Chapitre Deux

 

 

UNE OPTION FONDAMENTALE : LA MARINE DE GUERRE

 

Durant trois siècles, le gouvernement d’Alger attacha une importance sans égale à la marine, quelquefois même, au détriment de l’armée de terre. La sollicitude des responsables pour cette arme peut-elle s’expliquer ? Une marine de guerre seule était- elle indispensable ?

 

A- DES MENACES EXTERIEURES PERMANENTES :

 

Les raisons de se doter d’une marine forte ne manquaient pas. Les frontières à l’Est et à l’Ouest étaient moins menacées que la côte. Il suffit de comparer les expéditions européennes du XVIème au XIXème siècle, d’une part, et les quelques escarmouches avec les Marocains et les Tunisiens d’autre part, pour mesurer d’où venait le véritable danger. 

Quant au Sud, l’étendue du Sahara était une barrière naturelle suffisamment efficace pour qu’une agression de ce côté soit impensable. 

La croisade anti-algérienne était devenue quasi-permanente depuis la chute de Grenade (1492). Le péril réel venait de la mer et guettait le littoral et en particulier la capitale. 

Dévots, militaires, aventuriers et illuminés montaient des câbles et appelaient, ouvertement, à « l’extirpation des corsaires et à la destruction d’Alger. » De Saint Louis à Charles X, que de projets avaient été conçus pour occuper une portion du Maghreb ! 

On se mit à explorer les côtes sous le motif de curiosité touristique ou sous l’habit d’hommes d’affaires, on repérait les lieux de mouillage, on élaborait des plans, on ramassait de grosses sommes d’argent et on organisait la course pudiquement appelée contre-course. On se préparait « à crever l’abcès avec Alger[1]. » 

Il serait intéressant de passer en revue quelques passages de cette littérature propagandiste destinée à ragaillardir les Européens et les inciter à conquérir le Maghreb. 

« Si cette terre appartenait aux chrétiens, disait Haëdo, et qu’ils la travaillassent de leurs propres mains, il n’y aurait pas dans le monde entier de pays plus fertile[2]. » 

Marmol dans sa « Description de l’Afrique » faisait l’éloge de la Sainte Ligue de 1573, et vantait la conquête d’un si beau pays. C’est pourquoi on trouve dans son livre tant de précisions sur les ressources dans cette contrée[3]. 

Les projets d’occupation étaient clairs. Ecoutons Lanfreducci[4] : « L’endroit le plus facile pour donner l’assaut et s’emparer d’Alger est, de l’avis commun, celui de Babeluet (Bab el-Oued) après avoir pris le burchio de l’Ucciali[5] parce qu’en ce point l’armée serait à couvert des autres Burchi et de l’Alcazaba que l’on pourrait battre sûrement des collines et petites montagnes faciles qui dominent la ville avec abondance d’eau pour l’armée. » 

De toutes les villes côtières du littoral méditerranéen, Alger était la principale cible : « Il n’y a pas de doute qu’une fois Alger rasée, s’effondrerait facilement tout le pouvoir de la maison ottomane dans toute la Barbarie de l’Egypte en deçà [...] Il n’est pas douteux non plus qu’Alger, une fois rasée, tous les corsaires infidèles disparaîtront et les villes de la Barbarie seront facilement prises. De cette sorte, seront mises à l’abri toutes les côtes non seulement d’Espagne mais de toute la chrétienté car, l’aide d’Alger manquant à celle du Levant étant si lointaine et incertaine, il serait très facile aux chrétiens d’extirper les autres corsaires de Tripoli, Djerba, Sousse, Bizerte, Bône et autres[6]. » 

Mais voilà que la capitale de la Régence était devenue inébranlable. Certains stratèges européens préconisaient de s’emparer d’autres villes algériennes. 

« Il faudrait prendre Bougie, suggère Lanfreducci, fortifier les deux points de son port, ce qui serait chose longue, difficile et non sans danger[7]. » 

Il n’y a rien d’étonnant à rencontrer dans les archives d’Espagne et d’Italie, des descriptions d’une série de ports algériens faites par des capitaines corsaires en vue d’un débarquement ou d’une razzia. On y note les facilités de débarquement et de rembarquement, les points d’eau douce, les possibilités de ravitaillement, on y joint des croquis et légendes[8].

 

Au XVIIème siècle, l’idée de croisade trouvait de nombreux adeptes.

 

D’Aranda avait son projet en 1656, Saint Vincent de Paul conseillait une expédition contre Alger en 1659 prétextant la nécessité de libérer « dix à vingt mille chrétiens détenus en Barbarie. » Le vœu constant des ordres religieux trinitaires, Pères de la Merci et autres, était de voir les gouvernements européens et, en particulier la France, intervenir. Sur la fin de sa vie, Saint Vincent de Paul s’efforçait de faire entreprendre une expédition et sollicita des Marseillais les subsides nécessaires pour en couvrir les frais. 

Un marin de l’époque, le Chevalier Paul, « le seul chef d’escadre qui gardât la haine sacrée des infidèles[9] » tenta l’aventure. En 1660, on lui confia la charge d’une expédition. Après Tripoli et la Goulette (en juillet), le voici devant Alger en août. Ce fut l’échec. 

« Les Tunisiens, rapporte Charles-Roux, s’étaient hâtés de tirer leur épingle du jeu, dépêchant des négociateurs au Roi [...] Mais les Tripolitains et Algériens firent meilleure contenance qu’on ne l’avait attendu d’eux, l’effet de surprise fut manqué, des indiscrétions les ayant mis sur leurs gardes. Paul revint d’Alger sans rien rapporter[10]. »

 

La deuxième tentative de 1661 ne fut pas plus probante.

 

Dès son arrivée au gouvernement, le ministre Colbert demandait un rapport sur les problèmes avec Alger à l’intendant général de Toulon. 

En voici la réponse :

« 1/ S’emparer d’un port sur la côte d’Afrique, par exemple la ville et la forteresse d’Yppone (Bône) où l’on dit qu’il y a un port considérable. De là, on réduirait Alger, Tripoli et d’autres lieux à soumettre aux lois de notre Grand Roi…

2/ La seconde chose regarde Alger. Là, on peut en brûler les vaisseaux dans le port ou maçonner six de nos vieux vaisseaux et de les mener enfoncés dans l’embouchure du port d’Alger (il n’y a que 21 pieds d’eau) à la faveur du canon et de la mousqueterie de nos vaisseaux de guerre et de quelques galères pour remorquer et placer les vaisseaux maçonnés avant que de les enfoncer. On bouchera ainsi un port pour lequel les Barbares ont dépensé plus d’un million pour remettre en état. »

 

On étudia les conditions climatiques, on chercha la saison la plus favorable. « Tout débarquement au Maghreb doit se faire avant les fortes chaleurs, c’est à dire, au printemps » affirme Avity[11]. Il faut affamer Alger par une course et un blocus savamment organisé. Tous les projets, les plus réalistes ou les plus extravagants, étaient traités dans les chancelleries d’Europe.

 

Le mémoire du chevalier Paul en fut un. 

« A les traquer sur mer, disait-il, devraient être employés vingt-cinq navires de guerre dont dix forts vaisseaux, bien fournis en artillerie de gros calibre pourvus d’un nombreux équipage, quatre brûlots, le reste en frégates légères et bonnes à la voile Que si les pirates s’étaient terrés dans leurs ports, on pourrait résoudre de les brûler et mettre leurs villes en désordre et, particulièrement Alger, attendu qu’est exposée au canon. » 

« Deux des vaisseaux devraient être aménagés pour porter des mortiers à bombes qui accableraient de leurs projectiles les maisons de bois remplies de monde, aux toitures en terrasses, en sorte qu’il n’y aurait point de bombe qui ne fit un grand fracas et mortalité. » 

« La mer étant l’alliée naturelle d’Alger, on résolut d’attaquer la ville par terre. On constate que de ce côté, elle était beaucoup moins fortifiée et pour s’en emparer, il conviendrait de débarquer au Cap Matifou, à quatre milles d’Alger et d’y arriver au début de juillet parce qu’à cette époque, une grande partie des troupes du Dey étaient dans les provinces pour percevoir les impôts, que la rivière entre le cap et Alger était à sec et que la mer était calme[12]. »

 

Il fallait donc recourir à l’armée de terre et l’intéresser tout d’abord :  

« Le pays est riche, peuplé et le revenu en triplerait en nos mains, » leur soufflait -on, « on y pourrait faire assez de butin pour enrichir une armée de cent-mille hommes et assez d’esclaves pour armer cinquante galères. » 

Pour mieux préparer les interventions armées et venir à bout d’une résistance algérienne toujours efficace, on persistait à dresser des plans et élaborer des projets, comme celui de 1666 publié à Cologne. 

« Etat des forces de cette puissance. Tableau des forces militaires et navales nécessaires pour réussir un débarquement début juillet vers l’oued El Hamiz, alors à sec, sous le Matifou. Cent à cent-cinquante-mille écus devront être prévus pour les seuls frais de « voiture », » des « munitions » et de « l’attirail » en supposant une campagne de trois mois. Opération rentable ! Pays très peuplé... 

Alger est aussi un pays très riche qui rendrait trois fois plus s’il était mis en valeur : mines d’or et d’argent encore inexploitées et surtout le blé[13]. » 

Un des champions de la lutte contre les Algériens était le chevalier d’Arvieux. Il rêvait de châtier « réellement et une fois pour toutes » les corsaires de la Régence. Il consigna, dans ses mémoires, les points faibles des fortifications de la capitale, projeta avec grande minutie un débarquement à Bougie et rédigea, pour le Prince du Portugal, un plan afin de ruiner la République d’Alger[14]. » 

La politique de Louis XIV, monarque orgueilleux et avide de gloire, préconisait contre notre pays, l’action navale et même l’établissement militaire permanent. Il ne restait qu’à bien choisir un lieu de débarquement sûr après tant de mésaventures. 

Clerville, après avoir retenu Alger, pencha ensuite vers Stora, Bougie, La Calle ou Bône. Sur la même question, Beaufort[15] avait ses idées. Pour départager les stratèges, un conseil fut réuni à Toulon et Stora fut retenu. 

La France n’était pas le seul pays à vouloir s’emparer du littoral algérien. L’Espagne y pensait également. Ricaud, un ingénieur au service de cette puissance élabora, en 1754, un plan d’attaque : descendre sur la plage de Bab al Wad, c’est le lieu le moins fortifié de la côte Est[16], mais le mieux, c’est de descendre entre le Cap Cassim et Sidi Fredj. On surprendrait Alger par l’arrière[17]. 

Catherine II de Russie était, elle aussi, préoccupée par l’aide qu’apportaient les Régences d’Afrique du Nord à l’empire ottoman et l’attaque de ses bateaux par les navires algériens. Pour pénétrer en Méditerranée et construire une base, elle avait grand besoin de renseignements sur le flanc sud de cette mer. 

Un officier de marine, Natvei Grigorievitch Kokostov[18] se chargea de le faire. Il entreprit de voyager incognito, une fois sur un bateau français, en qualité d’homme d’affaires, une autre, sur une polacre vénitienne, comme second de navire. Entre le 14 juillet et le 7 août 1777, il scruta attentivement le littoral Est en vue d’une action de la marine russe. Ecoutons-le :

« J’évitai toutes les occasions de découvrir ma véritable condition et pour cela, je descendis rarement à terre, cependant, j’eus le moyen de connaître tout ce qui était nécessaire[19]. »

 

Le premier quart du XIXème siècle voit s’accentuer les desseins de colonisation européenne.

 

Domingo Badia[20] séjourna en Afrique « pour l’avantage moral et politique de l’Espagne. » Se faisant passer pour musulman, il entreprit, sans danger, un long voyage, en 1803, sous le nom d’Ali Bey. Son mémoire sur la colonisation remis au Duc de Richelieu[21] commence ainsi : « l’Afrique septentrionale est la colonie naturelle de l’Europe. » On trouve dans cet écrit, les arguments classiques pour inciter les gouvernements d’Europe à envahir le Maghreb : 

« L’Afrique septentrionale produit et peut produire toutes les denrées que nous tirons de l’Amérique et de l’Asie, elle donne du sucre, du tabac, de l’indigo, elle donnerait également le cacao, le café, la cochenille, le thé, etc [...] en plus « des trésors inépuisables des mines d’or de bambouc[22]. »

 

Les dernières années de la présence turque en Algérie, coïncident avec un appel de plus en plus pressant à la colonialisation. Un bourgeois italien, Pananti, après un bref séjour à Alger en 1814, rappelle aux souverains chrétiens « le droit légitime de venger les injures qu’endurent leurs sujets » et se demande pourquoi l’armée « n’a-t-elle pas été se saisir d’Oran ou de Bône ? » La vengeance chez Pananti n’exclut pas le profit. C’est pourquoi, il développe longuement tous les avantages d’une occupation. 

« Où l’Europe peut-elle trouver une acquisition plus importante que celle des rivages du Nord de l’Afrique ? Aucune des colonies établies jusqu’à ce jour sur quelque point de l’univers que ce soit ne peut entrer en comparaison avec cette côte, soit par le climat, soit pour les productions naturelles. Dans aucun parage, les peuples d’Europe ne rencontreront les ressources inépuisables de cette belle contrée où croissent presque spontanément les productions de la plus part des autres. Les Romains avaient placé leur principale gloire à coloniser l’Afrique si justement appelée par eux « le jardin de la nature. » Aussi, ne cessa-t-elle de leur fournir des blés, du vin et de l’huile et de pourvoir aux besoins de leur abondante population[23]. »

 

Pananti n’était pas le seul à exhorter l’Europe à se décider. Un de ses compatriotes, Livio Pascoli, avait ses idées sur la conquête : 

« Le temps est venu et les circonstances sont favorables pour une action concordée des états européens contre les barbaresques et contre Alger, en particulier, de manière à réaliser ce qui fut paralysé par les prestiges de l’envie et par le brouillard du temps. » 

Il propose une éventuelle stratégie de l’attaque européenne ; une expédition en provenance de Ceuta et de Bône répartie en deux corps de débarquement, attaquerait Alger avec pour but, la constitution de tout le Maghreb en « colonia europa[24]. »

 

Ainsi la côte algérienne avait constitué, depuis longtemps comme on vient de le constater, la région de la Méditerranée la plus convoitée. La prise de cette côte fut le rêve de plusieurs puissances du vieux continent. Le vis-à-vis aiguisait les appétits.

 

Ces nombreuses prises de position étaient connues des dirigeants du pays, c’est pourquoi ils avaient mis tous leurs espoirs dans une marine de guerre efficace capable de faire échouer tant de plans et de relever tant de défis. C’est pourquoi aussi, cette marine devait être la machine la mieux rodée de la Régence.

 

Certes, les guerres imposées à la République paralysaient le négoce du pays. Il était alors plus urgent de se défendre que de s’enrichir par le commerce.

 

B - UNE TIMIDE MARINE MARCHANDE :

 

Une Régence tournée résolument vers la mer pouvait-elle se passer d’une marine de commerce ? La question fut posée avec un légitime étonnement, les temps modernes ayant favorisé les échanges commerciaux et les transports maritimes notamment en Méditerranée.

 

Sans se priver entièrement d’un tel instrument de richesse, la Régence avait versé durant trois siècles, un lourd tribut au grand commerce extérieur étranger et s’était placée, nous verrons pourquoi, sous la dépendance des nations chrétiennes.

 

Mais le fait de consacrer tous les efforts et toutes les ressources à la marine de guerre peut cependant s’expliquer.

 

1- La sécurité des Raïs :

 

Presque tous les Raïs étaient, à l’époque, d’origine européenne. Les convertis, (les renégats pour les plumes chrétiennes) avaient offert leurs bras et leur savoir à la Régence. Pour diverses raisons, bon nombre de Français, d’italiens, de Grecs, d’Albanais et d’autres servaient en Algérie. Ils avaient embrassé l’Islam. La plupart étaient d’anciens navigateurs sur des bateaux européens. Le pavillon algérien procurait gloire et fortune. Puis, le courage et la compétence permettaient de gravir les échelles sociales. Aussi le mouvement de conversion était-il difficile à contenir.

 

Devenus musulmans à part entière, ces Raïs ne pouvaient guère commander des navires de commerce et entrer dans un port chrétien. L’inquisition y était très vigilante et le bûcher attendait ceux qu’on appelait, avec mépris, « les Turcs de profession. » En prenant la tête d’une unité algérienne, ces derniers couraient à leur perte. Ils préféraient servir dans la marine de guerre. Afin d’épargner aux Raïs les tourments de l’Eglise, le gouvernement d’Alger faisait appel, pour les importations, et exportations, à des armateurs étrangers. En effet, plusieurs Raïs, pris en mer, avaient payé de leur vie leur activité en Algérie.

 

Le 27 juin 1752, une corvette anglaise passant par Cadix arriva et informa le Dey que six « renégats » avaient été pris par les Espagnols sur le vaisseau algérien « Le Dantzick. » Quatre d’entre eux, sous les pressions et les menaces de mort, « rentrèrent alors dans le giron de l’Eglise » mais les deux autres furent brûlés vifs, en vertu d’un jugement de l’Inquisition. L’un de ces malheureux était majorquin, le second était anglais[25].

 

La ténacité répressive du Saint Office en Espagne était une des principales causes du manque de capitaines et par là, de la faiblesse du trafic maritime.

 

2 - Le monopole français du commerce :

 

Dès le début du XVIème siècle, les relations économiques entre la Régence et les pays chrétiens étaient, malgré les heurts et les oppositions religieuses, en progrès constants.

 

« Nulle part, nous dit Haëdo, sur cette côte il ne vient autant de marchands chrétiens qu’à Alger. Les bâtiments qui viennent d’Angleterre apportent quantité de fer, de plomb, d’étain, de cuivre, de la poudre et des draps de toute sorte. Ceux venant d’Espagne et de Valence sont chargés de vin, de sel, d’essences odorantes, de cochenille, de coiffures et de haïks teints en rouge, de perles et aussi d’or et d’argent monnayés dont ils tirent un grand bénéfice. Les navires de Marseille et autres ports de France apportent toute espèce de mercerie, de cotonnades, de fer, d’acier, de clous, de salpêtre, d’alun, de soufre et même de l’huile lorsqu’il en manque en Berbérie, ils apportent aussi de la coutellerie fine, de la gomme, du sel et du vin, même des chargements de noisettes et de châtaignes. De Gênes, de Naples et de la Sicile, il vient de la soie filée de toutes couleurs, des étoffes de Damas, du satin et du velours de toutes sortes. Venise fournit de la chaudronnerie, des draps, des coffres, des glaces et du savon blanc[26]. »

 

Le privilège de cette activité revenait aux Juifs livournais et aux négociants marseillais résidant à Alger ou dans les villes côtières de l’Est algérien. Ils exportaient cuirs, céréales, laines et corail. Alger abritait une importante maison de commerce dirigée par les frères La Porterie de Marseille. La maison Gunon était florissante et le restera jusqu’à la révolution française. Devoulx avait dressé une longue liste de ces marchands qui faisaient de bonnes affaires[27]. »

 

Les Juifs d’Italie prenaient à leur compte le produit des prises qui ne trouvaient pas preneurs sur place et l’écoulaient en Europe. Tous ces hommes d’affaires avaient ouvert aussi des comptoirs dans les principaux ports de l’Est algérien.

Pour le transport des marchandises, on faisait appel aux navires chrétiens. La marine marchande française, surtout à partir du XVIIIème siècle, était mieux outillée pour ce genre d’activité[28]. On avait recours à ses services pour se soustraire aux frais élevés des nolis. Rien d’étonnant si l’on voyait fréquemment, dans les ports de la Régence, les barques : L’aimable Thérèse, Les Cinq frères, Le Saint Pierre, La Marie Marguerite, La Marseillaise... Les pinques : Notre Dame des Anges, Le Saint Félix de Valois, La Vierge du Bon Chemin, Le Pentagone, La Marie Madeleine, L’heureux Retour... Les tartanes : Saint Jean de Matha, La Sainte Rose, Le Génie, Le Saint Jean... Les brigantins : Le Saint Tropez, IM Providence, L’Olympe... Les bricks : Le Courrier de Marseille, L’Aimable Paulin... La Polacre : Sainte Anne La Bonne Réussite et tant d’autres navires grands et petits.

 

Quand la paix entre Alger et Versailles fut rompue en 1687, le Dey fit saisir, dans le port de la capitale, onze bâtiments de France.

 

Grâce aux requêtes des capitaines auprès du consul de France en poste ici, grâce aux rapports des commissions d’enquête ordonnées par ce diplomate, grâce aussi aux manifestes des marchandises embarquées d’Alger vers les ports de l’Europe, on peut se faire une idée de l’importance des lignes maritimes reliant Alger aux principales villes marchandes comme Marseille, Livourne, Gênes et Naples, et de la part prépondérante de la marine française dans ce trafic.

 

Les provinces ottomanes riveraines de la Méditerranée intéressaient également, à partir du XVIIème siècle, le transport européen. Ce cabotage, le plus souvent de grande ampleur, était appelé à l’époque la « caravane maritime » et mobilisait de nombreux navires qui sillonnaient la Méditerranée sous forme de campagne de un ou deux ans selon les contrats signés. Les armateurs français y jouaient le grand rôle.

 

3 - Des méthodes déloyales :

 

Pour décourager les Musulmans, les Maghrébins en particulier, de pratiquer, directement et par leurs propres navires, un commerce lucratif, les Européens, notamment les Marseillais, eurent recours à des procédés défiant les lois et la morale. 

Afin d’abattre la concurrence musulmane, les négociants de la cité phocéenne utilisaient les manœuvres les plus rebutantes : tracasseries administratives, mauvaise foi caractérisée, obstacles lors du déchargement des marchandises algériennes, refus des places dans les entrepôts, séjour difficile sinon impossible... 

D’autre part, si les commerçants algériens avaient, à Constantinople Smyrne, Rhodes, Alexandrie, Beyrouth, Le Caire ou Tunis, des « Wakil » pour les renseigner, les aider et veiller sur leurs intérêts, ils n’avaient rien de semblable en terre chrétienne. L’absence de consuls[29], de correspondants ou d’interprètes dévoués, l’inexistence de comptoirs comme ceux établis à Alger, La Calle ou Arzew au profit des étrangers, tous ces aspects négatifs rendaient la tâche difficile sinon périlleuse. 

Ne pouvant, à eux seuls, connaître les marchés, les méthodes d’écoulement et les rouages économiques, nos marchands n’étaient pas en mesure de tenir tête aux négociants français, juifs ou grecs « habiles à écouler les marchandises les plus médiocres et à tromper la vigilance des douaniers[30]. » 

Le Musulman tenait à son honnêteté et à sa loyauté en matière de transactions. Il était réputé pour sa bonne foi. Cependant, malgré les barrières et les problèmes, il y eut des tentatives[31], mais, d’une manière générale, les Européens voyaient toujours dans le pavillon marchand un leurre et dans le paisible caboteur, le bandit sans scrupule[32]. 

La Chambre de Commerce de Marseille veillait, jalousement, et suivait, attentivement, toute activité des Algériens dans la cité. Elle se servait de tous les prétextes pour freiner leurs efforts. Elle multipliait les démarches auprès de la Cour. 

« La Chambre, écrivait Vallière, fatiguée des embarras que lui causaient les fréquents voyages des Maures algériens qui commettaient beaucoup de désordres dans la ville de Marseille, en ayant porté des plaintes, le Ministre chargea le Sieur Thomas de prévenir le Dey qu’on ne recevait, à l’avenir, ses sujets en France qu’autant qu’ils seraient porteurs d’un passeport signé de lui-même[33]. »

 

En 1771, la même Chambre revint à la charge en « signalant avec regret au Ministre de la Marine, (l’Abbé Therray) les relations commerciales que les Barbaresques ont établies directement à Marseille. » 

M. l’Abbé [...] partageait leur regret, mais il n’osa pas prescrire des mesures contre les commerçants musulmans dans la crainte de soulever des réclamations de la part du gouvernement algérien[34]. » 

Le silence du Ministre n’empêcha nullement MM. du Commerce d’utiliser toutes les ruses et tous les obstacles afin d’éloigner les Algériens et, avec eux, leurs armateurs.

 

Sans échanges commerciaux, il était difficile de faire travailler une flotte marchande.

 

4 - Les entreprises de Marseille

 

Devant une situation aussi défavorable, et malgré les efforts pour garder une partie du commerce international, les Algériens se retirèrent des affaires au profit des Européens[35] laissant les Chieuses, les Mercurins, les Mestres, les Dangalières et autres prospérer seuls et réaliser de colossaux bénéfices. 

Pouvait-on recourir au commerce avec les pays musulmans et aux échanges entre l’Orient et la Maghreb ? Les rapports économiques entre ces deux parties du monde islamique pouvaient-ils nécessiter la création d’une flotte marchande ? Hélas ! Les plans diaboliques des Marseillais et de leurs hommes de main veillaient attentivement pour déjouer les initiatives algériennes. 

Tout d’abord, on envisagea de s’emparer des bâtiments de la Régence avec le concours des pirates chrétiens. Certaines places en Méditerranée s’étaient même spécialisées dans cette chasse aux navires d’Alger. Minorque, Livourne et Malte étaient sollicitées pour pareille besogne. 

Quand une activité de la navigation musulmane était signalée, les Marseillais s’agitaient, et, moyennant des sacrifices financiers, chargeaient les corsaires maltais de l’attaquer afin que le monopole de fait reste aux chrétiens. Ces liens entre commerçants et hommes de main s’affirmaient, d’avantage, dans les périodes de tension ou de rupture entre la France et les Etats du Maghreb.

 

En 1728, le Marseillais Billon de Causerille, voulant mettre son expérience de l’Orient à la disposition du Ministre de la Marine lui dit : 

« Faites donner des passeports et des patentes à des Français par les rois d’Espagne et du Portugal afin que plusieurs navires aillent faire la course à tous les Turcs au Levant et en Barbarie, avec pavillon étranger [...]. J’ai vu, sur la fin du siècle dernier, plus de trente navires, tant français que d’autres nations, faire la course à tous les Turcs de Barbarie et du Levant avec des pavillons d’Espagne, de Savoye, de Malte, de Monaco et d’autres pavillons des princes ou des républiques d’Italie ». 

« J’ose assurer avec vérité et avec connaissance de cause que le commerce de la ville de Marseille n’a jamais été si florissant que pendant ce temps. Il est vrai de dire que tous les Turcs négociants ou passagers de toutes les échelles du Levant et de la Barbarie ne faisaient aucun commerce d’une ville à l’autre que sur les navires français parce qu’ils appréhendaient les corsaires de toutes les nations qui les insultaient, les pillaient et les faisaient esclaves lorsqu’ils les trouvaient sur des navires turcs, orientaux ou africains. » 

Le Grand-Maître de Malte trouvait que : « cabotage français et course maltaise allaient de pair puisque celle-ci obligeait les Turcs à naviguer sous le pavillon français dans la crainte d’être pris sous le leur s’ils rencontraient quelques croiseurs maltais. »

 

En 1790, le chevalier de Seytres Caumon, chargé des affaires de France à Malte écrivait que : « le commerce de Marseille qui donne à l’Ordre de si grandes marques d’intérêt fait consister notre principale utilité à empêcher les Turcs de charger leurs marchandises sur les bâtiments de leur nation et à les tenir dans notre dépendance[36]. » 

Poursuivre les bâtiments musulmans, leur interdire toute activité était une constante de la politique française en Méditerranée. La menace et les dangers empêchaient les navires de commerce de s’aventurer, surtout dans le bassin oriental. L’on comprendra pourquoi les pèlerinages à la Mecque et les déplacements des personnalités s’effectuaient à bord des navires français, suédois ou américains. Même dans ces cas, les corsaires chrétiens s’en prenaient aux cargaisons et aux passagers musulmans[37]. C’est pourquoi la confiance dans le pavillon blanc fut très souvent limitée. Devant de tels risques, les Algériens se faisaient délivrer des permis de circuler par le Consul de France à Alger. 

Le document que nous produisons ici montre les dangers qui guettaient les voyageurs musulmans et l’inutilité d’une marine marchande algérienne. Les circonstances étaient, en effet, défavorables. 

« Liberté, République Française, Egalité 

Nous, Charles François Dubois-Thainville, Commissaire-Général des relations commerciales et chargé d’affaires de la République Française près le Dey et la Régence d’Alger : 

Sidi Khaddgy Youssuf Khodja, Vekil Khardji ou ministre de la Marine de cette Régence, nommé par son Excellence Moustafa Pacha, Dey de la dite Régence, pour se rendre en qualité d’ambassadeur à Constantinople avec des présents pour sa Hautesse et pour les ministres de La Porte, s’embarquant avec sa suite et ses équipages sur le vaisseau des Etats-Unis de l’Amérique, Le Georges Washington, de trente-deux pièces de canon, commandé par le capitaine William Bambridge : 

Considérant que la République Française est en pleine paix avec cette Régence depuis le huit de ce mois, et que le dit bâtiment appartient à une nation neutre en paix avec la France : 

A la demande de son Excellence le Dey,

Nous, dit Commissaire, requérons tous ceux qui ces présentes verront de laisser passer librement le susdit bâtiment, sans permettre qu’il soit apporté aucun trouble ni empêchement à sa navigation et qu’on n’inquiète et moleste, en aucune manière, le dit Sidi Khaddgy Youssuf Khodja et sa suite, mais au contraire, de leurs donner aide et assistance en tous leurs besoins et nécessités.

En foi de quoi nous avons délivré les présentes signées par nous, contresignées par le citoyen Astouin Sielve, Chancelier de ce commissariat et munies du sceau du ci-devant Consulat (celui du commissariat n’ayant pas été encore envoyé).

A Alger, le 24 Vendémaire, an neuvième de la République (13 octobre 1800)[38]. » 

 

Les exemples de location de bateaux étrangers sont nombreux, notamment vers la fin de la période étudiée. Tel Bey nolise le brigantin suédois « Bonifaccius » commandé par le capitaine P.A.B. Boman « pour mener à Rhodes et en revenir son neveu Sidi Muhammad qui est son trésorier. » Tel autre personnage affrète une barque pour regagner l’Egypte avec ses épouses.

 

Cependant, malgré les mille difficultés, un noyau de marine marchande avait bien tenté de s’activer. Les manifestes des marchandises chargées à Alicante, Marseille, Alexandrie ou Smyrne indiquent les noms des navires et de leurs Raïs qui affrontèrent les périls et se moquèrent des menaces. Nous relevons ici le nom de ceux qui figurent souvent dans les documents :

« La Rachelle, » Raïs Hadj Sittov,

« Al-Ahram, » Raïs Muhammad,

« Al-Youssuf , » Raïs Muhammad Agha,

« Al-Mabrouk, » Raïs Al Hadj Muhammad ben Sliman,

 « La Caméra, » Raïs Dechmann,

« Messaouda, » Raïs Ahmad Amour,

« Li Tre Fratelli (Les Trois Frères), » Raïs Ahmad,

« Tamira, » Raïs Ahmad Ahmida,

« Il Guiseppe, » Raïs bou Djem’a.

 

Mais, comparés à leurs concurrents européens, ces bâtiments ne jouèrent pas un rôle déterminant dans le commerce algérien ou le commerce international. Si la politique dictée par Marseille et exécutée par les agents maltais n’étouffa pas, complètement, la marine marchande, elle en découragea tout développement et imposa aux usagers de ce pays les prix les plus élevés et les conditions les plus draconiennes.

 

Aussi le commerçant algérien fut-il saigné sans pitié par des armateurs insatiables et des intermédiaires sans scrupule. Il dut alors abandonner ses activités.

 

Et quand le commerce se meurt... La Course fleurit !



[1] Nicolaye, La Noue, Brèves, Savary, Hérault et Pananti appelèrent, plus d’une fois, l’Europe à s’unir contre Alger.

[2] Haëdo, Topographie in R.A., 1871, p. 464.

[3] Il faut signaler que « L’Afrique » de Marmol fut publiée au lendemain de Lepante et peu après l’échec des Andalous. Le livre fut traduit en français en 1667 dans la même intention : la croisade.

[4] Lanfreducci et Bosio, deux chevaliers espions de l’Ordre de Malte venus à Alger en 1587, étudier les modalités d’une agression.

[5] Il s’agit de Bordj Uldj ‘Ali du côté de Bab al Wâd.

[6] Le rapport de Lanfreducci intitulé : « Costa et discorsi di Barbaria » a été traduit par Monchicourt et Granghamp, R.A., 1925, pp. 431-549.

[7] Lanfreducci, R.A., 1925, p. 542. Le Comte de Brèves préconisait, quant à lui, l’occupation de Bougie avant toute entreprise sur la capitale.

[8] On trouve à Florence (ASF.F2077) une volumineuse liasse des années 1542 à 1695 où il est souvent question des ports algériens : Delesi (Dellys), Gigeri (Gigel) et Cercerlli (Cherchel).

[9] Julian (Ch ; A.), Histoire de l’Afrique du Nord, t. II, p. 287.

[10] « France et Afrique du Nord avant 1830, » p. 142. L’auteur ajoute : « Loin d’avoir été assagis par l’apparition de l’escadre du chevalier Paul sur la côte, les écumeurs de mer n’en avaient été rendus que plus audacieux... D’octobre 1660 à avril 1661, les Algériens avaient enlevé une valeur de plus de deux millions et amené pour le moins, cinq cents esclaves chrétiens. » p. 143.

[11] Description de l’Afrique (1637), cité par Turbet-Delof. Afrqiue barbaresque, p 175.

[12] Charles-Roux, op. cit. p. 145.

[13] Turbet-Delof, Bibliographie critique, p. 178, n° 205.

[14] Ibid., p. 192.

[15] Beaufort (Duc de). Le Roi des Halles, cousin de Louis XIV, fut un moment à la tête des forces navales de Méditerranée. Il surveillait la côte de Gibraltar à Alger.

[16] La baie de Bâb al-Wâd était défendue par une batterie qu'on nommait le fort des Anglais. Elle disposait de six pièces de canon.

[17] Cité par Venture de Paradis, « Alger au XVIIème siècle, » R.A., 1897, p. 118.

[18] Mort en 1783, auteur de deux relations :

- Descriptions de la Côte Barbaresque (1786), trad. M.Canard, R.A., 1951, pp. 121-186.

- Informations véridiques sur Alger, sur les mœurs et coutumes de son peuple, sur l’état de son gouvernement et des revenus de ses provinces, sur la situation des côtes barbaresques, sur les productions, etc. Compte Rendu M. Emerit, R.H.M., 4/1975, pp. 208-209.

[19] R.A., 1851, p 181.

[20] Le Duc de Richelieu (1766-1820) fut premier ministre de 1815 à 1818 et de 1820 à 1821.

[21] Agent d’origine espagnole, né en 1766, mort en 1818.

[22] Voir R.A., 1930, p. 61.

[23] Pananti, relation d'un séjour... p. 577.

[24] « Quadro storico-politico-morale dei Regno d’Algeri » (Cadre historique, politique et moral du Royaume d’Alger), Bologna. 1820, p. 111.

[25] Vallière, Observations... in Textes... p. 101.

[26] Topographie, R.A., 1871, pp. 53-54.

[27] Devoulx A., « Relevé des principaux Français résidents à Alger de 1686 à 1830, » R.A., 1872, pp. 356-357 et 420- 450.

[28] A.C.C.M., Série J 1879 (1697-1776). On y trouve les états des bâtiments français entrés dans le port d’Alger de 1710 à 1717 et qui avaient chargé pour l’Italie, Marseille et Livourne.

Archives du port de Toulon (1 RI 8 et 9).

Masson (P.), Histoire du Commerce Français dans le Levant au XVIIème siècle, pp. 401-405.

[29] Si les Algériens n'avaient pas d’agents accrédités de leur nation à Marseille, un consul de l’Empire Ottoman y était en poste. Raphaël Joseph Cohen signait, en 1816, les passeports des voyageurs en partance pour les possessions turques. Dimetrius Capudo Schaerder signait, en 1820, les documents des voyageurs partant pour Alger.

[30] Emerit (M.), « Essai d'une Marine Marchande Barbaresque au XVlème siècle, » CT. 11/1955, p. 369.

[31] A.G.G.A. - A 117118/2193, novembre 1808. Note de chargement de soude fait sur la felouque « El Mabrouk, » commandée par Raïs al Hadj Muhammad ibn Sulaïman, pour le compte du négociant marocain al Hadj al Aibi ibn 'Umar.

A.D.B.R. 200 E 454. Lettre d'Alger de Rogueneau de la Chameyl, 11 octobre 1809, au sujet d’une polacre algérienne valant de Smyme, chargée de coton et autres marchandises contumaces du Levant.

[32] Maurin (G.), Les Pirates Barbaresques a le Commerce Français aux XVIIème - XVIIIème siècles, p. 10.

[33] Observations sur le Royaume d’Alger in Chaillou, Textes... p. 59.

[34] A.C.C.M., série A.A/88 (1771).

[35] « Barques tartanes, saëtes, gaions et galionetti, navires de Marseille, écrit Braudel, ont peu à peu, au XVIème siècle, peuplé la vaste mer. Pas un port de l’Afrique du Nord, pas un port d’Espagne, pas un port d’Italie dont ils n’inondent les quais de leurs multiples marchandises... (La Méditerranée, 1, 285)

Nettement confond les causes et les effets et explique, en dépit du bon sens, l’absence d’une marine marchande algérienne à sa manière, en disant que les Algériens « avaient l’avantage de n’avoir pas de commerce de sorte qu’on ne pouvait leur rendre le mal qu'ils faisaient [...] leur commerce était la guerre. » (Histoire de la Conquête d’Alger, p 81)

[36] A.N.Aff.Etr. BI 1092, Correspondance consulaire, Tripoli de Barbarie, 31 décembre 1728, et BI 324 (Lettre au Ministre de la Marine, 26 janvier 1790).

[37] Le drame du vaisseau français « Le Septimane » n'est pas unique. Rappelons ici le voyage tumultueux du bâtiment en 1775 : Affrété pour 6 000 livres par le Dey pour effectuer un voyage Alger-Constantinople et retour, il devait ramener du matériel militaire et des passagers dont Si Hasan Wakil al Hardj et envoyé spécial du Diwan. Sur le chemin du retour, arrivé en face de l'île de la Galite, il fut attaqué par deux vaisseaux de guerre espagnols et conduit à Carthagène.

Sur cet épisode de la guerre algéro-espagnole, voir :

- Pares, Un Toulonnais à Alger au XVIIème siècle, Paris, 1931, pp. 15-16.

- Plantet, Correspondance, II, p. 329.

- al Zahhâr, Mudhakkirat, p. 34.

[38] Devoulx, Les Archives du Consulat de France à Alger (1686-1830), p. 141.