La mosquée d’ad-Dirar et sa destruction

 

Les hypocrites devinrent comme une cellule cancéreuse dans le corps de la communauté musulmane. Dès la première année de son arrivée à Médine, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) se trouva confronté à différents problèmes dont l’origine était bien connue. Mais, comme les hypocrites étaient Musulmans d’apparence, il était difficile de les reconnaitre car ils s’activaient toujours sournoisement.

 

Dans le Qur’an, nous trouvons plusieurs Versets qui en font le portrait moral. A titre d’exemple, citons ces versets :

1 - « Quand ils rencontrent ceux qui ont cru, ils disent : « Nous croyons » ; mais quand ils se trouvent seuls avec leurs diables, ils disent : « Nous sommes avec vous ; en effet nous ne faisions que nous moquer (d’eux). » (Qur’an 2/14)

 

2 - « Et quand on leur dit: «Ne semez pas la corruption sur la terre», ils disent: «Au contraire nous ne sommes que des réformateurs ! » (Qur’an 2/11)

 

3 – « Et quand les hypocrites et ceux qui ont la maladie [le doute] au cœur disaient : « Allah et Son messager ne nous ont promis que tromperie. » (Qur’an 33/12) 

 

4 – « Et parmi les Bédouins qui vous entourent, il y a des hypocrites, tout comme une partie des habitants de Médine. Ils s’obstinent dans l’hypocrisie. Tu ne les connais pas mais Nous les connaissons. Nous les châtierons deux fois puis ils seront ramenés vers un énorme châtiment. » (Qur’an 9/101)

 

5 – « D’autres ont reconnu leurs péchés, ils ont mêlé de bonnes actions à d’autres mauvaises. Il se peut qu’Allah accueille leur repentir. Car Allah est Pardonneur et Miséricordieux. » (Qur’an 9/102)

 

Les hypocrites ressemblaient beaucoup à des associations secrètes car ils travaillaient clandestinement contre l’Islam et la nouvelle communauté religieuse. Leurs activités clandestines de sape avaient aussi une autre raison ; celle de ne pas tomber sous le coup de la loi musulmane.

 

Agissant toujours par des activités néfastes, variées, ils n’abandonnèrent jamais leur principal objectif. Chaque nouvelle difficulté qu’ils inventaient traduisaient leur profonde haine à l’encontre du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) cependant,  ce dernier trouvait toujours le moyen de déjouer leurs manigances, sans pour autant employer les moyens de dissuasion dont il disposait largement.

 

La dernière trouvaille des hypocrites fut la construction d’une nouvelle mosquée (nommée ad-Dirar) dont la fonction était de faire une concurrence malsaine à la mosquée du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et de l’employer comme un endroit de coordination anti-islamique.

 

On dit que la construction de cette mosquée fut une idée de ‘Amir al-Fassiq qui avait dit à ses acolytes médinois : « Je ne peux pas entrer dans votre écurie pour la simple raison que je serai remarqué par les Compagnons de Muhammad qui ne s’empêcheront pas de faire ce que je déteste. » Puis, il leur proposa ensuite de construire cette fameuse mosquée.

 

Après la fin des travaux juste avant le départ pour Tabouk, les hypocrites demandèrent au Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) de présider une prière dans leur mosquée pour la légitimer. Celui-ci leur promit d’y prier mais après la fin de la campagne de Tabouk.

 

Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) failli tenir sa promesse pour ces hypocrites n’était-ce l’intervention d’Allah qui fit descendre des Versets ordonnant la destruction de ce site maléfique.

 

Dans les livres d’histoire et de biographie, il est  rapporté le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), en route vers Tabouk, passa près de la vallée Dzou Awan dans les environs de Médine ou à un certain endroit, un groupe d’hypocrites de la mosquée Dirar vint à sa rencontre.

 

Le nom des cinq hommes venus à sa rencontre est rapporté dans al-Maghazi : Mou’attab Ibn Qashir, Taïba Ibn Abou Hatib, Khouzam Ibn Khalik, Abou Habibah Ibn al-Az’ar, ‘AbdAllah Ibn Nabtal Ibn al-Harith.

 

Lors de la rencontre, ils dirent : « O Messager d’Allah, nous avons été envoyés par nos Compagnons pour te dire que nous venons de terminer la construction d’une mosquée qui nous servira pendant les nuits pluvieuses et les nuits d’hiver, et que nous aimerions bien que tu y viennes diriger nos prières. » Ils dirent ceci alors que le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) se préparait pour Tabouk. Il leur répondit quand même : « Je me prépare pour un voyage et je suis occupé. Si nous revenons, si Allah Exalté le veut, nous viendrons chez vous pour présider la prière dans votre mosquée. »

 

De retour de Tabouk, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) fut informé au même endroit (Dzou Awan) par Allah Exalté des véritables intentions diaboliques de ces hypocrites. Sur ce, il convoqua deux de ses Compagnons, ‘Assim Ibn Ouday et Malik Ibn ad-Dakhsham et leur ordonna de détruire cette mosquée. Il leur dit : « Partez pour cette mosquée dont les occupants sont injustes. Détruisez-la et brulez-la ! »

Alors, ils partirent en courant à pied. Arrivés devant la mosquée des Banou Salim, Malik dit à ‘Assim : « Attends-moi ici et tu me verras de retour de chez les miens avec du feu. » Après quoi, ils reprirent le chemin mais cette fois avec une torche allumée. Ils arrivèrent près de la mosquée des hypocrites après le Maghrib. A ce moment, des hypocrites dont Zayd Ibn Jariyah Ibn ‘Amir se trouvaient dans la mosquée. Ils l’incendièrent et la détruisirent après le départ des hypocrites.

 

Quand les Musulmans rentrèrent à Médine, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) proposa à ‘Assim Ibn Ouday de construire une maison à la place de la mosquée détruite qui était mitoyenne à la maison de Wadi’a Ibn Thabit et à celle de Abou ‘Amir al- Fajir, toutes deux détruites aussi lors de l’incendie. Mais ‘Assim refusa en disant au Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) : « Je ne peux y construire une maison après ce qui s’est passé dans cette mosquée. Et puis, je n’en ai pas besoin, ô Messager d’Allah. Cependant, tu peux la donner à Thabit Ibn Aqram car il n’a pas de maison. »

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) l’offrit alors à Thabit.

 

Les historiens ont rapporté que ceux qui construisirent la mosquée Dirar furent au nombre de douze.

Al-Waqidi avance le nombre de quinze mais ne cite que douze noms : Jariyah Ibn ‘Amir, surnommé l’âne de la maison ; ses fils Majma’, il n’était pas hypocrite, Zayd et Yazid ; Wadi’a Ibn Thabit ; Khouzam Ibn Khalid ; ‘AbdAllah Ibn Nabtal ; Bijad Ibn ‘Uthman ; Abou Habibah Ibn al-Az’ar ; Mou’attab Ibn Qashir ; ‘Abbad Ibn Hanif et Tha’labah Ibn Hatib.

 

‘AbdAllah Ibn Nabtal était l’espion des hypocrites auprès du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Il assistait régulièrement à ses réunions, écoutait ses propos puis les rapportaient aux hypocrites ce qui avait provoqua l’intervention de Jibril :

- « O Muhammad, il y a un individu hypocrite délégué par ses compères, qui vient écouter ton Hadith puis va le rapporter aux hypocrites. »

- « Qui donc, » demanda le Prophète ?

- « C’est l’homme noir à la chevelure dense, qui a des yeux rouges et ronds comme deux chaudrons. Il te regarde en fait avec des yeux sataniques. »

 

D’autre part, Allah, à Lui les Louanges et la Gloire, fit descendre des Versets sur cette mosquée de la discorde et des complots : « Ceux qui ont édifié une mosquée pour en faire [un mobile] de rivalité, d’impiété et de division entre les croyants, qui la préparent pour celui qui auparavant avait combattu Allah et son Envoyé et jurent en disant : « Nous ne voulions que le bien ! » [Ceux-là], Allah atteste qu’ils mentent. Ne te tiens jamais dans (cette mosquée). Car une Mosquée fondée dès le premier jour, sur la piété, est plus digne que tu t’y tiennes debout [pour y prier]. On y trouve des gens qui aiment bien se purifier, et Allah aime ceux qui se purifient. Lequel est plus méritant ? Est-ce celui qui a fondé son édifice sur la piété et l’agrément d’Allah, ou bien celui qui a placé les assises de sa construction sur le bord d’une falaise croulante et qui croula avec lui dans le feu de l’Enfer ? Et Allah ne guide pas les gens injustes. La construction qu’ils ont édifiée sera toujours une source de doute dans leurs cœurs, jusqu’à ce que leurs cœurs se déchirent. Et Allah est Omniscient et Sage. » (Qur’an 9/107 à 110)

 

L’histoire des trois musulmans qui hésitèrent et à qui Allah pardonna

 

La faiblesse humaine est un élément de la personnalité et certains Compagnons n’en furent pas pour autant épargnés. Les sirènes du laisser-aller envoutèrent si bien trois des Compagnons qu’ils manquèrent le voyage avec le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

 

Nous avons déjà brièvement rapporté leur histoire et mentionné leurs noms : Ka’b Ibn Malik, Hilal Ibn Oumayyah, Marara Ibn ar-Rabi’ et raconté l’histoire du quatrième Compagnon (Abou Khaythama) qui en fin de compte se reprit et rejoignit le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

 

L’histoire de ces trois Compagnons fautifs, tous des Ansar, fut rapporté dans tous les livres d’histoire et de biographie sans exception.

 

Ka’b Ibn Malik a dit : « Je n’ai raté aucune expédition du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) sauf celle de Badr. D’ailleurs, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) n’a pas blâmé ceux qui ne prirent pas part parce qu’initialement le but était l’interception de la caravane de Qouraysh. J’étais aussi à al-‘Aqabah avec le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) la nuit où nous avons scellé notre destin pour l’Islam.

 

Al-‘Aqabah est l’évènement que j’aime le plus même si Badr est plus connu pour les gens.

Pour l’expédition de Tabouk, j’étais dans une situation aisée, et, par Allah je n’ai jamais eu auparavant deux montures disponibles. Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et les Compagnons partirent (pour Tabouk) alors que, moi, je me disais chaque jour : « Demain, je vais me préparer et les rejoindre. » Mais, en définitive, je ne suis pas parti. Ah, si j’avais fait le voyage !

Après le départ du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), je ne voyais dans Médine que des hypocrites ou les démunis à qui Allah avait pardonné, et cela me rendit malheureux. » »

 

Si Ka’b Ibn Malik dit la vérité quant à sa sincérité et sa foi véritable, en ne se donnant aucune excuse pour sa faute, les deux autres Compagnons, Hilal et Marara, ne furent pas moins sincères que lui. Si bien que Allah Tout-Puissant et Très Haut leur accorda tous Son pardon.

 

Hilal Ibn Oumayyah a rapporté son histoire et celle de son Compagnon Marara : « Par Allah, je ne pris pas part parce que je doutais mais parce que je voulais acheter un chameau ayant suffisamment d’argent. Sur le chemin pour acheter le chameau, je rencontrai Marara Ibn ar-Rabi’ qui me dit : « Moi aussi je veux acheter un chameau pour prendre part à l’expédition. »

Je me suis dit : « Voici un Compagnon de route. » Et on se mit à dire et à répéter : « Demain, nous achèterons deux chameaux et rejoindrons le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) car avec nos montures, nous serons légers et pourront le rattraper. »

Mais nous restâmes finalement jusqu’au retour du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). »

 

Ka’b Ibn Malik raconte la mésaventure et ses angoisses

 

 « Lorsque j’appris que le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) était sur le chemin du retour, je commençai à penser au mensonge et à me dire : « Avec quoi, vais-je me sauver demain de la colère du Messager d’Allah ? Je dois demander conseil auprès de mes gens qui ont une expérience. » Mais quand en me dit que le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) se rapprochait (de Médine), ces fausses idées disparurent et je sus que je ne pouvais me sauver qu’en étant sincère. Je décidai alors de lui dire la vérité.

 

Quand il entra à Médine tôt le matin, il se dirigea directement vers la mosquée, comme à son habitude après chaque expédition, et accompli deux Rak’a puis commença à recevoir les gens. Ceux qui se désistèrent de l’expédition, et ils étaient plus de 80 hommes, vinrent et lui présentèrent leurs excuses en jurant tandis que le Messager (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) acceptait sur la base de leur déclaration nominale tout en sachant qu’Allah connaissait le fond de leur pensée.

 

Je me rapprochai alors du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) alors qu’il était assis et le saluais. Il me salua à son tour mais avec un air fâché puis il me demanda :

- « Qu’est-ce qui t’a empêché de nous accompagner ? »

- « O Messager d’Allah, si c’était un autre que toi, j’aurais trouvé un motif qui me sauvera et bien que tourmenté, je sus que si je te tenais des propos mensongers, tu me pardonnerais mais qu’Allah sera très furieux contre moi. Et bien que te disant la vérité, tu es en colère alors j’espère une issue d’Allah. Non, je jure par Allah que je n’ai aucune excuse. » 

- « Quant à toi, tu es sincère, lève-toi donc (et retire-toi) jusqu’à ce que Allah Puissant et Très-Haut décide de ton sort. »

 

Je me retirai alors avec des hommes de Banou Salamah qui me dirent : « Par Allah, nous savons que tu n’as pas commis de faute avant celle-ci, as-tu donc été incapable de lui présenter des excuses ? »

Par Allah, ils continuèrent de me blâmer si bien que je décidai de retourner sur mes pas et de mentir sur moi-même devant le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Mais Mou’az Ibn Jabal et Abou Qatada me dirent : « N’écoute pas tes Compagnons et maintiens ta sincérité et Allah te fera une issue, s’Il le veut. Quant à ces gens qui te conseillent, s’ils sont sincères, Allah sera satisfait de cela et le dira à Son Prophète mais s’ils sont autre que cela, Il les fustigera et démentira leurs propos. »

- « Y-a-t-il d’autre personne dans le même cas ? »

- « Oui, deux hommes qui ont tenu les mêmes propos que toi, et qui ont eu la même réponse de la part du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). »

- « Qui sont-ils ? »

- « Marara Ibn ar-Rabi’ et Hilal Ibn Oumayyah. »

Ils me donnèrent les noms de deux hommes pieux et de bonne moralité. »

 

La mise en quarantaine

 

Racontant les douleurs qu’ils subirent lui et ses deux Compagnons suite à la mise en quarantaine sociale appliquée par les Musulmans sur ordre du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), Ka’b Ibn Malik a dit : « Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) interdit aux gens de nous adresser la parole (nous trois) et ils nous évitèrent. Ils changèrent complètement de comportement envers nous au point que je détestai ma personne et le pays que je connaissais jadis. La situation resta ainsi cinquante nuits. Mes deux Compagnons ne bougèrent pas et restèrent cloitrés chez eux. Mais, moi, j’étais plus patient et résistant, je sortais, j’accomplissais les prières avec les Musulmans et je tournais dans les souks, mais personne ne me parlait.

 

Dans la mosquée, après la prière, je saluais le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) en me disant à chaque fois : « A-t-il répondu à mon salut du bout des lèvres ou non ? » Je priais près de lui en l’épiant des yeux quand je commençais ma prière, il regardait vers moi, et quand je le regardais, il détournait le regard. La froideur des Musulmans me devint très insupportable et je me rendis chez Abou Qatada (c’était mon cousin et mon ami) ou je fis le mur de sa maison pour lui parler. Il ne répondit même pas à mon salut. Je lui dis alors : « O Abou Qatada, je t’en conjure, sais-tu que j’aime Allah et son Messager ? » Il ne me répondit pas mais à la troisième demande, il dit : « Allah et son Messager savent mieux. »

Les larmes montèrent aussitôt à mes yeux puis je courus, escaladais le mur et me dirigeais vers le souk. »  

 

Dans le souk, un messager du roi des Ghassassinah vint trouver Ka’b Ibn Malik et lui remit une lettre qui l’invitait à s’exiler en Syrie, ce qui avait aggrava les remords de Ka’b.

 

« Dans la quarantième nuit, un émissaire du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) est venu me dire de ne pas m’approcher de ma femme. J’obéis en l’envoyant chez ses parents jusqu’à ce qu’Allah décide cette affaire. Puis, dix autres nuits s’écoulèrent.

A la fin de la cinquantième nuit, après l’accomplissement de la prière de Soubh chez moi et alors que j’étais en plein désarroi, j’entendis une voix qui criait du côté de Sil’: « O Ka’b Ibn Malik, la bonne nouvelle est descendue. » Je me suis alors prosterné et je su que la délivrance était descendue. »

 

La mort de ‘AbdAllah Ibn ‘Oubay, le chef des hypocrites

 

L’année de Tabouk, le représentant notoire des hypocrites ‘AbdAllah Ibn Oubay tomba malade au mois de Shawwal et mourut au mois de Dzoul Qi’dah.

Pendant sa maladie qui dura vingt nuits, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) lui rendit visite et lui dit le jour de sa mort : « Ne t’ai-je pas défendu d’aimer les Juifs ? »

- « Sa’d Ibn Zarara les haït et cela ne lui a pas été utile, » répondit le chef des hypocrites avant de poursuivre : « O Messager d’Allah, ce n’est pas le moment pour les reproches. Lorsque je mourais, assiste à mon lavage (ablutions mortuaires) et donne-moi ta chemise pour qu’elle soit mon linceul. »

Malgré la conduite haineuse de ‘AbdAllah Ibn ‘Oubay, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) s’inclina à sa demande.

 

Il est rapporté al-Maghazi d’al-Waqidi :

« Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) assista à son lavage et à sa mise dans le linceul. A son enterrement, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) s’avança pour prier sur sa dépouille ce qui poussa ‘Umar Ibn al-Khattab a dire : « O Messager d’Allah, pries-tu sur ‘AbdAllah Ibn Oubay alors qu’il a dit tel jour ceci et tel jour cela ? » (Rappelant ce que cet hypocrite avait dit et fait). Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) sourit alors puis répondit : « Epargne-moi, ô ‘Umar. »

Mais quand ‘Umar insista, il dit : « Je me suis retrouvé devant un choix et j’ai choisi. Et, si je savais que je pourrais ajouter soixante-dix autres prières, je l’aurai fait pour qu’Il lui pardonne. » »

 

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) voulut dépasser le nombre des soixante-dix prières à cause de la Parole du Très-Haut : « Que tu demandes pardon pour eux, ou que tu ne le demandes pas - et si tu demandes pardon pour eux soixante-dix fois - Allah ne leur pardonnera point. Et ce parce qu’ils n’ont pas cru en Allah et en Son Messager et Allah ne guide pas les gens pervers. » (Qur’an 9/80)

 

Puis, juste après la prière, ces versets descendirent : « Et ne fais jamais la Salat sur l’un d’entre eux qui meurt, et ne te tiens pas debout auprès de sa tombe, parce qu’ils n’ont pas cru en Allah et en Son messager, et ils sont morts tout en étant pervers. Et que ni leurs biens ni leurs enfants ne t’émerveillent! Allah ne veut par-là, que les châtier ici-bas, et qu’ils rendent péniblement l’âme en mécréants. Et lorsqu’une Sourate est révélée : « Croyez en Allah et luttez en compagnie de Son Messager, » les gens qui ont tous les moyens (de combattre) parmi eux te demandent de les dispenser (du combat), et disent : « Laisse-nous avec ceux qui restent. » Il leur plaît, (après le départ des combattants) de demeurer avec celles qui sont restées à l’arrière. Leurs cœurs ont été scellés et ils ne comprennent rien. » (Qur’an 9/84 à 87)

 

Depuis, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) s’abstint de prier sur la dépouille des hypocrites qui mourraient.

 

Selon le témoignage de ‘Amrou Ibn Oumayyah az-Zamari[1] parmi les hypocrites les plus influents qui assistèrent aux funérailles d’Ibn ‘Oubay, il y eut : Sa’d Ibn Hanif, Zayd Ibn al-Lasit, Salamah Ibn al-Hamam, Nou’man Ibn Abou ‘Amir, Rafi’ Ibn Harmalah, Malik Ibn Abou Tawfal, Da’is et Souwayd[2].

 

Finalement, Allah à Lui les Louanges et la Gloire, fit descendre plus de quatre-vingts Versets sur ces hypocrites et que l’on trouve dans la Sourate Le Repentir, appelée aussi la Dénonciation à cause des activités incessantes des hypocrites lors de cette expédition.

...

 

Victoire de l’Islam dans toute la presqu’ile Arabique

 

Après le retour victorieux à Médine au mois de Ramadan de l’an 9 de l’Hégire, l’Islam se répandit dans toute l’Arabie, d’est en ouest et du sud au nord, à l’exception de quelques petites poches idolâtres isolées dans l’extrême sud-ouest.

 

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) envoya donc deux détachement séparés, l’un commandée par ‘Ali Ibn Abou Talib et l’autre par Khalid Ibn al-Walid à Najran et Mazbah, dans l’extrême sud du Yémen,

 

La plus importante prescription concernant l’Islam après la campagne de Tabouk fut celle du pèlerinage imposé par Allah, à Lui les Louanges et la Gloire, à la fin de l’an 09 de l’Hégire. Avant cette année, le pèlerinage n’était pas obligatoire et le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) le faisait avec les polythéistes. Mais après son exil à Médine, il n’accomplit qu’un seul pèlerinage, le pèlerinage de l’Islam aussi appelé le Pèlerinage de l’Adieu.

 

En l’an 09 de l’Hégire, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) n’effectua pas en personne le pèlerinage mais délégua Abou Bakr à la tête de trois cents musulmans qui accomplirent le cinquième pilier de l’Islam.

 

Le jour du Sacrifice, ‘Ali Ibn Abou Talib, l’envoyé du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), prononça à Jamarat al-’Aqabah devant les pèlerins rassemblés, les nouvelles réformes du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) conformément à l’ordre d’Allah :

1 - Interdiction à tout polythéiste de faire le pèlerinage ou de se rapprocher de la Ka’bah après cette année-là.

2 - Défense absolue à tout homme de faire des tournées en étant complètement nu. (La coutume idolâtre faisait tourner les femmes et les hommes nus autour de la Ka’bah).

3 - Accorder aux polythéistes qui n’avaient pas d’engagement avec les Musulmans un délai de quatre mois pour décider librement la voie à adopter : se convertir à l’Islam, quitter l’Arabie ou se préparer à la guerre. Quant à ceux qui avaient un engagement les liant aux Musulmans, ils avaient le droit de rester parmi les Musulmans jusqu’à la fin de ce délai mais après, l’application de l’un des trois choix entrerait en vigueur.

Cet avertissement adressé aux polythéistes était la conséquence directe des quarante versets de la Dénonciation[3].

 

L’expédition de Khalid Ibn al-Walid au Najran

 

Après la campagne de Tabouk qui eut lieu au mois de Rajab de l’an 09 de l’Hégire et qui fut la dernière activité militaire dirigée en personne par le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), l’Islam se répandit dans toute l’Arabie excepté la région de Madhaj au Yémen, et la région des Banou al-Harith à Najran qui ne répondirent pas à l’appel de l’Islam comme l’avaient fait les autres tribus en envoyant des délégations à Médine.

 

Ainsi, au mois de Rabi’ al-Akhir de l’an 10, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) donna l’ordre à Khalid Ibn al-Walid de marcher sur Najran avec pour mission d’amener les Banou al-Harith à l’Islam. Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) insista sur la consigne d’appeler d’abord ces gens à embrasser l’Islam mais de les combattre s’ils ne répondraient pas à l’appel.

 

Khalid respecta les ordres du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et à l’appel, les Banou al-Harith embrassèrent l’Islam et envoyèrent une délégation à Médine avec Khalid Ibn al-Walid, sur la demande du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

 

L’expédition de ‘Ali Ibn Abou Talib au Yémen

 

Lorsque le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) fut informé que les gens du pays de Madhaj au Yémen avaient refusé d’embrasser l’Islam, il leur envoya alors une expédition militaire commandée par ‘Ali Ibn Abou Talib.

 

Et au mois de Ramadan de l’an 10 de l’Hégire, à la tête de trois cents cavaliers, ‘Ali Ibn Abou Talib quitta Qaba’ près de Médine pour arriver quelques jours plus tard dans les terres de Madhaj. Après avoir respecté les consignes du Prophète (les mêmes que celles données à Khalid), la bataille éclata et se solda par la mort de vingt guerriers avant que la tribu de Madhaj ne s’avoue vaincue et annonce sa conversion.

 

Il est rapporté dans les livres d’Ahadith (Tradition du Prophète), d’histoire et de biographies que lors de cette expédition ‘Ali Ibn Abou Talib rencontra le rabbin juif Ka’b al-Ahbar accompagné d’un autre rabbin et qu’un dialogue eut lieu entre eux.

 

Ka’b al-Ahbar a dit : « Quand ‘Ali arriva au Yémen, je lui demandai de me faire la description de Muhammad, ce qu’il fit et qui me fit sourire. Alors, il me demanda : « Pourquoi souris-tu ? » Je lui répondis que ce qu’il venait de dire sur Muhammad ressemblait avec ce que nous savions sur ses qualités et je finis par croire que Muhammad était bien le Messager d’Allah.

Après quoi, je réunis nos rabbins et je leur montrais un écrit en disant : « Ceci est de mon père qui m’a demandé de ne pas l’ouvrir avant je ne n’entende parler de l’apparition d’un Prophète à Yathrib. » Ensuite, je restais Musulman au Yémen jusqu’à la mort du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) puis celle d’Abou Bakr. Enfin je me rendis à Médine pendant le califat de ‘Umar Ibn al-Khattab. Ah ! Que n’ai-je regagné Médine dès l’Hégire (du Prophète)[4] ! »

 

L’année des délégations

 

On appela ainsi cette année à cause des délégations des tribus arabes qui affluèrent à Médine pour annoncer leur conversion au Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) certainement sous l’effet de trois éléments importants :

1 - Le Fath de La Mecque.

2 - La victoire des Musulmans à Hounayn.

3 - Et le succès de l’expédition de Tabouk.

 

Les délégations arabes affluèrent alors à Médine de l’année 09 jusqu’à l’année 11 de l’Hégire. Et ceci fut une grande victoire pour l’Islam et Allah Exalté Très Puissant et Très Haut fit descendre à l’occasion la Sourate du Secours :

 « Au nom d’Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux.

Lorsque vient le secours d’Allah ainsi que la victoire, et que tu vois les gens entrer en foule dans la religion d’Allah, alors, par la louange, célèbre la gloire de ton Seigneur et implore Son pardon. Car c’est Lui le grand Accueillant au repentir. » (Qur’an 110)

 

Voici résumé, les noms des tribus qui envoyèrent leur délégation pour déclarer leur Islam au Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) :

1. Mazinah.

2. Banou Asd.

3. Tamim.

4. ‘Abs.

5. Fazara.

6. Banou Moura.

7. Tha’labah.

8. Mouharib.

9. Sa’d Ibn Bak.

10. Kilab.

11. Banou ‘Amir Ibn Sa’sa’a.

12. ‘Abd al-Qays.

13. Rou’as.

14. ‘Aqil Ibn Ka’b.

15. Ja’da.

16. Qashir.

17. Banou al-Bouka’.

18. Banou ‘Abd Ibn Ouday.

19. Ashja1.

20. Bahilah.

21. Banou Salim.

22. Banou Hilal.

23. Bakr Ibn Wa’il.

24. Taghlib.

25. Hanifah.

26. Banou Shayban.

27. Tay.

28. Toujib.

29. Khoulan.

30 Jou’fiy.

31. Souda’.

32. Mourad.

33. Zoubayd.

34. Kinda.

35. Al-Azd.

36, As-Sadif.

37. Khoushayn.

38. Sa’d Houzaym.

39. Baliy.

40. Bahra’.

41. ‘Oudrah.

42. Soulaman.

43 Jouhaynah.

44. Banou Kalb.

45. Jarm.

46. Ghassan.

47. Houmadan.

48. Sa’d al-Ashirah

49. ‘Ans.

50. Ad-Dariyoun.

51. Ar-Raha’.

52. Ghamid.

53. Bajilah.

54. Hadramaout.

55. Khath’am.

56. Al-Ash’ariyoun.

57. Azd Oumman.

58. Ghafiq.

59. Bariq.

60. Daws.

61. Thoumala.

62. Houddan.

63. Aslam.

64. Jouzam.

65. Mahra.

66. Himyar.

67. les Chrétiens du Najran.

68. Jayshan.

69. As-Siba’.

 



[1] Maghazi al-Waqidi, t. III, p. 1045

[2] Maghazi al-Waqidi, t. III, p. 1060.

[3] Maghazi al-Waqidi, t. III, p. 1056.

[4] Al-Bidayah wa an-Nihayah, t. IV, p.p. 36-37-38, Maghazi al-Waqidi, t. III, p.p. 1077-1078 et Sirah Ibn Hisham.



Tombeau du Messager d'Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) - Madinah al-Munawwarah