Egypte

En attendant l’Abrégé de l’Histoire des Ottomans ou nous reviendrons plus en détail sur ce sujet, voici un résumé de l’Histoire égyptienne de la chute d’Acre le dernier bastion des croisés jusqu’à la période actuelle.

 



Al-Mansour Sayf ad-Din Qalawoun al-Alfi

Le sultan az-Zahir Rouqn ad-Din Baybars al-Boundouqdari décéda en 1277 et le sultan al-Mansour Sayf ad-Din Qalawoun (Qala'oun) al-Alfi lui succéda. Espérant profiter de ce changement de gouverneur d’Egypte, les Mongols décidèrent à nouveau de tenter d’arracher aux Mamalik la Syrie qu’ils envahirent en 1280 mais ils subirent une défaite désastreuse lors de la bataille de Hims (Homs) comme vingt années auparavant lors la bataille de ‘Ayn Jalout face au célèbre commandant al-Mouzaffar Sayf ad-Din Qoutouz. Après cette écrasante défaite, les Mongols déployèrent tous les efforts pour persuader l’occident chrétien d’entreprendre une nouvelle croisade mais en dehors de la promesse du paradis, les Mongols ne purent obtenir aucun renforcement militaire. Les Mongols envoyèrent une autre mission en France pour demander l’aide d’une croisade et en dehors de la visite du Paris médiéval, il ne leur fut offert aucune promesse de croisade.

En 1291, les Mongols envoyèrent de nouveaux missionnaires en France et Angleterre pour implorer une autre croisade. Ils promirent de fournir toutes les ressources alimentaires nécessaires aux croisés, tout ce que l’armée aurait besoin ainsi que de leur fournir une cavalerie de 30000 hommes pour les aider. Le roi français ne s’embêtât même pas à leur donner une réponse tandis que le roi de l’Angleterre les renvoya tout simplement en arrière vers le Pape qui leur répondit qu’il n’était pas en mesure d’organiser une croisade sans l’assistance active des rois européens.

Le roi mongol Khan II envoya des ambassadeurs rendre visite aux différents rois d’Europe mais ces messagers revinrent sans avoir obtenu la moindre chose tandis qu’entre-temps les chrétiens en Syrie, les Templiers et Hospitaliers commencèrent à lutter entre eux et sur ce, le sultan égyptien, à la tête de son armée, marcha sur la Syrie et attaqua Tripoli qu’il soumit à un intense bombardement de catapultes qui détruisit les murailles et la ville fut prise d’assaut et occupée par les Musulmans qui massacrèrent la garnison chrétienne de la ville avant de détruire le port.



Al-Ashraf Salah ad-Din Khalil

Après la destruction de Tripoli, les forces égyptiennes marchèrent sur Acre la dernière forteresse des croisés au Levant mais le sultan Qalawoun décéda en 1290 donnant ainsi quelque répit aux Chrétiens. Le répit fut cependant court et al-Ashraf Salah ad-Din Khalil qui succéda à son père et qui était aussi brillant que lui, leva toutes ses forces et entreprit de finir ce que son père avait commencé, l’expulsion de tous les croisés des terres musulmanes. La bataille d’Acre débuta le 6 avril et prit fin le 18 mai 1291 et la plupart des croisés périrent ou furent pris captifs et seuls quelques-uns s’enfuirent dans des navires.

Acre qui avait été jadis une puissante forteresse fut réduite à une étendue sauvage de décombres et avec sa chute, le chapitre des croisades prit momentanément fin et les chrétiens chassés des Terres Sacrées. Durant les années qui suivirent, différents papes essayèrent d’inciter les souverains chrétiens européens à entreprendre d’autres croisades, mais l’esprit des croisades était mort et les Européens perdirent l’intérêt pour le confort nébuleux promis de l’Au-delà (dans les deux sens du terme). Les siècles passèrent et les conditions sociales des Européens s’améliorèrent et ils vinrent à se rendre compte que les profits qu’ils pouvaient gagner dans la vie pourraient être mieux obtenus en restant chez eux plutôt que de chercher la mort au Levant et ce n’est que lorsque les Ottomans apparurent sur la scène internationale que les croisades se firent pressantes à nouveau.

 



Les Mamalik Bahri 1298-1390


An-Nassir Nassir ad-Din Muhammad


L’assassinat de Lajin en 1298 fournit l’occasion au sultan déposé an-Nassir de reprendre le pouvoir bien qu’il était un garçon âgé à peine de quatorze ans tandis que l’autorité suprême fut confiée aux émirs Salar et Baybars. La confusion prédomina alors dans la cour égyptienne et les choses devinrent incontrôlables en Syrie.

Les Mongols décidèrent alors de profiter de l’occasion offerte par la situation confuse et essayèrent de prendre la Syrie en 1360 et 1380 mais ils furent vaincus lors des deux occasions par les Mamalik. Les Mongols traversèrent l’Euphrate en très grand nombre et marchèrent sur la Syrie pour l’occuper mais le jeune sultan égyptien leva son armée et marcha à la rencontre des Mongols commandés par l’Ilkhan Ghazan qui avait pourtant accepté « l’Islam » et les deux armées se rencontrèrent à Wadi al-Khizandar en 1300 ou les Mamalik furent défaits et se retirèrent en Egypte et la Syrie fut occupée par les Mongols. Les forces égyptiennes revinrent en Syrie trois années plus tard et les Mongols incapables de faire face aux Mamalik évacuèrent la Syrie et se retirèrent en Perse.

Suite à cette occupation de la Syrie et des négociations infructueuses, les Mamalik se préparèrent à une nouvelle guerre et finalement les Mongols commandé par leur général Qoutlough Shah traversèrent une nouvelle fois l’Euphrate et entrèrent en Syrie. Les deux armées se rencontrèrent à Shakhab dans la plaine de Marj as-Saffar et la bataille fini par la compète déroute des Mongols. La plus grande partie de l’armée mongole fut massacrée et plus de dix mille Mongols furent pris captifs. Ce n’est qu’un reste misérable de l’immense armée mongole qui retourna en Perse pour raconter l’histoire du désastre.
La catastrophe brisa le cœur de l’Ilkhan Ghazan qui mourut peu après de dépit et ce fut la troisième défaite que les Mongols subirent face aux Mamalik. L’Ilkhan Ouljaytou qui succéda à Ghazan décida de ne pas risquer une autre rencontre avec les Mamalik écartant ainsi définitivement la menace mongole en Syrie et en Egypte permettant ainsi au jeune sultan an-Nassir de rentrer triomphant au Caire.

An-Nassir entrepris par la suite plusieurs expéditions pour contraindre le souverain de la Petite Arménie à payer la Jizyah (impôt de soumission) et expulser les Templiers de l’île d’Antaradus près des côtes syriennes, la dernière prise des croisés. L’île fut reprise par les Egyptiens. Une autre expédition peu concluante fut aussi conduite en Nubie.

An-Nassir maintint des relations sympathiques avec le Maroc, la France et Constantinople et la vieille alliance avec les Khan de la Horde d’Or fut maintenue.

Pour financer les guerres contre les Mongols, des taxes supplémentaires durent être prélevées ce qui provoqua des troubles chez les tribus bédouines de l’Egypte Supérieure qui se rebellèrent et renièrent l’autorité du sultan cependant la révolte fut réprimée.

Jusqu’à présent, les Juifs et les Chrétiens qui avaient apprécié de grands privilèges devinrent riches et effrontés et des contraintes durent être appliquées aux activités des non-musulmans. Les Chrétiens furent ordonnés de porter des turbans bleus tandis que les Juifs des turbans jaunes et il leur fut interdit de monter des chevaux mais pas les ânes. Pendant cette période, la plupart des non-musulmans devinrent Musulmans. An-Nassir fit bâtir une mosquée-collège au Caire appelé Nassiriyah.

Pendant que les émirs s’enrichissaient et devenaient puissants, le sultan fut laissé dans des conditions précaires et il ne lui fut pas permis d’exercer l’autorité réelle. Désabusé par cette situation, an-Nassir abdiqua et se retira dans la forteresse de Karak en 1308. Son deuxième règne dura dix années, de 1298 à 1308.



Al-Mouzaffar Roukn ad-Din Baybars II

Suite au renoncement du sultanat d’an-Nassir, l’émir Baybars fut nommé sultan et prit le titre d’al-Mouzaffar Roukn ad-Din Baybars II. Durant son règne le niveau du Nil resta bas et la famine gagna le pays. Baybars ne reçut pas le soutien des gens et fut impopulaire. Les émirs en Syrie se tournèrent vers an-Nassir dans Karak et le choisirent pour reprendre le trône. An-Nassir se rendit à Damas et rassembla une large force à la tête de laquelle, il marcha sur l’Egypte et les habitants se réjouirent de son retour. Baybars incapable de contrôler sa propre armée pour s’opposer à l’avance d’an-Nassir du abdiqué et son règne dura une année, à peine.



Le troisième règne d’an-Nassir Nassir ad-Din Muhammad

Sur l’abdication de Baybars II, an-Nassir entra triomphant au Caire. An-Nassir qui avait maintenant vingt-cinq ans, débuta son troisième règne le 6 mars 1310. Armé de son expérience amère de ses adversités passées, il était devenu cynique et brûlait de se venger de tous ceux qui avaient été contre lui ou lui avait fait du tort. Baybars II, bien que pardonné et nommé gouverneur d’une province fut convoqué au Caire où il s’inclina contrit. Salar, le rival de Baybars II qui avait contribué au retour d’an-Nassir fut jeté en la prison ou il mourut de faim. Un par un, tous les vieux émirs qui l’avait dominé lors de ses précédents règnes furent emprisonnés pour un prétexte ou un autre et finalement exécutés.

En 1333, an-Nassir conclu un traité d’amitié avec l’Ilkhan Abou Sa’id de Perse et maintint des relations amicales avec les Khan la Horde d’Or de la vallée de Volga et se maria avec la princesse mongole Toulbiyah de cette même Horde.

Makkah et Madina acceptèrent l’autorité de l’Egypte et an-Nassir accomplit fréquemment le pèlerinage à Makkah. Tripoli et Tunis à l’Ouest reconnurent aussi la suzeraineté de l’Egypte et la Khoutbah fut lue au nom d’an-Nassir. Des ambassades de différents royaumes du monde furent envoyées en Egypte.

An-Nassir prit des mesures pour améliorer le sort des pauvres. Il abolit les taxes oppressives et détourna le fardeau des taxations sur les riches. Il ordonna une nouvelle enquête sur les domaines, régula le prix de graines et d’autres articles quotidiens Il contraignit les émirs à ouvrir leurs greniers à la vente publique aux prix fixés par l’état. Il réprima la consommation du vin et d’autres actes d’immoralité.

Sous an-Nassir, l’Egypte apprécia un charme de prospérité économique. Il protégea l’art et l’apprentissage, construisit collèges, mosquées et son exquis palais « Qasr al-Ablaq ». Il creusa le canal alexandrin communiquant avec le port et le Nil à Fouwah ainsi qu’une chaussée à côté du Nil qui servait aussi bien de route que de barrage. Il était un spécialiste des chevaux et maintenant un registre qui lui permettait de connaitre l’âge, le prix et le pedigree de chaque cheval de ses écuries. Il avait un troupeau de 30000 moutons, était sportif et se consacrait à la fauconnerie et avait une collection parfaite de bijoux précieux

An-Nassir décéda en 1341 à l’âge de cinquante-huit ans. Il était cultivé et avait une vive intelligence, un moral strict et une grande énergie. Il maintint une cour superbe et construisit des bâtiments magnifiques. Son règne fut le point culminant de la civilisation et de culture égyptienne selon les historiens contemporains.



Les derniers Mamalik Bahri

Après an-Nassir, régna l’anarchie et de ses neuf fils, huit d’entre eux succédèrent au trône les uns après les autres durant les vingt prochaines années ou le rôle des sultans fut réduit à néant et l’autorité réelle conférée aux émirs. Les sultans furent tour à tour et fréquemment déposés ou assassinés par les émirs rivaux qui luttèrent continuellement entre eux.

Après la mort d’an-Nassir, son fils Abou Bakr devint sultan et son règne ne dura que quelques mois. Il fut suivit par son frère Qoujouq dont le règne n’excéda pas une année puis par son frère Ahmad qui régnait quelques mois seulement.

De 1342 à 1345, un autre frère régna trois ans suivit par son frère al-Kamil Sha’ban pour une année à peine et son frère Mouzaffar Hajji un an. Il fut succédé par son frère al-Hassan qui régna deux termes. Son premier règne dura de 1347 à 1351 avant d’être renversé par un autre frère as-Salih qui gouverna de 1351 à 1354.

Al-Hassan revint à nouveau au pouvoir de 1354 à 1361 et fut succédé par son neveu Muhammad, un des fils d’al-Mouzaffar Hajji qui gouverna de 1361 à 1363 avant d’être succédé par son cousin al-Ashraf Sha’ban qui gouverna une période relativement plus longue de 1363 à 1376.

En 1365, des états chrétiens menés par le souverain de Chypre entreprirent une autre croisade contre l’Egypte et prirent Alexandrie qu’ils pillèrent avant de se retirer avec 5000 prisonniers.

En 1369, la flotte de Chypre attaqua Tripoli avant d’apparaitre devant Alexandrie mais l’attaque fut repoussée.

Al-Ashraf Sha’ban fut succédé par son fils ‘Ala ad-Din ‘Ali qui gouverna de 1376 à 1381 lui-même succédé par son frère as-Salih Hajji qui fut renversé lors d’une révolte par Sayf ad-Din Barqouq de la section des Mamalik Bourji en 1382.

Par la même méthode, as-Salih reprit le trône en 1389 mais il fut renversé une deuxième fois en 1390 et après lui les Mamalik Bahri disparurent de l’Histoire et furent remplacés par les Mamalik Bourji sous le règne de Barqouq.

 



Les Mamalik Bourji 1390-1517


Az-Zahir Sayf ad-Din Barqouq


Après le renversement des Mamalik Bahri, Barqouq devint le premier sultan des Mamalik Bourji. Après être monté sur le trône, il prit le titre d’az-Zahir Sayf ad-Din Barqouq.

L’émir Taymour Lanq prit Baghdad en 1393 et Ahmad, l’émir Jalayar de Baghdad, se refugia chez Barqouq au Caire. Par la suite l’émir Taymour Lanq dépassa la Mésopotamie et annexa quelques territoires qui étaient sous la suzeraineté égyptienne. Barqouq s’allia alors avec les Turcs Ottomans, les Turcomans et les Khan de la Horde d’Or dans une coalition contre Taymour. Taymour envoya une ambassade au Caire portant un message menaçant qui rendit Barqouq furieux et fit exécuter l’envoyé signifiant une déclaration de guerre entre l’Egypte et Taymour. Barqouq conduisit une armée en Syrie puis marcha ensuite sur la Mésopotamie pour mesurer ses armes avec Taymour Lanq mais ce dernier retenu en Géorgie dans une confrontation avec la Horde d’Or, remit l’affrontement à plus tard.

Barqouq, un souverain sage et sagace, mourut en 1399 après un règne de neuf ans. Il abolit les taxes oppressives, développa et encouragea l’agriculture et le commerce. Il fut un grand entrepreneur et construisit de magnifiques bâtiments au Caire.



Nassir ad-Din Faraj

Barqouq fut succédé par son fils Nassir ad-Din Faraj né d’une mère grecque.
Taymour Lanq après la conquête de Géorgie avança en Syrie et Faraj sortit à sa rencontre mais les Egyptiens furent vaincus et Taymour captura Damas tandis que Faraj se retira au Caire. Les Mamalik perdirent ainsi la Syrie et ce fut un coup dur pour eux puisque l’Egypte était directement menacée mais Taymour se retira de la Syrie et le danger qui pesait sur l’Egypte fut évité.

En 1402, l’émir Taymour Lanq vainquit les Turcs Ottomans lors de la bataille d’Ankara et les Egyptiens perdirent un allié important mais ils n’étaient plus dans la position de défier Taymour. Faraj changea donc sa politique et fit la paix avec Taymour Lanq. Le Mamalik forgea même de l’argent au nom de Taymour montrant ainsi que les Mamalik étaient devenu pratiquement les vassaux de Taymour ce qui conduisit à de grands troubles en Egypte car malgré le traité de paix, Taymour Lanq pouvait envahir l’Egypte quand il le voudrait. Cependant, Taymour Lanq mourut en 1405 et ainsi la menace qui pesait sur l’Egypte fut levée ce qui n’évita pas à Faraj de faire face à d’autres problèmes.

En 1406, des pirates chrétiens attaquèrent Alexandrie tandis qu’au nord les Ottomans occupèrent un territoire sous la suzeraineté des Mamalik et la situation en Egypte se détériora à cause de l’incompétence de Faraj, un fanatique notoirement débauché en plus d’une nature cruelle. Il divorça de sa femme qu’il fit périr ensuite de ses propres mains. Il exécuta un grand nombre d’émirs pour différents prétextes, préleva de lourdes taxes et devint rapidement impopulaire.

Il entreprit quelques campagnes sans succès en Syrie pour la reprendre mais fut finalement vaincu et tué. Son impopularité fut si grande qu’il ne lui fut même pas donné une cérémonie décente lors de sa mort mais il fut jeté sur un tas d’excréments pour pourrir. Il construisit quelques bâtiments au Caire dont le mausolée de son père Barqouq.