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La campagne de Tabouk

 

Les actions militaires entre Hounayn et Tabouk

 

Sans conteste, la bataille de Hounayn qui eut lieu entre les Musulmans et la tribu Hawazin fut la plus violente des batailles et la dernière du Prophète Muhammad (Salut et Bénédiction sur lui).

 

La victoire des Musulmans dans cette bataille fut le dernier clou du cercueil de l’idolâtrie dans la presqu’ile arabique et dans cette bataille, la plus nombreuse coalition tribale païenne après celles des Coalisés, fut vaincue par les Compagnons du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

 

Dans cette bataille, le reste des païens de toute l’Arabie ainsi que les nouvellement convertis qui doutaient encore mirent tous leurs espoirs sur la victoire des troupes de Hawazin à Hounayn. Ils espérèrent tous que les 20.000 guerriers de Hawazin écraseraient l’armée du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) au nombre de dix-mille combattants joint par deux mille musulmans mecquois qui quinze jours auparavant venaient juste d’embrasser l’Islam et qu’un grand nombre d’entre eux avaient encore de la haine et de l’animosité envers l’Islam et les Musulmans et qui cultivaient l’espoir secret de voir les polythéistes remporter la victoire sur le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

 

Contre tous leurs espoirs et divagations, l’armée musulmane vainquit les Hawazin qui prouvèrent leurs capacités guerrières à Hounayn et fit ainsi voler en éclats tous les vains espoirs auxquels s’accrochaient encore le reste des païens qui s’étaient dispersées çà et là dans la presqu’ile arabique.

 

Et bien qu’une branche de Hawazin, les Thaqif, restèrent invaincus, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) leva le siège après la mort de quatorze Shouhadah, un nombre que tous les chroniqueurs et historiens s’accordent à dire qu’il ne fut pas égalé même dans la bataille de Hounayn, après avoir dit à ses Compagnons qu’Allah Exalté allait amener Thaqif sur la voie de l’Islam sans qu’aucun sabre n’ait besoin d’être levé et que, par conséquent, il n’y avait aucune raison à poursuivre le siège de gens qui allaient embrasser l’Islam, ce qu’ils firent exactement quelques temps plus tard quand une délégation de Thaqif se rendit à Médine pour déclarer la conversion de toute la tribu après de longs pourparlers avec le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

 

Malgré la victoire décisive des Musulmans à Hounayn, certains païens restèrent à défier l’Islam. Ces poches de résistance disséminées, sans aucun lien militaire entre elles pouvant conduire à une force unie contre les Musulmans, ne constituaient donc aucun menace militaire contre la communauté de l’Islam qui après ces succès successifs, était devenue la plus forte force de toute l’Arabie.

 

Toutefois, l’existence de ces croyances idolâtres ne pouvait durer car non seulement l’Islam était venu pour les effacer et conduire l’humanité vers la dernière étape de sa maturité mais aussi du simple fait qu’elle ne pouvait coexister avec la croyance en Allah l’Unique. Ainsi pour que seul règne l’Islam sans partage et que Seul Allah l’Unique soit adoré dans toute l’Arabie pour commencer, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) lanca cinq expéditions militaires pour éliminer les derniers vestiges de l’idolâtrie.

 

L’expédition contre les Banou Tamim

 

Cette expédition commandée par ‘Ouyaynah Ibn Hisn, le seigneur de Fazara, fut envoyé dans le territoire des Banou Tamim au mois de Mouharram 09 de l’Hégire.

 

Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) envoya certains Compagnons pour la collecte de la Zakat dont Barid Ibn al-Hasib pour les tribus d’Aslam et Ghifar, ‘Abbad Ibn Bishr al-Ashhal pour les tribus de Soulaym et Mazina, Rafi’ Ibn Makith pour sa tribu de Jouhaynah, ‘Umar Ibn al-‘As pour Fazara az-Zakkaq, Ibn Soufyan al-Kilab pour les Banou Kilab et Bousr Ibn Soufyan al-Ka’bi pour sa tribu Khouza’a.

 

Les Khouza’a qui s’était converti à l’Islam était donc obligé de donner la zakat pour la trésorerie de Musulmans et cette tribu était voisine de deux tribus des Banou Tamim, les Banou Jouhaynah et les Banou ‘Amrou Ibn Joundoub Ibn al-Atir encore païennes.

 

Certains Banou Tamim, qui étaient les hôtes de Khouza’a ce jour-là, refusèrent que le Mousaddiq (le collecteur de zakat) prenne la part déterminée de moutons, de chèvres et de chameaux. Ils demandèrent à Khouza’a : « Qu’est-ce que cela? On prend vos biens injustement ? »

- « Nous sommes musulmans et ceci est une obligation dans notre religion que nous acceptons de bon cœur, » répondirent les Khouza’i.

- « Par Allah, il ne touchera à aucun chameau, » répliquèrent furieusement leurs hommes. Puis, ils prirent leurs armes pour empêcher par la force l’émissaire du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) de prendre la zakat de la tribu Khouza’a.

L’émissaire du Prophète qui n’était accompagné que de deux médinois se retira devant le rassemblement de ces Tamim armés et menaçants et regagna aussitôt Médine.

 

Al-Waqidi a rapporté :

« Sachant que l’Islam ne s’était pas encore généralisé parmi les Arabes, il fut effrayé. Certains peuples arabes encore païens craignaient encore les Musulmans après ce qu’avait fait le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) à La Mecque et à Hounayn. Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) reçut ce dernier qui lui dit : « Mais nous étions que trois, ô Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)[1]. »

 

L’expulsion des Banou Tamim par Khouza’a

 

L’attitude des Banou Tamim qui, rappelons-le, étaient de simples hôtes traduisait tous les sens de la stupidité et de la maladresse. Khouza’a leur dit donc : « N’étiez-vous nos voisins vous n’arriverez jamais chez vous, nous risquons maintenant la colère du Messager d’Allah en plus de vous mettre en travers de son chemin en interdisant les musulmans de prendre nos contributions (pour la trésorerie des Musulmans). » Khouza’a les chassa alors pour exprimer leur mécontentement.

 

Lorsque le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) fut informé du comportement des Banou Tamim, il demanda : « Qui sortira pour ce qu’ont fait ces gens ? »

- « Moi, par Allah !, » se proposa ‘Ouyaynah Ibn Hisn, « je vais les chercher même s’ils atteignent Yabrin jusqu’à ce que je te les ramène, par la volonté d’Allah. (Et, à ce moment) tu décideras de leur sort, s’ils n‘embrassent pas l’Islam. »

 

Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) envoya donc ‘Ouyaynah Ibn Hisn à la tête d’un petit détachement de cinquante cavaliers, tous des bédouins. ‘Ouyaynah et ses cavaliers, marchèrent la nuit et se cachèrent le jour jusqu’à ce qu’ils parviennent chez les Banou Tamim sur les terres des Banou Soulaym. Il les attaqua alors mais ils n’eurent pas le courage nécessaire pour faire face et s’enfuirent cependant, ‘Ouyaynah et ses hommes réussirent à capturer onze hommes et onze femmes ainsi que trente enfants.

 

De retour à Médine, ces captifs furent placés dans la maison de Ramla Bint al-Harith jusqu’au jour où une grande délégation de Tamim la conversion de toute la tribu au Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Ce qui suffit pour remette en liberté les cinquante-deux captifs.

 

A propos de ces Tamim, Allah, à Lui les Louanges et la Gloire, fit descendre ce verset : « Ceux qui t’appellent à haute voix de derrière les appartements, la plupart d’entre eux ne raisonnent pas. » (Qur’an 49/4)

 

L’expédition punitive contre Khitha’m

 

Au mois de Safar de l’an 09 de l’Hégire, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) ordonna de lancer une attaque contre une branche (tribale) des païens de Khitha’m[2] et désigna un groupe de combat de vingt hommes dont il donna le commandement à Qoutba Ibn ‘Amir Ibn Hadida.

 

Après avoir reçu les ordres, Qoutba et ses Compagnons marchèrent sur leur objectif en se déplaçant la nuit seulement, dans le but de surprendre l’ennemi. Arrivés à un endroit appelé Batn Mashab, ils rencontrèrent un homme peu coopératif qu’ils interrogèrent sans résultat et qui essaya d’alerter les siens qui n’étaient pas loin, ce qui obligea Qoutba Ibn ‘Amir à le tuer.

 

Puis, les Musulmans bivouaquèrent à l’endroit même en attendant la tombée de la nuit. Et, dans l’obscurité totale de la nuit, Qoutba envoya un de ses Compagnons pour reconnaitre le terrain et repérer le camp ennemi. Au retour de ce Compagnon, il arrêta son plan d’attaque, donna ses derniers ordres et lanca une attaque surprise réussie.

 

Qoutba et ses Compagnons tombèrent sur l’ennemi en profitant de l’effet de surprise mais les assaillis résistèrent et les combats durèrent jusqu’au matin, jusqu’au moment où des renforts de la tribu Khitha’m arrivèrent. Mais, pour la victoire de l’Islam, la rivière, par la grâce d’Allah Exalté entra soudain en crue et barra le passage aux renforts ce qui permis aux hommes de Qoutba de continuer la bataille dans des conditions relativement bonnes si bien qu’à la fin, ils tuèrent tous les hommes et prirent en butin toutes les femmes et tous les biens.

 

A Médine, chacun des membres de l’expédition reçut sa part du butin évalué à quatre chameaux après que le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) eut soustrait le cinquième pour l’utilité de la communauté.

 

L’expédition des Banou Kilab

 

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) poursuivit le harcèlement des païens dans la presqu’ile arabique. Ainsi on l’informa qu’un Batn[3] d’al-Qarta’, des Banou Bakr dans la région du Najd à l’est de Médine, s’opposait encore à l’Islam et célébrait aussi ses croyances idolâtres.

Sur ces informations, au mois de Rabi’ Awwal de l’an 9 de l’Hégire, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) leur envoya un détachement commandé par ad-Dahhak Ibn Joufyan al-Kilabi.

Aucun historien n’a rapporté le nombre des combattants qui participèrent à cette campagne cependant, al-Waqidi a rapporté que c’était une armée ; ce qui revient à dire qu’il y avait un grand nombre de combattants.

 

Quand l’armée d’ad-Dahhak les rencontra à un endroit appelé Zaja Lawat, il les appela à embrasser l’Islam mais ces derniers répondirent en choisissant les hostilités qui ne tardèrent pas à se déclencher.

 

La bataille se termina par la victoire des Musulmans et la défaite de polythéistes. Parmi les faits dont Allah Exalté détient les secrets, il a été rapporté ce fait étonnant : Pendant la bataille, un musulman nommé al-Asyad Ibn Salamah rencontra son père païen Abou Salamah. Lorsque le fils demanda à son père d’embrasser l’Islam, celui-ci répondit par des insultes à l’encontre de son fils et de l’Islam. Al-Asyad le chargea et blessa le jarret du cheval qu’il montait et son père tomba dans l’eau. Son fils lui tendit alors la main pour le sauver quand un autre combattant qui suivait la scène se précipita et acheva le père devant les yeux du fils.

 

Ces Bakr qui avaient reçu un message écrit du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) leur demandant d’embrasser l’Islam se moquèrent avant la bataille du message en lavant le cuir de son encre qu’ils utilisèrent pour raccommoder une outre.

 

Les chroniqueurs et historiens ont rapporté que lorsque le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) fut informé sur la réaction des Bakr i dit : « Qu’est-ce qui leur a pris ? Est-ce que Allah a emporté leur bon sens ? »

 

Les biographes de la Sirah du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) ont aussi rapporté que celui qui leur délivra le message s’appelait ‘AbdAllah Ibn Awsajah[4].

 

L’expédition maritime de ‘Alqama al-Moudlaji

 

Cette expédition de trois cents combattants commandés par ‘Alqama al-Moudlaji fut envoyé dans la région de la mer Rouge à Qalzam au mois de Rabi’ al-Akhir de l’an 9 de Hégire pour empêcher des pirates abyssins de venir rôder près du port d’ash-Sha’ayba, non loin de Jeddah.

 

‘Alqama se rendit Jeddah puis à ash- Sha’ayba, d’où il prit la mer vers l’ile où les pirates avaient installé leur camp. A la vue des Musulmans, ces derniers s’enfuirent et reprirent la mer et  en direction de l’Abyssinie.

Les historiens n’ont pas indiqué le nom de cette île.

 

Constatant leur fuite, ‘Alqama et les trois cents combattants musulmans regagnèrent ash-Sha’yba. Sur le chemin du retour et puisque la mission était terminée, quelques Compagnons demandèrent la permission de rejoindre les leurs. ‘Alqama leur accorda la permission tout en désignant à leur tête un chef ‘AbdAllah Ibn Hathafa as-Sahmi, un musulman sérieux mais connu aussi pour ses plaisanteries.

 

Ces derniers, en cours de chemin, s’arrêtèrent pour se reposer autour d’un feu et ‘AbdAllah ne rata pas l’occasion pour plaisanter en ordonnant à ses Compagnons de sauter sur le feu. Et au moment où ils allaient s’exécuter (car la discipline militaire était observée, selon les ordres du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), il les arrêta en leur disant : « Asseyez-vous ! J’ai seulement voulu rire avec vous. » Cependant, lorsque le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) en fut informé, il dit : « Celui qui vous ordonne de commettre une transgression, ne l’écoutez-pas. »

 

L’expédition de 'Ali Ibn Abou Talib contre la tribu Tay

 

Toujours ce même mois, ‘Ali Ibn Abou Talib, commandant un escadron de cent cinquante Ansar dont les seigneurs des Aws et des Khazraj montés sur cinquante chevaux et cent chameaux, marcha sur Tay’ dans l’extrême nord de l’Arabie, là où habitait précisément la grande famille de Hatim at-Tay qui avait pour roi ‘Adi Ibn Hatim.

 

Après la victoire décisive de Hounayn, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), ne perdit pas de temps à envoyer des expéditions partout en Arabie, là où à chaque fois des informations lui parvenaient que des idoles existaient encore et c’est la raison pour laquelle il dépêcha ‘Ali Ibn Abi Talib lorsqu’il fut informé que les Tay avaient une idole appelée al-Fouls.

 

La tribu Tay d’origine yéménite dont les clans et les ramifications étaient nombreuses émigrèrent au nord il y a si longtemps qu’elle était considérée comme une tribu de Najd. Sur le plan militaire, elle avait de grandes capacités, vu sa nombreuse population qui pouvait être comparée à celle de Ghatafan et aussi à celle de Hawazin et en plus de leurs nombreux forts, elle avait des guerriers courageux.

 

‘Ali Ibn Abou Talib aurait pu rencontrer des difficultés et une résistance acharnée comme les Musulmans rencontrèrent face à Ghatafan et à Hawazin dans la bataille de Hounayn mais la chute de ces deux puissantes tribus et leurs conversions ainsi que celle de la majorité des tribus rendirent Tay’ inoffensive surtout après la défection de ses clans et malgré son passé militaire célèbre.

 

‘Ali Ibn Abi Talib et ses Compagnons parcourent six cents miles et détruisirent l’idole al-Fouls après une résistance qui se termina par la mort d’un certain nombre de résistants et la capture de plusieurs personnes.

Parmi les captifs, il y avait as-Safinah, la fille de Hatim Tay et la sœur de ‘Adi Ibn Hatim, le roi chrétien de Tay, qui s’enfuit en Syrie. Cependant, il embrassa l’Islam après que sa sœur as-Safinah, devenue libre et musulmane l’eut contacté dans son exil et convaincu de la justesse de la mission du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). L’islam de ‘Adi fut d’un grand support surtout après la mort du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) sous le Califat d’Abou Bakr Siddiq dans les batailles contre les Apostats.

 

L’Imam al-Waqidi a rapporté dans al-Maghazi :

« Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) envoya ‘Ali à la tête de 150 hommes qui firent le voyage sur 100 chameaux et 50 chevaux. Il y avait dans l’expédition que des Ansar dont les notables des Aws et des Khazraj. Ils attaquèrent un camp de Tay puis, ‘Ali et ses Compagnons se dirigèrent vers l’endroit où se trouvait al-Fouls (l’idole de Tay) pour la détruire. ‘Ali donna l’étendard, de couleur noire, à Sahl Ibn Hanif et la bannière, de couleur blanche, à Jabbar Ibn Sakhr as-Salami. Lors de son déplacement, la patrouille musulmane suivit un guide nommé Hourayth de la tribu des Banou Asd qui les fit passer par Fayd[5] avant d’arriver à un certain endroit où il dit : « D’ici, il y a une journée de marche pour arriver chez le clan en question. Si marchons en plein jour, nous arriverons chez eux mais vous serez découverts et ils s’enfuiront sans que vous n’obteniez rien. Cependant, si nous campons ici toute la journée pour nous déplacer la nuit, nous pouvons les surprendre de bon matin, aux  premières lueurs du jour. »

La proposition du guide fut acceptée. On installa alors un camp et on délesta les chameaux. Mais pour plus de prévention, ‘Ali Ibn Abou Talib ordonna à Abou Qatada, à al-Houbab Ibn al-Moundir et à Abou Na’ila de patrouiller aux alentours du camp. Dans leur mission, ces derniers rencontrèrent un jeune esclave noir.

-« Qui es-tu, » lui demandèrent-ils ?

- « Quelqu’un à la recherche de quelque chose, » leur dit-il.

(Sur sa vague réponse), on le ramena à ‘Ali qui lui répéta la même question :

- « Qui es-tu ? » Et l’esclave de répéter aussi la même réponse. On le secoua donc jusqu’à ce qu’il dise la vérité :

- « Je suis un esclave appartenant à un homme de Tay, des Banou Nabahan. On m’a ordonné de parcourir la région en me disant : « Dès que tu auras vu les chevaux de Muhammad, tu viendras vite nous informer. Quand je vous ai vus, je voulus partir mais je me suis dit : « Ne te précipite pas, il faut d’abord connaitre votre nombre et celui de vos chevaux. Je ne sais ce qui m’a pris : je me retrouvais comme ligoté jusqu’au moment où vos éclaireurs m’ont pris. »

- « Sois franc, dis-nous ce que tu caches, » dit ‘Ali.

- « Le clan est à une nuit de marche. Avec vos chevaux, vous pouvez l’atteindre au matin. »

- « Qu’en pensez-vous, » demanda ‘Ali à ses Compagnons ?

- « Partons de nuit pour pouvoir les surprendre au matin. Nous partirons de nuit en compagnie de l’esclave noir, laissant une distance entre nous et Hourayth ainsi que le reste des combattants qui suivront de loin avec la volonté d’Allah. »

- « Vous voyez juste. »

Et, par conséquent ils partirent avec l’esclave noir mais juste avant le lever du jour, ce dernier essaya de brouiller la piste néanmoins sans résultat.

- « Je me suis trompé de route, » dit-il, « je l’ai laissée derrière moi. »

- « Retourne alors là où tu t’es trompé, » lui dit ‘Ali. Il retourna effectivement sur ses pas à un mile ou plus puis il dit : « Je suis encore trompé. »

- « Tu es en train de nous tromper, tu veux nous détourner du clan. Ramenez-le, » dit alors ‘Ali avant de poursuivre : « Soit tu nous dis la vérité, soit que tu auras la tête tranchée. »

On l’avança puis on tira le sabre qu’on mit sur sa tête. A la vue de la mort se rapprocher, il dit : « Et si je vous dis la vérité, est-ce que cela va me sauver ? »

- « Oui, » lui répondit-on.

- « Le clan est tout près. »

Ils avancèrent avec lui pour vérifier s’il avait dit vrai et trouvèrent effectivement les tentes des gens de Tay cependant, ils attendirent le lever du jour pour attaquer le camp.

L’attaque fut un succès total puisque les Musulmans parvinrent à ramener avec eux des captifs (essentiellement des enfants et des femmes) ainsi que d’autres variétés de butin sans avoir oublier de détruire la statue appelée al-Fouls. Avec la destruction de cette idole, les Musulmans mirent fin à la dernière manifestation des croyances païennes dans le nord de l’Arabie. »

 

Ainsi, les unités militaires de l’Islam éliminèrent l’une après l’autre les résistances païennes sans aucune difficultés et la tribu Tay, bien qu’elle fut la plus puissante d’entre elles et laissé croire que sa réaction serait des plus fortes et violentes, dans une surprenante et imprévisible réaction, s’effondra dès la première attaque. La peur eut raison de ces guerriers païens et de de leur courage.

 

La défaite psychologique avant terme des païens revient sans aucun doute au succès du commandement musulman dans sa mission de dislocation des plus puissants tenants de l’idolâtrie et ennemis de l’Islam, notamment les tribus de Ghatafan, Hawazin et les différents clans de Qouraysh en plus de l’élément juif antagonique et particulièrement celui de Khaybar.

 

Les milliers de guerriers de Tay n’étaient plus cette force crainte comme par le passé et une simple patrouille légère de 150 musulmans suffit pour vaincre toute une tribu minée par l’angoisse et la peur. Cette peur qui vint à bout de Tay était une preuve de la véracité de la parole du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) qui a dit : « Par la peur, Allah m’octroya la victoire ! » Et quiconque connait Tay, son grand roi et ses courageux cavaliers ne peut croire que des milliers de guerriers avaient été vaincus par un simple détachement de musulmans, à six-cent miles de Médine, de même qu’il ne peut croire aussi que son seigneur et roi ‘Adi Ibn Hatim s’enfuit sans manifester la moindre résistance.

 

La fuite de ‘Adi Ibn Hatim en Syrie

 

Laissons donc le roi de Tay, ‘Adi raconter la situation qui régnait dans les différents clans de sa grande tribu ainsi que son aventure qui le mena jusqu’en Syrie puis le fit revenir à Médine pour enfin déclarer sa conversion devant le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

 

Il est rapporté dans la Sirah d’Ibn Hisham:

« Il n’y avait pas d’homme parmi les Arabes qui détestait autant que moi le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Quant à moi, j’étais un homme d’origine noble et chrétien. J’étais respecté dans ma tribu car je prenais le quart du butin chaque fois que l’on razziait et je professais une religion (il était chrétien alors que les siens étaient polythéistes) tout en étant roi dans ma tribu. Quand j’entendis parler du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), je l’ai aussitôt détesté. Puis, je dis à un esclave arabe que j’avais et qui était berger de mes chameaux : « Va me préparer mes plus dociles et robustes chameaux et apprête-les. Et lorsque tu apprendras que l’armée de Muhammad est entrée dans ce pays, informes-moi le plus rapidement possible ! »

 

Un jour, il revint me dire : « O ‘Adi, fait ce que tu as l’intention de faire car les chevaux de Muhammad sont là. J’ai vu  des étendards et j’ai questionné et on m’a dit que ce sont les armées de Muhammad. » (Ce n’était pas des armées mais plutôt un simple détachement cependant la peur accroit les proportions). Alors, je lui demandai de ramener mes chameaux et partit avec ma famille et mon fils en me disant : « Je vais rejoindre mes frères de religion, les chrétiens en Syrie sachant que je laissais derrière moi la fille de Hatim. » (as-Safinah qui était connue pour sa grande intelligence et ses profondes intuitions, qui fut capturée puis libérée par le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)).

 

J’arrivais donc arrivé en Syrie quand le Messager (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) fut informé de ma fuite en Syrie. On mit la fille de Hatim devant la porte de la mosquée là où l’on mettait habituellement les captives et quand le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) passa, elle se leva et lui dit : « O Messager d’Allah, le père est mort et son héritier qui devait arriver est absent. Au nom d’Allah, sois bienveillant avec moi (en m’octroyant ma liberté).

- « Et qui est [ton tuteur] ? »

- « ‘Adi Ibn Hatim. »

- « Celui-là qui s’est enfui d’Allah et de Son Messager ? »

- « Oui, » répondit-elle.

 

Puis elle dit : « Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) partit en me laissant (sans réponse). Le jour suivant, je lui répétais ce que je lui avais dit la première fois et lui de même. Le troisième jour, alors que j’avais perdu espoir, un homme qui marchait derrière le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), me fit signe d’insister. Je me suis alors aussitôt levée et je lui ai réitéré ma demande avec les mêmes termes.

 

Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) me répondit alors : « Je te l’accorde mais ne te précipite pas de partir. Trouve d’abord un homme de confiance parmi les tiens pour qu’il t’emmène dans ton pays et n’oublie pas de m’informer quand tu décides de partir. »

Je demandais ensuite qui était cet homme qui m’avait conseillé de parler au Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et on me répondit que c’ était ‘Ali Ibn Abou Talib (radhiyallahou ‘anhou). Je restais (à Médine) jusqu’à au moment où je pu trouver un homme de confiance car je voulais rejoindre mon frère en Syrie alors, je suis allée informer le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), comme convenu. Il me donna des habits et de l’argent puis je partis pour la Syrie. »

 

Par Allah, dit ‘Adi Ibn Hatim, j’étais assis avec ma famille lorsque je vis une femme se rapprocher au loin, j’ai tout de suite pensé que c’était la fille de Hatim et c’était effectivement elle. Dès qu’elle arriva, elle resta debout et ne cessa de me culpabiliser.

- « Fuyard et injuste, tu t’es enfui avec ta famille et ton fils en laissant derrière toi le souvenir de ton père, honte à toi ! »

- « Hélas que veux-tu, petite sœur, ce suffit, ne dis rien d’autre ! Par Allah, je n’ai aucune excuse, j’ai commis, c’est vrai, ce que tu viens de dire. »

 

Puis je l’accueillie et un peu plus tard, je lui demandai (elle était une femme de décision) :

- « Que penses-tu de cet homme (le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)) ? »

- « Je vois, par Allah, que tu dois le rejoindre au plus vite. S’il est un Prophète, le premier qui l’a cru aura ce privilège de l’avoir fait et s’il est un roi, tu ne seras pas humilié même en plein Yémen, (tu ne perdras rien) et tu resteras comme tu es. »

- « C’est la bonne suggestion. »

 

Puis, je parti à Médine et entrai chez le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) alors qu’il était dans sa mosquée. Après l’avoir salué, il me demanda mon nom. Quand je lui ai dit qui j’étais, il se leva et m’emmena chez lui.

 

Sur le chemin, une vieille femme de faible carrure le retint et lui parla d’une chose qui l’intéressa alors je me dis : « Par Allah, ce n’est pas un roi !» Puis il m’emmena chez lui, et là il m’invita à m’asseoir sur un modeste coussin.

- « Assieds-toi sur cela. »

- « Non, assieds-toi, plutôt. »

- « Non, assieds-toi. »

Je m’assis donc sur ce coussin alors que le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) s’assit par terre. Je me dis alors : « Ce n’est pas des pratiques de roi. »

- « O ‘Adi Ibn Hatim, n’étais-tu pas ruskinien ? (la croyance ruskinienne était intermédiaire entre celle des sabéens et le christianisme).

- « C’est vrai, je l’étais. »

- « Ne prenais-tu pas dans ta tribu le quart de chaque butin ? »

- «  Oui, c’est vrai. »

- « N’as-tu pas permission dans ta religion ? »

- « Oui, par Allah c’est vrai. »

Je me suis convaincu, par conséquent, qu’il était un Prophète envoyé à qui on fit savoir ce qu’il ignorait et finalement, j’embrassais l’Islam. »

 

Sa conversion fut plus tard d’un grand bénéfice et secours surtout contre les Apostats lorsqu’il put convaincre trois mille cavaliers de revenir à l’Islam et de participer au combat qui se solda par la défaite de Toulayhah Ibn Khouwaylid et de ‘Ouyaynah Ibn Hisn al-Fizari dans la bataille de Bouzakhah.



[1] Maghazi, al-Waqidi, t.4, p 974.

[2] Une tribu yéménite qahtaniyah dont les terres se situaient entre Bisha et Tourba.

[3] Une sorte de clan mais plus nombreux.

[4] Maghazi al-Waqidi, t.II pp 754-755 et t. III, p. 982.

[5] Fayd: une petite agglomération située sur le chemin menant de La Mecque à al-Koufa. Pour de plus amples informations, voir Marasid al-Itla’.