La campagne de
Tabouk
Les actions
militaires entre
Hounayn
et Tabouk
Sans conteste, la bataille de Hounayn qui eut
lieu entre les Musulmans et la tribu Hawazin fut la plus
violente des batailles et la dernière du Prophète Muhammad
(Salut et Bénédiction sur lui).
La victoire des Musulmans dans cette bataille fut le
dernier clou du cercueil de l’idolâtrie dans la
presqu’ile arabique et dans cette bataille, la plus
nombreuse coalition tribale païenne après celles des
Coalisés, fut vaincue par les Compagnons du Prophète
(sallallahou ‘aleyhi wa sallam).
Dans cette bataille, le reste des païens de toute
l’Arabie ainsi que les nouvellement convertis qui
doutaient encore mirent tous leurs espoirs sur la
victoire des troupes de Hawazin à Hounayn. Ils
espérèrent tous que les 20.000 guerriers de Hawazin
écraseraient l’armée du Messager d’Allah (sallallahou
‘aleyhi wa sallam) au nombre de dix-mille combattants
joint par deux mille musulmans mecquois qui quinze jours
auparavant venaient juste d’embrasser l’Islam et qu’un
grand nombre d’entre eux avaient encore de la haine et
de l’animosité envers l’Islam et les Musulmans et qui
cultivaient l’espoir secret de voir les polythéistes
remporter la victoire sur le Prophète (sallallahou
‘aleyhi wa sallam).
Contre tous leurs espoirs et divagations, l’armée
musulmane vainquit les Hawazin qui prouvèrent leurs
capacités guerrières à Hounayn et fit ainsi voler
en éclats tous les vains espoirs auxquels s’accrochaient
encore le reste des païens qui s’étaient dispersées çà
et là dans la presqu’ile arabique.
Et bien qu’une branche de Hawazin, les Thaqif, restèrent
invaincus, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)
leva le siège après la mort de quatorze Shouhadah, un
nombre que tous les chroniqueurs et historiens
s’accordent à dire qu’il ne fut pas égalé même dans la
bataille de Hounayn, après avoir dit à ses
Compagnons qu’Allah Exalté allait amener Thaqif sur la
voie de l’Islam sans qu’aucun sabre n’ait besoin d’être
levé et que, par conséquent, il n’y avait aucune raison
à poursuivre le siège de gens qui allaient embrasser
l’Islam, ce qu’ils firent exactement quelques temps plus
tard quand une délégation de Thaqif se rendit à Médine
pour déclarer la conversion de toute la tribu après de
longs pourparlers avec le Messager d’Allah (sallallahou
‘aleyhi wa sallam).
Malgré la victoire décisive des Musulmans à Hounayn,
certains païens restèrent à défier l’Islam. Ces poches
de résistance disséminées, sans aucun lien militaire
entre elles pouvant conduire à une force unie contre les
Musulmans, ne constituaient donc aucun menace militaire
contre la communauté de l’Islam qui après ces succès
successifs, était devenue la plus forte force de toute
l’Arabie.
Toutefois, l’existence de ces croyances idolâtres ne
pouvait durer car non seulement l’Islam était venu pour
les effacer et conduire l’humanité vers la dernière
étape de sa maturité mais aussi du simple fait qu’elle
ne pouvait coexister avec la croyance en Allah l’Unique.
Ainsi pour que seul règne l’Islam sans partage et que
Seul Allah l’Unique soit adoré dans toute l’Arabie pour
commencer, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa
sallam) lanca cinq expéditions militaires pour éliminer
les derniers vestiges de l’idolâtrie.
L’expédition contre les Banou Tamim
Cette expédition commandée par ‘Ouyaynah Ibn Hisn,
le seigneur de Fazara, fut envoyé dans le territoire des
Banou Tamim au mois de Mouharram 09 de l’Hégire.
Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)
envoya certains Compagnons pour la collecte de la Zakat
dont Barid Ibn al-Hasib pour les tribus d’Aslam
et Ghifar, ‘Abbad Ibn Bishr al-Ashhal pour les tribus de
Soulaym et Mazina, Rafi’ Ibn Makith pour sa tribu de
Jouhaynah, ‘Umar Ibn al-‘As pour Fazara az-Zakkaq, Ibn
Soufyan al-Kilab pour les Banou Kilab et Bousr Ibn
Soufyan al-Ka’bi pour sa tribu Khouza’a.
Les Khouza’a qui s’était converti à l’Islam était donc
obligé de donner la zakat pour la trésorerie de
Musulmans et cette tribu était voisine de deux tribus
des Banou Tamim, les Banou Jouhaynah et les Banou ‘Amrou
Ibn Joundoub Ibn al-Atir encore païennes.
Certains Banou Tamim, qui étaient les hôtes de Khouza’a
ce jour-là, refusèrent que le Mousaddiq (le collecteur
de zakat) prenne la part déterminée de moutons, de
chèvres et de chameaux. Ils demandèrent à Khouza’a : «
Qu’est-ce que cela? On prend vos biens injustement ? »
- « Nous sommes musulmans et ceci est une obligation
dans notre religion que nous acceptons de bon cœur, »
répondirent les Khouza’i.
- « Par Allah, il ne touchera à aucun chameau, »
répliquèrent furieusement leurs hommes. Puis, ils
prirent leurs armes pour empêcher par la force
l’émissaire du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa
sallam) de prendre la zakat de la tribu Khouza’a.
L’émissaire du Prophète qui n’était accompagné que de
deux médinois se retira devant le rassemblement de ces
Tamim armés et menaçants et regagna aussitôt Médine.
Al-Waqidi a rapporté :
« Sachant que l’Islam ne s’était pas encore généralisé
parmi les Arabes, il fut effrayé. Certains peuples
arabes encore païens craignaient encore les Musulmans
après ce qu’avait fait le Messager d’Allah (sallallahou
‘aleyhi wa sallam) à La Mecque et à Hounayn. Le
Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) reçut ce
dernier qui lui dit : « Mais nous étions que trois, ô
Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)[1].
»
L’expulsion des Banou Tamim par Khouza’a
L’attitude des Banou Tamim qui, rappelons-le, étaient de
simples hôtes traduisait tous les sens de la stupidité
et de la maladresse. Khouza’a leur dit donc : «
N’étiez-vous nos voisins vous n’arriverez jamais chez
vous, nous risquons maintenant la colère du Messager
d’Allah en plus de vous mettre en travers de son chemin
en interdisant les musulmans de prendre nos
contributions (pour la trésorerie des Musulmans). »
Khouza’a les chassa alors pour exprimer leur
mécontentement.
Lorsque le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa
sallam) fut informé du comportement des Banou Tamim, il
demanda : « Qui sortira pour ce qu’ont fait ces gens ? »
- « Moi, par Allah !, » se proposa ‘Ouyaynah Ibn Hisn,
« je vais les chercher même s’ils atteignent Yabrin
jusqu’à ce que je te les ramène, par la volonté d’Allah.
(Et, à ce moment) tu décideras de leur sort, s’ils
n‘embrassent pas l’Islam. »
Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)
envoya donc ‘Ouyaynah Ibn Hisn à la tête d’un
petit détachement de cinquante cavaliers, tous des
bédouins. ‘Ouyaynah et ses cavaliers, marchèrent la nuit
et se cachèrent le jour jusqu’à ce qu’ils parviennent
chez les Banou Tamim sur les terres des Banou Soulaym.
Il les attaqua alors mais ils n’eurent pas le courage
nécessaire pour faire face et s’enfuirent cependant,
‘Ouyaynah et ses hommes réussirent à capturer onze
hommes et onze femmes ainsi que trente enfants.
De retour à Médine, ces captifs furent placés dans la
maison de Ramla Bint al-Harith jusqu’au jour où
une grande délégation de Tamim la conversion de toute la
tribu au Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa
sallam). Ce qui suffit pour remette en liberté les
cinquante-deux captifs.
A propos de ces Tamim, Allah, à Lui les Louanges et la
Gloire, fit descendre ce verset : «
Ceux qui
t’appellent à haute voix de derrière les appartements,
la plupart d’entre eux ne raisonnent pas. » (Qur’an
49/4)
L’expédition punitive contre Khitha’m
Au mois de Safar de l’an 09 de l’Hégire, le Messager
d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) ordonna de
lancer une attaque contre une branche (tribale) des
païens de Khitha’m[2]
et désigna un groupe de combat de vingt hommes dont il
donna le commandement à Qoutba Ibn ‘Amir Ibn Hadida.
Après avoir reçu les ordres, Qoutba et ses Compagnons
marchèrent sur leur objectif en se déplaçant la nuit
seulement, dans le but de surprendre l’ennemi. Arrivés à
un endroit appelé Batn Mashab, ils rencontrèrent
un homme peu coopératif qu’ils interrogèrent sans
résultat et qui essaya d’alerter les siens qui n’étaient
pas loin, ce qui obligea Qoutba Ibn ‘Amir à le tuer.
Puis, les Musulmans bivouaquèrent à l’endroit même en
attendant la tombée de la nuit. Et, dans l’obscurité
totale de la nuit, Qoutba envoya un de ses Compagnons
pour reconnaitre le terrain et repérer le camp ennemi.
Au retour de ce Compagnon, il arrêta son plan d’attaque,
donna ses derniers ordres et lanca une attaque surprise
réussie.
Qoutba et ses Compagnons tombèrent sur l’ennemi en
profitant de l’effet de surprise mais les assaillis
résistèrent et les combats durèrent jusqu’au matin,
jusqu’au moment où des renforts de la tribu Khitha’m
arrivèrent. Mais, pour la victoire de l’Islam, la
rivière, par la grâce d’Allah Exalté entra soudain en
crue et barra le passage aux renforts ce qui permis aux
hommes de Qoutba de continuer la bataille dans des
conditions relativement bonnes si bien qu’à la fin, ils
tuèrent tous les hommes et prirent en butin toutes les
femmes et tous les biens.
A Médine, chacun des membres de l’expédition reçut sa
part du butin évalué à quatre chameaux après que le
Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) eut
soustrait le cinquième pour l’utilité de la communauté.
L’expédition des Banou Kilab
Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) poursuivit
le harcèlement des païens dans la presqu’ile arabique.
Ainsi on l’informa qu’un Batn[3]
d’al-Qarta’, des Banou Bakr dans la région du Najd à
l’est de Médine, s’opposait encore à l’Islam et
célébrait aussi ses croyances idolâtres.
Sur ces informations, au mois de Rabi’ Awwal de l’an 9
de l’Hégire, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa
sallam) leur envoya un détachement commandé par ad-Dahhak
Ibn Joufyan al-Kilabi.
Aucun historien n’a rapporté le nombre des combattants
qui participèrent à cette campagne cependant, al-Waqidi
a rapporté que c’était une armée ; ce qui revient à dire
qu’il y avait un grand nombre de combattants.
Quand l’armée d’ad-Dahhak les rencontra à un endroit
appelé Zaja Lawat, il les appela à embrasser l’Islam
mais ces derniers répondirent en choisissant les
hostilités qui ne tardèrent pas à se déclencher.
La bataille se termina par la victoire des Musulmans et
la défaite de polythéistes. Parmi les faits dont Allah
Exalté détient les secrets, il a été rapporté ce fait
étonnant : Pendant la bataille, un musulman nommé
al-Asyad Ibn Salamah rencontra son père païen Abou
Salamah. Lorsque le fils demanda à son père d’embrasser
l’Islam, celui-ci répondit par des insultes à l’encontre
de son fils et de l’Islam. Al-Asyad le chargea et blessa
le jarret du cheval qu’il montait et son père tomba dans
l’eau. Son fils lui tendit alors la main pour le sauver
quand un autre combattant qui suivait la scène se
précipita et acheva le père devant les yeux du fils.
Ces Bakr qui avaient reçu un message écrit du Prophète
(sallallahou ‘aleyhi wa sallam) leur demandant
d’embrasser l’Islam se moquèrent avant la bataille du
message en lavant le cuir de son encre qu’ils
utilisèrent pour raccommoder une outre.
Les chroniqueurs et historiens ont rapporté que lorsque
le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) fut
informé sur la réaction des Bakr i dit : « Qu’est-ce qui
leur a pris ? Est-ce que Allah a emporté leur bon sens ?
»
Les biographes de la Sirah du Messager d’Allah
(sallallahou ‘aleyhi wa sallam) ont aussi rapporté que
celui qui leur délivra le message s’appelait ‘AbdAllah
Ibn Awsajah[4].
L’expédition maritime de ‘Alqama al-Moudlaji
Cette expédition de trois cents combattants commandés
par ‘Alqama al-Moudlaji fut envoyé dans la région de la
mer Rouge à Qalzam au mois de Rabi’ al-Akhir de l’an 9
de Hégire pour empêcher des pirates abyssins de venir
rôder près du port d’ash-Sha’ayba, non loin de Jeddah.
‘Alqama se rendit Jeddah puis à ash- Sha’ayba, d’où il
prit la mer vers l’ile où les pirates avaient installé
leur camp. A la vue des Musulmans, ces derniers
s’enfuirent et reprirent la mer et
en direction de l’Abyssinie.
Les historiens n’ont pas indiqué le nom de cette île.
Constatant leur fuite, ‘Alqama et les trois cents
combattants musulmans regagnèrent ash-Sha’yba. Sur le
chemin du retour et puisque la mission était terminée,
quelques Compagnons demandèrent la permission de
rejoindre les leurs. ‘Alqama leur accorda la permission
tout en désignant à leur tête un chef ‘AbdAllah Ibn
Hathafa as-Sahmi, un musulman sérieux mais connu aussi
pour ses plaisanteries.
Ces derniers, en cours de chemin, s’arrêtèrent pour se
reposer autour d’un feu et ‘AbdAllah ne rata pas
l’occasion pour plaisanter en ordonnant à ses Compagnons
de sauter sur le feu. Et au moment où ils allaient
s’exécuter (car la discipline militaire était observée,
selon les ordres du Prophète
(sallallahou ‘aleyhi wa sallam), il les arrêta en leur
disant : « Asseyez-vous ! J’ai seulement voulu rire avec
vous. » Cependant, lorsque le Messager d’Allah
(sallallahou ‘aleyhi wa sallam) en fut informé, il dit :
« Celui qui vous ordonne de commettre une transgression,
ne l’écoutez-pas. »
L’expédition de 'Ali Ibn Abou Talib contre la
tribu Tay
Toujours ce même mois, ‘Ali Ibn Abou Talib, commandant
un escadron de cent cinquante Ansar dont les seigneurs
des Aws et des Khazraj montés sur cinquante chevaux et
cent chameaux, marcha sur Tay’ dans l’extrême nord de
l’Arabie, là où habitait précisément la grande famille
de Hatim at-Tay qui avait pour roi ‘Adi Ibn Hatim.
Après la victoire décisive de Hounayn, le
Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), ne
perdit pas de temps à envoyer des expéditions partout en
Arabie, là où à chaque fois des informations lui
parvenaient que des idoles existaient encore et c’est la
raison pour laquelle il dépêcha ‘Ali Ibn Abi Talib
lorsqu’il fut informé que les Tay avaient une idole
appelée al-Fouls.
La tribu Tay d’origine yéménite dont les clans et les
ramifications étaient nombreuses émigrèrent au nord il y
a si longtemps qu’elle était considérée comme une tribu
de Najd. Sur le plan militaire, elle avait de grandes
capacités, vu sa nombreuse population qui pouvait être
comparée à celle de Ghatafan et aussi à celle de Hawazin
et en plus de leurs nombreux forts, elle avait des
guerriers courageux.
‘Ali Ibn Abou Talib aurait pu rencontrer des difficultés
et une résistance acharnée comme les Musulmans
rencontrèrent face à Ghatafan et à Hawazin dans la
bataille de Hounayn mais la chute de ces deux
puissantes tribus et leurs conversions ainsi que celle
de la majorité des tribus rendirent Tay’ inoffensive
surtout après la défection de ses clans et malgré son
passé militaire célèbre.
‘Ali Ibn Abi Talib et ses Compagnons parcourent six
cents miles et détruisirent l’idole al-Fouls après une
résistance qui se termina par la mort d’un certain
nombre de résistants et la capture de plusieurs
personnes.
Parmi les captifs, il y avait as-Safinah, la fille de
Hatim Tay et la sœur de ‘Adi Ibn Hatim, le
roi chrétien de Tay, qui s’enfuit en Syrie. Cependant,
il embrassa l’Islam après que sa sœur as-Safinah,
devenue libre et musulmane l’eut contacté dans son exil
et convaincu de la justesse de la mission du Messager
d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). L’islam de ‘Adi
fut d’un grand support surtout après la mort du Prophète
(sallallahou ‘aleyhi wa sallam) sous le Califat d’Abou
Bakr Siddiq dans les batailles contre les Apostats.
L’Imam al-Waqidi a rapporté dans
al-Maghazi :
« Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam)
envoya ‘Ali à la tête de 150 hommes qui firent le voyage
sur 100 chameaux et 50 chevaux. Il y avait dans
l’expédition que des Ansar dont les notables des Aws et
des Khazraj. Ils attaquèrent un camp de Tay puis, ‘Ali
et ses Compagnons se dirigèrent vers l’endroit où se
trouvait al-Fouls (l’idole de Tay) pour la détruire.
‘Ali donna l’étendard, de couleur noire, à Sahl Ibn Hanif
et la bannière, de couleur blanche, à Jabbar Ibn Sakhr
as-Salami. Lors de son déplacement, la patrouille
musulmane suivit un guide nommé Hourayth de la
tribu des Banou Asd qui les fit passer par Fayd[5]
avant d’arriver à un certain endroit où il dit :
« D’ici, il y a une journée de marche pour arriver chez
le clan en question. Si marchons en plein jour, nous
arriverons chez eux mais vous serez découverts et ils
s’enfuiront sans que vous n’obteniez rien. Cependant, si
nous campons ici toute la journée pour nous déplacer la
nuit, nous pouvons les surprendre de bon matin, aux
premières lueurs
du jour. »
La proposition du guide fut acceptée. On installa alors
un camp et on délesta les chameaux. Mais pour plus de
prévention, ‘Ali Ibn Abou Talib ordonna à Abou Qatada, à
al-Houbab Ibn al-Moundir et à Abou Na’ila de
patrouiller aux alentours du camp. Dans leur mission,
ces derniers rencontrèrent un jeune esclave noir.
-« Qui es-tu, » lui demandèrent-ils ?
- « Quelqu’un à la recherche de quelque chose, » leur
dit-il.
(Sur sa vague réponse), on le ramena à ‘Ali qui lui
répéta la même question :
- « Qui es-tu ? » Et l’esclave de répéter aussi la même
réponse. On le secoua donc jusqu’à ce qu’il dise la
vérité :
- « Je suis un esclave appartenant à un homme de Tay,
des Banou Nabahan. On m’a ordonné de parcourir la région
en me disant : « Dès que tu auras vu les chevaux de Muhammad,
tu viendras vite nous informer. Quand je vous ai vus, je
voulus partir mais je me suis dit : « Ne te précipite
pas, il faut d’abord connaitre votre nombre et celui de
vos chevaux. Je ne sais ce qui m’a pris : je me
retrouvais comme ligoté jusqu’au moment où vos
éclaireurs m’ont pris. »
- « Sois franc, dis-nous ce que tu caches, » dit ‘Ali.
- « Le clan est à une nuit de marche. Avec vos chevaux,
vous pouvez l’atteindre au matin. »
- « Qu’en pensez-vous, » demanda ‘Ali à ses Compagnons ?
- « Partons de nuit pour pouvoir les surprendre au
matin. Nous partirons de nuit en compagnie de l’esclave
noir, laissant une distance entre nous et Hourayth
ainsi que le reste des combattants qui suivront de loin
avec la volonté d’Allah. »
- « Vous voyez juste. »
Et, par conséquent ils partirent avec l’esclave noir
mais juste avant le lever du jour, ce dernier essaya de
brouiller la piste néanmoins sans résultat.
- « Je me suis trompé de route, » dit-il, « je l’ai
laissée derrière moi. »
- « Retourne alors là où tu t’es trompé, » lui dit ‘Ali.
Il retourna effectivement sur ses pas à un mile ou plus
puis il dit : « Je suis encore trompé. »
- « Tu es en train de nous tromper, tu veux nous
détourner du clan. Ramenez-le, » dit alors ‘Ali avant de
poursuivre : « Soit tu nous dis la vérité, soit que tu
auras la tête tranchée. »
On l’avança puis on tira le sabre qu’on mit sur sa tête.
A la vue de la mort se rapprocher, il dit : « Et si je
vous dis la vérité, est-ce que cela va me sauver ? »
- « Oui, » lui répondit-on.
- « Le clan est tout près. »
Ils avancèrent avec lui pour vérifier s’il avait dit
vrai et trouvèrent effectivement les tentes des gens de
Tay cependant, ils attendirent le lever du jour pour
attaquer le camp.
L’attaque fut un succès total puisque les Musulmans
parvinrent à ramener avec eux des captifs
(essentiellement des enfants et des femmes) ainsi que
d’autres variétés de butin sans avoir oublier de
détruire la statue appelée al-Fouls. Avec la destruction
de cette idole, les Musulmans mirent fin à la dernière
manifestation des croyances païennes dans le nord de
l’Arabie. »
Ainsi, les unités militaires de l’Islam éliminèrent
l’une après l’autre les résistances païennes sans aucune
difficultés et la tribu Tay, bien qu’elle fut la plus
puissante d’entre elles et laissé croire que sa réaction
serait des plus fortes et violentes, dans une
surprenante et imprévisible réaction, s’effondra dès la
première attaque. La peur eut raison de ces guerriers
païens et de de leur courage.
La défaite psychologique avant terme des païens revient
sans aucun doute au succès du commandement musulman dans
sa mission de dislocation des plus puissants tenants de
l’idolâtrie et ennemis de l’Islam, notamment les tribus
de Ghatafan, Hawazin et les différents clans de Qouraysh
en plus de l’élément juif antagonique et
particulièrement celui de Khaybar.
Les milliers de guerriers de Tay n’étaient plus cette
force crainte comme par le passé et une simple
patrouille légère de 150 musulmans suffit pour vaincre
toute une tribu minée par l’angoisse et la peur. Cette
peur qui vint à bout de Tay était une preuve de la
véracité de la parole du Messager d’Allah (sallallahou
‘aleyhi wa sallam) qui a dit : «
Par la peur, Allah
m’octroya la victoire ! » Et quiconque connait Tay,
son grand roi et ses courageux cavaliers ne peut croire
que des milliers de guerriers avaient été vaincus par un
simple détachement de musulmans, à six-cent miles de
Médine, de même qu’il ne peut croire aussi que son
seigneur et roi ‘Adi Ibn Hatim s’enfuit sans
manifester la moindre résistance.
La fuite de ‘Adi Ibn
Hatim
en Syrie
Laissons donc le roi de Tay, ‘Adi raconter la situation
qui régnait dans les différents clans de sa grande tribu
ainsi que son aventure qui le mena jusqu’en Syrie puis
le fit revenir à Médine pour enfin déclarer sa
conversion devant le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa
sallam).
Il est rapporté dans la
Sirah d’Ibn
Hisham:
« Il n’y avait pas d’homme parmi les Arabes qui
détestait autant que moi le Messager d’Allah
(sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Quant à moi, j’étais un
homme d’origine noble et chrétien. J’étais respecté dans
ma tribu car je prenais le quart du butin chaque fois
que l’on razziait et je professais une religion (il
était chrétien alors que les siens étaient polythéistes)
tout en étant roi dans ma tribu. Quand j’entendis parler
du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), je
l’ai aussitôt détesté. Puis, je dis à un esclave arabe
que j’avais et qui était berger de mes chameaux : « Va
me préparer mes plus dociles et robustes chameaux et
apprête-les. Et lorsque tu apprendras que l’armée de Muhammad
est entrée dans ce pays, informes-moi le plus rapidement
possible ! »
Un jour, il revint me dire : « O ‘Adi, fait ce que tu as
l’intention de faire car les chevaux de Muhammad
sont là. J’ai vu
des étendards et j’ai questionné et on m’a dit
que ce sont les armées de Muhammad. » (Ce n’était
pas des armées mais plutôt un simple détachement
cependant la peur accroit les proportions). Alors, je
lui demandai de ramener mes chameaux et partit avec ma
famille et mon fils en me disant : « Je vais rejoindre
mes frères de religion, les chrétiens en Syrie sachant
que je laissais derrière moi la fille de Hatim. »
(as-Safinah qui était connue pour sa grande intelligence
et ses profondes intuitions, qui fut capturée puis
libérée par le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa
sallam)).
J’arrivais donc arrivé en Syrie quand le Messager
(sallallahou ‘aleyhi wa sallam) fut informé de ma fuite
en Syrie. On mit la fille de Hatim devant la
porte de la mosquée là où l’on mettait habituellement
les captives et quand le Messager d’Allah (sallallahou
‘aleyhi wa sallam) passa, elle se leva et lui dit : « O
Messager d’Allah, le père est mort et son héritier qui
devait arriver est absent. Au nom d’Allah, sois
bienveillant avec moi (en m’octroyant ma liberté).
- « Et qui est [ton tuteur] ? »
- « ‘Adi Ibn Hatim. »
- « Celui-là qui s’est enfui d’Allah et de Son Messager
? »
- « Oui, » répondit-elle.
Puis elle dit : « Le Messager d’Allah (sallallahou
‘aleyhi wa sallam) partit en me laissant (sans réponse).
Le jour suivant, je lui répétais ce que je lui avais dit
la première fois et lui de même. Le troisième jour,
alors que j’avais perdu espoir, un homme qui marchait
derrière le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), me
fit signe d’insister. Je me suis alors aussitôt levée et
je lui ai réitéré ma demande avec les mêmes termes.
Le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) me
répondit alors : « Je te l’accorde mais ne te précipite
pas de partir. Trouve d’abord un homme de confiance
parmi les tiens pour qu’il t’emmène dans ton pays et
n’oublie pas de m’informer quand tu décides de partir. »
Je demandais ensuite qui était cet homme qui m’avait
conseillé de parler au Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa
sallam) et on me répondit que c’ était ‘Ali Ibn Abou
Talib (radhiyallahou ‘anhou). Je restais (à Médine)
jusqu’à au moment où je pu trouver un homme de confiance
car je voulais rejoindre mon frère en Syrie alors, je
suis allée informer le Messager d’Allah (sallallahou
‘aleyhi wa sallam), comme convenu. Il me donna des
habits et de l’argent puis je partis pour la Syrie. »
Par Allah, dit ‘Adi Ibn Hatim, j’étais assis avec
ma famille lorsque je vis une femme se rapprocher au
loin, j’ai tout de suite pensé que c’était la fille de
Hatim et c’était effectivement elle. Dès qu’elle
arriva, elle resta debout et ne cessa de me
culpabiliser.
- « Fuyard et injuste, tu t’es enfui avec ta famille et
ton fils en laissant derrière toi le souvenir de ton
père, honte à toi ! »
- « Hélas que veux-tu, petite sœur, ce suffit, ne dis
rien d’autre ! Par Allah, je n’ai aucune excuse, j’ai
commis, c’est vrai, ce que tu viens de dire. »
Puis je l’accueillie et un peu plus tard, je lui
demandai (elle était une femme de décision) :
- « Que penses-tu de cet homme (le Messager d’Allah
(sallallahou ‘aleyhi wa sallam)) ? »
- « Je vois, par Allah, que tu dois le rejoindre au plus
vite. S’il est un Prophète, le premier qui l’a cru aura
ce privilège de l’avoir fait et s’il est un roi, tu ne
seras pas humilié même en plein Yémen, (tu ne perdras
rien) et tu resteras comme tu es. »
- « C’est la bonne suggestion. »
Puis, je parti à Médine et entrai chez le Messager
d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) alors qu’il
était dans sa mosquée. Après l’avoir salué, il me
demanda mon nom. Quand je lui ai dit qui j’étais, il se
leva et m’emmena chez lui.
Sur le chemin, une vieille femme de faible carrure le
retint et lui parla d’une chose qui l’intéressa alors je
me dis : « Par Allah, ce n’est pas un roi !» Puis il
m’emmena chez lui, et là il m’invita à m’asseoir sur un
modeste coussin.
- « Assieds-toi sur cela. »
- « Non, assieds-toi, plutôt. »
- « Non, assieds-toi. »
Je m’assis donc sur ce coussin alors que le Messager
d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) s’assit par
terre. Je me dis alors : « Ce n’est pas des pratiques de
roi. »
- « O ‘Adi Ibn Hatim, n’étais-tu pas ruskinien ? (la
croyance ruskinienne était intermédiaire entre celle des
sabéens et le christianisme).
- « C’est vrai, je l’étais. »
- « Ne prenais-tu pas dans ta tribu le quart de chaque
butin ? »
- « Oui, c’est vrai. »
- « N’as-tu pas permission dans ta religion ? »
- « Oui, par Allah c’est vrai. »
Je me suis convaincu, par conséquent, qu’il était un
Prophète envoyé à qui on fit savoir ce qu’il ignorait et
finalement, j’embrassais l’Islam. »
Sa conversion fut plus tard d’un grand bénéfice et
secours surtout contre les Apostats lorsqu’il put
convaincre trois mille cavaliers de revenir à l’Islam et
de participer au combat qui se solda par la défaite de
Toulayhah Ibn Khouwaylid et de ‘Ouyaynah Ibn Hisn
al-Fizari dans la bataille de Bouzakhah.
[1]
Maghazi,
al-Waqidi, t.4, p 974.
[2]
Une tribu yéménite qahtaniyah dont les terres se
situaient entre Bisha et Tourba.
[3]
Une sorte de clan mais plus nombreux.
[4]
Maghazi
al-Waqidi, t.II pp 754-755 et t. III, p. 982.
[5]
Fayd: une petite agglomération située sur le
chemin menant de La Mecque à al-Koufa. Pour de
plus amples informations, voir
Marasid
al-Itla’. |