Règne : 763 - 791 (1362-1389)
Titres honorifiques et pseudonymes
: Ghazi Hounkar (souverain combattant), Khoudawandkar
(dévot de Dieu), Emir-i ‘Azam (grand général), Khan,
(souverain), Badishah (grand monarque) et Sultan as-Salatine
(Sultan des Sultans).
Nom du Père
: Orkhan Ghazi.
Nom de la Mère
: Nilufer Khatoun.
Lieu et date de naissance
: Bursa, 726 (1326).
Âge à l’accession au trône
: 36 ans.
Territoires :
500.000 km2.
Cause et date du décès
: Martyr sur le champ de bataille du Kosovo, 791 (1389).
Lieu de décès et lieu de sépulture
: Kosovo et Bursa !
Héritiers
: Ya’qoub Chalabi, Yildirim Bayazid, Savci Bey et Ibrahim
Bey.
Héritière
: Khatoun Nilufer et Khatoun Malak.
Le Sultan Mourad Awwal, le troisième Sultan Ottoman,
administra en tant que gouverneur de Bursa, puis de
Sultanoyugu (aujourd’hui Eskisehir) alors qu’il était
Sehzade ou héritier du trône (prince héritier). À la mort de
son frère Souleyman Bacha, le conquérant de Roumélie, il
reprit sa cause et poursuivit les conquêtes en Roumélie.
Mourad I évita le débarquement de la papauté et des troupes
byzantines dans les golfes de Lapseki et de Saros, et
mobilisa les unités pionnières de cavalerie légère, appelées
Akincis, tout le long de la voie jusqu’au nord, près
d’Istanbul, afin de bloquer la ville lors de la conquête
d’Edirne (Andrinople) qui allait devenir la deuxième
capitale ottomane après Bursa. Il envoya également l’armée à
Edirne sous la direction de Lala Shahin comme une armée
pionnière. Lorsque l’armée de Lala Shahin vainquit les
forces du souverain byzantin locale d’Edirne dans la vallée
de Sazhdere, Sehzade Mourad marcha sur Edirne avec son armée
le 28 Joumadah ath-Thani 762 (mai 1361). Comme il l’avait
préparé pour de nouvelles conquêtes depuis Edirne, il reçut
la triste nouvelle de la mort de son père.
Pendant les premières années de son règne, Mourad Awwal mena
une série de combats contre les Karamanides et l’État
d’Eretna en Anatolie centrale. Ankara passa sous la
domination ottomane à son époque. Du côté de la frontière
occidentale, les conquêtes de Mourad Awwal près de
Constantinople obligèrent Byzance à organiser une croisade
contre les Ottomans. En 767 (1366), une armée de croisés
reprit et rendit Gallipoli du côté européen des Dardanelles
à Byzance. Le Sultan Mourad Awwal, qui pensa que cela allait
mettre en péril la présence ottomane en Roumélie, fit
pression sur Byzance pour que l’Empereur lui rende Gallipoli
comme condition préalable à tout accord de paix.
Bien que Byzance fût prise en sandwich territorial par les
Ottomans, l’Empereur Byzantin choisit de ne pas remettre
Gallipoli mais plutôt de former une alliance avec les Serbes
afin de débarrasser la Roumélie des Ottomans une fois pour
toutes.
Les Serbes, qui avaient une puissante armée composée des
forces serbes et d’autres chrétiens locaux, assemblés tout
le long du chemin de Thrace à l’Albanie, marcha sur Lala
Shahin. Sultan Mourad qui était alors à Bursa, mobilisa ses
forces aussitôt qu’il reçut l’appel à l’aide de son
commandant Lala Shahin. Les Byzantins qui tenaient Gallipoli
refusèrent le passage de l’armée ottomane. Sur un autre
théâtre de guerre, l’armée serbe avança jusqu’à Qarman sur
le fleuve Merig et commença à défier la ville d’Edirne. Lala
Shahin, le protecteur d’Edirne, ne put recevoir l’aide qu’il
demanda d’Anatolie. Il savait qu’il serait seul pour lutter
contre les Serbes. Il décida donc d’envoyer ses unités
pionnières de cavalerie légère face aux Serbes en 766 (1365)
selon les sources ottomanes. Les unités pionnières ottomanes
commandées par Hajji Ilbayi lancèrent une attaque
surprise de nuit et surprirent les soldats serbes dans un
état vulnérable. Dans le chaos qui s’ensuivit, les Serbes
tombèrent dans la confusion. Certains moururent au combat
tandis que d’autres tombèrent dans la rivière Merig
(Martisa-Maritza). Le résultat fut une défaite totale.
Reconnu dans l’histoire ottomane comme la victoire de Sirb
Sindighi (destructions des Serbes), cet événement révéla
l’incroyable vérité selon laquelle les forces ottomanes
bloquées et sans aide vainquirent l’armée serbe forte de
60000 soldats et alimenta un sentiment d’étonnement et de
consternation dans le monde chrétien.
La bataille de Sirb Sindighi 765 (1364) Alliance Croisée
L’invasion de la Roumélie par les Ottomans rassembla les
États Européens contre les Ottomans et conduisit à la
préparation d’une puissante armée croisée. Sous l’ordre et
les encouragements du pape Urbain V, autour du royaume de
Hongrie, qui était l’un des plus grands états d’Europe à
l’époque, le royaume de Serbie s’unit avec les royaumes de
Bosnie-Herzégovine, de Valachie et des Balkans et réunit une
force de 60000 soldats commandée par le roi de Hongrie en
personne, Layos V. Les croisés reprirent Plovdiv des
Ottomans. Ce mouvement inattendu des armées ennemies prit
les Ottomans au dépourvu puisqu’ils ignorèrent tout de cette
alliance. Le but de cette croisade était d’expulser les
Ottomans hors de Roumélie, de reconquérir les Dardanelles et
sauver Istanbul du siège. Les croisés se regroupèrent à
Sofia puis descendirent dans la vallée de Méric en été 765
(1364). Ils avaient tellement espoir de leur succès qu’ils
ne prirent aucune précaution de sécurité et passèrent leur
temps à s’amuser.
Lala Shahin Basha fut informé que tardivement que les
croisés marchaient sur Edirne et demanda aussitôt des
renforts d’Anatolie. Cependant, le Sultan Mourad, ignorait
ce raid et rassembla l’armée en Anatolie. Il ne pouvait pas
imaginer que les croisés viendraient si rapidement à Edirne
et pensa qu’il serait plus approprié de continuer le siège
du château de Biga pour la sécurité de Roumélie et en
particulier des Dardanelles. Face à cette situation, Lala
Shahin Basha devait défendre Edirne à tout prix. Il trouva
donc une solution en la personne du célèbre commandant Hajji
Ilbayi, qui était le seigneur de Roumélie.
Mission du Commandant de génie
Alors qu’il était dans cette situation, Lala Shahin Basha
vit l’offre de Hajji Ilbayi d’espionner l’ennemi
comme une solution pratique et lui confia une unité de 10000
hommes. Ainsi, il pourrait connaitre l’état et le nombre de
la force ennemie et ce qu’il pourrait faire. Si les forces
ennemies le découvraient, ils les retarderaient en se
livrant à des escarmouches pour les distraire afin de
reconnaitre leur force. Les forces de Hajji Ilbayi ne
faisaient pas partie de l’armée ottomane régulière mais
était composée d’unités volontaires de cavaliers appelées
Ghazi-Derviche. C’étaient des guerriers performants et
puissants qui avaient pris part à toutes les guerres menées
jusqu’à ce jour. Lala Shahin Bacha transmettait toutes les
nouvelles à Mourad I.
La Bataille
Les cavaliers de Hajji Ilbayi passèrent de l’ouest
d’Edirne au nord-ouest de la vallée de Merij. La marche se
poursuivit en silence jusqu’à la tombée de la nuit jusqu’à
ce qu’ils s’approchèrent de Chirmen. Pendant ce temps, des
nouvelles étonnantes commencèrent à venir des habitants
expulsées de la région. Les forces ennemies serbe¸ bulgare¸
hongroise, bosniaque et roumaines s’étaient installées dans
le camp sans aucune mesure de sécurité. Les troupes alliées
se concurrençaient les unes les autres et avaient oublié
leurs ennemis. Ils étaient tellement convaincus qu’ils
allaient prendre Edirne des Ottomans et expulser les
Ottomans de Roumélie, qu’ils oublièrent presque l’existence
des Ottomans. Ils étaient heureux et détendus comme s’ils
étaient dans un pique-nique et non pas en guerre.
Lorsque les éclaireurs virent cette situation de l’ennemi,
ils se rendirent sans délai auprès de leur commandant et
l’informèrent. Hajji Ilbayi et les autres commandants
examinèrent et évaluèrent rapidement la situation : une rare
opportunité et ils avaient appris à tirer parti de telles
opportunités dans leurs guerres jusqu’à ce jour. De nombreux
châteaux ennemis avaient été conquis par des pièges placés à
l’intérieur ou de l’extérieur. Cette fois, l’insensibilité
de l’ennemi ne serait pas pardonnée. Hajji Ilbayi
rendit son jugement : il compenserait le petit nombre de ses
forces en tirant parti du sommeil de l’ennemi et livrerait
un raid de nuit d’autant plus qu’ils avaient déjà remporté
de nombreuses batailles en faisant de tels raids. Profitant
donc de l’obscurité, il décida de détruire l’ennemi dans son
sommeil.
Plan d’opération
Hajji
Ilbayi divisa ses forces en quatre groupes. Il nomma à la
tête de chaque groupe un commandant sûr tandis qu’il
commanderait le quatrième groupe lui-même puis ils se
rapprochèrent de l’ennemi et se cachèrent dans une zone
boisée jusqu’à la tombée de la nuit. Pour ne pas dévoiler
leur présence, aucun homme ne serait autorisé à entrer dans
le camp ennemi de l’extérieur et, s’il sortait du camp
ennemi, il serait immédiatement capturé et ne serait pas
autorisé à retourner dans son camp. Les groupes devaient
établir un contact ininterrompu les uns avec les autres et
attaquer ensemble. Cette masse ivre, qui n’avait besoin
d’aucun secours du fait de son orgueil extrême, buvait sans
souci et ne pensait qu’à se divertir et, allait subir
bientôt une attaque implacable et la victoire serait
réalisée en peu de temps.
Hajji Ilbayi se retrouva avec le groupe numéro trois et le
signe de l’attaque sera annoncé dans ce groupe avec un grand
nombre d’incendie. Dès que le début de l’attaque, un grand
vacarme viendrait de tous les côtés grâce aux tambours et
autres accessoires. La cible serait le centre du camp qui
sera attaqué de quatre directions, après que l’attaque ait
été lancée quelques heures avant l’aube. Ils seraient
rapidement exterminés par l’épée sans que l’ennemi nepuisse
saisir ses armes. Le signe et le mot de passe serait Allah,
Allah. Lorsque la confusion et la panique apparaitrait dans
le camp ennemi, chaque groupe devrait se retirer dans la
direction d’où il venait puis couvrir systématiquement d’un
barrage de flèches l’ennemi égaré. Seule la direction de la
rivière Meric du campement où se trouvait l’ennemi serait
laissée ouverte tandis que les autres directions seraient
complètement fermées et s’il venait dans ces directions, il
serait exécuté. Hajji Ilbayi prépara parfaitement ce
plan d’opération.
Raid à l’aube
Ignorant tout, les soldats ivres de l’ennemi sombrèrent dans
le sommeil profond, rêvant peut-être de victoire. Deux
heures avant le début de l’aube, les forces de Hajji
Ilbayi mirent en action leur plan et attaquèrent le camp
depuis quatre direction différentes, dans la terrible
lumière des grandes flammes qui s’élevèrent et au son leur
voix. Les croisés épuisés sous l’influence du vin, de
l’ivresse et du sommeil tombèrent avant de réaliser ce qui
s’était passé, sans pouvoir saisir leurs armes et leurs
chevaux exceptés à de rares exceptions.
Ce troupeau d’ivrognes mérita d’être vaincu dans un court
laps de temps comme ils étaient eux-mêmes tombés sur les
populations civiles de Plovdiv sans répit ni pitié. En
désespoir de cause, ceux qui s’enfuirent en direction de la
rivière Méric tombèrent également tombés dans le fleuve et
la plupart d’entre eux se noyèrent. Les raids des forces
ottomanes se poursuivirent jusqu’au matin. Lorsque l’aube se
leva sur le camp, les forces ennemies ici et là, qui ne
savaient pas quoi faire, furent également détruites. La
totalité du camp ennemi passa entre les mains des forces de
Hajji Ilbayi.
Lors de ce raid, les pertes des forces de Hajji Ilbey
furent très peu nombreuses comparées à celle de l’ennemi. La
plupart des forces ennemies furent passées par l’épée. Seuls
les commandants en chef, le Roi hongrois Lachos, et Vlach
Mirce, survécurent. Les Rois serbes de Bosnie et bulgares
étaient parmi les victimes.
Le raid de Hajji Ilbayi brisa les ailes de toute
l’Europe et les laissa sans moral. Les Ottomans purent vivre
ainsi 25 ans dans la paix et la tranquillité et se
développèrent.
Ce type de combat de Hajji Ilbayi fut un raid de
cavalerie classique. Avec un raid aussi bien planifié, la
destruction d’une armée ennemie bien supérieure à elle-même
et son résultat définitif constituent un événement rare dans
l’histoire de la guerre mondiale. L’audace de préparer et de
mettre en place un tel raid fut accordé à Hajji
Ilbayi, un commandant turc qui naquit sur le champ de
bataille et grandit avec des victoires.
Les mécréants rapportèrent différents acomptes sur
l’assassinat de Hajji Ilbayi par Lala Shahin Bey tout
comme ils l’ont fait pour Alp Arsalan après la glorieuse
bataille de Manzikert et avant lui l’assassinat de Sayf Din
Qoutouz, le héros de la bataille de ‘Ayn Jalout, par Rouqn
ad-Din Baybars sur le prétexte de la haine qu’ils ont à
l’égard de l’Islam. Ce sont bien sûr d’odieux mensonges
comme tout le reste, toutes leurs vies et histoires.
Qu’attendre d’autre de gens qui ont refusé, insulté puis tué
les Messagers de Dieu et falsifié les écritures divines !
Les princes serbes et les dynasties des Balkans reconnurent
la supériorité du Sultan Mourad I et agréèrent de payer des
tributs. La papauté fut informée de la défaite de l’armée
chrétienne six mois plus tard. Dans sa lettre au roi
hongrois, le pape Grégoire XI souligna sa crainte que les
Turcs se rendent en Hongrie, en Serbie et en Albanie après
avoir vaincu les Serbes et puissent malheureusement avancer
vers la Mer Adriatique, et l’exhorta à expulser les Turcs
des terres chrétiennes.
Pendant que le Sultan Mourad était en Roumélie, l’Empereur
Byzantin de facto l’avait soutenu, fort probablement en
personne. Pendant ce temps, le prince héritier Andronic à
Istanbul s’annonça comme l’Empereur Byzantin et Sehzade
(héritier au trône) Savci Bey à Bursa revendiqua le Sultanat
Ottoman. Tant les Ottomans que les Byzantins furent pris
dans ces révoltes qui émergèrent simultanément.
Il est rapporté que Mourad I descendit dans la région de
Biga après avoir appris la rébellion de son fils. Il feignit
d’ignorer toute l’affaire et invita son fils à une chasse.
Manipulé par son entourage, Savci Bey distribua le trésor de
l’état, eut son nom mentionné lors de la prière du vendredi
comme un symbole de souveraineté et rejeta l’invitation de
son père. En fait, il recruta une armée et décida de
combattre son père.
En échange, le Sultan Mourad I set dirigea vers Bursa,
captura le Sehzade lors d’une rencontre près de la Vallée de
Kite et tua ceux qui poussèrent le Sehzade à réclamer le
trône. Bien que Mourad I ait conseillé à son jeune Sehzade
de se confesser et de se repentir de sa culpabilité, Savci
Bey lui répondit par des mots cruels et durs qui aboutirent
à son aveuglement en 775 (1374) pour éviter qu’il ne se
révolte de nouveau avec une telle rigueur.
Le Sultan redonna ensuite la priorité aux conquêtes en
Roumélie. Il mena les campagnes depuis Edirne et les
commandants, en particulier Jandarid Kara Khalil Khayr
ad-Din, Evrenos Ghazi et Lala Shahin Bey, participèrent aux
conquêtes en cours.
Mourad I marcha ensuite sur Ivan Chichman de Bulgarie et le
soumit. Ivan accepta de payer le tribut aux Ottomans et
promit de participer à toutes les batailles au côté du
Sultan.
À ce stade, le Sultan Mourad I assigna Kara Timourtash Basha
au poste de Beylerbeyi (gouverneur général) de Roumélie. Ce
fut une étape importante vers la fortification de la
domination ottomane en Roumélie et montre que les officiers
de Mourad Ier étaient des maîtres accomplis de leur
profession.
Kara Timourtash Bacha obtint le consentement du Sultan dans
les années 777-783 (1375-1381) pour entreprendre en Roumélie
la première distribution de Timars (fiefs militaires) parmi
les soldats chrétiens autonomes. Il leur permis de vivre sur
certaines parties des terres où ils vivaient en échange de
leur service dans l’armée ottomane. Cet acte conduisit à la
création dans les Balkans d’une armée ottomane composée de
soldats musulmans et chrétiens.
Le Sultan Mourad utilisa les mariages dynastiques comme
moyen de diplomatie dans les relations extérieures. Il
s’efforça d’établir un réseau de relations unies entre elles
par le biais de mariages entre la dynastie ottomane, les
principautés anatoliennes et les dynasties balkaniques. Le
premier mariage à cette époque fut annoncé par la cérémonie
de mariage de son fils Sehzade Bayazid et de la fille de
Souleyman Bey, le Karmaniyan (Germiyanide), Devlet Khatoun.
À la suite de ce mariage, Kutahya, Tavganh, Shimav et Emet
furent ajoutés aux territoires ottomans en paix, comme dot
offert par le père de la mariée. Le Sultan promit également
la main de sa fille Nefise Khatoun au Qarman (Karamanide)
‘Ala' ad-Din ‘Ali Bey lors du mariage susmentionné et ils se
marièrent effectivement plus tard. De plus, il acheta les
villes d’Akgehir, Beygehri, Seydigehri, Karaagag et Isparta
des Khamidi, qui étaient présents lors du mariage de
Bayazid.
Dans la tradition des états turcs, les terres pour
lesquelles des vies sont épargnées au lieu de les livrer à
l’ennemi ne peuvent être cédées pour quelque raison que ce
soit, que ce soit comme dot ou comme marchandise
commerciale. La dot et l’achat de terres pendant le règne de
Mourad I sont interprétés comme une preuve et une
justification confirmée de l’acceptation croissante parmi
les principautés anatoliennes turques que les Ottomans
étaient déjà devenus une puissance politique majeure.
L’objectif du Sultan était d’assurer la sécurité en Anatolie
et de prendre part aux conquêtes en Roumélie. Cependant, la
région des lacs (Goller Yoresi) au sud-ouest de l’Anatolie,
qu’il avait achetée aux Khamidi, se sépara des Ottomans et
des Karamanides. Par conséquent, le Sultan Mourad I fut
forcé de marcher sur les Karamanides, qui avaient envahi la
région quand il s’était en Roumélie en 788 (1386). Les
Karamanides furent vaincus lors de la bataille de
Frenkyazisi. Le Sultan Mourad assiégea ensuite la ville de
Konya, la capitale des Karamanides mais leva le siège par
bienveillance lorsque sa fille lui demanda miséricorde et
son gendre, ‘Ala’ ad-Din' ‘Ali Bey, embrassa sa main en
signe de soumission.
Au cours de cette période, une relation de sang se forma
avec Souleyman, le fils de Kastamonu Bey : Mourad maria sa
nièce Sultan Hanim à Souleyman Bey. Ce faisant,
Kastamonu offrit son allégeance aux Ottomans. Pendant ce
temps, les combats contre la principauté du Qadi Bourhan
ad-Din à l’Est se poursuivirent. Des relations de
bienveillance s’établirent entre les Ottomans et les
Mamelouks sous le règne de Mourad Ier, qui se soutenaient
mutuellement contre les croisades. La longanimité continua
entre eux jusqu’à la mort du Sultan.
Suite à la défaite subie après que le commandant de la
frontière albanaise, Shahin Bey, ait été pris dans une
embuscade à Plocnik, les états des Balkans se risquèrent à
attaquer les Ottomans. Dirigeant une armée composée de
soldats originaires de Serbie, du Kosovo, de Bosnie, de
Bulgarie, de Catalogne, de Hongrie, d’Albanie et de
Valachie, le Serbe Knez Lazar refusa de payer le tribut et
massacra les villageois musulmans frontaliers innocents. Il
fut alors déclaré par l’Église serbe « grand imperator. »
Par conséquent, le Sultan Mourad se sentit obligé de faire
une sixième expédition en direction de la Roumélie. Les
armées des états qui continuaient de payer le tribut aux
Ottomans rejoignirent également l’armée ottomane.
Dans le cadre de sa stratégie de division visant à réduire
le nombre de combattants ennemis, le Sultan Mourad mobilisa
d’abord une armée contre les Bulgares et détacha la Bulgarie
de la grande Ligue des Balkans. Le Sultan prépara son camp
militaire dans la vallée de Kosovo pour marcher contre
l’armée des croisés. Cependant, non seulement il dut
combattre l’ennemi mais aussi composer avec le nuage de
poussière qui tomba sur son camp. Conscient du fait qu’un
vent inverse soufflant du côté ennemi limiterait la
visibilité de ses soldats, le Sultan pria toute la nuit.
Suite à ses prières, il commença à pleuvoir ce qui dissipa
le nuage de poussière. Dans une autre prière, le Sultan dit
: « Ô mon Seigneur, sacrifie-moi au nom de tous les
musulmans qui sont et ne sont pas ici sur ce champ de
bataille. Prends mon âme mais rends-nous victorieux ! Tu as
fait de moi un vétéran sur Ta Voie et je serai un martyr,
mon Seigneur. »
La première bataille ottomane des Ottomans commença à l’aube
et se poursuivie pendant huit heures ininterrompues. Les
deux parties utilisèrent une nouvelle arme dans cette
guerre : les canons fabriqués par les artisans de Dubrovnik
sur la mer Adriatique. Les deux ailes de l’armée ottomane
étaient commandées par Sehzade Bayazid et Sehzade Ya’qoub
Bey. Lorsque l’aile gauche commença à s’effondrer,
l’ottomane armée aurait pu subir une défaite désastreuse si
l’aile droite commandée par Sehzade Bayazid n’était arrivé
pour renforcer les soldats de Ya’qoub Bey. La dispersion des
Rois alliés à Lazar dissout la Ligue des Balkans et les
Ottomans remportèrent une glorieuse victoire au Kosovo.
Il est rapporté sans preuve concrète que Milosh Kobilovich,
un ancien combattant blessé étendu à côté des cadavres de
l’ennemi, voulait être distingué en tant que meurtrier du
Sultan Mourad, qui inspectait alors le champ de bataille.
Kobilovich bondit en avant sur les jambes du Sultan. Avant
que les sergents ne puissent intervenir, il s’agenouilla
comme s’il allait embrasser la cote de maille du Sultan et
avec le poignard qu’il ôta de ses bottes, poignarda le
Sultan dans le cœur. Milosh tenta de s’échapper mais il fut
capturé et exécuté.
Avant de continuer plus loin j’aimerais revenir en détail
sur cette mort qui pour moi est un autre mensonge et un
autre conte de fée.
Ce que nous avons rapporté est ce que les historiens
ottomans ont rapporté mais vous devez savoir qu’aucun récit
exact de l’Histoire des Ottomans n’existe sur cette époque
et que les seuls récits sont ceux des mécréants qui comme
nous l’avons vu écrivent l’histoire selon leur haine et nous
pas selon la réalité.
Il existe un intéressant travail sur ce sujet particulier :
Primary Sources.
The Battle of Kosovo: Early Reports of Victory and Defeat by
Thomas A. Emmert.
From Kosovo: Legacy of a Medieval Battle.
Voici un passage que nous avons traduit pour la
circonstance :
« L’historien est confronté à un problème difficile
lorsqu’il tente de découvrir ce qui s’est passé lors de la
bataille du Kosovo. Il n’y a pas de récits de témoins
oculaires de la bataille, et des différences assez
importantes existent entre les sources contemporaines qui
mentionnent l’événement. Il ne fait aucun doute que la
confrontation eut lieu sur le terrain de Kosovo le 28 (15
juin 1389) entre les forces chrétiennes dirigées par le
prince Lazare de Serbie et les forces ottomanes dirigées par
le Sultan Mourad I. À la fin, les deux dirigeants étaient
morts et le fils de Mourad, Bayazid, retourna à Edirne pour
assurer sa succession. La photo devient très trouble au-delà
de ces maigres détails.
Les premiers documents ne traitent pas particulièrement des
armements, de la tactique, de la taille des forces et du
déroulement général de la bataille. De manière assez
surprenante, il n’est même pas possible de savoir avec
certitude, à partir du matériel contemporain, si l’une ou
l’autre des parties a été victorieuse sur le terrain. Il y a
certainement peu de choses qui indiquent que ce fut une
grande défaite serbe ; et les premiers rapports sur le
conflit suggèrent, au contraire, que les forces chrétiennes
avaient gagné.
Des rumeurs sur la bataille furent diffusées jusqu’à
Constantinople, Florence, Venise, Barcelone et Paris, mais
elles semblaient mettre l’accent sur une seule nouvelle : la
mort du Sultan Ottoman. Alors que l’Occident avait tardé à
juger de la gravité de l’avancée ottomane en Europe, à la
fin du XIVe siècle, on se rendit compte de cette nouvelle
menace pour le monde chrétien. La mort de Mourad fut donc un
motif de fête dans les rues des villes occidentales. En soi,
ce fut une sorte de victoire chrétienne.
« Heureux, le plus chanceux sont ces mains des douze
seigneurs loyaux qui, ayant ouvert leur chemin avec l’épée
et ayant pénétré dans les lignes ennemies et le cercle de
chameaux enchaînés, atteignirent héroïquement la tente
d’Amurat (Mourad) lui-même.
Je ne vais pas traduire l’intégralité du document mais il
apparait que ces contes de fées apparurent pour la première
fois cinq siècles
après les évènements et que toutes les sources tant
mécréantes qu’ottomanes sont toutes différentes. Que les
premiers documents serbes ne se lamentaient que sur la mort
de leur roi ! De même Lammens qui a traduit l’Histoire des
Ottomans de l’Allemand Hammer, qui est plein de mensonges et
d’inventions rapporte qu’un historien ottoman a rapporté que
Mourad fut tué dans sa tente et non pas sur le champ de
bataille et aussi une histoire sordide sur son assassin qui
n’était pas un saint comme on a fait de lui pour l’unique
circonstance de redorer le blason de l’histoire d’une nation
humiliée systématiquement par les Ottomans et qui se vengea
des siècles plus tard en massacrant les populations civiles
désarmées et innocentes de Bosnie tout comme ils
massacrèrent plus d’un million de turcs lors du démembrement
de l’État Ottoman après la première guerre mondiale. Ils se
sont fait les héros de la mort du Sultan Mourad, puisse
Allah Exalté lui faire miséricorde, et c’est là la seule
satisfaction qu’ils auront tout au long du conflit, il n’y
pas donc de quoi s’émerveiller d’autant que ce qui suivit
avec les autres Sultans seraient bien plus pire.
Voilà,
pourquoi, je ne crois pas un traitre mot de cette histoire
abracadabrante rapportée aussi malheureusement pas tous les
historiens musulmans. Un autre point est qu’il existe deux
tombeaux du Sultan Mourad, l’un en Turquie et l’autre au
Kosovo. L’un d’entre eux est donc faux et a donc été
construit pour confirmer le mensonge. C’est comme le tombeau
du soit disant Christ, il aurait été si facile de confirmer
si c’est vraiment lui qui est dedans d’autant plus que des
travaux récents ont été accomplis voir même une étude d’ADN
sur les pierres ! Je comprends et certainement vous aussi
pourquoi cela n’a pas été accomplis.
L’ultime argument reste qu’il est rapporté que le Sultan fut
poignardé soit dans le cœur, le ventre ou la gorge alors
qu’il était vêtu d’une cote de maille ! Relisons : « Avant
que les sergents ne puissent intervenir, il s’agenouilla
comme s’il allait embrasser
la cote de maille
du Sultan et avec le poignard qu’il ôta de ses bottes,
poignarda le Sultan dans le cœur »
De toute manière même s’il mourut ainsi, mourir martyr est
le désir de tout Musulman sincère puisqu’il ouvre les portes
à toutes les excellences dans l’Au-delà, c’est pourquoi ce
fut certainement une double victoire pour les Musulmans et
l’histoire nous a prouvé que ce n’est pas la mort d’un homme
qui arrêta les Musulmans ; bien au contraire cela leur dona
des ailes et l’histoire des Sultans Ottomans qui suivirent
en est une très large preuve puisqu’elle culmina avec la
prise de Constantinople.
Les hauts responsables de l’état et les Beys (gouverneurs)
discutèrent de l’incident de Savci Bey, qui plongea l’état
presque dans le chaos et convinrent à l’unanimité que l’état
naissant ne pourrait pas supporter une autre contestation de
Sehzade. Par conséquent, ils convinrent que « la sédition
est plus dangereuse que la mort, » ce qui signifie que
l’autre Sehzade devrait être sacrifiée au nom de la religion
et de l’état ; c’est-à-dire afin d’éviter des troubles à
l’échelle du pays et de provoquer ainsi une guerre civile
ainsi que pour le plus grand bien de l’état, qui était
engagé sans cesse dans des ghazwa. Cette décision fut prise
au Kosovo et le cercueil de Ya’qoub Bey fut envoyé avec
celui de son père à Bursa. » Ce fut le premier fratricide de
l’histoire ottomane résultant de la notion plus large de
protéger et d’assurer la survie de l’État Islamique. Cela
permis à l’état de continuer à s’engager dans les ghazwa et
rester unifié.
Contrairement à certaines hypothèses (vous savez
lesquelles), ces décisions ne plurent pas du tout aux
Sultans Ottomans. Les événements pénibles qui suivirent,
tels que ceux de Fetret Devri ou de l’ère de l’Interrègne,
montrèrent que cette pratique se reproduisit mainte fois.
Toutefois, le fratricide ne fut pas la norme tout au long de
l’histoire ottomane.
La Loi Islamique ne fait pas de détails pour les opposants
au pouvoir et ceux qui sèment la corruption sur terre. Nous
avons détaillé ceci dans nos Abrégés de l’histoire des
Omeyyades et ceux des Abbassides et nous avons vu de manière
claire les résolutions qu’ils prirent en ce sens et démontré
que la « Fitnah est
plus grave que le meurtre. »
Il semble donc que le monde chrétien salua la mort de Mourad
Ier au Kosovo. Il est dit que la nouvelle que le Sultan qui
s’était révélé imbattable sur les champs de bataille ne
constituait plus un danger suscita plus d’une vague de joie
et de célébration à Paris et l’Istanbul Byzantine.
« L’assassinat » du Sultan Ottoman entraîna également une
série de fausses nouvelles en Europe qui devinrent des
mythes : les Turcs auraient subi une défaite totale et le
Sultan Ottoman, l’un de ses fils et la plus grande partie de
son armée, éliminés ainsi que douze héros qui traversèrent
les lignes ottomanes, entrèrent dans la tente du Sultan
Mourad Ier et l’anéantirent !
Ceci est rapporté par les historiens turc, vous voyez par
vous-même les contradictions : le champ de bataille ou la
tente ?
La bataille du Kosovo, qui représente la dernière grande
défense des Serbes, est considérée comme l’épopée nationale
des Serbes bien qu’ils aient perdu la bataille. Les
histoires serbes ont d’abord raconté « le grand exploit de
Knez Lazar » et « la victoire des Serbes ! » De même des
sources ultérieures leur attribuent même le mérite de la
défaite des Ottomans car comme vous le savez toute
l’histoire est en cours de réédition ! Curieusement, le Roi
de Bosnie, Tvrtko Ier, qui envoya Vlatko Vukovic à la
bataille, supposa dans ses lettres que la victoire
revendiquée lui appartenait ! On est plus à un mythe près
d’autant plus qu’il n’y a jamais personne pour contester !
Le Sultan Mourad I, qui fut « extraordinairement » le
premier et le seul Sultan de l’histoire ottomane à avoir été
martyrisé par l’ennemi sur le champ de bataille, bien que
d’autre sources turques rapportent qu’il décéda sur son lit
de mort, était un homme de taille moyenne, trapu, le visage
rond et le nez crochu, des cheveux et des sourcils abondants
et une épaisse moustache. Ses épaules étaient droites, ses
bras musclés et forts. Il avait la peau claire et une barbe
brune.
Le Sultan Mourad I accorda une telle priorité aux ghazwa
qu’il fit six campagnes durant son règne en Roumélie et
transporta l’Islam dans les Balkans. Il n’a jamais voulu se
quereller avec les principautés anatoliennes et turques,
dont il savait qu’elles étaient originaires de ses mêmes
origines et préféra négocier et établir des alliances
matrimoniales avec elles.
Les sources ottomanes le considèrent comme un Musulman
pratiquant béni. Il était calme, attentionné,
philanthropique et juste. Il refléta l’affection de l’Islam
sur ses sujets chrétiens et fut aimé par ceux-ci en retour.
Beaucoup de Chrétiens se convertirent à l’Islam grâce à son
bon comportement et à son attitude. Il respectait les
intellectuels et les artisans. Il était un commandant
intelligent et un homme d’état organisateur. Il parlait très
peu et parlait avec sagesse quand il le faisait. Il avait un
caractère équilibré et une bonne prestance.
L’Anatolie et les régions environnantes sympathisèrent
généralement avec le Sultan Mourad I en tant que grand
Sultan Ghazi combattant contre les croisés. Les Turcs, les
Arabes, les Perses et les autres ethnies originaires du
monde Islamo-turc et voulant se battre au service des
Ottomans furent recrutés dans les unités Sipahi du palais ;
c’est ainsi que fut créée l’institution Kapikulu Sipahis
(Cavalerie de la Porte), qui deviendra l’armée impériale
chargée de protéger et d’assurer la sécurité du Sultan et
des hommes d’état ottomans.
Le Sultan Mourad I construisit le Hudavendigar Kulliye, ou
complexe de bâtiments construits autour de la mosquée pour
le bien public, la Mosquée Hudavendigar et la Mosquée Hissar
à Bursa, la Mosquée Hudavendigar à Ayvacik et une mosquée
tant à Bilecik et Yenişehir. Il avait également un modeste
palais à Edirne et une maison de charité à Iznik construite
au nom de sa mère Nilufer Khatoun. Après la conquête
d’Edirne, il convertit en mosquées une église située à
l’intérieur de la forteresse et une autre à Plovdiv.
La tombe du Sultan Mourad Ier qui se trouvait à l’extérieur
du territoire ottoman après les guerres des Balkans
(1912-1913) fut transformée en ruines après la guerre. Ces
dernières années, l’état turc restaura le tombeau et le
rendit accessible aux visiteurs. |