsi et ainsi ! » L’homme répondit « Qui est celui-ci ? » Donc le jeune leur nomma ceux de ses parents qui étaient avec lui. L’homme dit alors : « Approche et permet-moi de parler avec toi ». Donc le jeune monta et l’homme lui dit : « Retourne et dit à la personne responsable de se retirer, car nous avons attaqué al-Afshin la nuit et il est retourné vers sa tranchée défensive. Et contre vous, de plus, nous avons préparé deux armées. Repartez aussi vite que possible et peut-être vous pourrez vous échapper ».

Le jeune retourna et informa Ibn al-Ba’ith de tout cela. Il lui donna le nom de l’homme et Ibn al-Ba’ith connaissait l’homme en question, alors il en informa Bougha. Bougha s’arrêta et consulta ses compagnons. L’un d’entre eux, leur fit des remontrances et dit : « C’est un mensonge, une ruse, cela ne peut être ! » À cela, un des gardiens de la montagne dit : « C’est un sommet avec lequel je suis familier ! Si quelqu’un monte à son sommet, il sera capable de voir le camp d’al-Afshin ». Bougha, al-Fadl Ibn Kawous et un groupe de leurs hommes qui étaient ingénieux et agiles grimpèrent et arrivèrent au sommaire pour constater l’absence du camp d’al-Afshin et là, ils furent convaincus qu’il était parti. Ils se concertèrent ensemble de nouveau et décidèrent à l’unanimité que les troupes devaient retourner avant que la nuit ne les enveloppe. Bougha ordonna à Daoud Siyyah de retourner et il se mit en route en voyageant rapidement et en évitant la route par laquelle ils s’étaient approchés d’Hashtadsar, craignant chaque piste de montagne et chaque défilé. Au lieu de cela il prit la route précédente qu’il emprunta la première fois lorsqu’il vint à Hashtadsar, du fait qu’il n’y avait aucun défilé le long de cette route excepté à un endroit. Il voyagea avec les troupes terrifiées et envoya des éclaireurs en avant. Le dernier d’entre eux jeta sa lance et ses armes le long de la route (pour voyager plus rapidement).

Bougha, al-Fadl Ibn Kawous et un groupe de commandants voyagèrent dans l’arrière-garde. Les éclaireurs de Babak apparurent à chaque fois que les troupes de Bougha descendait une pente de montagne. Les éclaireurs de Babak montèrent la montagne pour les espionner. Quelquefois les éclaireurs apparaissaient et d’autrefois il restait hors de leur vue. Des éclaireurs, environ dix cavaliers, suivirent les pistes de l’armée jusqu’à la période entre les prières de midi et d’après-midi (le début de l’après-midi). Bougha descendit pour faire les ablutions mineures et exécuter la prière. Les éclaireurs de Babak les approchèrent  et sortir de leur champ de vision. Bougha effectua la prière hors de leur vue quand il se leva, ils s’arrêtèrent. Bougha craignit pour son armée, que les éclaireurs les attaques d’un côté et que les forces de Babak les encerclent dans les montagnes et les défilés. Il demanda conseil à ceux qui étaient avec lui et dit : « Je ne suis pas sûr que ces gens n’ont pas planifié une attaque de diversion qui nous empêchera de continuer le long de la route et qu’ensuite ils envoient en avant leurs forces pour saisir les défilés contre nos propres troupes ».

Mais al-Fadl Ibn Kawous lui dit : « Ces gens ne luttent pas de jour, mais seulement la nuit et si nous devons les craindre, c’est seulement pendant la nuit. Envoie un message à Daoud Siyyah en lui disant d’accélérer sa marche et de ne pas s’arrêter, même s’il fait nuit avant qu’il traverse le défilé. Pendant ce temps nous attendrons ici, car aussi longtemps que les forces ennemies nous voient, ils n’iront pas en avant. De cette manière, nous les retarderons et les éloignerons dans une certaine mesure jusqu’à l’arrivée de l’obscurité. Alors, quand il fera nuit, ils ne connaîtront pas notre position exacte et nos troupes avanceront et traverseront un par un. Si le défilé est fermé contre nous, nous atteindrons la sécurité au moyen de la route d’Hashtadsar ou d’une autre route ».

Quelqu’un d’autre, cependant, conseilla Bougha et pointa le fait suivant : « L’armée s’est divisée en groupes séparés et le groupe de front ne sera pas capable de se rejoindre le groupe arrière. De plus, les troupes ont jeté leurs armes, bien que l’argent et des armes restent encore sur les mulets. Il n’y a personne avec cet argent et ces armes et nous ne sommes pas sûrs que quelqu’un se précipite pour saisir de l’argent et les captifs », il voulait dire Ibn Jawidan, qui était un prisonnier chez eux et un moyen d’obtenir une rançon du secrétaire de ‘AbderRahmane Ibn Habib qui avait été capturé par Babak.

Quand le facteur supplémentaire de l’argent, des armes furent mentionnés à Bougha, il décida d’établir le camp avec ses troupes et il envoya un message à Daoud Siyyah disant : « Dès que tu trouves un emplacement sécurisé dans la montagne, établi ton camp ». Daoud se détourna et remonta le côté d’une montagne, mais il ne trouva aucun endroit où les troupes pourraient se reposer à cause des pentes excessivement raides. Néanmoins Daoud établi son camp et monta une tente pour Bougha sur le flanc de la montagne dans une poche ressemblant à un espace clôturé sans accès. Bougha arriva et ordonna aux troupes d’établir le camp, car ils étaient las, fatigués et leurs provisions épuisées. Ils passèrent la nuit déployés et prêt pour l’action et gardèrent en direction de la pente; mais l’ennemi tomba sur eux d’une autre direction et grimpèrent le flanc de la montagne jusqu’à ce qu’ils atteignent la tente de Bougha. Ils encerclèrent et attaquèrent la tente et l’armée la nuit. En fait, Bougha s’était enfuit du camp à pied et en toute tranquillité. Al-Fadl Ibn Kawous fut blessé ; Janah as-Soukkari, Ibn Jawsham et un des deux frères de la famille d’al-Fadl Ibn Sahl furent tués. Bougha avait fui le camp à pied, mais il trouva une monture et passa par Ibn al-Ba’ith qu’il fit monter avec lui à Hashtadsar jusqu’à ce qu’il le ramène au camp de Muhammad Ibn al-Houmayd qu’ils atteignirent au milieu de la nuit. Les khourramiyah saisirent l’argent, le campement, les armes et sauvèrent le prisonnier Ibn Jawidan mais ils ne poursuivirent pas les troupes musulmanes et ceux-ci avancèrent déroutés et dans la confusion, avant qu’ils ne rejoignent Bougha, qui était déjà dans le camp de la Tranchée de Muhammad Ibn Houmayd.

Bougha resta dans la Tranchée de Muhammad Ibn Houmayd quinze jours. Alors il reçut une lettre d’al-Afshin lui ordonnant de revenir à al-Maraghah et de lui renvoyer les renforts qu’il avait envoyés pour le renforcer. Bougha procéda à al-Maraghah, pendant qu’al-Fadl Ibn Kawous, avec toutes les troupes d’al-Afshin qui étaient parties avec lui, rejoignirent al-Afshin. Ce dernier leur alloua pour se reposer, le quart d’hiver de cette année jusqu’au printemps de l’année suivante ou l’un des commandants de Babak du nom de Tarkhan fut tué.

 

 

La mort de Tarkhan, commandant de Babak

 

Il a été rapporté que ce Tarkhan occupait une position proéminente dans l’entourage de Babak, et qu’il était un de ses commandants.

Quand l’hiver de cette année arriva, il demanda la permission à Babak pour passer l’hiver dans un village des environs d’al-Maraghah. Al-Afshin, pendant ce temps, l’attendait et espérait le capturer à cause de sa haute position chez Babak. Babak lui donna en conséquence la permission et Tarkhan partit dans son village près d’Hashtadsar pour passer l’hiver. Al-Afshin écrivit à Turk, le Mawlah d’Ishaq Ibn Ibrahim Ibn Mous’ab, qui était alors à al-Maraghah, et lui ordonna de faire un raid nocturne sur ce village, qu’il lui décrivit, et soit de tuer Tarkhan ou bien de le capturer et de le lui envoyer prisonnier. Turk mena donc un raid nocturne contre Tarkhan. Il alla chez lui au milieu de la nuit, le tua et envoya sa tête à al-Afshin.

 

 

En l’an 222 de l’Hégire (836), al-Mou’tassim envoya en renfort Ja’far Ibn Dinar al-Khayyat à al-Afshin et le fit suivre par Aytakh avec la somme de 30 millions de dirhams comme solde des troupes et pour l’entretien de l’armée.

 

Il y eut cette même année une bataille entre les forces d’al-Afshin et un des commandants de Babak appelé Adin.

 

La bataille entre al-Afshin et Adin

 

Lorsque l’hiver de l’année 221 (835) prit fin et que le printemps de l’année 222 de l’Hégire (836) arriva, al-Mou’tassim envoya des renforts et de l’argent à al-Afshin alors qu’il se trouvait à Barzand. Aytakh lui remit l’argent et les troupes avant de revenir chez lui. Quant à Ja’far al-Khayyat, il resta avec al-Afshin durant quelque temps. Alors quand la saison devint favorable pour le combat, al-Afshin marcha vers Kalan Roudh, où il creusa une tranchée défensive qu’il fortifia d’un rempart. Puis, il écrivit à Abou Sa’id, qui voyagea de Barzand jusqu’à une place faisant face dans la campagne de Kalan Roudh, séparés les uns des autres d’à peine quelques kilomètres. Abou Sa’id établi son camp dans une tranchée défensive et resta à Kalan Roudh durant cinq jours quand quelqu’un vint le trouver et l’informa qu’un commandant de Babak du nom d’Adin avait établi son camp en face d’al-Afshin et avait envoyé sa famille dans une montagne surplombant Roudh ar-Roudh, en disant : « Je ne me retrancherai pas dans la position défensive des Juifs, (sous-entendu les Musulmans) et je ne placerai pas ma famille dans une position fortifiée ! » Parce que Babak lui avait dit : « Place ta famille dans une position fortifiée ! » Mais Adin lui répondit : « Me protégez des Juifs ? Par Dieu, je ne placerai jamais ma famille dans aucune position fortifiée ! » Alors, il les déplaça dans cette montagne. 

Al-Afshin envoya Zafar Ibn al-‘Ala' as-Sa’di et al-Houssayn Ibn Khalid al-Mada'ini, deux des commandants d’Abou Sa’id, avec une force de cavaliers et des gardes montagnards. Ils voyagèrent toute la nuit de Kalan Roudh jusqu’à ce qu’ils descendirent dans un défilé si étroit que même un simple cavalier ne pouvait le traverser qu’avec de grands efforts. La plupart des troupes conduisirent leur monture et se glissèrent dans le passage les uns après les autres car al-Afshin leur avait ordonné de voyager à Roudh ar-Roudh avant le lever de l’aube. Il ordonna aussi aux gardes montagnards de traverser à pied car il était impossible pour des cavaliers de manœuvrer dans les montagnes et d’y grimper. Ils atteignirent Roudh Ar-Roudh avant l’aube. À ce point, Zafar Ibn al-‘Ala' ordonna aux cavaliers qui s’étaient approchés de descendre, d’enlever leurs vêtements et de marcher. Tous les cavaliers descendirent de leur monture et traversèrent le fleuve à pied, accompagné par les gardes montagnards et ensemble ils grimpèrent dans la montagne ou ils capturèrent la famille d’Adin et retraversèrent le fleuve.

Plus tard, Adin fut informé de la capture de sa famille et al-Afshin fut effrayé de peur que son détachement ne puisse emprunter de nouveau le défilé et qu’il soit fermé devant eux. Il ordonna alors aux gardes montagnards de prendre des étendards et aller se placer aux cimes des montagnes, dans des endroits où ils pourraient apercevoir Zafar Ibn al-‘Ala' et ses forces. Et leur ordonna que s’il voyait n’importe quel mouvement suspect d’agiter leur bannière pour le signaler. Suite à cela, les gardes montagnards passèrent la nuit à la cime des montagnes.

Quand Ibn al-‘Ala' et al-Houssayn Ibn Khalid revinrent avec les membres de la famille d’Adin qu’ils avaient capturés et avant qu’ils atteignent le défilé, Adin envoya des fantassins pour garder le défilé et quand le détachement d’al-Afshin entra dans le défilé, ils les empêchèrent d’avancer. Pratiquement tous les hommes des deux côtés furent massacrés et certaines femmes furent secourues. Les gardes montagnards qu’al-Afshin avait déployés les virent et Adin envoya deux corps de troupes, l’un pour combattre et l’autre pour tenir le défilé. Lorsque les gardes montagnards agitèrent leur drapeau en signal, al-Afshin envoya aussitôt Mouzaffar Ibn Khaydar avec un escadron qui partir au galop. Il envoya aussi Abou Sa’id à sa suite, suivit par le Boukhara-Khoudah[8] et tous se rencontrèrent. Quand les fantassins d’Adin qui étaient au-dessus du défilé les virent, ils descendirent et rejoignirent leurs camarades. Zafar Ibn Al ‘Ala' et al-Houssayn Ibn Khalid, ainsi que les troupes qui étaient avec eux, s’enfuirent et aucun d’entre eux ne fut tué excepté ceux qui étaient tombés dans le premier engagement. Tous revinrent saufs au camp d’al-Afshin accompagnés par certains membres de la famille d’Adin qu’ils avaient capturés.

 

Cette même année, la capitale de Babak, al-Badh, fut capturé. Les musulmans y entrèrent, la traitèrent comme un pillage légal et la saccagèrent le vendredi 20 de mois de Ramadan.



[1] Les Mameloukes étaient des esclaves convertis à l’Islam qui allaient devenir une élite militaire.

[2] Pluriel de Mamelouke qui veut dire possédé dans le sens d’appartenance.

[3] Aire de prière en plein air.

[4] Bien évidemment l’Azerbaïdjan de l’époque ne correspond pas à celui de nos jours.

[5] La forteresse du fleuve.

[6] Unité de distance au Moyen-Orient. Au 19e siècle, dans le golfe persique le farsakh était d’environ 6,23 kilomètres. Quant au farsakh arabe, il est de 5,76 kilomètres.

[7] La nouvelle année musulmane commence au mois de Mouharram.

[8] Membre de la famille régnante de Boukhara qui devint l’un des principaux commandants d’al-Afshin. Les Turcs allaient devenir la force armée des Abbassides.