Les patrouilles musulmanes

1 - Une patrouille de 30 cavaliers sous le commandement de Hamza Ibn ‘Abd al-Mouttalib. Cette patrouille croisa une caravane commerciale de Qouraysh escortée de 300 gardes commandés par Abou Jahl Ibn Hisham. La rencontre eut lieu pendant le mois de Ramadan de l’an 1 de l’Hégire dans la région d’al-‘Is sur le littoral mais, à cause de l’interposition de Moujdi Ibn ‘Amrou al-Jouhani, le combat fut évité.

2 - Une patrouille de 60 cavaliers sous le commandement de ‘Oubayd Ibn al-Harith sortit vers la vallée de Rabigh, pendant le mois de Shawwal de l’an 1. Son but était de menacer le commerce de Qouraysh. Cette patrouille rencontra 200 combattants Qouraysh sous le commandement d’Abou Soufyan (radhiyallahou ‘anhou) mais le combat n’eut pas lieu.

Cette incursion vit le ralliement d’al-Miqdad Ibn ‘Amrou al-Bahrani et de ‘Outbah Ibn Ghazwan qui étaient déjà musulmans avant de sortir avec la compagnie mecquoise.

3 - Une patrouille de reconnaissance composée de 8 Mouhajirine commandés par Sa’d Ibn Abi Waqqas se rendit jusqu’à al-Kharrar dans le but de menacer la route commerciale de Qouraysh, et ce, pendant le mois Dzoul Qi’dah de l’an 1. Aucun affrontement n’eut avec l’ennemi.

4 - L’incursion de Wadan menée par le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) jusqu’à la région du même nom, durant le mois de Safar de l’an 2 de l’Hégire (les dates sont celle de l’Hégire pour le reste du texte). Son unité de combat se composait de 200 combattants. Ils ne livrèrent aucune bataille mais revinrent à Médine avec un accord de non-agression avec les tribus des Banou Zoumrah Ibn Bakr Ibn Kinana.

5 - L’incursion de Bouwat
Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) sortit avec 100 combattants dans la région de Bouwat, sur la route menant de la Syrie à La Mecque, durant le mois de Rabi’ Awwal de l’an 2. Le but de la patrouille était de tendre un piège à une caravane de Qouraysh mais celle-ci s’échappa.

6 - L’incursion d’al-‘Ashirah
200 combattants dirigés par le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) se rendirent à al-‘Ashirah dans la région Yanbou’ dans le but de menacer le commerce de Qouraysh. La compagnie revint sans qu’il ait eu accrochage car la caravane s’échappa. Cependant, le Prophète réussit, pendant l’incursion, à signer un pacte de non-agression avec les Banou Moudlaj alliés de Banou Zoumrah, et ce, durant le mois de Joumadah Awwal de l’an 2.

7 - La première incursion de Badr.
Au mois de Joumadah Thani de l’an 2, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) sorti avec une compagnie de 200 combattants pour pourchasser des unités légères des polythéistes qui avaient pillé quelques troupeaux, près de Médine. La poursuite s’acheva dans la vallée Safwan, près de Badr sans résultat.

8 - La dernière expédition fut celle dirigée par ‘Abdallah Ibn Jahsh dont la mission fut de mener une opération de reconnaissance sur les Qouraysh. La patrouille composée de huit Mouhajirine, arriva à Nakhlah entre La Mecque et Ta’if et pu prendre un piège à une caravane des Qouraysh chargée de marchandises.
Lors de l’accrochage, un polythéiste nommé ‘Amrou Ibn al-Hazrami fut tué et toute la caravane fut ramenée à Médine avec deux prisonniers. Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) exprima sa désapprobation de l’opération car l’opération se passa pendant le mois de Rajab, un des mois sacrés (houroum). Mais Allah Exalté conforta son Messager et sauva la patrouille. Allah Exalté fit descendre le verset suivant : « Ils t’interrogent sur le fait de faire la guerre pendant les mois sacrés. – Dis : « Y combattre est un péché grave, mais plus grave encore auprès d’Allah est de faire obstacle au sentier d’Allah, d’être impie envers Celui-ci et la Mosquée sacrée, et d’expulser de là ses habitants. L’association est plus grave que le meurtre. » (Qur’an 2/217)


Prélude à la grande bataille de Badr

Avec la révélation de ce Verset, les deux partis conscients des enjeux, le conflit armé allait prendre de l’ampleur. Les craintes des mécréants mecquois se confirmèrent tandis que Médine resta tout le temps en alerte surveillant tous les mouvements commerciaux des Qouraysh entre la Mecque et la Syrie.

Au début de l’automne de l’an 2, Médine fut informé par ses espions qu’Abou Soufyan Ibn Harb était sorti vers la Syrie. Le Prophète (qu’Allah soit satisfait de lui) quitta alors Médine, accompagné de 200 combattants pour intercepter la caravane, et il s’agit de l’incursion d’al-‘Ashirah, mais la caravane se sauva et regagner la Syrie, comme nous l’avons déjà mentionné, ce qui l’obligea à l’attendre. De plus, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) envoya une patrouille, composée de Talha Ibn ‘Oubaydallah et Sa’id Ibn Zayd, guetter le retour de la caravane. Ils arrivèrent à al-Hawra, une oasis appartenant aux Bani Tay au nord-ouest de Médine, et attendirent jusqu’à son retour. Quand Abou Soufyan apparut avec les 1000 chameaux, ils retournèrent et informèrent le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) qui se mit aussitôt en route avec son armée pour intercepter cette fois la caravane qourayshi.

Après avoir entendu ses espions, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) appela les Musulmans à participer à l’expédition sans toutefois les forcer à s’enrôler. Il (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) leur laissa le choix libre tout en soulignant l’aspect positif : « Voilà les chameaux chargés de marchandises de Qouraysh. Sortez vers la caravane, » leur avait-il dit, « peut-être qu’Allah Exalté vous la donnera en butin. »

Ce fut pour cette raison que de nombreux Musulmans ne participèrent pas à l’expédition car personne ne pensa qu’il y aurait bataille mais juste une simple interception d’une caravane des Qouraysh escortée par 40 cavaliers, qui, à la vue de 300 combattants, prendraient la fuite.

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) ne nia pas cette vérité et en voici la preuve. Quand les Musulmans restés à Médine allèrent à la rencontre du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) après la bataille, ‘Oussayd Ibn al-Houzayr dira : « Par Allah, ô Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), je n’ai pas participé à la bataille non pas parce que je croyais que tu allais à la rencontre d’un ennemi mais parce que je croyais que c’était à cause d’une caravane. Si j’avais su que c’était l’ennemi, je n’aurais pas reculé. »
- « Tu as dit vrai, » lui répondit le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam).

 



L’itinéraire

Avant le départ de l’armée pour le lieu qui allait être le premier champ de bataille de l’Islam, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) laissa à Médine Ibn ‘Oum Maktoum et désigna comme émir de la ville Abou Lababa, les libérant ainsi de participer à l’expédition. Puis il donna le drapeau du commandement à Mous’ab Ibn ‘Oumayr al-Qourayshi, répartit les troupes en deux compagnies sur une base tribale; celle des Mouhajirine sous les ordres de ‘Ali Ibn Abou Talib (radhiyallahou ‘anhou) et celle des Ansar sous les ordres de Sa’d Ibn Mou’ad, l’aile droite à az-Zoubayr Ibn al-‘Awam, l’aile gauche à al-Miqdad Ibn ‘Amrou al-Kindi puis les seuls cavaliers de l’armée et l’arrière garde sous le commandement de Qays Ibn Abou Sa’sa’a.

L’armée de Médine composée de 317 hommes était répartie : 231 Ansar et 86 Mouhajirine dont 41 de Qouraysh et les 45 restants, des esclaves affranchis et des alliés. Pour l’acheminement des troupes, 70 chameaux, dont les cloches retirées pour garder secret les mouvements de l’armée, furent montés à tour de rôle par les combattants. Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) envoya aussi un groupe d’hommes pour espionner les mouvements de la caravane de 1000 chameaux d’Abou Soufyan.

Pour arriver à Badr, les Musulmans suivirent l’itinéraire suivant :
Le col de la montagne près de Médine ; la vallée d’al-‘Aqiq Dzoul al-Halifa, à 6 miles de Médine ; la vallée d’Oulat et de Jaysh ; la vallée du Tourban-Malal, un endroit à deux nuits de marche pour une caravane ; la vallée de Ghamis al-Hamam ; as-Sayala ; le défilé d’ar-Rawha’. Quittant le puit d’ar-Rawha’, ils s’écartèrent à gauche de la route menant vers la Mecque puis bifurquèrent à droite, du côté d’an-Naziya et suivirent cet itinéraire : la vallée de Wahqan ; la vallée d’as-Safra’ ; la vallée d’Afran ou le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) fut informé à la sortie de cette vallée, des mouvements de l’armée de Qouraysh vers Badr ; les cols d’al-‘Asafir ; ad-Daba, une autre contrée et enfin al-Hounan, une imposante dune de sable de la taille d’une montagne derrière laquelle les Musulmans s’arrêtèrent et se cachèrent, tout près de Badr.



La caravane

Badr était un point d’eau très connu des Arabes, ainsi qu’un carrefour important de commerce. Cet endroit fut nommé ainsi du nom du premier qui y creusa un puits : Badr Ibn Qouraysh Ibn Moukhalid Ibn an-Nazr Ibn Kinana.
Badr, se situe au sud-ouest de Médine et au nord de La Mecque. En suivant l’itinéraire des caravanes, il se trouve à 160 miles de Médine et à 250 miles (450 Kms) de La Mecque et aujourd’hui, la distance par route est respectivement de 153 Kms et 35 Kms. Enfin, Badr se trouve à 30 Kms à l’est de la mer Rouge.

Quant à la caravane, son chef Abou Soufyan prudent et alerté, responsable des 1000 chameaux, sachant que la route vers La Mecque était pleine de dangers, envoya donc ses espions aussitôt que sa caravane pénétra dans le Hijaz qui ne tardèrent pas à l’informer que Muhammad (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et son armée étaient sortis à sa rencontre. Il envoya alors immédiatement Zamzam Ibn ‘Amrou al-Ghifari alerter Qouraysh.

Toutes les tribus de Qouraysh participèrent au déploiement rapide d’une armée à laquelle se joignirent tous les notables et chefs à l’exception d’Abou Lahab qui était malade et qui envoya quelqu’un d’autre à sa place et Safwan Ibn Oumayyah car son père et son frère étaient déjà dans l’armée.

Avant d’entamer la marche, Qouraysh dû régler le conflit armé qui les opposait aux tribus des Banou Bakr de Kinana dont ils reçurent l’assurance de Souraqah Ibn Malik Ibn Ja’shim, un noble de Kinana et sortirent précipitamment.

Selon Ibn Kathir dans son livre al-Bidayah wa an-Nihayah, Allah Exalté fit descendre ces versets : « Et ne soyez pas comme ceux qui sortirent de leurs demeures pour repousser la vérité et avec ostentation publique, obstruant le chemin d’Allah. Et Allah cerne ce qu’ils font. Et quand le Diable leur eut embelli leurs actions et dit : « Nul parmi les humains ne peut vous dominer aujourd’hui, et je suis votre soutien. » Mais, lorsque les deux groupes furent en vue l’un de l’autre, il tourna les talons et dit : « Je vous désavoue. Je vois ce que vous ne voyez pas ; je crains Allah, et Allah est dur en punition. » » (Qur’an 9/47- 48)

Ayant assuré ses arrières, Qouraysh lança ses guerriers vers le champ de bataille. En route pour Badr, l’armée qourayshi suivit l’itinéraire suivant : la vallée de ‘Ousfan entre La Mecque et Rabigh ; Qoudayd près de Touwal ; al-Jouhfa un village au bord de la vallée de Rabigh à 6 miles de la mer ; al-‘Abwa un village à 23 miles d’al-Jouhfa et enfin Badr.



L’armée de Qouraysh

Ses guerriers étaient environ 1300 avec 60 chevaux et 600 boucliers. Quant aux chameaux, leur nombre n’a pu être déterminé. Le ravitaillement des troupes fut assuré par les notables : Abou Jahl, Oumayyah Ibn Khalif, Souhayl Ibn ‘Amrou, Shaybah Ibn Rabi’ah, ‘Outbah Ibn Rabfa, Nabih Ibn al-Hajjaj et Mounbih Ibn al-Hajjaj, al-‘Abbas Ibn ‘Abd al-Mouttalib, Abou al-Boukhtouri Ibn Hisham. Chacun de ces notables abattit dix chameaux à chaque fois que les troupes s’arrêtèrent en cours de route.

Pendant ce temps-là, Abou Soufyan (radhiyallahou ‘anhou) prit toutes les précautions pour ne pas tomber entre les mains du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) mais sans pour autant changer la direction habituelle empruntée par la caravane. Il fut sauvé quand il rencontra Moujdi Ibn ‘Amrou qui lui dit qu’il avait vu deux chameliers sur une hauteur toute proche. Il alla vérifier à l’endroit où étaient les deux hommes, observa les déjections des chameaux et fut dès lors convaincu que les deux hommes appartenaient à l’armée du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), ce qui l’amena à changer aussitôt la direction de la caravane vers la côte, à l’ouest.

Assurés que les biens des Qouraysh étaient sauvés, il envoya leur envoya un messager pour les informer de la nouvelle situation et leur conseiller de retourner à La Mecque.

Il en aurait été autrement si Abou Jahl n’aurait pas refusé le conseil d’Abou Soufyan et qui insista que l’armée se rende à Badr et y passe trois jours entiers à festoyer. Par cette manœuvre militaire, Abou Jahl voulait montrer aux Arabes, et surtout aux tribus des environs, la force de La Mecque. Seul al-Akhnas Ibn Shariq Ibn Wahb se retira avec ses 300 guerriers et ce retrait n’empêcha nullement Abou Jahl de progresser vers Badr.

Dès lors, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et ses Compagnons avaient un nouveau problème auquel ils devaient faire face. Des troupes ennemies à Badr constituaient un danger pour Médine, et un péril pour l’Islam. Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) réunit alors son conseil militaire pour connaitre les avis de ses adjoints car, au début, les Musulmans n’étaient sortis que pour intercepter la caravane protégée seulement par 40 guerriers cependant avec ces nouvelles données, ils risquaient de se trouvaient, dans une situation critique.

La réunion avait à peine commencé que les Mouhajirine déclarèrent leur détermination à accrocher l’armée des polythéistes. Mais le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) voulait aussi connaitre la position des Ansar car c’étaient eux qui allait recevoir tout le poids de la bataille à venir, et que le Pacte d’al-‘Aqabah ne les obligeait pas à combattre loin de leurs foyers. Il craignait que les Ansar ne s’assurent de sa défense que s’il était attaqué à Médine cependant, ses craintes furent vite dissipées et leur réponse fut très claire : ils étaient déterminés et prêts à croiser le fer avec leurs ennemis.

Sans attendre une minute de plus, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) donna l’ordre à sa petite armée de se diriger vers Badr en disant : « En avant ! Allah le Très-Haut m’a promis [la victoire sur] l’une des deux troupes... Par Allah Exalté, c’est comme si je vois ces gens-là terrassés ». En cours de route, il devança ses troupes pour reconnaitre le terrain et les mouvements des Qouraysh. Et après son retour à son poste de commandement, il envoya le soir même, une patrouille de reconnaissance vers Badr qui revint de sa mission avec deux esclaves prisonniers qu’elle présenta au Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Celui-ci les interrogea immédiatement sur le camp des Qouraysh, le nombre de leur force et quels nobles de Qouraysh se trouvaient dans leurs rangs.

 



Le puit de Badr

Le 16 Ramadan 02 de l’Hégire, l’armée musulmane se dirigea rapidement vers le puit de Badr pour empêcher les guerriers ennemis de s’y désaltérer. Suivant les conseils d’al-Houbab Ibn al-Moundir l’Ansari, les Musulmans se rendirent aux points d’eau les plus proches des troupes de Qouraysh qu’ils détruisirent puis se tinrent prêts pour la bataille près du puit de Badr, le seul laissé intact.

Quand l’ennemi fut informé du changement de la situation par l’intermédiaire de ‘Oumayr Ibn Wahb, envoyé en reconnaissance, il était déjà trop tard et ce dernier leur conseilla même de décrocher ce qui d’ailleurs n’empêcha pas une seconde opposition, plus grande que la première, menée par ‘Outbah Ibn Rabi’ah, le seigneur des Banou ‘Abd ash-Shams, soutenu par Hakim Ibn Hizam. L’idée de cette opposition qui avait éclaté un jour, ou moins d’un jour avant la bataille était d’éviter l’affrontement avec l’armée de Médine, de la tranquilliser (par un accord) et de retourner à la Mecque.

Hakim Ibn Hizam convainquit le grand et respecté seigneur de Qouraysh ‘Outbah Ibn Rabi’ah (le premier à être tué à Badr) qui accepta et demanda à Hakim de convaincre Abou Jahl avant de prendre son chameau rouge et de raisonner les guerriers de Qouraysh.

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) qui voyait de loin l’armée des Qouraysh dit que s’il y aurait une bonne action, c’était de « celui qui montait son chameau rouge » (à savoir Outbah Ibn Rabi’ah).

Mais quand Abou Jahl fut informé de la tentative de ‘Outbah, il l’accusa de lâcheté et de mauvaise volonté pour sauver son fils Abou Hathifa Ibn ‘Outbah qui était parmi les Musulmans. ‘Outbah se mit alors en colère et dit : « On va connaitre qui a peur, moi ou lui ! » Et c’est dans la colère qu’échoua cette opposition.



La bataille

Les deux armées désormais face à face attendirent qui lancerait l’attaque le premier. Ce fut Abou Jahl qui, de peur d’une autre opposition, précipita les événements. Il appela ‘Amir Ibn al-Hazrami et l’incita à se venger des Musulmans qui avaient tué son frère ‘Amrou Ibn al-Hazrami lors de la patrouille de reconnaissance d’Abdallah Ibn Jahsh.

‘Amir fut l’étincelle qui jeta les troupes de Qouraysh dans la bataille. Il lui avait suffi d’un mot, comme de tradition, pour les monter contre les Musulmans.

De l’autre côté, les Musulmans étaient sur le pied de guerre. Dès qu’ils prirent position à l’endroit choisi par al-Houbab Ibn al-Moundir, un poste de commandement pour le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) avec sa garde composée de jeunes Ansar fut établit sur la proposition de Sa’d Ibn Mou’ad.

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) avait déjà organisé les premières lignes et dit aux Musulmans : « Par Celui qui détient la vie de Muhammad, ne les combat aujourd’hui que l’homme patient, estimable, qui avance et ne recule pas jusqu’à l’instant où Allah Exalté l’accueille dans Son Paradis. »

Ses paroles furent d’une telle force que ‘Oumayr Ibn al-Hamam, qui tenait dans sa main quelques dattes, les jeta et dit avec détermination : « Quel honneur, il n’y a que cela entre moi et le Paradis ! »

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) recommanda aussi à ses Compagnons de ne pas commencer les premiers la bataille, d’attendre ses ordres et de tirer sur l’ennemi des flèches s’ils seraient encerclés avant de revenir à son poste en compagnie d’Abou Bakr as-Siddiq (radhiyallahou ‘anhou).

Lorsque les deux armées furent en vue l’une de l’autre, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) se tourna vers Allah Exalté et persista dans ses prières, disant : « O Allah ! Si Tu fais périr ce groupe (les Musulmans), Tu ne seras plus adoré sur terre. »

Et l’affrontement se produisit. Le premier à tomber sur le champ de bataille fut un kamikaze des Qouraysh, al-Aswad Ibn ‘Abd al-Aswad al-Makhzoumi, qui avait juré auparavant de boire puis de détruire ou de périr devant le puit aménagé et gardé par les Musulmans. Ce fut Hamza Ibn ‘Abd al-Mouttalib (radhiyallahou ‘anhou) qui l’empêcha de boire en le tuant au bord du bassin.

La mort du Makhzoumi suffit pour déclencher la bataille et trois cavaliers polythéistes sortirent des rangs et vinrent lancer un duel : Shaybah Ibn Rabi’ah, ‘Outbah Ibn Rabi’ah et son fils al-Walid, tous les trois descendants de ‘Abd al-al-Manaf, l’aïeul du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Trois jeunes Ansar, ‘Awf et Mi’wath Ibn Afra’ et ‘Abdallah Ibn Rawahah leurs répondirent et s’avancèrent mais les trois Qourayshi refusèrent de se mesurer à eux car ils voulaient d’un duel interne entre Qourayshi. Alors, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) désigna Hamza Ibn Abd al-Mouttalib, ‘Oubaydah Ibn al-Harith et ‘Ali Ibn Abou Talib (radhiyallahou ‘anhoum), tous les trois de la même famille (de ‘Abd al-Manaf) qui se chargèrent des Qouraysh : ‘Ali/al-Walid, ‘Oubaydah/Shaybah, Hamza/‘Outbah.

L’issue du duel fut en faveur des Musulmans, ‘Ali et Hamza sortirent victorieux mais ‘Oubaydah, après avoir tué Shaybah Ibn Rabi’ah, mourut entre les mains du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), suite à une grave blessure grave qu’il reçut durant le duel.

Furieux, les guerriers polythéistes fondirent sur les combattants musulmans qui résistèrent aux assauts répétés en attendant le signal du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). Cette tactique de défense entama la patience et aussi la détermination des Qouraysh.


Ce fut le moment idéal pour la contre-attaque qui se déclencha subitement et avec force. Les rangs musulmans martelèrent les forces éparses de Qouraysh tandis que durant tout ce temps, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) suivit attentivement tous les mouvements et remarquait le courage de ses combattants.

Al-Boukhari a rapporté : « Qu’au fil et à mesure de l’intensification de la bataille, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) disait : « O Allah ! J’en appelle à Ton engagement et à Ta promesse. O Grand Seigneur ! Si Tu veux ne jamais être adoré après ce jour. » Abou Bakr lui serra la main et lui dit : « Cela suffit, ô Messager d’Allah. Tu insistes trop sur Ton Seigneur. » »

Ibn Ishaq a rapporté : « Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) s’assoupi puis se réveillé et dit à Abou Bakr : « Bonne nouvelle, ô Abou Bakr. La victoire d’Allah arrive ! » »

Les anges participèrent à la bataille pour renforcer le moral des Musulmans comme cela est mentionné dans le Noble Qur’an : « (Et rappelez-vous) le moment où vous imploriez le secours de votre Seigneur et qu’Il vous exauça aussitôt : « Je vais vous aider d’un millier d’Anges déferlant les uns à la suite des autres. Allah ne fit cela que pour (vous) apporter une bonne nouvelle et pour qu’avec cela vos cœurs se tranquillisent. Il n’y a de victoire que de la part d’Allah. Allah est Puissant est Sage. » (Qur’an 9/9-10)

Après quoi, le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) se jeta dans le feu de la bataille en disant : « Leur rassemblement sera bientôt mis en déroute, et ils fuiront. L’Heure, plutôt, sera leur rendez-vous, et l’Heure sera plus terrible et plus amère. » (Qur’an 54/45-46)

Et effectivement, la bataille ne dura pas plus longtemps.

Abou Jahl essayait vainement d’organiser ses troupes mais la défaite était déjà sur eux. Du point de vue purement militaire, Abou Jahl était un homme courageux qui ne craignait pas la mort mais il était têtu et obstiné. Sa mort vint des mains de Mou’ad Ibn ‘Amrou Ibn al-Jamouh l’Ansari qui le blessa gravement en lui coupant la jambe au niveau du mollet. Son fils ‘‘Ikrimah intervint tardivement et trancha la main de Mou’ad. Quant à la troupe des polythéistes, elle s’enfuit.

Quand la bataille se termina, le Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) voulut connaitre le sort réservé à Abou Jahl. On entama alors les recherches et ce fut ‘AbdAllah Ibn Mas’oud qui le trouva en train de mourir et qui répondit à sa question (A qui la victoire aujourd’hui ?) : « A Allah Exalté, à Son Messager et aux Croyants. »

Abou Jahl, lors de sa rencontre avec al-Akhnas Ibn Shourayq, à Rabigh, répondit secrètement à la curiosité de ce dernier : « Comment ment-il (le Prophète) sur Allah Exalté, alors qu’on l’appelle l’Honnête ? Car il n’a jamais menti. Mais qu’est-ce qui nous restera si se réunissent chez les ‘Abd al-Manaf, as-Siqaya, ar-Rifada, al-Hijaba et al-Mashoura et en plus an-Noubouwa (prophétie) ? »

Les Musulmans firent de nombreux prisonniers qu’ils ramenèrent à Médine et parmi eux, se trouvait l’oncle du Prophète al-‘Abbas Ibn Abd al-Mouttalib. Les Banou Hashim furent épargnés lors de l’affrontement, sur la demande du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam), car il savait qu’ils furent contraints de participer à la bataille.

Ainsi la bataille de Badr finit par la victoire des Musulmans qui ne s’étaient pas du tout préparés pour la circonstance sur les mécréants de Qouraysh qui perdirent sur le champ de bataille 70 des leurs dont plus de 20 chefs et seigneurs. Les Musulmans réussirent à faire prisonniers 70 Qourayshi.

Les Musulmans, quant à eux, enregistrèrent la perte de 14 combattants ; six Mouhajirine et huit Ansari.