Muhammad al-Amine, le sixième calife abbasside

 

Al-Amine Muhammad, Abou ‘AbdAllah, le fils d’ar-Rashid devint l’héritier de son père et calife après lui. Il était un des plus parfaits jeunes gens en apparence, équitable, grand, généreux, possédant une grande force, vigoureux et de célèbre bravoure. On a rapporté qu’il tua une fois un lion avec ses propres mains. Il était éloquent, poli dans les discours, bien instruit et accompli, mais défectueux dans le jugement, prodige, faible d’esprit, apathique et impropre au gouvernement.

Aussitôt qu’il devint calife, le jour suivant, il ordonna la construction, sur une parcelle de terre près du palais d’al-Mansour, un terrain pour jouer au ballon.

 

 

Durant l’année 194 de l’Hégire (809), il retira son frère al-Qassim du gouvernement duquel ar-Rashid l’avait nommé et alors se produisit une séparation entre lui et son frère al-Ma'moun.

On a rapporté que Fadl Ibn Rabi’, était conscient que lorsque le califat passa à al-Ma'moun, il n’aurait aucune clémence à son égard, incita et poussa al-Amine de le mettre de côté et de donner la succession à son fils Moussa. Quand la disgrâce de son frère al-Qa'im atteignit al-Ma'moun, il coupa toute les relations avec al-Amine et omit son nom sur les uniformes et la monnaie. Peu de temps après qu’al-Amine l’informa de son désir de donner la succession au califat à Moussa avant lui et qu’il l’avait surnommé Natiq bil-Haqq. Mais al-Ma'moun le rejeta et refusa. Le messager d’al-Amine joignit le parti d’al-Ma'moun et lui porta allégeance en tant que calife en secret. Ensuite, il prit l’habitude de le garder informé et lui envoya des conseillers de l’Iraq.

Et quand il retourna et informa ’al-Amine du refus d’al-Ma'moun, il raya son nom de la succession et fit ramener l’acte qu’ar-Rashid avait écrit et déposé dans la Ka’bah. Après lui avoir apporté, il le déchira en morceaux et la séparation entre les frères s’accrut ainsi. Ses conseillers insistèrent à son propos et Khouzaymah Ibn Khazim dit « O Prince des croyants, celui qui t’a menti ne t’a donné aucun bon conseil et celui qui te dit la vérité ne te trahira pas. N’encourage pas les officiers à demander la destitution, car ils te déposeront un jour et ne les incitent pas à violer un pacte, car ils violeront leur allégeance envers toi. Car en vérité celui qui trompe sera trompé et celui qui fait un faux serment sera lui-même trahi ». Mais, il n’écouta pas les conseils et entreprit de concilier les officiers avec des cadeaux et eut l’engagement de succession prise pour son fils Moussa qui était à cette époque encore un bébé.

 

Quand al-Ma'moun fut assuré qu’il avait été mis de côté, il prit le titre de Prince des croyants et ainsi il fut adressé. Al-Amine nomma ‘Ali Ibn ‘Issa Ibn Mahan aux régions montagneuses de Hamadan, Nahawand, Qoum et Ispahan en l’an 195 de l’Hégire (810). ‘Ali Ibn ‘Issa arriva alors à Baghdad au milieu du mois de Joumadah Thani, à la tête d’une armée forte de quarante-mille combattants, dont il n’a pas été vu de précédent, pour engager al-Ma'moun. Il avait pris avec lui une chaîne en argent, dans l’espoir qu’il pourrait l’enchainer avec. Al-Ma'moun lui envoya Tahir Ibn al-Houssayn à la tête de moins de quatre-mille hommes et il fut victorieux. ‘Ali fut tué et son armée mise en déroute. Sa tête fut prise à al-Ma'moun et envoyée au Khorasan et al-Ma'moun fut salué comme le calife. Les nouvelles arrivèrent à al-Amine alors qu’il était en train de pêcher et il dit au messager : « Puisses-tu être confondu ! Laisse-moi, car Kawthar a pris deux poissons et moi encore aucun ».

 

‘AbdAllah Ibn Salih al-Jarmi a rapporté que quand ‘Ali fut tué, les gens à Baghdad se levèrent en grand tumulte et al-Amine se repentit alors d’avoir écarté son frère. Les nobles aussi, cherchèrent à obtenir ce qu’ils pouvaient de lui et expédièrent leurs troupes pour demander leur paie à al-Amine et la dispute continua entre lui et son frère. Les affaires d’al-Amine empirèrent chaque jours à cause de son abandon à la frivolité et aux folies, pendant que ceux d’al-Ma'moun s’amélioraient jusqu’à ce que les habitants des Villes Sacrées et la plus grande partie de l’Iraq lui jurèrent fidélité.

A la fin, les conditions d’al-Amine devinrent désespérées. La discipline de l’armée fut détruite, ses trésors dissipés et la condition des gens s’aggrava. Pendant ce temps la violence, la dévastation et la ruine augmentèrent par la poursuite des hostilités et les machines de guerre et de naphte liquide entrèrent en action. Bientôt, les splendeurs de Baghdad furent effacées et les chants funèbres psalmodiés.

Le siège de Baghdad se poursuivit durant quinze mois et un grand nombre des Abbassides et des ministres d’état rejoignirent les forces d’al-Ma'moun et personne ne resta avec al-Amine pour le défendre excepté, la foule et les vagabonds de Baghdad et cela dura jusqu’au début de l’année 198 de l’Hégire (813). Alors Tahir Ibn al-Houssayn entra dans Baghdad à la pointe de l’épée et al-Amine s’enfuit avec sa mère et sa famille du palais à la ville d’al-Mansour. Toutes ses troupes et ses domestiques se dispersèrent et la nourriture et l’eau devinrent des denrées rares pour eux.

Une nuit ou deux après cela, il fut tué. Il fut d’abord capturé et emprisonné dans une maison et un groupe de Perses tomba sur lui, le frappèrent avec leurs épées et lui tranchèrent la tête qu’ils amenèrent à Tahir, qui l’a plaça sur le mur d’un jardin et il fut proclamé par le crieur : « C’est la tête du déposé Muhammad » et son corps fut trainé par une corde.

Tahir envoya alors la tête, la cape, le sceptre et le tapis de prière qui avait des branches de palmiers alignées tissées, à al-Ma'moun. L’assassinat de son frère pesa fortement sur al-Ma'moun car il aurait préféré que l’on le lui ramène vivant afin qu’il puisse considérer son intention le concernant. Il détesta donc Tahir et le négligea avec total oubli jusqu’à ce qu’il meurt en exil éloigné. Alors les mots d’al-Amine furent vérifiés, car il avait écrit une lettre avec sa propre main à Tahir Ibn al-Houssayn quand il avait été invité à lui faire face sur le champ de bataille dans laquelle il disait : « O Tahir, aucun défenseur de nos droits ne s’est jamais élevé pour nous, depuis que nous avons accédé au pouvoir, et notre récompense est l’épée. Par conséquent, regarde par toi-même et ne te mêle pas. Considère Abou Mouslim et ceux comme lui, qui furent au service des Abbassides et leur fin fut la mort de leurs mains ».

 

Ibn Jarir a rapporté que lorsqu’al-Amine prit en charge le gouvernement, il acheta des énuques à des prix excessifs, les admit dans son intimité et abandonna la société de ses femmes et de ses filles d’esclaves.

 

Un autre a rapporté que lorsqu’il devint calife, il envoya des gens en quête de bouffons et leur fournit un salaire. Ils lui ramenèrent un certain nombre de bêtes sauvages, des animaux de proie et des oiseaux qui le gardèrent à l’écart de sa famille et il traita ses nobles avec mépris. Il gaspilla ce qui était dans les trésoreries publiques, des joyaux et des objets de prix dans la profusion. Il construisit de nombreux palais dans des endroits différents à fin d’amusement et lors d’une occasion, il donna un bateau plein d’or. Il construisit aussi cinq barques sous la forme d’un lion, d’un éléphant, d’un aigle, d’un serpent et d’un cheval et dépensa de grandes sommes pour leurs constructions.

 

Ahmad Ibn Hanbal a rapporté : « En vérité, j’espère que le Seigneur sera miséricordieux envers al-Amine pour la répudiation d’Isma’il Ibn ‘Oulayyah, qui lui fut ramené et à qui le calife dit «  O fils d’une adultère, ce n’est pas toi qui a prétendu que le Qur’an est créé ? »

 

Al-Mas’oudi a rapporté : « Personne jusqu’à mon époque n’a gouverné le califat étant un Hashimite et le fils d’une femme Hashimite, excepté ‘Ali Ibn Abi Talib, son fils al-Hassan (qu’Allah soit satisfait d’eux) et al-Amine dont la mère était Zoubaydah la fille de Ja’far Ibn Abi Ja’far al-Mansour. Son nom était Amat al-’Aziz et Zoubaydah était son surnom ».

 

Isbaq de Mossoul rapporta qu’il y avait des qualités réunies chez al-Amine et trouvées dans personne d’autre : « Il avait le plus gracieux des visages et était le plus généreux, le plus noble des califes par le côté de son père et de sa mère, qualifié dans les lettres, versées dans l’art de poésie, mais asservit par la sensualité et la frivolité et en dépit de son extravagance en argent et un radin dans sa table ».

 

Abou al-Hassan al-Ahmar a rapporté : « J’avais souvent l’habitude d’oublier un vers par lequel un point de grammaire pourrait être illustré et al-Amine le citait pour moi et je n’ai jamais rencontré parmi les fils de monarque quiconque plus à anticiper qu’al-Amine ».

Son assassinat eut lieu les 24 ou 25 du mois de Mouharram de l’année 198, (813) alors qu’il était âgé de vingt-sept ans ».

 

‘Ali Ibn Muhammad an-Nawfali et d’autres ont rapporté que ni as-Safah, ni al-Mansour, ni al-Mahdi, ni al-Hadi, ni ar-Rashid ne furent mentionnés sur les chaires par leurs noms de famille, ni dans leurs correspondances jusqu’au règne d’al-Amine. Il fut alors prié pour al-Amine sur les chaires et la correspondance lui fut adressée sous ce surnom. L’entête des lettres mentionnait : « Du servant d’Allah,  Muhammad al-Amine, le Prince des croyants ». 

 

At-Tha’labi a rapporté dans « al-Lata'if al-Ma’arif » qu’Abou al-‘Aynah Abou ‘AbdAllah Muhammad Ibn al-Qassim, le Mawlah du calife al-Mansour, avait l’habitude de dire : « Si Zoubaydah libérait ses nattes tressées, elles ne s’ouvriraient sur rien excepté des califes ou des héritiers au califat, car al-Mansour fut son grand-père, as-Safah le frère de son grand-père, al-Mahdi son oncle paternel, ar-Rashid son mari, al-Amine son fils, al-Ma'moun et al-Mou’tassim les fils de son mari, al-Wathiq et al-Moutawakkil les petit-fils de son mari et quant à ses héritiers apparents, ils sont nombreux. Comme elle, de la Maison d’Oumayyah, fut ‘Atikah, la fille de Yazid Ibn Mou’awiyyah. Yazid était son père, Mou’awiyyah son grand-père, Mou’awiyyah Ibn Yazid son frère, Marwan Ibn al-Hakam son beau-père, ‘Abdel Malik son mari, Yazid son fils, al-Walid le fils de son fils al-Walid, Hisham et Souleyman les fils de son mari et Yazid et Ibrahim les deux fils d’al-Walid, les petits-fils de son mari ».

 

Le calife Amine ne pouvait en aucun cas être d’une quelconque utilité pour les Musulmans et encore moins capable de remplir les fonctions du pouvoir du fait qu’il passait beaucoup de son temps dans les inutilités (lahw) et les beuveries (majalis shrab). Les conseils de Khouzaymah Ibn Khazim s’avérèrent justes et allaient devenir une habitude. Al-Amine fut donc le premier calife abbasside à être tué et nous assisterons par la suite à de nombreux événements similaires dans l’histoire de la dynastie des Abbassides.

 


‘AbdAllah al-Ma'moun, le septième calife abbasside

  

Le calife al-Ma’moun prit la succession après l’assassinat de son frère au moins de Mouharram 198 de l’Hégire (813). Durant son règne, Muhammad Ibn Ibrahim Ibn Isma’il Ibn Ibrahim Ibn Hassan Ibn Hassan Ibn ‘Ali Ibn Abi Talib (qu’Allah soit satisfait d’eux) se révolta contre le calife. Le père de Muhammad est « Tabataba » et c’est ainsi qu’il est connu dans le monde islamique. Cette rébellion finit par la mort de Muhammad Ibn Ibrahim qui fut empoisonné en l’an 199 de l’Hégire (814) suivie par la défaite de ses partisans en l’an 200 de l’Hégire (815).

Zayd an-Nar qui est le surnom de Zayd Ibn Moussa al-Kazim Ibn Ja’far Siddiq Ibn Muhammad al-Baqir Ibn ‘Ali Zayn al-‘Abidin Ibn Houssayn (qu’Allah soit satisfait de lui) se révolta à Basra. Il fut surnommé, Zayd an-Nar (Zayd le feu) par ce qu’il brûla beaucoup de maisons à Basra et si des prisonniers abbassides tombaient entre ses mains, il ordonnait de les brûler. Après avoir réussi à venir à bout de la rébellion du fils de Tabataba à Koufa, l’armée d’al-Ma’moun marcha sur Basra et Zayd an-Nar se rendit sous la condition d’une garantie de sécurité cette même année. Le nombre des Abbassides qui avait un poste de commandement à cette époque s’élevait à trente-trois mille.

Après cela, les forces d’al-Ma’moun se dirigèrent vers La Mecque pour combattre un membre misérable des Banou Hashim du nom d’Ibrahim Ibn Moussa al-Kazim Ibn Ja’far et lorsqu’il fut informé de l’arrivée imminente de l’armée des Abbassides, il s’enfuit au Yémen dont il prit le contrôle. Il commit là-bas d’horribles crimes, viola des Musulmanes et prit les biens des Musulmans. Il fut surnommé après cela « le boucher » (al-jazzar).

 

Au mois de Mouharram de cette même année, Houssayn Ibn Hassan Ibn ‘Ali Ibn ‘Ali Zayn al-‘Abidin surnommé al-Aftas, entra à la Maison Sacrée d’Allah (bayt al-haram) à la Mecque, et les Musulmans souffrirent énormément de ses exactions. Les gens qui l’accompagnaient terrifièrent les enfants de La Mecque et ils volèrent tout l’or qui servait de parure à la Ka’bah. Al-Aftas vida aussi les caisses d’argent du trésor de la Ka’bah qu’il partagea à ses partisans. Puis il alla voir Muhammad Ibn Ja’far as-Siddiq, qui était un habitant de La Mecque, et le força à lui porter allégeance ainsi qu’à son fils ‘Ali Ibn Muhammad  Ibn Ja’far ainsi que d’autres personnes. Alors il se fit surnommé commandant des croyants (amir al-mou’minin) et bien qu’il n’ait ni force et ni pouvoir.

Ceci fut la conséquence de la volonté du calife Haroun ar-Rashid de donner la succession à trois de ses fils les uns après les autres. Et cela commença lorsqu’al-Fadl Ibn Rabi’ qui voyait les affaires du point de vue de ses intérêts personnels suggéra au calife al-Amine de désister al-Ma’moun de la succession. Et suite à cela, la sédition s’infiltra dans la communauté musulmane. Le calife fut tué ainsi que des milliers de Musulmans. Le palais du gouvernement fut bombardé avec des catapultes et brûlé lorsque Tahir Ibn Houssayn donna l’assaut sur la ville. Et de ce fait, et ce qui est bien pire, la population se retourna contre le souverain. Le fils de Tabataba se rebella à Koufa, Zayd an-Nar à Basra, al-Aftas à La Mecque, al-Jazzar à San’a et il fut porté allégeance à Muhammad Ibn Ja’far as-Siddiq.

Et bien que les Abbassides fussent d’une extrême dureté, il apparaît maintenant qu’ils ne portaient plus d’attention à ceux qui se rebellèrent contre eux. Il s’ensuivit de nouveau une grande sédition avec tout ce qu’elle entraîna comme horreur dans son sillage. Et du fait, que le calife ne fit rien pour l’arrêter, elle engendra sédition sur sédition comme un feu ravageur. Et si regardons ce que fit al-Houssayn al-Aftas et le fils de son oncle, il apparaît qu’ils étaient des gens corrompus et dépravés ce qui poussa les Musulmans à s’éloigner d’eux d’autant plus que les Abbassides lui accordèrent la sécurité après ses dépravations.

À cause de cette sédition, il n’y eût aucun émir des Musulmans pour conduire le pèlerinage en l’an 199 de l’Hégire (814), après que le gouverneur abbasside de La Mecque, Daoud Ibn ‘Issa Ibn Moussa Ibn ‘Ali Ibn ‘AbdAllah Ibn ‘Abbas, quitta la ville en disant : « Je n’autorise pas le combat dans La Mecque ». Il prit ses affaires et ses biens et quitta La Mecque pour l’Iraq. Ce fut un simple musulman qui conduisit la prière des gens le jour de ‘Arafat sans prêche (khoutbah) et les musulmans quittèrent ‘Arafat pour Mouzdalifah sans qu’il y ait un Imam pour les Musulmans. Un autre simple musulman conduisit la prière de Maghrib et de ‘Isha des pèlerins.

 

Ar-Rashid décéda au mois de Joumadah II de l’année 193 de l’Hégire (809) et la sédition s’enflamma parmi ses enfants. La sécurité et la stabilité de l’état, ainsi que le commun des Musulmans, souffrirent de ces événements qui conduisirent à l’assassinat d’al-Amine au mois de Mouharram de l’année 198 de l’Hégire (813). Al-Ma'moun devint alors calife mais il ne put entrer à Baghdad qu’au mois de Safar 204 de l’Hégire (819), soit six ans après.

 

Le grand Imam l’historien Muhammad Ibn Jarir at-Tabari, puisse Allah Exalté lui faire miséricorde, né en l’an 224 de l’Hégire (838) est décédé en 310 (922) fut un témoin vivant de ces événements qu’il rapporta de gens vivants à son époque et qui connurent ces événements. L’Imam est donc le meilleur historien qui écrivit sur cette époque et il a dit dans son livre : « En l’an 201 de l’Hégire (816), les soldats et les bandits (ash-shourar ou al-baltajiyah de nos jour) commirent les pires turpitudes et semèrent une grande corruption sur la terre. Ils forcèrent l’inviolabilité des gens et de leurs biens, pratiquèrent ouvertement les interdits et firent couler le sang des innocents. Ils se sentirent tellement en sécurité qu’ils firent payer le tribut aux voyageurs pour garantir leur sécurité afin de ne pas être dépouillé de leurs biens y compris les gens voyageant sur les fleuves dont il arrêtait la circulation des navires. Les agriculteurs et les fermiers furent aussi contraints à payer le tribut pour pouvoir exercer librement leurs fonctions sans quoi leurs cultures étaient détruites et leur bétail confisqué. Cela se propagea jusqu’à la péninsule arabique. La police était trop faible pour faire face à ces bandits ».

 

Ces événements et ses tribulations eurent lieu à Baghdad à cause de la faiblesse du calife qui pendant ce temps était au Khorasan et l’appel à l’aide des Musulmans durera bien longtemps sans que personne ne vienne les secourir. Ils décidèrent donc de venir eux-mêmes à bout de cette corruption et formèrent un groupe de volontaires des habitants de Baghdad pour faire face aux bandits. Ce groupe fut appelé « al-Moutawi’ah ». Ibn Mandour dit dans « al-Lissan al-‘Arabi » : al-Moutawi’oun sont les volontaires pour le Jihad.

Et c’est effectivement d’un Jihad qu’il s’agissait puisque ces gens luttaient pour défendre leur religion, leur terre, leurs familles, leur honneur et leurs biens. Doit-on considérer cela comme une rébellion contre le calife officiel al-Ma'moun qui se trouvait à Merv au Khorasan et qui n’était pas très éloigné de Baghdad à l’opposé de Tanger ? L’immunité des bandits était parvenue à un tel point qu’ils prenaient les montures des Musulmans et leur bétail comme bon leur semblait et les vendaient aux Musulmans dans leur propre marché !

Les Musulmans approuvèrent le bien et désapprouvèrent le mal eux-mêmes sans la permission du souverain officiel qui était occupé pendant ce temps à lire les livres de philosophie qui corrompirent son dogme (‘aqidah).

 

 

En l’an 201 de l’Hégire (816), ‘AbdAllah Ibn Khouradadbih, le gouverneur du Tabaristan, conquit Lariz et Shirriz dans Daylam et les rajouta aux terres d’Islam puis les régions montagneuses du Tabaristan et en expulsa Shahriyar Ibn Sharwin.

 

Cette année, il envoya Mazyar Ibn Qarin à al-Ma'moun et fit prisonnier Abou Layla, le roi de Daylam, sans conclure un accord de paix avec lui.

 

Toujours cette année, Babak al-Khourrami prétendit que l’esprit de Jawidan s’était incarné en lui et avec les jawidaniyah, les partisans de Jawidan Ibn Sahl, le souverain de Badh, ils semèrent la corruption et le mal sur terre.

 

Cette année, les habitants du Khorasan, d’ar-Rayy et d’Ispahan furent affligés par la famine. Les prix de nourritures montèrent si haut que beaucoup de gens moururent de faim.

 

Cette même année, le calife al-Ma'moun désigna ‘Ali Ibn Moussa al-Kazim à la succession après lui et le surnomma ar-Radi ou Rida de la famille du Prophète Muhammad (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) et qui est ‘Ali ar-Rida. Puis, al-Ma'moun prit la couleur verte comme signe de reconnaissance personnelle. Il s’habilla dorénavant de vert et fit ses drapeaux et ses étendards de la même couleur au contraire des Abbassides dont la couleur était le noir comme les Omeyyades prirent la couleur blanche.

Les Musulmans appliquèrent la loi d’Allah dans la capitale du califat sans ordre du calife.

 

Laissez-moi faire un bond de huit siècles dans l’histoire en l’an 982 de l’Hégire (1574). Le souverain des Musulmans, le Sultan ottoman (‘uthmani), le calife des Musulmans, Mourad III pris la succession cette année et ordonna l’interdiction de consommation du vin parce que sous le règne de son père Salim II, l’état était parvenu à un haut degré de dépravations.

Est-ce que l’interdiction du vin requiert une autorisation du souverain des musulmans ?

Ceci relève de la Shari’ah et c’est un commandement direct d’Allah Exalté qui interdit la consommation du vin (de tout ce qui est enivre de quelque manière que ce soit). Donc le calife ou le gouvernement n’a absolument rien à voir dans cette affaire et n’a donc pas besoin d’être consulté pour requérir une interdiction. Le licite et l’illicite concerne directement le Musulman sans intermédiaire.

Que firent donc les Inkishariyah[1] ? Ils mirent tellement la pression et menacèrent le faible Sultan qu’il dut retirer son édit. Cela conduisit les janissaires à la rebellions et la sédition et la corruption ébranlèrent la dynastie des Ottomans.

De même, sous le règne du Sultan ottoman, le calife des Musulmans, Ahmad al-Awwal (I) en l’an 1123 de l’Hégire (1711) et sous la menace de l’armée, le Sheikh de l’Islam, le Mufti ad-Dawlah ‘Uthmaniyah, dut retirer son édit juridique (fatwa) sur l’interdiction de fumer le tabac introduit par les hollandais dans l’état ottoman.

En l’an 1125 de l’Hégire (1713), le Sultan ottoman, le calife des Musulmans, Ahmad III (thalith) prit la succession sous la condition de pardonner aux janissaires assassins du Mufti ad-Dawlah, le Sheikh de l’Islam. Pourquoi l’ont-ils tué ? Parce qu’il désapprouvait les turpitudes des janissaires.

Et cette même année, après la mort du Sheikh de l’Islam, naquit le Sheikh réformateur de l’Islam Muhammad Ibn ‘Abdel Wahhab, puisse Allah Exalté lui faire miséricorde.

En période de tels troubles, il arrive des gens qui se permettent de dire que le Sheikh de l’Islam Muhammad Ibn ‘Abdel Wahhab se rebella contre le Sultan ottoman qui fut incapable d’interdire le vin, qui fut incapable aussi de défendre les innocents contre la terreur des janissaires et qui fut incapable de protéger le Mufti ad-Dawlah d’être assassiné tandis que le tabac à cette époque, se répandait rapidement sans ne rien pouvoir faire ? Quel pouvoir avait donc cet homme s’il était incapable de diriger un état ? Parce que ces gens sont questionnés sur les raisons qui poussèrent, soi-disant, le Sheikh de l’Islam Muhammad Ibn ‘Abdel Wahhab à se rebeller contre l’état ottoman, ils disent : « Par ses méthodes réformatrices ». Il considère l’appel à la purification islamique comme une rébellion contre le souverain ! Le Sheikh de l’Islam Muhammad Ibn ‘Abdel Wahhab était à ‘Inah dans le Nejd tandis que le Sultan ottoman était à Islamboul[2].

Nous devons nous servir de l’histoire pour en tirer des bénéfices et des leçons. Nous reviendrons amplement sur ces détails dans la suite de nos « Abrégés ».

 

 

Lorsqu’al-Ma'moun désigna ‘Ali ar-Rida pour être son successeur et qu’il prit la couleur  verte comme symbole, Baghdad où habitaient les grands Hashimi et les chefs des Abbassides se retournèrent contre lui et portèrent allégeance à Ibrahim Ibn al-Mahdi pour être leur calife et le surnommèrent al-Moubarak.

Certes, le souverain peut patienter et rester ferme devant de nombreuses choses mais pas contre celui qui lui dispute le pouvoir et des gens qui étaient avec lui au Khorasan partirent l’informer de l’urgence de la situation et que s’il ne faisait rien dans l’immédiat il perdrait le califat. Et le calife al-Ma'moun revint à la raison après une longue période d’absence et en l’an 202 de l’Hégire (817), il marcha aussitôt vers Baghdad. Ses hommes tuèrent Fadl Ibn Sahl et envoyèrent sa tête à Hassan Ibn Sahl qui se trouvait en Iraq. Certains ont dit que le calife al-Ma'moun tua Fadl Ibn Sahl par ce qu’il avait des partisans au Khorasan. Il avait une haute position chez al-Ma'moun et était le premier homme de l’état après lui. Il était tellement puissant qu’il ordonna de tuer le grand général musulman Hartamah Ibn A’yan alors qu’il était en route vers al-Ma'moun pour l’informer des derniers événements en Iraq.

 

Cette même année, le calife al-Ma'moun maria Muhammad Ibn ‘Ali ar-Rida à sa fille Oumm Habibah.

Quant à al-Ma'moun, il se maria à Bourane Bint Hassan Ibn Sahl et Hassan Ibn Sahl est Ibn Sahl Ibn ‘AbdAllah as-Sarkhrassi al-Khorassani qui était un des grands mages (majous) qui se convertit à l’Islam ainsi que ses enfants sous le règne d’ar-Rashid avant que sa famille deviennent des hommes de l’état.

Alors qu’il était en route pour l’Iraq, le calife al-Ma'moun s’arrêta dans la ville de Tous[3] alors qu’il était en compagnie du successeur au califat ‘Ali ar-Rida Ibn Moussa al-Kazim. Rida et le huitième imam des shiites duodécimains (ithna ‘ashariyah).

 

 

En l’an 203 de l’Hégire (818), ‘Ali ar-Rida Ibn Moussa al-Kazim décéda et l’Imam at-Tabari a rapporté qu’il mangea du raisin en trop grande quantité et mourut d’indigestion. Abou Faraj al-Isfahani alias ‘Ali Ibn Houssayn al-Amawi, qui était un des protégés de Marwan Ibn Muhammad Ibn Marwan le dernier calife omeyyade, et auteur du fameux livre « al-Aghani » a dit dans son livre qu’al-Ma'moun mit du poison dans ses aliments et le tua. ‘Ali ar-Rida fut enterré à Tous et il était surnommé «Abi Bakr ».

 

Cette même année, le dimanche 28 de Dzoul Hijjah, il y eut une éclipse du soleil, la lumière du soleil fut éclipsée et deux tiers de son globe disparu. L’éclipse commença quand le soleil s’éleva et continua jusqu’à à peu près midi avant de s’éclaircir.

 

 

Au moins de Safar de l’année 204 de l’Hégire (819), le calife al-Ma'moun entra à Baghdad habillé de vert mais une semaine après, il s’habilla de nouveau en noir, la couleur des Abbassides.

 

Toujours en l’an 204 de l’Hégire, Yahya Ibn Mou’ad combattit Babak, et aucun d’entre eux ne marqua une victoire décisive sur l’autre.

 

 

En l’an 205 de l’Hégire (820), al-Ma'moun nomma ‘Issa Ibn Muhammad Ibn Abi Khalid gouverneur d’Arménie et de l’Azerbaïdjan et lui ordonna de combattre Babak.

 

Cette année, al-Ma'moun ordonna à ‘Issa Ibn Yazid al-Jouloudi de combattre les zout.

 

Toujours cette année, Tahir Ibn al-Houssayn partit pour le Khorasan au moins de Dzoul Qi’dah (205-821). Il resta deux mois dans son camp jusqu’à ce que les nouvelles de la rebellions de ‘AbderRahmane an-Nayssabouri al-Mouttawwi’i lui parviennent. Dès lors il marcha sur lui.

 

Cette même année, les Turcs Toghouz Oghouz arrivèrent à Oushroussanah.

 

 

En l’an 206 de l’Hégire (821), al-Ma'moun nomma Daoud Ibn Banijour responsable de la guerre contre les zout, des habitants du Sind, et gouverneur des provinces de Basra, du Tigre, de Yamamah et du Bahrayn.

 

 

En l’an 207 de l’Hégire (822), décéda le grand général de l’Islam Tahir Ibn Houssayn Ibn Mous’ab al-Khorassani al-Khouza’i alors qu’al-Ma'moun l’avait nommé gouverneur du Khorasan en l’an 205 de l’Hégire. Le calife al-Ma'moun le détestait beaucoup parce qu’il avait ordonné de tuer son frère al-Amine et lorsqu’il apprit sa mort il dit : « Louanges à Allah qui a avancé sa mort est retardé la mienne ».

 

 

En l’an 209 de l’Hégire (824), une crue inonda le Sawad, Kaskar, les terres d’Oumm Ja’far et celles d’al-‘Abbas et emporta toutes les couches arables.

 

Cette année, Babak terrassa ‘Issa Ibn Muhammad Ibn Abi Khalid.

 

Toujours cette année, al-Ma’moun nomma Sadaqah Ibn ‘Ali, connu sous le nom de Zourayq, gouverneur de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan, avec la responsabilité de conduire la guerre contre Babak. Sadaqah nomma Ahmad Ibn al-Jounayd Ibn Farzandi al-Iskafi pour reconduire les opérations militaires contre Babak. Ahmad Ibn al-Jounayd Ibn Farzandi revint à Baghdad et retourna ensuite pour combattre les khourramiyah, mais Babak le fit captif. Le calife nomma alors Ibrahim Ibn al-Leyth Ibn al-Fadl at-Tajibi sur l’Azerbaïdjan.

 

Cette année, Michael, le fils de George l’empereur byzantin qui régnait depuis neuf ans mourut. Les Byzantins nommèrent Théophile le fils de Michael pour le remplacer.

 

 

En l’an 210 de l’Hégire (825), des navires chargés de gens venant d’Andalousie arrivèrent par la Mer Méditerranée et ancrèrent leurs navires à Alexandrie. À cette époque et à cause de la rébellion d’al-Jarawi et d’Ibn as-Sari, les gens ne leur prêtèrent pas attention. Leur chef était à ce moment-là un homme appelé Abou Hafs[4], ‘Omar Ibn Hafs al-Ballouti et ils restèrent près de la côte jusqu’au retour de ‘AbdAllah Ibn Tahir en Egypte.

Younous Ibn ‘Abdel A’la a rapporté : Un jeune homme (il voulait dire ‘AbdAllah Ibn Tahir) vint chez nous de la direction de l’est alors que le monde entier était plongé dans des conflits. Différents usurpateurs avaient saisi le pouvoir dans chaque partie de la terre et avaient terrorisés les gens mais il ramena aux gens innocents leurs droits et apporta la paix et la sécurité.

Quand ‘AbdAllah Ibn Tahir Ibn al-Houssayn entra en Egypte, il envoya un message aux Andalous et ceux qui les avaient rejoints. Il menaça de les attaquer s’il ne se soumettait pas aux autorités de l’Égypte. Les Andalous acceptèrent de se soumettre si un sauf-conduit leur était accordé afin qu’il puisse quitter Alexandrie et partir vers une autre région de la terre des Roum (les territoires byzantins) qui ne faisait pas partie des terres d’Islam. ‘AbdAllah leur accorda ce qu’il demandait et ils quittèrent Alexandrie et débarquèrent sur une des îles de  la Mer Méditerranée appelée Crète. Ils installèrent et établirent une colonie et leur progéniture resta sur cette île jusqu’à ce jour.

 

 

En l’an 211 de l’Hégire (826), le calife afficha ses déviances et fit annoncer publiquement que dorénavant quiconque mentionnerait Mou’awiyyah (qu’Allah soit satisfait de lui) en bien perdrait la sécurité inhérente à sa personne que lui confère l’Islam. Nul calife des abbassides avant lui n’affirma de tels propos.

Un jour alors que le calife parlait avec ‘Abd as-Salam Ibn Salih al-Harawi il le questionna, ‘Abd as-Salam Ibn Salih lui répondit : « Abou Bakr ceci Abou Bakr cela…» Le calife al-Ma'moun lui demanda : « Qui est Abou Bakr ? Notre Abou Bakr ou Abou Bakr en général (‘amma) ? » Il voulait dire en disant « Notre Abou Bakr » ‘Ali ar-Rida surnommé «Abou Bakr » et « Abou Bakr en général » le respectable compagnon Abou Bakr as-Siddiq (qu’Allah soit satisfait de lui), le Compagnon du Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui), son compagnon dans la grotte, le père de l’honorable ‘Ayshah (qu’Allah soit satisfait d’elle) et le calife du Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) !

Qui étais-tu donc toi-même ô al-Ma'moun pour rabaisser le plus grand Compagnon du Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) ?

 

Lorsqu’un poète Daymali du nom d’Aspahdaoust Ibn Muhammad Ibn Hassan décédé en l’an 469 de l’Hégire (1076), longtemps après al-Ma’moun, qui était un shiite et redevint Sounni vers la fin de ses jours, fut questionné à propos de ses croyances, il dit : « Si on me questionne à propos de mes croyances, je leur dirais : « Il était sur la voie des justes et je dirais que la meilleure personne après Muhammad (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) est son véridique (siddiqouhou) et son compagnon dans la grotte » ». Ainsi était Abou Bakr (qu’Allah soit satisfait de lui).

 

 

Le Calife al-Ma'moun n’allait pas arrêter là ses déviances et il devait en l’an 212 de l’Hégire (827) affirmer que ‘Ali Ibn Abi Talib (qu’Allah soit satisfait de lui) était la meilleure création après le Messager d’Allah (saluts et bénédictions d’Allah sur lui) avant d’affirmer la création du Qur’an.

 

Cette même année, al-Ma'moun dépêcha Muhammad Ibn Houmayd at-Toussi par la route de Mossoul pour faire campagne contre Babak. Muhammad Ibn Houmayd captura Ya’la Ibn Mourrah et d’autres rebelles en Azerbaïdjan et les envoya à al-Ma'moun.

 

Les campagnes d’al-Ma'moun contre les Byzantins

 

En l’an 215 de l’Hégire (830), al-Ma'moun quitta la Ville de la Paix[5] le 27 Mouharram pour attaquer les Byzantins.

D’autres ont rapporté qu’il voyagea de Shammassiyah à Baradan le jeudi, après la prière de Zouhr le 24 du mois de Mouharram. Quand al-Ma'moun partit de la Ville de la Paix, il nomma son député Ishaq Ibn Ibrahim Ibn Mous’ab sur la ville, et à qui il confia plus tard le Sawad, Houlwan et les régions du Tigre.

Quand al-Ma'moun arriva à Tikrit, Muhammad Ibn ‘Ali Ibn Moussa Ibn Ja’far Ibn Muhammad Ibn ‘Ali Ibn al-Houssayn Ibn ‘Ali Ibn Abi Talib (qu’Allah soit satisfait d’eux) arriva de Médine dans la nuit du vendredi[6] du mois de Safar et rencontra le calife. Al-Ma'moun lui offrit des cadeaux et lui ordonna de consommer son union avec sa fille Oumm al-Fadl (la fille d’al-Ma'moun). Elle fut amenée en sa présence dans la maison d’Ahmad Ibn Youssouf, située sur la rive du Tigre ou Muhammad Ibn ‘Ali resta. Quand le temps du pèlerinage approcha, il revint avec sa famille à La Mecque avant de retourner dans sa maison à Médine ou il resta.

Quant à al-Ma'moun, il partit pour Mossoul, puis continua jusqu’à Manbij et enfin parvint à Dabiq, Antioche et à Massissah. Ensuite, il partit pour Tarse et pénétra dans les terres des Byzantins au milieu du mois de Joumadah Awwal, tandis  que son fils al-‘Abbas Ibn al-Ma'moun parti pour Malatyah. Al-Ma'moun assiégea une forteresse appelée Qourrah qu’il captura par la force. Il ordonna de détruire la forteresse le dimanche 26 Joumadah Awwal de cette même année. Précédemment, il conquit une autre forteresse du nom de Majidah, mais épargna ses occupants. On a rapporté que lorsqu’al-Ma'moun s’arrêta à Qourrah et attaqua la garnison, les occupants demandèrent la sécurité. Al-Ma'moun la leur accorda et envoya alors Ashinas à la forteresse de Soundous et Ashinas rapporta son commandant au calife. Il envoya plus tard ‘Oujayf et Ja’far al-Khayyat au commandant de la forteresse de Sinan qui vint se présenter au calife et lui porta allégeance.

Lorsqu’al-Ma'moun quitta la terre des Byzantins, il se dirigea vers Damas.

 

 

En l’an 216 de l’Hégire (831), le calife al-Ma'moun retourna dans les terres des Byzantins pour y conduire le Jihad.

Les historiens ont rapporté plusieurs versions sur les raisons de son retour en terre de Byzance. Parmi elles, il a été rapporté qu’al-Ma'moun fut informé que le roi des Byzantins massacra les gens de Tarse et de Massissah. D’après ce qu’il a été rapporté il aurait tué plus de mille-six-cents personnes. Quand il reçut ces nouvelles, il partit en expédition et entra dans leur terre le lundi 19 Joumadah Awwal de cette année et y resta jusqu’au milieu du mois de Sha’ban de cette même année. D’autres ont dit que c’est parce que Théophile le fils de Michael écrivit à al-Ma'moun et commença la lettre en ce nommant soi-même uniquement. Quand al-Ma'moun reçut la lettre, il ne la lut pas et partit aussitôt pour la terre des Byzantins. Les envoyés de Théophile le rencontrèrent à Adana ou ils lui remirent cinq-cents captifs musulmans. Quand al-Ma'moun entra dans les terres byzantines, il s’arrêta à Antighou et l’assiégea. La garnison quitta la forteresse après avoir concédé un traité de paix et le calife entra sans combat. Al-Ma'moun se dirigea alors à Heraclia et sa garnison quitta la ville en sécurité après avoir aussi concédé un traité de paix. Il envoya son frère Abou Ishaq poursuivre des raids et il captura trente forteresses, des caches souterraines et des entrepôts (matmourah). Il envoya aussi de Touwanah, Yahya Ibn Aktham qui conduisit plusieurs raids de son côté, ou il tua des ennemis, brûla leur forteresse, prit des captifs et du butin avant de rejoindre le corps principal de l’armée. Ensuite, Al Ma’moun partit vers Kayssoum ou il resta deux ou trois jours avant de retourner à Damas.

 

 

En l’an 217 de l’Hégire (832), al-Ma'moun envahit les terres byzantines et assiégea Lou’lou’ah durant cent jours avant de se retirer en laissant son lieutenant ‘Oujayf poursuivre le siège. Mais les gens de Lou’lou’ah trompèrent ‘Oujayf, le capturèrent et il resta prisonnier huit jours avant d’être libéré. L’empereur Théophile marcha sur Lou’lou’ah et encercla ‘Oujayf mais al-Ma'moun lui envoya des renforts et Théophile se retira pour éviter d’entrer en contact avec l’armée musulmane. ‘Oujayf et les habitants de Lou’lou’ah après avoir demandé la sécurité quittèrent la forteresse.

Cette même année, le souverain de Byzance Théophile, écrivit à al-Ma'moun pour demander la paix moyennant un tribut. Il mit seulement son propre nom dans sa lettre et son ministre apporta la lettre suivante au calife :

« Il paraît plus raisonnable que les deux côtés adverses se réunissent sur ce qui les unit plutôt que de rechercher des côtés préjudiciables pour eux-mêmes. Tu n’es pas le genre de personne qui renoncerait à ce que tu possèdes en faveur d’une autre personne et tu comprends parfaitement ce que je veux te dire sans que j’aie besoin de te le dire. Je t’écris pour t’inviter à conclure un accord de paix entre nous car je désire bénéficier des avantages d’une trêve dans les opérations militaires afin que nous puissions nous soulager des fardeaux de la guerre qui pèsent sur nous et être amis les uns des autres et des associés. Nous pourrions accumuler des bénéfices si nous établissions des relations commerciales, si nous libérons ceux qui sont en captivité et si la sécurité des routes et des royaumes sont garantis. Si tu rejettes l’offre de paix, je ne perdrais pas de temps avec toi[7]. Adieu ! »

Al-Ma'moun lui répondit : « J’ai reçu ta lettre dans laquelle tu me demandes une trêve dans le combat et me demande la réalisation d’un traité de paix réciproque. Tu emploies dans ta lettre tant les mots doux que durs en cherchant la conciliation avec moi tout en me proposant de faire du commerce avantageux pour nous, la libération des captifs ainsi que l’arrêt des combats. Si ce n’était pas ce vers quoi je travaille et de saisir une occasion favorable de renverser la situation en tenant compte du bien-être de ma communauté, et ce que je préfère à l’égard de ses résultats, devraient faire la réponse à ta lettre. Mais l’envoi d’une inébranlable cavalerie montée par des cavaliers vifs et courageux qui seront heureux de te détruire, cherchant la satisfaction de Dieu en répandant le sang pour obtenir Sa proximité, en combattant tes soldats m’est préférable. Je leur fournirai des renforts ainsi qu’un équipement militaire suffisant. Ils sont plus désireux d’avancer vers les fontaines de la mort que tu cherches à te préserver de l’effrayante menace qu’ils font peser sur toi. Ils ont la promesse d’une des deux meilleures choses : une rapide victoire ou un retour glorieux à Dieu comme des martyrs dans la bataille. Mais j’estime que je devrais t’offrir un avertissement, afin qu’Allah établisse clairement contre toi la preuve décisive de l’Islam, en t’appelant ainsi que tes partisans à la reconnaissance de l’Unicité Divine et de la Loi Divine de la Religion des Hanif[8]. Si tu refuses d’accepter cette offre, tu peux payer le tribut qui te vaudra la protection des Gens de la Dîme (ahl ad-dimmah) et rendra possible pour toi un répit pour la guerre. Si tu refuses aussi de payer le tribut, alors tu feras clairement face à nos qualités martiales d’une telle manière que mon discours éloquent et toutes tentative exhaustive d’explication te paraîtront superflues. Paix sur celui qui suit la guidance ! »

 

Toujours cette année, al-Ma'moun se rendit à et prit Salaghous, une forteresse au-delà du Tarse.

 

 

En l’an 218 de l’Hégire (833), al-Ma'moun voyagea de Salaghous à Raqqah ou il exécuta Ibn Oukht ad-Dari.

 

Cette même année, le premier Joumadah Awwal, al-Ma'moun envoya son fils al-‘Abbas en terre byzantine et lui ordonna d’établir son camp à Thouwanah et d’y construire des habitations. Il y avait déjà envoyé des ouvriers et des détachements de troupes régulières (payées). Lorsqu’il arriva, il travailla sur ce programme de construction et bâtit sur un mile carré qu’il entoura d’un mur de 18 km de long, séparé par quatre portes ayant chacune une tour de défense fortifiée.

 

Toujours cette même année, alors que le calife al-Ma'moun était à Raqqah[9], il écrivit à Ishhaq Ibn Ibrahim Ibn Mous’ab al-Khouza’i, le chef de la police à Baghdad et lui ordonna de questionner les savants sur la création du Qur’an. Al-Ma'moun et ses amis mou’tazilah affirmaient que le Qur’an était créé tandis que les savants de l’Islam affirmaient que c’est la Parole d’Allah Exalté incréée. Sous la pression de la menace et de la terreur, après de terribles événements, les savants répondirent. Ils répondirent contraints que le Qur’an est créé mais deux d’entre eux du nom de Muhammad Ibn Nouh al-‘Ijli al-Bakri al-Wahili ar-Rab’i et le deuxième, la Montagne Inébranlable (jabal rasikh), le grand Imam Ahmad Ibn Muhammad Ibn Hanbal ash-Shaybani al-Bakri al-Wahili ar-Rab’i, puisse Allah Exalté leur faire miséricorde, furent amenés tous les deux enchaînés au calife al-Ma'moun à Tarassous pour être tué. Lorsqu’ils arrivèrent près de sa résidence, un employé vint les trouver et dit en pleurant à l’Imam : « Le calife al-Ma'moun jure par sa proximité du Prophète (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) qu’il te tuera si tu n’affirmes pas que le Qur’an est créé. Lorsque l’Imam Ahmad Ibn Hanbal entendit cela, il se redressa, leva la tête vers le ciel et invoquât contre le calife injuste dont même les Compagnons (qu’Allah soit satisfait d’eux) ne furent pas à l’abri de ces méfaits. Et à peine eut-il fini son invocation, qu’un messager les informa de la mort du calife par lequel la communauté islamique fut éprouvée. Al-Ma'moun mourut au moins de Rajab de l’année 218 de l’Hégire (833).

 

Comment le calife al-Ma'moun Ibn Haroun ar-Rashid a-t-il pu changer ses croyances et dévier du chemin de ses ancêtres, al-Ma'moun qui contrairement à son père ne fit absolument rien pour arrêter la propagation des sectes déviantes pour devenir finalement lui-même un déviant ?

La cause est qu’il resta chez ses oncles au Khorasan un certain nombre d’années et il était le mari de Marajil la fille d’Oustansis qui se fit passer pour un faux prophète. Ses plus proches compagnons étaient Fadl et Hassan, qui étaient les fils d’un mage. D’autre part, il fut éduqué par le Sheikh des mou’tazilah, Abou Houdayl Hamdan Ibn Houdayl al-‘Alaf  à Basra, qui était le Mawlah des ‘Abdel  Qays. Abou Houdayl mourut en 226 de l’Hégire (841). Ainsi vous pouvez voir le résultat néfaste d’un enseignement déviant par les professeurs sur ses élèves.



[1] Al-Inkishariyah : Police militaire ottomane connut sous le nom de janissaires.

[2] Islamboul - Dar al-Islam : Nom original de la capitale des Ottomans qui signifiait la ville de l’Islam. Il fut remplacé par Istanbul en 1925.

[3] Machhad en Iran de nos jours.

[4] Nous avons déjà longuement mentionné l’histoire de ces gens expulsés d’ar-Rabd d’Andalousie dans le second volume de notre « Abrégé de l’Histoire du Maghreb et de l’Andalousie ».

[5] Baghdad.

[6] La nuit du jeudi. En Islam, la nouvelle journée débute par la nuit précédant le jour. Donc le jeudi soir est en fait le début du vendredi.

[7] Sous-entendu : je t’embusquerais secrètement sans utiliser avec toi la bonté mais la tromperie pour pénétrer dans tes terres, retirer leurs barrières et lancer contre toi ma cavalerie et mon infanterie. Je ne ferai cela bien évidemment qu’après une excuse valable afin d’établir entre nous l’argument décisif.

[8] Hanif : Nature et religion unique et primordiale par laquelle Allah Exalté  à créer l’Humanité.

[9] Une ville sur les bords du type de l'Euphrate.