La position des batini à Ispahan et le meurtre d’Ibn ‘Attash

 

Cette année, le sultan Muhammad conquit le château que le batini avait pris près d’Ispahan, appelé Shah Diz et tua son souverain Ahmad Ibn ‘Abdel-Malik Ibn ‘Attash et son fils. Ce château avait été construit par Malik Shah et Ahmad Ibn ‘Abdel-Malik Ibn ‘Attash en avait pris le contrôle après mort.

 

La raison est qu’il fréquenta le châtelain du fort et quand il  mourut Ahmad l’acquerra. Le batini dans Ispahan lui avait déjà donné une couronne et avait recueilli de l’argent pour lui et il fit cela seulement parce que son père ‘Abdel-Malik avait été un chef de leur secte. Il était un homme instruit et éloquent qui possédait une bonne calligraphie et était capable de composition impromptue rapide et virtuose mais il eut la malchance de devenir consacré à cette secte. Cependant, son fils Ahmad était un ignare qui ne savait rien. On demanda à Ibn as-Sabbah, le seigneur de la forteresse d’Alamout : « Pourquoi révères-tu Ibn ‘Attash quand il est si ignorant ? » Il répondit : « A cause de son père qui était mon mentor. »

 

Ibn ‘Attash acquit de nombreux soutien et une grande force et sa position dans le château prospéra. Il avait l’habitude d’envoyer ses hommes attaquer les routes, de voler les marchandises et de tuer tous ceux qu’ils pouvaient. Ils tuèrent un nombre si vaste de gens qu’il est au-delà de tout compte et, agissant en son nom, ils imposèrent aux habitants des villages du sultan des impôts en échange de ne pas leur faire de mal. De ce fait, le sultan ne put profiter de ses villages ou des gens de leurs propriétés. La position des batini prospéra aidé par la dispute entre les deux sultans, Barkyarouq et Muhammad.

 

Quand le sultanat de Muhammad devint incontesté et qu’aucun rival ne resta, il n’y avait pas de projet plus important pour lui que d’attaquer et de mener la guerre contre les batini et chercher à venger les Musulmans pour leur cruelle violence tyrannique (des batini). Il décida de commencer par le château d’Ispahan qui était entre leurs mains et parce que le mal qu’il provoquait était le plus grand, puisqu’il exerçait la pression sur sa capitale. Il marcha en personne et les assiégea le 6 du mois de Sha’ban de cette année. Il avait eu l’intention de se mettre en route le 1 Rajab mais leurs sympathisants dans son armée furent très affectés par cela et fabriquant la correspondance à cet effet, ils lancèrent la rumeur que Kilij Arsalan Ibn Souleyman était arrivé à Baghdad et l’avait prise. Puis, ils prétendirent que des problèmes avaient éclatés au Khorasan si bien que le sultan hésita à exécuter son plan. Quand cela s’avéra être faux, il montra une résolution inébranlable et l’intention de lutter contre eux. Il monta sur une colline à l’ouest et en face du château sur lequel il installa un trône sur le sommet. D’Ispahan et de son arrière-pays, une multitude de gens se rassemblèrent pour lutter contre eux à cause de la vengeance qu’ils voulaient exercer sur eux. Ils encerclèrent la colline du château dont la circonférence était d’environ 20 kilomètres. Le sultan organisa les émirs pour la bataille, avec un émir luttant chaque jour. La situation des assiégés devint difficile quand le siège s’intensifia et ils ne furent plus en mesure de recevoir des provisions.

 

Quand leur situation devint sérieuse, ils écrivirent un « Fatwa » disant : « Ce qu’on dit les juristes, les Imams de la Foi, concernant les gens qui croient en Allah, en Ses Nobles Écritures, Ses Prophètes et le jour dernier et que ce que Muhammad (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) a apporté est l’authentique vérité et diffère seulement à propos de l’Imam ? Est-il permis pour le sultan de faire la paix, de se réconcilier avec eux, d’accepter leur fidélité et les garder de tout le mal ? » La plupart des juristes répondirent que c’était permis et d’autres se sont retenus. Ils se sont réunis pour contester l’affaire et avec eux était Abou Hassan ‘Ali Ibn ‘AbderRahmane as-Simanjani, un des Sheikhs Shafi’i, qui dit en présence de la compagnie : « Il incombe de lutter contre eux et les laisser dans cette place n’est pas permis. Le fait qu’ils déclarent les deux attestations de foi ne les aident pas. Permettez de leur demander : « Parlez-nous de votre imam, s’il vous autorise ce que la Loi Sacrée vous a défendu ou défend ce que la Loi a permis, acceptez-vous sa décision ? » Ils diront « oui » et dans ce cas leur sang est licite par le consensus de la communauté. » La discussion dura une longue période.

 

Alors les batini demandèrent au sultan de leur envoyer certaines personnes pour débattre avec eux et ils ont spécifié certaines personnes parmi les ‘Oulama telles que le Qadi Abou al-‘Ala' Sa’id Ibn Yahya, le Sheikh des Hanafi d’Ispahan et leur Qadi, parmi d’autres. Ils montèrent, débattirent avec eux et revinrent comme ils étaient montés. Le seul but des batini était de les distraire et de temporiser. Le sultan accentua le siège et quand ils se rendirent compte qu’il était vraiment sérieux, ils concédèrent la capitulation du château à condition qu’il leur soit donné à la place le château de Khalinjan à environ quarante kilomètres d’Ispahan. Ils dirent : « Nous craignons pour nos vies et nos biens des gens du commun et avoir un endroit où nous pouvons nous défendre contre eux. » On conseilla au sultan d’accorder leur requête et ils demandèrent alors un délai jusqu’à « Nawrouz (fête des mages) » pour se retirer à Khalinjan et renoncer à leur château. Ils stipulèrent aussi que le sultan ne devait pas écouter tout ce qui était rapporté à leur sujet et si quelqu’un rapportait quoi que ce soit sur eux, il devrait le leur livrer. De même, tout ce que sultan leur avait pris devrait être rendu et ce dernier accepta. Ils demandèrent aussi que des provisions suffisantes leur soient fournies sur une base quotidienne et tout cela fut accordé. Leur but était de gagner du temps dans l’attente d’une division entre les Musulmans ou qu’un incident se produise.

 

Le vizir du sultan Sa’d al-Moulk fit des arrangements pour que de la nourriture, des fruits et tout qu’ils avaient besoin leur soit fourni tous les jours et les batini commencèrent eux-mêmes à acheter des denrées alimentaires qu’ils stockèrent pour résister plus longtemps dans leur château. Plus tard, ils chargèrent un de leurs éléments de tuer un émir qui avait été très actif dans le combat contre eux. Ils le surprirent et le blessèrent mais il leur échappa. Alors suite à cela, le sultan ordonna la démolition du château de Khalinjan et renouvela le siège. Ils demandèrent que si certains d’entre eux descendaient, le sultan devait envoyer des hommes avec eux pour les protéger jusqu’à ce qu’ils arrivent à Tabas et que le reste resterait dans un haut pic du château jusqu’à ce que quelqu’un soit venu leur dire que leurs camarades étaient arrivés et ensuite eux-mêmes partiraient alors et qu’ensuite le sultan les envoient tous aux gens dans le château d’Alamout d’Ibn as-Sabbah. Cela fut accepté ainsi certains d’entre eux partirent pour an-Nazir et à Tabas. Le sultan reprit le château et le rasa.

 

Plus tard, ceux qui étaient partis dans les forts d’an-Nazir et de Tabas informèrent Ibn ‘Attash qu’ils étaient arrivés. Cependant, il n’abandonna pas le pic qui resta entre ses mains. Le sultan considéra cette traîtrise comme une révocation de tout ce qui avait été conclu et ordonna donc un assaut général qui fut lancé le 2 du mois de Dzoul Qi’dah. Le nombre de ceux qui résistèrent et lutèrent n’étaient pas très élevé mais ils montrèrent une grande ténacité et un courage extrême. Un de leurs chefs conclut un traité avec le sultan et dit : « Je vais te montrer un de leur point faible », et il les emmena sur un des flancs du pic, très difficile d’accès puis leur dit : « Grimpez ici. » On lui objecta que l’endroit était peut-être protégé et qu’ils y avaient posté des hommes. Il répondit : « Les armes et les brigandines que vous voyez n’ont été placées que pour vous tromper sur leur nombre restreint. » Et seul quatre-vingts hommes étaient restés. Les troupes attaquèrent en grimpant à ce point et prirent la place ou la plupart des batini avaient été tués. Certains se mêlèrent à ceux qui donnèrent l’assaut et se retirèrent avec eux. Cependant, Ibn ‘Attash était du nombre des prisonniers. Il fut laissé une semaine avant d’être paradé dans toute la ville. Il fut alors écorché vif et après avoir survécu quelques temps, il mourut et fut empaillé. Son fils fut aussi exécuté et leurs têtes prises à Baghdad. Sa femme se jeta du haut du château et périt alors qu’elle portait ses précieux bijoux sans parallèle qui furent aussi détruits et perdus. Les tribulations provoquées par Ibn ‘Attash durèrent douze années.

 

Comment le vizir du sultan fut tué et Ahmad Ibn Nizam al-Moulk nommé à ce poste

 

Au mois de Shawwal de cette année, le sultan Muhammad arrêta son vizir, Sa’d al-Moulk Abou al-Mahasin, saisit ses richesses et le crucifia à la porte d’Ispahan en compagnie de quatre de ses principaux associés qui étaient ses clients. Le vizir fut accusé de traîtrise envers le sultan et ses associés de conviction batini. Il était vizir depuis deux ans et neuf mois et au début de sa carrière, il avait été un associé de Taj al-Moulk Abou al-Ghana'im, après qui il avait été sans emploi. Alors Mouayyad al-Moulk Ibn Nizam al-Moulk le nomma chef du Bureau du Contrôle Financier ou il excella au service du sultan Muhammad quand son frère le sultan Barkyarouq l’assiégea dans Ispahan. Quand Muhammad quitta Ispahan, il tint son poste admirablement et avec succès. Muhammad le nomma vizir et le récompensa avec des larges fiefs et lui donna pleine autorité dans l’état, mais il le déchut - et c’est le résultat final des services pour les princes ! Combien est excellent l’adage de ‘Abdel-Malik Ibn Marwan qui a dit : « L’homme le plus béni dans la vie est celui qui a assez pour vivre, une femme qui lui plaît et qui connaît pas ces machiavéliques cours que les nôtres et le mal qu’elles peuvent faire. »

 

Après avoir arrêté le vizir, le sultan consulta pour l’appointement d’un successeur. Plusieurs noms furent mentionnés et le sultan dit : « Mes ancêtres comblèrent de bénédictions Nizam al-Moulk et il leur devait beaucoup. Ses fils sont nourris par notre générosité. Ils sont indispensables. » Il ordonna alors qu’Abou Nasr Ahmad soit nommé vizir et on lui donna les titres de son père, Qiwam ad-Din Nizam al-Moulk Sadr al-Islam.

 

 

Au mois de Dzoul Hijjah de l’année 501 de l’Hégire (1107), les ruines d’Ibn Jarada prirent feu et beaucoup de personnes périrent. Quant aux marchandises, les biens et les meubles, la perte fut au-delà de toute mesure. Une foule de gens s’enfuirent par un trou qu’ils percèrent dans le mur du district dans le cimetière de la porte Abraz. Un certain nombre de Juifs s’y trouvaient et ils ne sortirent pas à cause de leur Sabbat. Certains des habitants qui avaient traversé sur la rive ouest  pour les loisirs selon leur coutume le samedi retournèrent pour trouver leurs maisons en ruines, leurs familles calcinées et leurs biens détruits.

 

Les feux dans se propagèrent plusieurs endroits, par exemple, dans la rue des marchands et le jardin d’Ibn Razin. Les gens s’inquiétèrent, abandonnèrent leurs occupations et passèrent jours et nuits à surveiller leurs maisons dans les allées et sur les toits tout en gardant de l’eau près d’eux prêts à éteindre n’importe quel feu. Il apparut que la cause du feu fut due à une domestique-fille, qui tomba amoureuse d’un homme et prit des dispositions pour qu’il passe secrètement la nuit avec elle dans la maison de son maître. Elle prépara quelque chose qu’il pourrait voler quand il  partirait et en l’emmenant elle aussi avec lui en mettant derrière eux le feu à la maison, mais Allah Exalté révéla leur culpabilité et apporta une rapide honte sur eux. Ils furent saisis et emprisonnés.

 

Durant cette année Baldwin, le roi des croisés, qu’Allah les maudisse, rassembla une armée et marcha sur la ville de Tyr pour l’assiéger. Il ordonna de construire un fort près de la ville sur la colline d’al-Ma’shouqah tandis qu’il assiégea la ville durant un mois. Baldwin fut acheté par le gouverneur pour 7 000 dinars et après avoir pris l’argent, il quitta les lieux et se dirigea vers Sidon qu’il assiégea par terre et mer et érigea une tour de bois pour l’attaquer. La flotte égyptienne arriva pour défendre la ville et protéger les habitants mais ils furent retenus par la flotte croisée cependant les Musulmans s’avérèrent victorieux. Les nouvelles atteignirent alors les croisés que l’armée de Damas aidait les habitants de Sidon et ils quittèrent les lieux sans rien gagner.

 

Cette année, une grande comète avec une queue apparut et resta plusieurs nuits avant de disparaitre ensuite.

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Comment Mawdoud et l’armée du sultan conquirent Mossoul et Mawdoud devint le gouverneur

 

Au mois de Safar de l’Année 502 de l’Hégire (1108), Mawdoud et l’armée que le sultan avait envoyée avec lui conquirent la ville de Mossoul qu’ils enlevèrent des mains des hommes de Jawouli Saqaou.

Quand l’armée du sultan vint à Mossoul et mit le siège Jawouli quitta la ville et prit avec lui le comte d’Edesse, que Souqman avait fait prisonnier et que Joukarmish lui avait pris ce que nous avons déjà rapporté. Jawouli alla à Nisibis qui appartenait à cette époque à l’émir Ilghazi Ibn Artouq. Il lui écrivit, demanda un entretien et l’invita à le soutenir, tous les deux agissant comme un. Il lui dit que leur peur du sultan devait les unir pour obtenir sa protection. Ilghazi ne répondit pas mais quitta Nisibis pour Mardin après avoir installé son fils en lui ordonnant de tenir contre Jawouli et de lutter contre lui si ce dernier l’attaquait.

 

Ayant été informé, Jawouli s’écarta de Nisibis et partit pour Dara. Il envoya une deuxième fois un message à Ilghazi sur ces affaires et suivit son envoyé. Alors que son envoyé était avec Ilghazi à Mardin, et avant que ce dernier ne s’en rende compte, Jawouli était près de lui dans la citadelle, seul, avec l’intention de gagner son soutien et sa sympathie. Quand Ilghazi le vit, il se leva et le salua. Voyant que Jawouli était si confiant, suite à la bonne réception et pas inquiet à son sujet, il se trouva dans l’impossible de refuser. Ils quittèrent alors la citadelle et vinrent camper à l’extérieur de Nisibis d’où, ils se rendirent à Sinjar, qu’ils assiégèrent durant quelque temps mais la personne en charge refusa les conditions de paix proposées. Ils levèrent donc le siège et marchèrent sur al-Rahbah. Ilghazi montrait sa coopération avec Jawouli mais intérieurement cherchait une occasion de le quitter. Lorsqu’ils arrivèrent à Araban, dans la vallée de Khabour, Ilghazi s’enfuit de nuit et retourna à Nisibis.

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Comment Jawouli libéra le comte croisé

 

Après la fuite d’Ilghazi, Jawouli se mit en route pour ar-Rahbah et lorsqu’il arriva à Maksin, il libéra le comte Baldwin qui avait été son prisonnier à Mossoul et qu’il avait pris avec lui. Il était resté en captivité et bien qu’il ait offert de grandes sommes d’argent, il ne fut pas libéré. Jawouli le libéra et lui donna une robe d’honneur après un séjour de presque cinq années en prison après la stipulation d’un paiement d’une rançon, de libérer les captifs musulmans qu’il retenait en prison et qu’il devrait apporter son aide en personne et celles de ses troupes puis de l’argent, quand il lui serait requis de le faire.

 

Quand cela fut conclu, Jawouli envoya le comte à Salim Ibn Malik le gouverneur de Qal’at Ja’bar jusqu’à l’arrivée de Josselin, son cousin et un des chevaliers des croisés, le souverain de Tall Bashir. Josselin avait été pris prisonnier avec le comte dans la même bataille mais il s’était rançonné  pour 20 000 dinars. Il resta donc à Qal’at Ja’bar en otage en échange du comte qui partit pour Antioche. Jawouli libéra Josselin de Qal’at Ja’bar et prit à sa place le frère de sa femme et le beau-frère du comte et l’envoya au comte pour le renforcer et pour l’encourager à libérer les prisonniers, envoyer l’argent et ce qu’il avait garanti. Quand Josselin atteignit Manbij il l’attaqua et la ravagea, bien qu’il avait avec lui un détachement des hommes de Jawouli qui objectèrent et qualifièrent de traitrise son comportement mais il répondit : « Cette ville n’est pas la vôtre. »

 

De ce qui s’est produit entre Baldwin et Tancrède le seigneur d’Antioche

 

Après la libération du comte et son voyage à Antioche, Tancrède, son souverain, lui donna 30 000 dinars, des chevaux, des armes, des vêtements et d’autres choses. Tancrède avait pris Edesse des hommes du comte quand ce dernier avait été capturé. Le comte lui demanda de lui restituer la ville mais il refusa alors il quitta Tancrède pour aller Tall Bashir, où Josselin le rejoignit ayant été libéré par Jawouli, à la très grande joie du comte.

 

Tancrède, le souverain d’Antioche, marcha contre eux avec ses troupes pour les amener à combattre avant qu’ils ne deviennent puissants. Ils rassemblèrent une armée avant que Jawouli puisse les rejoindre avec ses forces pour leur apporter son soutien. Ils se livrèrent bataille et quand le combat fut fini, ils se rencontrèrent firent la fête et conversèrent entre eux. Le comte libéra cent-soixante prisonniers musulmans, tous de l’arrière-pays d’Alep, les habilla et les mit sur la route.

 

Quant à Tancrède, il se retira à Antioche sans avoir réglé ses affaires avec le comte d’Edesse et Josselin qui poursuivirent leur raid contre l’un des forts de Tancrède et se réfugièrent dans la région contrôlée par Basil Kogh, un Arménien qui avait avec lui un grand corps d’apostats et d’autres et qui était le seigneur de Ra’ban, Kayssoum et d’autres forteresses au nord d’Alep. Il fournit au comte 1 000 cavaliers parmi les apostats et 2 000 fantassins. Tancrède marcha à leur rencontre et ils argumentèrent à propos de qui devait contrôler Edesse. Leur patriarche dont l’autorité n’était pas contestée s’interposa comme intermédiaire. Plusieurs citadins et prêtres témoignèrent que Bohémond, l’oncle de Tancrède, leur avait dit qu’il projetait de naviguer pour retourner à la maison, qu’Edesse devrait être restitué au comte du fait de sa libération de captivité. Tancrède restitua donc la ville le 9 du mois de Safar et le comte traversa l’Euphrate pour remettre l’argent de la rançon et les prisonniers aux subalternes de Jawouli. Sur sa route, il libéra un grand nombre de captifs de Harran et ailleurs.

 

Il y avait trois cents Musulmans nécessiteux dans Sarouj et les hommes de Jawouli réparèrent leurs mosquées. Le chef de Sarouj était un Musulman qui avait apostasié et les hommes de Jawouli l’entendirent parler de façon désobligeante de l’Islam si bien qu’ils le châtièrent et à cause de lui survint une dispute entre eux et les croisés. Cela fut rapporté au comte qui dit : « Cela n’est bien ni pour nous ni pour les Musulmans, » et il l’exécuta.

 

Ce qui arriva à Jawouli après la libération du comte

 

Lorsque Jawouli libéra le comte Baldwin à Maksin, il procéda à ar-Rahbah, où Abou an-Najm Badran et Abou Kamil Mansour, les fils de Sayf ad-Dawlah Sadaqah, vinrent le trouver. Après le meurtre de leur père ils s’étaient rendu dans Qal’at Ja’bar avec Salim Ibn Malik ou ils parvinrent à un accord pour s’entraider et se soutenir et Salim leur promit qu’il irait avec eux à al-Hillah. Leur intention était de faire de Baktash Ibn Toutoush Ibn Alp Arsalan leur commandant. Alors qu’ils avaient ce plan en tête, Sabawah arriva sur les ordres du sultan qui lui avait assigné ar-Rahbah comme fief, comme nous l’avons déjà mentionné. Il rencontra Jawouli et lui conseilla d’aller en Syrie qui était vidée là de ses troupes depuis que les croisés en avaient conquis la plus grande partie. Il lui dit aussi que s’il visait l’Irak pendant que le sultan s’y trouvait ou était à proximité, il ne garantissait pas qu’un mal ne tombe sur lui. Il accepta ses propos et quitté ar-Rahbah.

Les envoyés de Salim Ibn Malik, le seigneur de Qal’at Ja’bar arrivèrent alors et lui demandèrent son aide contre les Banou Noumayr et Jawsham an-Noumayri qui avaient surpris et tué ‘Ali Ibn Salim, le gouverneur de Raqqa et saisit la ville.

 

Ridwan entendu cela et quitta Alep pour Siffin. Il rencontra quatre-vingt-dix croisés qui avaient avec eux une partie de la rançon que le seigneur d’Edesse avait envoyée à Jawouli. Ridwan s’en saisit et prit un certain nombre d’entre eux prisonniers avant d’aller à Raqqa ou il fit la paix avec les Banou Noumayr en échange d’argent et les quitta ensuite pour revenir à Alep. Salim Ibn Malik demanda à Jawouli de l’aide militaire et d’aller prendre Raqqa en lui promettant de lui fournir tout ce dont il pourrait avoir besoin. Donc Jawouli se rendit à Raqqa et l’assiégea durant soixante-dix jours. Quand les Banou Noumayr s’engagèrent à lui donner de l’argent et des chevaux, il envoyé un message à Salim lui disant : « Je suis engagé dans un projet plus important que cela. Je suis face à face avec un ennemi et me sens concerné par ce problème plus que quiconque. Je projette de descendre en Irak. Si mon but réussit, Raqqa et d’autres endroits seront les tiens. Je ne dois pas me distraire de cette affaire importante en assiégeant cinq individus des Banou Noumayr. »

 

Lorsqu’arriva l’émir Houssayn, le fils de l’Atabeg Qoutloughtakin dont le père avait été l’Atabeg[1] du sultan Muhammad qui l’avait exécuté. Cependant, son fils prospéra à la cour du sultan et devint son intime. Le sultan l’envoya avec Fakhr ad-Din Ibn ‘Ammar pour réparer ses relations avec Jawouli et ordonna aux troupes de marcher avec Ibn ‘Ammar et de mener le Jihad contre les mécréants. Il vint donc trouver Jawouli, lui ordonna d’abandonner ses terres et de se tranquilliser à propos du sultan, en lui garantissant un traitement équitable, s’il remettait ses terres et proclamait son obéissance et sa subordination. Jawouli répondit : « Je suis l’humble domestique du sultan et lui obéirai, » et après lui avoir remis de l’argent et des vêtements de grande valeur rendue pour lui, il dit : « Va à Mossoul et retire l’armée de la ville. J’enverrai avec toi quelqu’un qui te livrera mon fils comme otage et permettra ainsi au sultan d’envoyer quelqu’un pour assumer les charges de la ville et recueillir les taxes. » Houssayn fit ce qu’on lui dit et se mit en marche avec l’homme de Jawouli. Quand ils arrivèrent, l’armée assiégeait Mossoul mais ne l’avait pas encore capturé et Houssayn leur ordonna de se retirer. Tous furent d’accord à part l’émir Mawdoud qui  dit : « Je ne me retirerai seulement sur les ordres du sultan, » et il arrêta l’homme de Jawouli et poursuivit le siège de Mossoul jusqu’à ce qu’il l’ait pris, ce que nous avons déjà rapporté.

 

Houssayn Ibn Qoutloughtakin retourna chez le sultan et défendit le cas de Jawouli qui était partit pour la ville de Balis ou il arriva le 13 du mois de Safar mais le peuple s’opposa à lui. Les hommes du prince Ridwan, le seigneur d’Alep, qui s’y trouvaient s’enfuirent et Jawouli assiégea la ville durant cinq jours qu’il prit après avoir miné une des tours qui tomba sur les soldats du génie tuant plusieurs d’entre eux. Il prit donc la ville, crucifia un groupe de notables et convoqua le Qadi Muhammad Ibn ‘Abdel-‘Aziz Ibn Ilyas, qui était un juriste dévot et l’exécuta. Alors il ravagea la ville et prit une grande quantité d’argent.

 

De la bataille entre Jawouli et les croisés

 

Au mois de Safar cette année, une bataille eut lieu entre Jawouli Saqaou et Tancrède, le souverain d’Antioche. La raison est que le prince Ridwan correspondit avec Tancrède et l’informa du comportement traître, sournois et fourbe de Jawouli et le mis en garde qu’il avait l’intention d’attaquer Alep et que, s’il l’a prenait, les croisés ne pourraient plus maintenir leur présence en Syrie. Il proposa une alliance à Tancrède ainsi que de l’aide pour s’opposer à lui. Tancrède répondit à sa demande et quitta Antioche tandis que Ridwan lui envoya 600 cavaliers. En entendant ces nouvelles, Jawouli envoya un messager au seigneur d’Edesse et l’invita à lui fournir de l’aide et renonça à la grande somme d’argent de la rançon. Le comte procéda alors pour rejoindre les forces de Jawouli qui était à Manbij. Dans cette situation, Jawouli reçut des informations que l’armée du sultan avait conquis Mossoul et saisit sa trésorerie et ses propriétés. Cela lui fit beaucoup de peine et un grand nombre de ses partisans l’abandonnèrent dont l’Atabeg Zanki Ibn Aqsounqour et Baktash an-Nihawandi.

 

Jawouli se retrouva donc avec mille cavaliers mais une grande foule de volontaires le rejoignit et il campa devant Tall Bashir quand arriva Tancrède à la tête de 1 500 cavaliers croisés et des 600 soldats du prince Ridwan sans compter les fantassins. Jawouli donna le commandement de l’aile droite aux émirs Aqsiyan, Altountash al-Abari et d’autres et l’aile gauche à l’émir Badran Ibn Sadaqah, au commandant général Sabawah et Sounqour Daraz tandis que le centre fut donné aux comtes croisés Baldwin et Josselin. La bataille débuta et les hommes d’Antioche chargèrent le comte. Le combat fut féroce et Tancrède enfonça le centre. Alors l’aile gauche de Jawouli chargea l’infanterie du seigneur d’Antioche et tua un grand nombre d’entre eux. Alors que la défaite du seigneur d’Antioche semblait imminente, les hommes de Jawouli se tournèrent vers les chevaux de rechange des croisés, le comte et ceux de Josselin, les enfourchèrent et s’enfuirent. Jawouli se lança vers eux et les rappela mais ils ne revinrent pas. Son autorité sur eux s’était rompue après la chute de Mossoul et quand il vit qu’ils ne reviendraient pas avec lui, il ne pensa qu’à lui-même et craignant pour sa vie s’il restait, il s’enfuit suivit par le reste de l’armée.

Le commandant Sabawah partit pour Damas, Badran Ibn Sadaqah à Qal’at Ja’bar, le fils de Joukarmish disposa pour Jazirat Ibn ‘Omar et Jawouli pour ar-Rahbah. Une foule de Musulmans furent tués et le seigneur d’Antioche pilla leurs affaires et leurs bagages et le reste souffrit énormément des croisés. Le comte et Josselin s’enfuirent à Tall Bashir et un grand nombre de Musulmans y cherchèrent aussi refuge et ils furent bien traités. Les blessés furent soignés, les nus habillés avant d’être envoyé dans leurs propres terres.

 

La bataille entre Toughtakin et les croisés et le traité subséquent

 

Il y eut une féroce bataille cette année entre Toughtakin l’Atabeg et les croisés quand Toughtakin se rendit à Tibériade à cause de l’arrivée du neveu de Baldwin pour ouvrir des hostilités. Toughtakin commandait 2 000 cavaliers et un grand nombre de fantassins tandis que le neveu du roi Jérusalem commandait  400 chevaliers et 2 000 fantassins.

 

Après un combat intense, les Musulmans se retirèrent. Toughtakin descendit de sa monture et s’adressa aux Musulmans avec des mots d’encouragement puis, ils revinrent à la bataille et écrasèrent les croisés, en capturant le neveu du roi qui fut emmené à Toughtakin. Toughtakin lui proposa la conversion à l’Islam mais il refusa, offrit la rançon de 30 000 dinars et la libération de 500 captifs pour sa libération. Toughtakin n’accepta rien hormis sa conversion et comme il refusa, il le tua de ses propres mains et envoya au calife et au sultan les prisonniers qu’il fit. Plus tard Toughtakin et Baldwin, le roi des croisés se mirent d’accord pour une cessation des hostilités pour une durée de quatre ans. Ce fut une bénédiction d’Allah Tout Puissant pour les Musulmans et n’était-ce traité, les croisés, qu’Allah les maudisse, auraient remporté un grand succès sur les Musulmans après la défaite qui est sur le point d’être mentionnée.

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Comment Toughtakin fuit les croisés

 

Au mois de Sha’ban de cette année, l’Atabeg Toughtakin fut vaincu par les croisés et cela arriva ainsi. La puissante forteresse de ‘Arqa, dans le district de Tripoli, était aux mains d’un Mamelouk du Qadi Fakhr al-Moulk Abou ‘Ali Ibn ‘Ammar, le seigneur de Tripoli qui se révolta contre son maître et tomba à court de nourriture, ses approvisionnement ayant été interrompus parce que les croisés étaient resté longtemps dans la région. Il envoya donc un messager à l’Atabeg Toughtakin, le seigneur de Damas et lui dit : « Envoyez quelqu’un à qui je puisse remettre cette forteresse que je suis incapable de tenir car il m’est préférable dans ce monde et l’autre que soit les Musulmans plutôt que les croisés qui la prennent. » Toughtakin lui envoya un de ses subalternes, appelés Isra’il, avec 300 hommes et il reprit la forteresse. Lorsque le Mamelouk d’Ibn ‘Ammar descendit de la forteresse, Isra’il lui tira une flèche et le tua. Son but était de l’empêcher d’informer l’Atabeg Toughtakin de l’argent qu’il avait laissé dans la citadelle.

 

Toughtakin projeta d’aller à la forteresse pour l’inspecter et y placer une forte garnison avec des provisions et du matériel de guerre mais la neige et la pluie durant deux mois consécutifs l’en empêchèrent. Lorsque cela passa, il sortit avec 4 000 cavaliers et conquis sur sa route, plusieurs forts des croisés dont la forteresse d’al-Akmah. Quand le comte as-Sidarni (Cerdagne) qui assiégeait Tripoli fut informé de l’arrivée de Toughtakin, il se mit en route avec 300 chevaliers et lorsque les troupes de Toughtakin les virent arriver ils s’enfuirent en laissant toute leur caravane de bagages, les provisions et l’armement  pour les croisés qui les saisirent et se trouvèrent considérablement renforcé et mieux équipé.

 

Les Musulmans arrivèrent à Homs dans un extrême état de confusion bien que personne n’ait été tué et qu’aucune bataille n’ait été livrée. Le comte de Cerdagne arriva alors devant la forteresse de ‘Arqah et après qu’il l’ait investi, la garnison demanda des conditions et il s’engagea à garantir leurs vies et repris le fort. Quand la garnison partit, il arrêta Isra’il et lui dit : « Je te libérerai seulement en échange de la libération d’untel et untel, des croisés qui étaient prisonniers à Damas depuis les sept dernières années. Cet échange fut accepté et les prisonniers libérés ensemble.

 

Quand Toughtakin arriva à Damas après cette défaite, le roi de Jérusalem lui envoya un message disant : « N’imagine pas que je romprais notre traité à cause de la défaite que tu as subi parce que les princes souffrent bien plus que ce que tu as subi puis leurs affaires retrouvent l’ordre et la solidité. » Toughtakin craignit en effet après ce revers l’attaque du roi aurait été en mesure de prendre n’importe quelle terre de son dominion.

 

Récit de la réconciliation entre les Sounnis et les shiites à Baghdad

 

De même, au mois de Sha’ban de cette année, les gens du commun de Baghdad, Sounni et shiite, parvinrent à un accord après avoir été la cause de nombreux troubles pendant une très longue période. Les califes, les sultans et les préfets avaient déployés de grands efforts pour améliorer la situation mais cela s’avéra impossible jusqu’à ce qu’Allah Tout Puissant ait donné Son permission et l’arrangement eut lieu sans un seul intermédiaire.

 

La raison est que lorsque le sultan Muhammad tua le roi des Arabes Sadaqah, que nous avons déjà rapporté, les shi’a de Baghdad, les habitants de Karkh et d’ailleurs, devinrent effrayés parce que Sadaqah et sa famille étaient des shiites et les Sounnis les exposèrent aux railleries à cause de la consternation et de l’inquiétude qui était tombée sur eux à cause de sa mort. Donc les shiites étaient effrayés et ennuyés par ce qu’ils entendaient et leur peur se poursuivit jusqu’au mois de Sha’ban. Au début de ce mois, les Sounnis firent leurs préparatifs pour la visite du tombeau de Mous’ab Ibn az-Zoubayr, qu’ils n’avaient pas fait pendant plusieurs années, ayant été empêché de le faire pour mettre fin aux dérangements qui en résultait.

 

Quand ils firent leurs préparations, ils décidèrent de passer par Karkh et l’annoncèrent. L’opinion générale des habitants de Karkh était qu’ils ne devraient pas s’opposer, ni les empêcher. Les Sounnis commencèrent à expulser les habitants de chaque quartier les uns après les autres, accompagné par un grand nombre de chars de carnavals et d’armes. La population de la Porte des Degrés vint avec un éléphant de bois monté par des hommes en armes. Tous se sont dirigés vers Karkh pour traverser le quartier et les habitants les accueillirent avec de l’encens, des parfums, de l’eau glacée et des étalages d’armes. Avec ces signes de joie ils les ont conduits et leur ont fait traverser leur quartier.

 

À la veille du milieu du mois, les shi’a sortirent pour visiter le mausolée de Moussa Ibn Ja’far et d’autres et pas un seul Sounni ne les empêcha. Les gens furent vraiment étonnés par cela. Quand les Sounnis revinrent de leur visite, les habitants de Karkh les accueillirent avec joie et ravissement. Il arriva que l’éléphant des gens de la Porte des Degrés se désintégra au pont de la Porte de Harb et certaines personnes récitèrent justement : « N’as-tu pas vu comment ton Seigneur a agi envers les gens de l’Eléphant, » jusqu’à la fin de la Sourate.

 

 

Au mois de Nissan de cette année, le niveau du Tigre s’éleva tellement que les routes devinrent infranchissables. Les récoltes d’hiver et d’été furent inondées et une grande famine s’ensuivie en Irak. Un Kara de blé vert atteignit dix dinars Imami et le pain devint introuvable. Les gens mangèrent des dattes et des haricots verts. Quant aux habitants de l’arrière-pays, ils n’eurent rien à manger durant tout le mois de Ramadan et la moitié de Shawwal excepté l’herbe et les baies.

 

 

Au mois de Safar de cette année, le Qadi d’Ispahan, ‘Oubaydallah Ibn ‘Ali al-Khatibi, fut tué dans Hamadan. Il consacra tout son temps au problème batini et prit l’habitude de vêtir une courte cotte de maille par précaution ainsi que l’observation d’autres mesures de sécurité. Un vendredi, un Perse l’aperçu entre lui et ses gardes et le tua.

 

De même, Sa’id Ibn Muhammad Ibn ‘AbderRahmane, Abou al-‘Ala’, le Qadi de Nishapour fut assassiné le jour de la rupture du jeune par un batini qui fut tué à son tour. Sa’id Ibn Muhammad naquit en l’an 448 de l’Hégire (1056) et il était un savant du Hadith et un membre de l’école Hanafi.

 

 

Cette année une grande caravane quitta Damas pour l’Egypte et le roi des croisés en fut informé. Il se mit en route donc, s’opposa à son passage et captura tous ceux qui en faisaient partie. Quelques-uns d’entre eux s’enfuirent mais pour finalement être capturé par des Bédouins.

 

De même cette année, lors de la fête des Chrétiens un groupe de  cent batini se levèrent dans la forteresse de Shayzar, en prenant les habitants au dépourvu, qu’ils saisirent et expulsèrent avant de fermer la porte et de remonter dans la citadelle qu’ils reprirent. Les souverains de la forteresse qui avaient bien traités ces hérétiques s’étaient rendus aux festivités des Chrétiens. Les gens de la ville se précipitèrent vers la barbacane et leurs femmes, à l’aide de cordes, les tirèrent en haut par les fenêtres pour qu’ils les rejoignent. Les Banou Mounqid, les émirs et les souverains de la forteresse arrivèrent sur la scène et grimpèrent à leur tour pour les rejoindre pour défaire les batini dans la bataille qui furent contrecarré dans leur plan et tombèrent sous la pluie de sabres qui s’abattit sur eux de chaque côté. Tous furent tués et pas un d’entre eux ne s’enfuit. Quant à ceux de la forteresse qui avait les mêmes convictions ils furent aussi tous exécutés.

 

Trois étrangers vinrent à al-Mahdiyah cette année. Ils écrivirent à l’émir local, Yahya Ibn Tamim, pour lui dire qu’ils pratiquaient l’alchimie. Il les convoqua et leur ordonna d’exécuter quelque chose de leur art dont il pourrait être témoin. Ils répondirent : « Nous allons faire un lingot. » Il leur fourni l’équipement et d’autres choses qu’ils demandèrent. Il s’assit alors parmi eux avec Sharif Abou Hassan et le commandant de son armée, appelée Ibrahim qui étaient ses amis intimes. Quand les alchimistes virent que l’endroit était vide de compagnie, ils les attaquèrent. L’un d’entre eux frappa Yahya Ibn Tamim sur la tête mais la dague toucha son turban et le coup fut sans effet. Yahya lui donna un coup de pied et le fit chuter sur son dos mais le batini esquiva par une porte qu’il referma sur lui. Le deuxième homme frappa et tua Sharif. Le commandant Ibrahim tira son épée et lutta contre eux. Une agitation s’ensuivie après quoi les hommes de l’émir Yahya entrèrent et tuèrent les alchimistes. Ils étaient vêtu comme des Andalous et comme plusieurs homme dans la ville étaient habillés de la même façon, ils furent exécutés. On rapporta à l’émir Yahya que certaines personnes les avaient vu avec al-Mouqaddam Ibn Khalifah.

Il arriva aussi que l’émir Abou al-Foutouh Ibn Tamim, le frère de Yahya vint au palais à ce moment-là avec ses disciples, complètement armés. On l’empêcha d’entrer et l’émir Yahya fut convaincu que cela avait été ordonné par eux deux. Il convoqua al-Mouqaddam Ibn Khalifah et ses neveux, et sur les ordres de Yahya, ils tuèrent al-Mouqaddam en représailles d’avoir tué leur père. Il expulsa l’émir Abou al-Foutouh et sa femme, Ballarah, la fille d’al-Qassim Ibn Tamim et son cousin et les mit sous garde dans le palais de Ziyad entre al-Mahdiyyah et Sfax, où ils restèrent jusqu’à la mort de Yahya. Son fils ‘Ali lui succéda en l’an 509 de l’Hégire (1115) et envoya Abou al-Foutouh et sa femme Ballarah en Egypte par bateau et ils débarquèrent à Alexandrie, que nous rapporterons si Allah Exalté le veut.

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Comment les croisés capturèrent Tripoli et Beyrouth en Syrie

 

Le 11 du mois de Dzoul Hijjah de l’année 503de l’Hégire (1109), les croisés, qu’Allah les maudisse, capturèrent Tripoli et cela arriva comme suit. Tripoli était sous le contrôle de l’Egypte et en avait reçu des provisions comme nous l’avons mentionné durant l’année 501 de l’Hégire (1107).

Au mois de Sha’ban de cette (présente) année arriva une grande flotte en provenance des terres des croisés et commandée par un comte nommé Raymond Ibn St Gilles. Les navires débarquèrent des hommes, les armes, des provisions qui assiégèrent Tripoli qui avait été auparavant assiégé par le comte de Cerdagne, le neveu de St Gilles et qui n’est pas le neveu de ce Raymond. Au contraire, il est un autre comte cependant, il y eut  une dissension entre eux qui provoqua des problèmes et finalement un combat. Tancrède, le souverain d’Antioche, vint à Tripoli pour aider le comte de Cerdagne mais Baldwin, le roi de Jérusalem, vint avec son armée et fit la paix entre eux.

Au mois de Sha’ban, Tous les croisés descendirent ensemble sur Tripoli et commencèrent l’attaque et pressèrent durement sa population. Ils amenèrent leurs tours au contact de la muraille et quand la garnison et le peuple les virent, ils désespérèrent et leur volonté sombra. La dernière livraison de la flotte égyptienne avec des provisions et des renforts augmenta leur état vulnérable. La flotte était en retard, et bien que tout était prêt et le nécessaire fourni, ils se disputèrent durant plus d’une année et quand ils mirent les voiles, le vent les repoussa et ils ne purent arriver à Tripoli, afin qu’Allah Exalté puisse réaliser Son plan prédéterminé.

Les croisés intensifièrent leur combat et leurs assauts par les tours de siège et finalement assaillirent la ville qu’ils prirent par la force des armes le lundi 11 du mois de Dzoul Hijjah. Ils ravagèrent la ville, prirent prisonniers les hommes, asservirent les femmes et les enfants et saisirent les biens. La quantité d’argent, de marchandises et de livres des institutions d’apprentissage qu’ils pillèrent des habitants fut au-delà de tout calcul ou d’estimation. La population locale était l’une des plus riches et les plus commercialement développée. Le gouverneur et la petite garnison qui demandèrent des conditions avant que la ville ne tombe, quittèrent la ville en toute tranquillité et pour Damas. Les croisés soumirent le peuple à toutes sortes de torture pour qu’il livre les endroits ou leurs trésors étaient cachés et ils furent enlevés des endroits où ils les avaient cachés.

 

La conquête de Joubayl et de Banyas

 

Lorsque les croisés finirent avec Tripoli, Tancrède, le seigneur d’Antioche, alla à Banyas qu’il assiégea et prit après avoir garanti les vies de ses habitants puis, il investit la ville de Joubayl, où se trouvait Fakhr al-Moulk Ibn ‘Ammar, l’ancien seigneur de Tripoli dont les provisions étaient au plus bas. Tancrède lutta contre la ville jusqu’à ce qu’il l’emménage, après des conditions, le 22 du mois de Dzoul Hijjah de cette année. Fakhr al-Moulk Ibn ‘Ammar partit en sureté.

Fakhr al-Moulk Ibn ‘Ammar se rendit à Shayzar, où il fut honorablement et respectueusement reçu par son souverain, le sultan l’émir Ibn ‘Ali Ibn Mounqid al-Kinani, qui lui demanda de rester avec lui mais il déclina et alla à Damas, où Toughtakin le salua, lui donna d’abondantes provisions et des cadeaux généreux. Et au mois de Mouharram de l’année 502 de l’Hégire (1108), il lui donna le grand district d’az-Zabadani, une des régions dépendantes de Damas, comme un fief.

 

Peu après la conquête de Tripoli, la flotte égyptienne arriva avec hommes, de l’argent, des denrées alimentaires et d’autres choses, suffisantes pour une année. La flotte mouilla à Tyr, huit jours après la chute de Tripoli à cause du destin qui avait été décrété le peuple de Tripoli. Les provisions et les réserves qu’ils apportèrent furent distribuées dans les régions nécessiteuses, Tyr, Sidon et Beyrouth.

 

 

Au mois de Mouharram de cette année, le sultan envoya son vizir, Nizam al-Moulk Ahmad Ibn Nizam al-Moulk, à la forteresse d’Alamout pour lutter contre al-Hassan Ibn as-Sabbah et les ismaéliens qui étaient avec lui. Il débuta le siège mais l’hiver descendit sur eux et il se retira  sans avoir rien accomplit.

 

Au mois de Sha’ban de cette même année, le vizir Nizam al-Moulk se rendit dans la mosquée centrale quand un batini bondit sur lui et le frappa avec des dagues, le blessant au cou. Il resta malade quelque temps mais finit par récupérer. Le hashashi qui le blessa fut saisit, abreuvé de vin jusqu’à ce qu’il soit ivre et questionné ensuite sur ses complices. Il nomma plusieurs personnes de la mosquée Ma’mouniyah qui furent arrêtés et exécutés.

 

Toujours cette même année, Yahya Ibn Tamim, le seigneur d’Ifriqiyah, équipa quinze galères et les envoya vers les terres byzantines. La grande flotte byzantine les intercepta et une bataille s’ensuivit. Six des galères musulmanes furent saisies mais après cette défaite, nulle autre force de Yahya ne fut défaite en mer ou sur la terre. Il envoya son fils, Abou al-Foutouh, dans la ville de Sfax pour y être le gouverneur mais le peuple se révolta contre lui et ravagèrent le palais. Ils tentèrent de le tuer mais Yahya employa différents stratagèmes jusqu’à ce qu’il répandit la division parmi eux et brisa leur front uni. Il les saisit alors et les emprisonna mais pardonna leur carnage et leurs crimes.

 

Cette année, l’émir Ibrahim Yinal, le seigneur d’Amid mourut. Il était un méchant souverain, célèbre pour ses injustices. Beaucoup d’habitants émigrèrent à cause de sa tyrannie. Après lui son fils prit le pouvoir et il était un meilleur homme dans bien des manières.

 

Le 8 du mois de Dzoul Qi’dah, une comète apparut dans le ciel de l’est avec une queue s’étendant au sud et resta en vue jusqu’à la fin de Dzoul Hijjah avant de disparaitre.

 

La capture de Sidon par les croisés

 

Au mois de Rabi’ Thani de l’année 504 de l’Hégire (1110), les croisés prirent possession de la ville de Sidon sur la côte de la Syrie après le débarquement de soixante navires croisés chargés d’hommes et des provisions, accompagnées par un de leurs princes qui avaient l’intention de réaliser un pèlerinage à Jérusalem et pour mener la guerre, comme il l’affirma, contre les Musulmans. Baldwin, le roi de Jérusalem, les rencontra et un arrangement fut fait entre eux pour attaquer le territoire islamique. Ils quittèrent Jérusalem et assiégèrent durement par terre et mer la ville de Sidon le 3 du mois de Rabi’ Thani. 

 

La flotte égyptienne bien qu’ancrée à Tyr fut incapable d’aider Sidon. Les croisés, qu’Allah les maudisse, construisirent une solide tour de bois qu’ils couvrirent d’une couverture protectrice contre le feu et les pierres et qu’ils avancèrent pour un assaut. Quand les habitants de Sidon la virent, leurs cœurs flanchèrent et ils craignirent que la même chose qui était arrivé aux gens de Beyrouth ne leur arrive. Ils envoyèrent donc un certain nombre de Qadi et de Sheikhs aux croisés qui demandèrent des conditions au roi, qui leur donna la sécurité pour leurs vies et leurs biens ainsi qu’à la garnison. Ils accordèrent la sécurité à ceux qui voulurent rester avec eux ainsi qu’à ceux qui décidèrent de partir et un serment à cet effet leur fut donné. Le gouverneur ainsi qu’un grand nombre de notables quittèrent la ville le 20 du mois de Joumadah pour aller à Damas tandis qu’un grand nombre resta dans la ville sous garantie. Le siège dura quarante-sept jours.

Baldwin partit alors pour Jérusalem mais revint peu de temps après à Sidon et imposa aux Musulmans qui étaient restés le paiement de 20 000 dinars ce qui les appauvri et englouti leur richesse.

 

 

Comment les Egyptiens prirent le contrôle d’Ascalon

 

Ascalon avait appartenu aux ‘oubaydi d’Egypte quand le calife al-Amir Bi-Ahkamillah y nomma un gouverneur appelé Shams al-Khilafah qui entra en contact avec Baldwin, le roi des croisés en Syrie, et arrangea une trêve avec lui, lui donna des cadeaux d’argent et de marchandises puis avec le soutien de Baldwin, il échappa au contrôle égyptien.

Cependant, al-Amir Bi-Ahkamillah, le souverain d’Egypte et son vizir, al-Afdal l’émir al-Jouyoush en furent informés et ils furent si outragés qu’ils levèrent une force qu’ils envoyèrent à Ascalon avec un de leur grand général et annoncèrent que son but était de faire la guerre contre les croisés mais l’informèrent secrètement qu’il devrait arrêter Shams al-Khilafah quand il se présenterait devant lui et qu’il devrait lui-même rester en poste à Ascalon comme l’émir. L’armée se mise en route mais Shams al-Khilafah se douta de quelque chose et refusa d’apparaître devant l’armée égyptienne. Il proclama alors ouvertement sa rébellion et expulsa les troupes égyptiennes qu’il était avec lui de peur d’eux.

 

Quand al-Afdal fut informé, il craignit qu’il puisse abandonner Ascalon aux croisés et il lui envoya un messager qui le réconcilia et a calma ses craintes. Il le confirma à son poste et lui restitua son fief en Egypte. Puis, Shams al-Khilafah s’effraya des gens d’Ascalon et réunit un groupe d’Arméniens qu’il recruta pour en faire ses troupes. Les choses restèrent dans l’état jusqu’à la fin de l’année 504 de l’Hégire (1111) et tandis que les citadins étaient forts mécontents de la situation, certains notables bondirent sur lui alors qu’il était sorti et le blessèrent. Il s’enfuit dans sa résidence mais ils le poursuivirent et le tuèrent puis  pillèrent sa maison et son contenu ainsi que d’autres maisons appartenant à des hommes de riches, sur ce prétexte. Ils envoyèrent alors en Egypte un rapport de l’affaire à al-Amir et à al-Afdal, qui furent ravis et généreux envers ceux qui apportèrent ces bonnes nouvelles. Ils envoyèrent un nouveau gouverneur pour y résider et exercer la bienveillance et l’équité envers le peuple. Cela fut fait et les peurs furent tranquillisées.

 

La prise de la forteresse d’al-Athrib et d’autres par les croisés

 

Cette année, le seigneur d’Antioche rassembla ses forces parmi les croisés et mobilisa la cavalerie et l’infanterie puis marcha vers la forteresse d’al-Athrib, située à douze kilomètres de la ville d’Alep qu’il assiégea et coupa l’arrivée de ses provisions si bien que la situation devint sérieuse pour les Musulmans qui creusèrent un tunnel sous la citadelle dans l’espoir d’en émerger pour attaquer la tente du seigneur d’Antioche et le tuer. Quand le tunnel fut creusé et qu’ils s’approchèrent de sa tente, un jeune arménien chercha protection auprès du roi et l’informa du plan. Le souverain prit donc des précautions et resserra l’étau jusqu’à ce que la forteresse tombe par la force des armes. Deux mille habitants furent tués et le reste asservis et prit prisonniers. Puis il marcha sur la forteresse de Zardana, qu’il assiégea et prit aussi en traitant la population comme à al-Athrib. Quand les habitants de Manbij furent informés, ils abandonnèrent la ville de peur des croisés ainsi que les gens de Balis. Les croisés, qu’Allah les maudisse, se rendirent dans ces deux villes vidées de toute âme avant de se retirer à leur tour.

 

Une force de croisés alla à Sidon et les gens leur demandèrent des conditions qui furent accordés et ils reprirent la ville. La peur des Musulmans envers les croisés était si grande que leurs cœurs remontèrent dans leurs gorges, convaincu que les croisés gagnerait le contrôle de toute la Syrie parce qu’il n’y avait personne pour les protéger et les défendre. Les souverains des territoires syriens entre les mains des Musulmans commencèrent à négocier des trêves avec eux mais les croisés refusèrent de leur accorder excepté pour une courte période en échange du paiement de la Jizyah. Le prince Ridwan, le seigneur d’Alep, fit la paix avec eux sur le paiement de 32 000 dinars et d’autres articles, dont des chevaux et des vêtements. Le seigneur de Tyr fit une trêve sur le paiement de 7 000 dinars ainsi qu’Ibn Mounqid, le seigneur de Shayzar, pour 4 000 dinars. Le seigneur de Hama, ‘Ali al-Kourdi fit la paix avec eux pour 2 000 dinars. La période de la trêve était jusqu’au mûrissement et la moisson des récoltes.

 

Un certain nombre de navires quittèrent l’Egypte transportant des marchands et leur grande quantité de marchandises furent interceptés par les navires croisés et saisis. Tout ce que les marchands avaient  devint du butin et ils furent eux-mêmes prit prisonniers.

 

Un certain nombre d’habitants d’Alep voyagèrent à Baghdad pour chercher de l’aide contre les croisés et arrivés à Baghdad, ils furent rejoints par une foule de juristes et d’autres. Ils se rendirent à la mosquée du sultan et demandèrent de l’aide mais ils furent empêchés de prier et détruisirent la chaire. Le sultan promit d’envoyer des troupes pour le Jihad et envoya une nouvelle chaire pour la mosquée du sultan du palais califal. Le vendredi suivant, ils se rendirent à la mosquée du palais dans la résidence califal, accompagnée par les gens de Baghdad. Le chambellan de palais leur refusa l’accès mais ils le débordèrent et entrèrent dans la mosquée où ils brisèrent la garniture du placard ainsi que la chaire et la prière du vendredi fut de nouveau annulée. Le calife envoya un messager au sultan pour s’enquérir sur cette affaire et lui ordonner d’y remédier. Sur ce le sultan ordonna aux émirs avec lui de retourner dans leurs terres et de se préparer au Jihad. Il envoya son fils, le prince Mas’oud, avec l’émir Mawdoud, le seigneur de Mossoul qui se rendirent d’abord à Mossoul avec l’espoir que les émirs les rejoindraient et continueraient à lutter contre les croisés. Ainsi l’année arriva à sa fin et ils se mirent en route durant l’année 505 de l’Hégire (1111) ou il arriva ce que nous rapporterons si Allah le Tout-Puissant le veut.

 

Un envoyé de l’empereur byzantin arriva chez le sultan pour lui demander son soutien contre les croisés et lui conseilla de lutter contre eux et les éconduire de ses terres. Son rival précéda l’arrivée des gens d’Alep qui dit au sultan : « N’as-tu pas honte devant Allah Tout-Puissant que l’empereur byzantin montre plus de ferveur pour l’Islam que toi et te conseille de mener le Jihad contre nous ? »

 

Cette année, un vent noir souffla en Egypte qui obscurcit le monde et emporta la respiration des gens. Personne ne fut capable d’ouvrir ses yeux et celui qui le fit ne put même pas discerner sa propre main devant lui. Le sable descendit sur les gens et ils désespérèrent de la vie, convaincus qu’ils allaient périr. Alors il s’éclaircit un peu et les cieux s’éclaircirent. Cela dura du début de l’après-midi jusqu’après le coucher du soleil.



[1] Un Atabeg est un titre de noblesse d’origine turc et en général attribué à un gouverneur et le premier à qui fut attribué ce titre fut le vizir Nizam al-Moulk.