L’entrée des qarmates à La Mecque et le massacre des pèlerins

 

Durant l’année 317 de l’Hégire (929), al-Mouqtadir confia la sécurité de la caravane de La Mecque à Mansour ad-Daylami et ils arrivèrent en toute sécurité à destination. Mais le jour de Tarwiyyah[1], Abou Tahir l’abject qarmate, l’ennemi d’Allah, le mécréant fils du mécréant, s’attaqua à l’endroit le plus sacré sur terre. Il tomba sur les pèlerins de la Maison Sacrée qu’il massacra pratiquement tous à l’intérieur du sanctuaire sacré et jeta leur corps innocents dans le puits de Zamzam. Il s’assit sur la porte de la Ka’bah et dit : « Je suis par dieu et dieu est par moi, Allah créé les créatures et moi je les annihile ». L’infâme athée Abou Tahir malédiction d’Allah sur lui, dont les partisans existent encore de nos jours particulièrement en Iran et qui crie à la liberté du culte du diable, ne prospéra pas après cela et son corps fut ravagé par la variole.

Puis, il ordonna de sceller le puits de Zamzam, arracha la porte de la Ka’bah, retira la parure que se partagèrent les chiens entre eux. Puis il ordonna à l’un de ces hommes de prendre la Pierre Noire. Ce dernier la frappa avec une barre de fer, la cassa et la descella tandis qu’Abou Tahir le vil dit : « Où sont donc les oiseaux Ababil[2], où sont les pierres de Sijjil ? » Les qarmates restèrent à la Mecque onze jours avant de repartir en emmenant avec eux la Pierre Noire qui resta en leur possession durant plus de vingt ans. 50.000 dinars leur fut offert pour la retourner mais ils refusèrent jusqu’à ce qu’elle fut restitué sous le califat d’al-Mouti’.

Il a été rapporté, que lorsqu’ils emportèrent la Pierre Noire, quarante chameaux forts ployèrent sous son poids entre La Mecque et Hajar et quand elle fut chargée sur un jeune chameau mince, il grossit sur la route. Muhammad Ibn ar-Rabi’ Ibn Souleyman a rapporté : « J’étais à La Mecque l’année des qarmates quand l’un d’entre eux monta sur la Ka’bah pour démolir la Rigole[3] (mizab). Je l’observais, perdit patience et criait : « O Seigneur, quelle haine à put l’inciter ? » Et l’homme tomba sur sa tête et mourut sur place ». 

 

Tous ces événements concernant tant les zanj que les qarmates ont été rapportés des Imams at-Tabari, Ibn al-Jawzi, Ibn al-Athir et l’Imam al-Hafiz Ibn Kathir ainsi que d’autres comme l’Imam as-Souyouti, dont il n’y a aucun doute en ce qui concerne l’authenticité de leurs informations.

Et sous le couvert de la liberté de pensée, d’information et de culte, il est malheureux de voir que les livres qui glorifient les qarmates et les ismaéliens, se vendent dans les pays musulmans. Regardons par exemple le livre « Les qarmates entre la gloire et le déclin » écrit par le Dr Mustapha Ghalib, un ismaélien qui glorifie sans exception toutes les sectes hérétiques et dans l’introduction de son livre, dit des choses absolument ignominieuses et des mensonges difficilement croyables et parmi toutes qu’ils furent ceux qui déposèrent la pierre de la liberté, de la justice et de l’amour entre les cultes, quant aux génocides qu’ils commirent particulièrement envers les Musulmans sunnites, plus d’un million de morts, il n’en fait mention ! Et ainsi, il est pardonné à des gens qui vantent et sèment leur diabolique doctrine parmi les Musulmans.

Ce même écrivain, a dit dans l’introduction de son livre « Alif Dikr » : Nous ne parlons pas de la relation qui existe entre les qarmates et les ismaéliens bien qu’elle existe réellement. Les ismaéliens sont les propagateurs de la doctrine qarmate et les qarmates sont des ismaéliens ».

 

Et comme nous l’avons déjà précédemment mentionné, les qarmates sont bien originaires des ismaéliens et le Sheikh Ihsan Zahir dans son superbe livre « les Ismaéliens » a dit à leur sujet : « La doctrine des ismaéliens est bâtie sur la pensée shiite et sur les piliers de la doctrine des Battiniyah, les malveillants envers la communauté de Muhammad (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) et ses pieux ancêtres (salafiyah), et particulièrement envers les respectables Compagnons (qu’Allah soit satisfait d’eux) du Messager d’Allah (saluts et bénédictions d’Allah sur lui), et à leur tête les trois Califes Bien Guidés, Abou Bakr as-Siddiq, ‘Omar Ibn al-Khattab et ‘Uthman Ibn al-’Affan (qu’Allah soit satisfait d’eux), sur les Mères des croyants (qu’Allah soit satisfait d’elles) ainsi que quiconque suit leur voie, est guidés par eux ou les suit au fil des siècles ».

 

Un jour du mois de Ramadan de l’année 259 de l’Hégire (872) à Samarra, c’est-à-dire longtemps avant ces événements, sous le règne du calife abbasside faible al-Mou’tamid ‘Allallah, un homme qui insultait les pieux ancêtres fut capturé. Malgré son extrême faiblesse, le calife al-Mou’tamid ‘Allallah, sur qui fut jeté des pierres à une certaine occasion, dit-il ou pensa-t-il à la liberté des cultes ou de la parole ou bien lui appliqua-t-il le châtiment qu’il méritait ? L’homme en question fut donc fouetté mille coups jusqu’à ce qu’il trouve la mort.

Et aujourd’hui, des livres sont imprimés ou le Messager (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui), les Mères des croyants (qu’Allah soit satisfait d’elle), les pieux Compagnons (qu’Allah soit satisfait d’eux) et les pieux ancêtres (qu’Allah leur fasse miséricorde) se font gratuitement insulter par les plus viles créatures de la terre. Ces créatures qui n’atteindront jamais le summum de la gloire et ni même une ombre de gloire des gens qu’ils insultent et diffament bien que ces derniers ne leur ont commis aucun tort ! Quant au jour de la résurrection, l’évidence des degrés qu’occuperont les accusateurs et les accusés sera bien nette pour tout le monde. Et puis comble de la lâcheté, il est plus facile de calomnier les morts que les vivants car les calomniateurs ne risque pas de représailles de la part de ceux qu’ils insultent ! Que l’histoire de ces hérétiques est vile et sale !

Et l’histoire restera l’histoire de toute manière. Liberté de culte ou de parole ou pas, les Musulmans doivent connaître leurs ennemis et ceux-ci sont connus ! L’histoire nous a appris à propos des nations et des sectes, leurs crimes ou leurs gloires resteront comme une preuve irréfutable contre eux. Et ce n’est pas aujourd’hui, des arrivistes sortis de l’ombre, gavés par des forces obscures bien connues pour faire suinter leurs plumes qui pourront changer cette réalité.

Après cette petite mise au point et ces funestes événements survenus à La Mecque contre les musulmans en l’an 317 de l’Hégire (929), nous revenons à l’histoire des abbassides.

 

Durant cette même année, un grand tumulte survint à Baghdad concernant le verset du Très Haut, « …afin que ton Seigneur te ressuscite en une position de gloire »[4]. Les Hanbalites affirmèrent que le sens de ce verset est qu’Allah Exalté placera Muhammad (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) sur Son trône près de Lui, pendant que d’autres soutinrent que cela signifiait seulement le pouvoir d’intercession. La controverse continua et ils en vinrent aux mains si bien qu’un grand nombre d’entre eux furent tués.

 

 

En l’an 317 et 318 de l’Hégire (929/930), les pèlerinages à La Mecque eurent lieu parce que le calife ordonna à des armées, sous le commandement de Mounis al-Khadim qui était âgé à cette époque de 88 ans, d’accompagner les pèlerins. Vous êtes en droit de vous demander qui était ce général qui commandait les armées et qui était craint par les califes et pourquoi le calife n’a pas désigné plutôt le vizir, un Qadi ou un gouverneur pour accompagner les pèlerins ? Mounis al-Khadim était un homme blanc de peau qui était un des servants du calife al-Mou’tadid Billah et qui fut surnommé « al-Moughaffar ». C’était un homme d’état et un homme de guerre.

 

 

Durant l’année 319 de l’Hégire (931), les qarmates attaquèrent Koufa et les gens de Baghdad craignirent leur entrée dans Baghdad et demandèrent de l’aide.

 

Cette même année, les Daylami entrèrent dans Dinawar où ils tuèrent un très grand nombre de gens et prirent des prisonniers.

 

 

Lorsque nous mentionnons qu’un calife quelconque ou le présent al-Mouqtadir Billah était faible, nous ne le faisons pas par nous-mêmes mais ce sont les grands historiens qui les ont qualifiés ainsi comme l’Imam al-Hafiz ad-Dahhabi qui dit dans son livre « al-‘Ibar fil Khabar liman Ghabar » à propos d’al-Mouqtadir Billah : « Sous son règne, l’état abbasside se rétrécit ». En effet, l’ensemble du Maghreb islamique sortit du contrôle des abbassides pour passer sous le contrôle de l’hérétique ‘oubaydi ‘Oubaydillah al-Mahdi, qui se fit surnommer « émir des croyants ». De même l’émir omeyyade ‘AbderRahmane an-Nassir, se fit surnommer émir des croyants en Andalousie.

 

Après son retour de Mossoul au mois de Mouharram 320 de l’Hégire (931), Mou’nis al-Khadim eut des mots avec le calife faible et il quitta Baghdad avec ses servants et ses aides pour Mossoul.

Tandis qu’à Mossoul (mawsil) un grand nombre de personnes rejoignirent les rangs de Mou’nis et au mois de Shawwal de cette année, il marcha sur Baghdad. Le calife al-Mouqtadir Billah sortit avec ses hommes pour l’arrêter mais la situation se retourna contre lui et il tomba entre les mains des hommes de Mou’nis, un groupe de maghrébins, qui le tuèrent et tranchèrent sa tête qu’ils élevèrent sur une lance. Son corps fut dépouillé de tous ses vêtements et il fut laissé nu sur le sol. Ainsi fut traité le calife des musulmans, ses parties intimes dévoilées tandis que ses assassins rigolaient de joie autour de sa dépouille. Précédemment, lorsque le calife leur dit : « Je suis le calife des Musulmans » ils lui répondirent : « Tu es le calife du diable ». Puis lorsqu’ils furent partis, un Musulman qui passait le couvrit puis creusa une tombe et l’enterra là où il était tombé.

 

L’Imam al-Hafiz Ibn Kathir a dit dans son livre d’histoire : «  La rébellion de Mou’nis al-Khadim contre le calife est la cause qui poussa les servants de l’état à se rebeller contre les califes abbassides mais aussi à contester leur pouvoir». L’Imam a aussi dit que le calife al-Mouqtadir Billah était un prodigue et qu’il avait dépensé pour ses désirs personnels huit millions de dinars, ce qui représentait une somme faramineuse à l’époque. Il a aussi rapporté qu’il consultait beaucoup ses femmes pour ses affaires et dépensait pour elle des sommes fabuleuses ».

 

L’Imam as-Souyouti a dit dans son livre « Tarikh al-Khoulafah » : « Al-Mouqtadir avait un bon sens et un jugement solide, mais il était adonné à la sensualité, à l’ivresse et les dépenses. Ses femmes avaient une totale influence sur lui et il leur prodigua tous les joyaux de la couronne royale, des objets précieux et accorda à l’une de ses concubines une perle sans pareil, dont le poids était de trois Mithqals[5] (environ 12 grammes). Il donna à Zaydan, le garde de ses appartements privés, un collier de pierres précieuses dont nul pareil n’a jamais été vu et il gaspilla une immense richesse. Il avait dans son palais onze-mille garçons, en plus des esclaves grecs, noirs et blancs ».  

 


Al-Qahir Billah, le dix-neuvième calife abbasside

  

Après son assassinat, les sommités de l’état se réunirent pour porter allégeance à Muhammad Ibn Mou’tadid Billah qu’ils surnommèrent al-Qahir Billah au mois de Shawwal de l’année 320 de l’Hégire (931). Sa mère se prénommait Fitnah et le calife commença son règne par torturer les fils de son frère al-Mouqtadir Billah ainsi que leur mère qui était malade. Il ordonna de la frapper et elle fut pendue par ses pieds pour lui faire avouer ou elle cachait son argent. Puis, il fit poursuivre les grands généraux dont Mou’nis al-Khadim.

Comme l’armée lui était défavorable, Mou’nis, Ibn Mouqlah et d’autres conspirèrent et cherchèrent à le détrôner en faveur du fils d’al-Mouktafi, mais al-Qahir complota aussi contre eux, les captura et les exécuta.  Mou’nis al-Khadim finit égorgé en l’an 321 de l’Hégire (932) alors qu’il était âgé de 90 ans et le fils d’al-Mouktafi fut emmuré vivant. Quant à Ibn Mouqlah, il se dissimula mais sa maison et celle des conspirateurs furent incendiées. Al-Qahir procéda au paiement des troupes qui se calmèrent ainsi. Son autorité devint fermement établie et sa crainte révérencielle remplit les cœurs des gens à cause des grandes exactions qu’il commit. Et à ses titres, il fut ajouté «  le châtieur des ennemis d’Allah », qui fut gravé sur la monnaie.

 

Toujours cette année, le calife al-Qahir Billah publia une prohibition contre les musiciens et la consommation des boissons alcoolisées. Il fit arrêté tous les chanteurs mâles et femelles, défendit l’emploi des personnes infâmes, il brisa tous les instruments de désœuvrement mais permis la vente des chanteuses sous certaines conditions.

 

Le calife se fit faire un javelot qu’il garda toujours en son compagnie jusqu’à ce qu’il ait tué un homme avec. ‘Ali Ibn Muhammad al-Khorassani a rapporté : « Al-Qahir me fit venir un jour, le javelot était devant lui et il me dit :

- « Je voudrais te questionner sur les qualités et les caractères des califes de la Maison d’al-’Abbas ». Je répondis :

- « En ce qui concerne as-Safah, il était rapide à verser le sang et ses préfets l’ont imité en cela. Malgré cela, il était munificent et généreux ».

- « Et al-Mansour » demanda-t-il ?

- « Il fut le premier à semer la division entre les descendants d’al-‘Abbas et ceux d’Abou Talib alors qu’auparavant, ils étaient unis. Il fut le premier calife à utiliser les astrologues et le premier pour qui fut traduit des travaux syriens et perses comme le livre de Kalilah et Damnah, le livre d’Euclide et d’autres travaux grecs que les gens ont lu et pris. Et quand Muhammad Ibn Ishaq vit cela, il compila son travail sur les batailles et les expéditions militaires. Al Mansour fut aussi le premier qui employa des esclaves non arabes au service de l’état ».

- « Et al-Mahdi ? »

- Je répondis : « Il fut généreux, juste et équitable. Il restitua ce que son père prit par la violence aux gens et était empressé dans le déracinement des Zindiq[6]. Il reconstruisit la Maison Sacrée de La Mecque et les mosquées de Médine et de Jérusalem.

- « Qu’en est-il d’al Hadi ? »

- « Il était un tyran fier et ses gouverneurs furent comme lui pendant son court règne ».

- « Et ar-Rashid ? »

- « Il se consacra à la guerre, au pèlerinage et il établit des maisons et des réservoirs d’eau sur la route de La Mecque et fortifia les postes frontières de Kadanah, Tarse, Massissah et Mar’ash. Sa générosité embrassa les gens en général et pendant ses jours prospérèrent les Banou Barmak avec leur munificence célèbre. Il fut le premier calife qui joua au polo, qui tira des flèches sur une cible et qui joua aux échecs ».

- « Et al-Amin ? »

- « Il fut bienfaisant mais absorbé par la sensualité et les affaires tombèrent en désordre ».

- « Al-Ma'moun ? »

- « L’astrologie et la philosophie eurent trop d’influence sur lui, mais il fut prévenant et munificent ».

- « Et al-Mou’tassim ? »

- « Il suivit ses pas, mais l’amour de l’équitation et l’imitation des potentats étrangers l’influencèrent excessivement mais il se concentra sur la guerre et les conquêtes ».

- « Et al-Wathiq ? »

- « Il marcha sur les voies de son père ».

- « Et al-Moutawakkil ? »

- « Il alla à l’encontre de la conduite d’al-Ma'moun, d’al-Mou’tassim et d’al-Wathiq concernant ses convictions religieuses. Il interdit la discorde, les controverses, les disputes et les punis. Il ordonna la lecture et l’audition de Traditions (prophétiques), interdit la doctrine de la création du Qur’an, et pour cette raison les gens l’aimèrent ».

Puis, il continue à me questionner sur le reste des califes et je lui répondis ce que je pensais d’eux alors il me dit :

- « J’ai entendu tes propos et c’est comme si j’ai vu les acteurs eux-mêmes ». Alors il se leva et parti.

 

Cette même année, les disciples d’Abou Tahir le qarmate arrivèrent dans les régions de Tawwaj et de Siniz par bateaux et par terre. Quand ils furent à une certaine distance de leurs bateaux, ceux-ci furent brûlés par un homme qui contrôlait la région. Il rassembla alors les habitants des contrées et attaqua les qarmates, tua certains d’entre eux et captura quatre-vingts hommes, dont Ibn al-Ghamr. Un messager de Muhammad Ibn Yaqout emmena triomphant ces prisonniers dans la capitale avec des cornes attachées sur la tête d’Ibn al-Ghamr et les prisonniers vêtus de gilets de satin montés sur des chameaux. 



Ar-Radi Billah, le vingtième calife abbasside 

 

Au mois de Joumadah Thani de l’année 322 de l’Hégire (933), les soldats turcs attaquèrent le calife al-Qahir Billah qu’ils capturèrent avant de lui crever ses yeux et de nommer à sa place Ahmad Ibn Mouqtadir Billah qu’ils surnommèrent ar-Radi Billah et dont la mère d’origine romaine se prénommait Zalloum.

Al-Mas’oudi rapporta qu’al-Qahir confisqua une quantité immense de propriété de Mou’nis et de ses partisans et quand il fut déposé, aveuglé et questionné sur cela, il refusa d’acquiescer et fut torturé de différentes façons sans rien avouer. Alors ar-Radi Billah le prit et le rapprocha de lui et lui dit : « En vérité, tu connais les demandes de l’armée pour l’argent et je ne possède rien. Ce que tu as ne te profite pas, avoue donc où il est ». Il répondit : « Bien, si tu fais cela, alors l’argent est enterré dans le jardin ». Il disposait précédemment d’un jardin dans lequel étaient plantés toutes sortes d’arbres différentes apportés pour lui des provinces et il l’avait embelli, construit un pavillon et ar-Radi était beaucoup attaché au jardin et au pavillon et il demanda : « Dans quelle partie se trouve le trésor ? » al-Qahir répondit : « Je suis aveugle et ne peux pas te guider à l’endroit, mais creuse le jardin et tu le trouveras ». Ar-Radi chercha dans tous le jardin, déterra les arbres et retira les fondations du pavillon mais ne trouva rien et il demanda à al-Qahir : « Où est le trésor ? » Al-Qahir répondit : « Ai-je un trésor ? Mon seul regret était de ne pouvoir m’assoir dans le jardin et d’en tirer plaisir. J’ai donc voulu que tu déplores sa perte ».

Ar-Radi se repentit alors de ce qu’il lui avait fait et le mit en prison où il resta jusqu’à l’année 333 de l’Hégire (944), quand il fut libéré et laissé en liberté. Un jour, il se tint debout dans la mosquée d’al-Mansour, parmi les rangs des adorateurs portant un vêtement de lin blanc, quand il s’écria : «  Donnez-moi la charité car je suis celui que vous connaissez ». Cela se passait sous le règne d’al-Moustakfi et il faisait ainsi pour le déshonorer. Alors, on lui interdit d’apparaître en public jusqu’à ce qu’il mourut le 3 du mois de Joumadah de l’année 339 de l’Hégire (950), à l’âge de cinquante-trois ans.

 

Sous le règne d’ar-Radi, la lutte intestine entre les hommes de l’état, les vizirs et les généraux des armées se poursuivit.

 

 

Durant l’année 322 de l’Hégire (933), al-Mahdi le gouverneur de l’Afrique mourut. Son règne fut d’une durée de vingt-cinq ans. Il fut le premier calife égyptien ‘Oubaydi, qu’Allah le maudisse. Il se prétendait être un descendant de ‘Ali (Qu’Allah soit satisfait de lui), alors qu’en vérité son ancêtre était un mage.

Le Qadi Abou Bakr al-Bakilani a dit : « Le grand-père de ‘Oubaydallah, surnommé al-Mahdi était un mage. Lorsque ‘Oubaydallah entra en ‘Egypte, il se fit passer comme un descendant de ‘Ali (qu’Allah soit satisfait de lui), mais aucun des généalogistes ne l’admit en tant que tel. Il était un infâme battini qui chercha à détruire la religion de l’Islam. Il se débarrassa des gens de science et des jurisconsultes afin de pouvoir séduire les gens ignorants et sa postérité suivit son exemple. Il rendit le vin et la fornication licites et propagea l’hérésie. Après sa mort son fils al-Qa'im bi-Amrillah Abou al-Qassim Muhammad lui succéda.

 

Toujours cette année, apparut Muhammad Ibn ‘Ali ash-Shalmaghani surnommé Ibn Abi al ‘Azakir. Il a été rapporté qu’il prétendit posséder le pouvoir divin et ressusciter les morts. Il fut exécuté et crucifié ainsi qu’un certain nombre de ses compagnons prouvant ainsi qu’il ne pouvait même pas se ressusciter lui-même.

 

Cette année aussi, décéda Abou Ja’far as-Sajzi un des chambellans. Il a été rapporté qu’il atteignit l’âge de 140 ans. Il resta en possession de tous ses moyens et en bonne santé.

 

À partir de cette année, le pèlerinage à La Mecque de Baghdad fut interrompu jusqu’à l’année 327 de l’Hégire (938).

 

 

Durant l’année 323 de l’Hégire (934), ar-Radi Billah gouverna de manière suprême et attribua l’est et l’ouest à ses deux fils Abou al-Fadl et Abou Ja’far.

 

Il se produisit cette année l’affaire bien connue d’Ibn Shanaboud et de la rétractation qu’il fit concernant sa lecture peu orthodoxe du Qur’an et sa déclaration qu’il avait été descendu sur lui et ce en présence du vizir Abou ‘Ali Ibn Mouqlah. Abou al-Hassan Muhammad Ibn Shanaboud était un célèbre lecteur du Qur’an, mais dont les lectures dévièrent du texte orthodoxe. Ibn Khalil a rapporté différents exemples de ses erreurs de lecture et ajouta qu’il était un homme de peu de connaissance. Quand il fut châtié sur les ordres d’Ibn Mouqlah, ce dernier le maudit et pria pour qu’Allah Exalté fasse qu’il ait la main tranchée ce qui arriva effectivement et Ibn Shanaboud mourut à Baghdad en l’an 328 (939).

 

Au mois de Joumadah Awwal de cette même année 323 (934), une violente tempête souffla à Baghdad, la terre fut obscurcie et l’obscurité dura de l’après-midi jusqu’au coucher du soleil.

 

Toujours cette année il y eut un pèlerinage, mais quand les pèlerins arrivèrent à al-Qadissiyah, ils furent arrêtés par Abou Tahir le qarmate. Le calife avait envoyé avec les pèlerins, Lou'lou', le Mawlah de Moutahashim qui supposa que les qarmates étaient des bédouins ordinaires, et les gens dans la caravane les engagèrent. Ils furent cependant vaincus par les qarmates qui acquirent un grand butin. ‘Omar Ibn Yahya le ‘Alid plaida pour ceux qui étaient entrés dans al-Qadissiyah et Abou Tahir leur accorda la vie sauve. Ils quittèrent alors al-Qadissiyah et le pèlerinage fut annulé pour cette année. Abou Tahir alla à Koufa où il resta.

 

Durant le mois de Dzoul Qi’dah, il y eut une chute, sans précédent tant en durée qu’en taille, d’étoiles filantes qui dura toute la nuit à Baghdad, Koufa et les régions contiguës. Les étoiles tombèrent toute la nuit avec une fréquence extraordinaire, dont nul pareil n’a jamais été enregistré.

 

De même, il y eut aussi une mutinerie de troupes, qui allèrent à la résidence du vizir et creusèrent dans le mur de sa résidence à de nombreux endroits. Ils ne purent cependant pas atteindre le vizir, qui fut défendu par ses serviteurs qui tirèrent des flèches sur les mutins du haut du mur. Bien que nous n’ayons raconté aucune rébellion de troupes, elles devinrent chose courante.

 

 

En l’an 324 de l’Hégire (935), le pouvoir des vizirs cessa et le contrôle des provinces, des bureaux ou des départements leur fut retiré. Ils portaient simplement le titre de vizir et le droit d’apparence, en noir avec une épée et une cloche, les jours de cérémonies officielles au palais, où ils restaient dans le silence. Ibn Ra’iq et son secrétaire eurent le contrôle de la totalité des affaires d’état et il en fut de même avec tous ceux qui portaient le titre de prince, du temps d’Ibn Ra’iq à cette date. Les revenus des provinces étaient transmis à la trésorerie des princes, qu’ils utilisaient selon leur plaisir et remettaient ce qu’il voulait au calife pour ses frais. Les vieilles trésoreries cessèrent d’exister.

À cette époque, quand le pouvoir du califat s’affaiblit, et que les piliers de la puissance des Abbassides chancela, les qarmates et les autres hérétiques devinrent suprêmes dans les provinces.

 

L’émir AbderRahmane qui possédait beaucoup de qualités éminentes, le descendant d’Oumayyah et de Marwan, le souverain d’Andalousie, se fit surnommé « commandants des croyants » et le « défenseur de la religion d’Allah ». Il régna sur la plus grande partie de l’Andalousie. Il inspira la crainte révérencielle, combattit dans la voie d’Allah Exalté, ordonna des expéditions militaires, renversa tous les rivaux et captura soixante-dix forteresses. Et comme nous l’avons déjà mentionné, il y avait à cette époque, ainsi trois personnages qui portaient le titre de commandants des croyants : l’Abbaside à Baghdad, AbderRahmane en Andalousie et l’hérétique maudit al-Mahdi à al-Mahdiyyah.

 

L’histoire de Lashkari Ibn Mardi

 

En l’an 326 de l’Hégire (937), Lashkari Ibn Mardi, un homme éminent gradé, un partisan de Mardawij, qui était son lieutenant sur les provinces Jabal, reçut la possession de l’Azerbaïdjan (adarbayjan). Collectant de l’argent et des hommes en grandes quantités, il abandonna son maître et procéda en Azerbaïdjan pour emménager la province.

Dayssam Ibn Ibrahim y était au pouvoir à cette époque et avait rassemblé une vaste armée de Kurdes et d’autres races. Après avoir déposé des marchandises dans certaines régions, il avança pour rencontrer Lashkari, qu’il combattit deux fois en l’espace de deux mois et où il fut vaincu lors des deux occasions. Lashkari prit possession de son pays à l’exception d’Ardabil, dont les habitants étaient braves, robustes et des gens d’armes.

Ardabil était la capitale d’Azerbaïdjan, le siège du gouvernement, et fortifiée d’enceintes protectrices. Lashkari leur envoya des messagers, qui leur firent des discours courtois, des promesses équitables, mais ils rejetèrent ses avances, ayant entendu parler des Jil et des différentes tortures qu’ils avaient infligées aux gens de Hamadan et d’autres endroits. La ville fut donc assiégée par Lashkari et il y eut une guerre prolongée entre les partis. Finalement certains de ses partisans trouvèrent un endroit dans le mur où ils pouvaient monter, et où il fut creusé dans un certain nombre d’endroits. Ils ouvrirent la porte et les troupes de Lashkari entrèrent dans la ville, qui fut prise durant la nuit.

Quand Lashkari eut Ardabil bien en main, assuré de sa conquête, il eut peur que la ville puisse être pillée et les propriétés perdues pour lui et ses hommes. Il décida donc de revenir dans son camp qui était à une distance de deux kilomètres de la ville, où il passa la nuit avant de repartir le matin suivant à la lumière du jour. Quand il partit, les gens de la ville réparèrent en hâte la brèche, bouchèrent les trous, fermèrent les portes et se préparèrent pour la guerre. Quand Lashkari arriva il fut stupéfié et se rendit compte de la faute qu’il avait commise en ne laissant pas une garnison sur place ainsi que des hommes pour protéger les brèches. Ses officiers lui reprochèrent amèrement son incompétence et il ne put rien faire qu’avouer qu’il avait fait une gaffe.

Les habitants de la ville envoyèrent rapidement des messagers à Dayssam, pour lui faire part de la situation et lui demander de venir un jour prédéterminé quand ils pourraient faire une sortie contre Lashkari pour qu’il puisse tomber sur ses arrières et ce stratagème réussit. Le jour prévu, Dayssam avança avec des vastes hordes de bandits et de Kurdes, pendant que les habitants, environ dix-mille, sortirent sous l’apparence de Daylamite, avec des boucliers et des lances. Lashkari leur livra bataille quand Dayssam apparut et chargea ses arrières. Lashkari fut honteusement mis en déroute et un très grand nombre de ses hommes furent abattus. Lashkari partit en direction de Mouqan, vaincu et dévasté sans chevaux ni armée.

L’Ispahbad de Mouqan, appelé Ibn Daloulah sortit à sa rencontre et le divertit lui et ses officiers. Lashkari lui exprima sa gratitude et lui demanda de lui fournir l’hospitalité ainsi qu’à ses hommes tandis qu’il revint dans sa propre ville, à quatre jours de voyage de Mouqan, pour retirer son trésor, aller chercher son fils et son frère et rassembler ses forces. Lashkari revint rapidement, amenant son fils et son neveu, avec mille jeunes Jilites bien équipés et armés. Il envahit de nouveau l’Azerbaïdjan et poursuivit Dayssam, aidé par Ispahbad Ibn Daloulah et ses hommes. Dayssam s’enfuit en traversant un fleuve appelé ar-Rass, dont le courant était fort; empruntant les endroits de la rivière ou il était possible de traverser de son côté. Lashkari prit une position lui faisant face et fut incapable pendant un certain temps de l’atteindre. Son fils, son neveu et les jeunes Jilites, qui étaient tous des bons nageurs parce que leur pays se trouvait sur le littoral de la mer Caspienne, vinrent le trouver en groupe et l’informèrent qu’ils avaient suivi le cours du fleuve, dans les deux sens, et qu’ils avaient découvert à une distance de 12 kilomètres de leur camp un endroit où le courant était lent et ils lui demandèrent sa permission pour risquer une traversée, qu’il leur accorda. Ils vinrent de nuit à l’endroit avec un certain nombre de trompettistes, ils traversèrent à la nage le fleuve et tendirent de fortes cordes qu’ils attachèrent à des pieux fermement plantés sur les deux rives. Le reste traversa alors avec leurs boucliers et leurs armes et chargèrent le camp de Dayssam en faisant retentir leurs trompettes. Ils tuèrent un certain nombre des hommes de Dayssam qui prit la fuite et les Jilites prirent possession de ses bagages et ses provisions. Ils furent satisfaits de leur butin et la victoire de Lashkari fut complète.

Dayssam parti trouver Washmajir qui était dans Rayy et lui dit raconta ce qu’il avait subi aux mains de Lashkari, maintenant le maître de l’Azerbaïdjan, qui avait été aidé par l’Ispahbad de Mouqan Ibn Daloulah. Il fit remarquer à Washmajir que le pays de Jil était près du sien et que Lashkari pouvait facilement en tirer des renforts et qu’il attaquerait très bientôt Rayy et en contesterait la possession à Washmajir.

Dayssam demanda donc à Washmajir de lui fournir une force de Jilites et de Kurdes qui lui permettraient de s’opposer à Lashkari. Il proposa alors que Washmajir devait lui fournir une force de dix-mille cavaliers, de Kurdes et d’autres, qu’il (Dayssam) paierait cette force à partir du jour où elle entrerait dans Khounj, qui est juste à la frontière de l’Azerbaïdjan de la direction de Rayy. Il ferait dire la Khoutbah au nom de Washmajir sur toutes les chaires des mosquées d’Azerbaïdjan, lui verserait cent-mille dinars chaque année et lui rendrait la force lorsqu’il aurait fini avec Lashkari. Quand Washmajir entendit ses propos, il considéra l’affaire sérieuse. Dayssam accepta toutes ses demandes, chacun jura loyauté à l’autre et Washmajir s’appliqua à équiper cette force et avant que cette opération soit complétée, des nouvelles arrivèrent que l’Ispahbad Ibn Daloulah et beaucoup de ses hommes étaient morts de la variole. Le reste d’entre eux étaient resté avec Lashkari, qui expédia un de ses officiers en chef, Balsouwar Ibn Malik Ibn Moussafir Lashkari, dans la région de Miyanij, qui était comme la frontière entre lui et Washmajir, avec les ordres de garder les routes, de suivre, de contrôler ceux qui passaient et d’examiner leurs documents en guise de précaution et de prévision. Très bientôt Balsouwar saisit un messager qui transmettait des lettres des officiers de l’armée de Lashkari à Washmajir, en s’excusant de leur enrôlement dans les forces de Lashkari et en déclarant que quand ils s’étaient inscrits, ils avaient supposés qu’ils étaient encore dans leur service d’origine; et que quand ils verraient une de ses bannières avancer vers eux, ils le rejoindraient et s’opposeraient à Lashkari. Quand Lashkari fut informé de ces lettres, il les plia et n’en parla à personne. Informé du départ de Dayssam de Rayy avec l’armée de Washmajir, accompagnée par son chambellan Shaboushti, il chevaucha dans les champs, réunit ses officiers et les informa de l’approche de cette armée, en déclarant qu’il avait peur que d’engager les Jilites et Daylamites et d’être attaqué sur ses arrières par Dayssam comme à Ardabil. Il avait donc décidé de les prendre pour un raid sur l’Arménie, d’où après avoir pillé le pays il les emmènerait à Mossoul et à Diyar Rabi’ah, qui étaient des régions fertiles et riches. Ils furent d’accord avec son plan et il les conduisit en Arménie où les habitants n’étaient pas prêts pour une attaque. Il pilla leurs marchandises et leurs bétail, prit beaucoup de prisonniers, en pénétrant aussi loin que Zawazan. Lui et ses officiers furent à ce moment en possession d’immenses troupeaux de bétails qu’ils avaient pillé et qu’ils furent incapables de compter. Ils confièrent leurs charges à des gardiens de troupeau, qui les emmenaient au pâturage le matin et les rapportaient au crépuscule dans le camp.

Près de Zawazan, il y avait une forteresse arménienne[7] tenue par un de leurs chefs appelé  Atoum Ibn  Jourjin qui était un parent d’Ibn al-Dayrani, le roi des Arméniens. Il envoya un message courtois à Lashkari lui demandant d’épargner les Arméniens, comme ils étaient sous un traité et payait le tribut et espérait pouvoir lui remettre l’argent pacifiquement. Lashkari répondit positivement à sa demande. Mais cet Arménien, conçut un plan et réussi à tuer Lashkari et la totalité de ses hommes.

Cet Arménien, connaissant la vitesse et la légèreté des méthodes de Lashkari dans la guerre, comment il avançait sans réfléchir et se précipitait en avant sans un plan, il lui tendit une embuscade sur deux collines près de l’endroit où Lashkari avait établi son camp.

Entre ces collines il y avait un ravin étroit. L’Arménien envoya alors un groupe de ses compatriotes pour attaquer le bétail dans le camp de Lashkari. Ils tuèrent les gardiens de troupeau et conduisirent les bêtes dans le ravin. Un des gardiens de troupeau s’enfuit blessé et rencontra Lashkari qui venait du bain du bazar de Zawazan. Il informa les nouvelles et Lashkari partit immédiatement, le gardien de troupeau devant lui pour lui montrer la voie, accompagnée par seulement six de ses hommes dont il envoya l’un d’entre eux au reste de ses hommes dans le camp leur ordonnant de le rejoindre. Grâce à un incident qui lui arriva, l’un de ses six compagnons fut le seul qui échappa au massacre. Son cheval s’étant mis à boiter, Allah Exalté ayant décrété sa sauvegarde, il descendit pour voir le sabot et le remettre en place. Lashkari poursuivit sa route sans l’attendre, avec ses cinq compagnons restants et atteignit le défilé avant d’être rejoint par ses hommes. Il s’engagea dans la passe, et lorsqu’il fut au milieu, les hommes embusqués se levèrent d’un bond et le tuèrent ainsi que ceux qui l’accompagnaient. Avant de partir, ils tranchèrent leurs têtes et leurs membres et laissèrent leurs troncs. L’armée arriva à sa suite et quand ils virent le groupe de corps, ils les reconnurent et se retirèrent aussitôt. Les officiers de son armée nommèrent chef son fils Lashkaristan et ils décidèrent alors d’aller en groupe en direction d’une arête raide et inaccessible pour y déposer leurs bagages, leurs objets de valeur et le bétail en sécurité et ensuite de revenir à la ville d’Atoum Ibn Jourjin pour exécuter leur vengeance sur lui et y apporter massacre et pillage.

Mais un deuxième plan fut réalisé contre eux avec succès où ils furent tous massacrés excepté un petit nombre qui réussit à s’enfuir à cause de leur emportement, de l’ignorance des défilés et des routes et de leur vanité. Atoum Ibn Jourjin avait envoyé des éclaireurs pour surveiller leurs mouvements après avoir mis son plan en action en laissant en haut des montagnes des groupes d’Arméniens pour leur lancer des pierres. Leur route sur ces montagnes passait près d’un endroit étroit et profond, avec une montagne d’un côté et un large cours d’eau de l’autre. Les Arméniens postèrent des hommes en embuscade à cet endroit et Atoum se rendit avec un groupe de ses hommes dans sa forteresse et s’embusqua sur la voie de ce défilé, enfin que si l’ennemi s’enfuyait, il pourrait les attaquer. Quand les Jilites et Daylamites atteignirent le défilé, les Arméniens leur lancèrent des roches qui écrasèrent cavaliers et montures, fantassins et chameaux. Personne ne put les éviter à cause de la présence du cour d’eau. Certains cavaliers descendirent de leur monture, se glissèrent entre les pattes de leurs chevaux et ainsi les uns après les autres réussirent à s’enfuir. Mais plus de cinq-mille hommes périrent à cet endroit. D’autres encore, réussirent à s’enfuir dont Lashkaristan, qui procéda avec ses compagnons à Mossoul où il se réfugia chez Nassir ad-Dawlah qui leur fournit un salaire. Certains d’entre eux choisirent d’accepter de l’argent pour voyager immédiatement et partirent. D’autres voulurent rester avec Lashkaristan tandis que ceux qui acceptèrent de l’argent de voyage descendirent le fleuve à Wassit, où ils rejoignirent Bachkam. Le reste, qui étaient au nombre de cinq-cents furent expédiées par Nassir ad-Dawlah avec son cousin Abou ‘Abdallah Houssayn Ibn Hamdan en Azerbaïdjan quand Dayssam le Kurde avança là.

Ce Dayssam avait été un des officiers d’Ibn Abi as-Saj et Abou ‘Abdallah Houssayn Ibn Sa’id Ibn Hamdan avait été nommé ministre de sécurité publique en Azerbaïdjan par son oncle Abou Muhammad Hassan Ibn ‘Abdallah Ibn Hamdan surnommé Nassir ad-Dawlah.

 

 

En l’an 327 de l’Hégire (938), Abou ‘Ali Omar Ibn Yahya, le descendant de ‘Ali, écrivit au chef des qarmates avec qui il était en bon terme, pour lui demander de laisser la route libre aux pèlerins et qu’il lui donnerait cinq dinars par chameau. La permission fut accordée et les gens effectuèrent le pèlerinage. Ce fut la première fois où les pèlerins furent taxés.

 

 

En l’an 328 de l’Hégire (939), Baghdad fut submergée par une terrible inondation. L’eau atteignit environ deux mètres. Les hommes et les animaux furent noyés et les maisons détruites.



Al-Mouttaqi Billah, le vingt et unième calife abbasside 

 

Au mois de Rabi’ Awwal de l’année 329 de l’Hégire (940), le calife malade ar-Radi Billah décéda à l’âge de 32 ans et il fut porté allégeance après lui, sur les ordres de Bachkam at-Turki le général des armées, à Ibrahim Ibn Mouqtadir, qui fut surnommé al-Mouttaqi Billah et qui fut le vingt et unième calife abbasside. Sa mère se nommait Khaloub.

Durant son règne, les commandants Daylamites[8] se distinguèrent si bien qu’il s’ensuivit de nouveau des luttes intestinales pour le pouvoir entre les commandants turcs, qui possédaient tous les pouvoirs, et ceux de Daylam.

Al-Mouttaqi Billah Abou Ishhaq Ibrahim ne changea jamais son comportement ni visita secrètement une de ses esclaves. Il avait l’habitude de jeûner, de prier beaucoup et il ne but jamais du vin. Il avait l’habitude de dire : « Je n’ai besoin d’aucun ami inséparable, mais du Qur’an ». Il n’avait aucune autorité excepté son titre de calife et l’administration était entre les mains d’Ibn ‘AbdAllah Ahmad Ibn ‘Ali al-Koufi, le secrétaire de Bachkam.

 

Cette même année, le dôme vert de la ville d’al-Mansour qui était la couronne de Baghdad et un mémorial de la Maison des ‘Abbas, s’effondra. C’était un des édifices érigés par al-Mansour. Sa hauteur était d’environ 37 m quatre-vingts coudées et au-dessous se trouvait un hall d’une surface de 10 m² où se trouvait la statue d’un cavalier avec une lance dans la main. Le sommet du dôme s’effondra pendant une nuit de pluie et de tonnerre.

 

Toujours cette année, Bachkam at-Turki fut tué. Pendant une partie de chasse, il tomba sur une troupe de Kurdes qui avaient amassé un pillage considérable. Il les suivit et dans la mêlée il tomba en arrière et fut transpercé par une lance et Kourtakin le Daylamite lui succéda au poste d’émir al-Oumara. Al-Mouttaqi prit possession des trésors de Bachkam qui étaient à Baghdad et qui s’élevaient à plus d’un million de dinars. Par la suite, Ibn Ra’iq obtint la prédominance et combattit Kourtakin à Baghdad. Kourtakin fut mis en déroute et il se dissimula pendant qu’Ibn Ra’iq devint le chef émir à sa place.

 

 

En l’an 330 de l’Hégire (941), se produisit un fait exceptionnel à Baghdad si bien qu’un « Kour » de blé coûta jusqu’à plusieurs centaines de dinars. La détresse fut par conséquent très sévère et les gens se nourrirent de cadavres. Ce fut une famine sans précédent et qui n’a jamais été vu à Baghdad. Les gens mangèrent l’herbe et il y eut tellement de morts que plusieurs personnes furent enterrées dans la même tombe sans lavage ni prière. Certains des habitants se montrèrent pieux, donnèrent la charité et fournirent des linceuls et d’autres, plus nombreux, se révoltèrent et pillèrent.

 

Cette même année, Abou al-Houssayn ‘Ali Ibn Muhammad al-Baridi se révolta et le calife accompagné d’Ibn Ra’iq sortirent le combattre mais ils furent vaincus et s’enfuirent à Mossoul et Baghdad tandis que le palais royal fut pillé.

Quand le calife arriva à Tikrīt, il rencontra Sayf ad-Dawlah Abou al-Hassan ‘Ali Ibn Abdillah Ibn Hamdan et son frère al-Hassan. Ibn Ra’iq fut traîtreusement assassiné et le calife nomma al-Hassan Ibn Hamdan à sa place et lui donna le titre de Nassir ad-Dawlah. Il attribua aussi à son frère une robe d’honneur et le surnomma Sayf ad-Dawlah. Il revint alors à Baghdad accompagné par eux, et al-Baridi s’enfuit à Wassit. Par la suite, des informations arrivèrent au mois de Dzoul Qi’dah qu’al-Baridi marchait sur Baghdad, ce qui inquiéta les gens et les principaux hommes de Baghdad quittèrent la ville. Le calife sortit en compagnie de Nassir ad-Dawlah, tandis que Sayf ad-Dawlah partit pour à la rencontre d’al-Baridi. Il y eut plusieurs affrontements qui se poursuivirent un certain nombre de jours au cours desquels Sayf ad-Dawlah fut vaincu. Il fut renforcé par son frère et ensemble, ils réussirent à mettre en déroute al-Baridi, après un engagement désespéré près de Mada'in. Al-Baridi fut vaincu et revint démoralisé à Wassit. Sayf ad-Dawlah le poursuivit à Wassit et al-Baridi se retira à Basra.

 

 

En l’an 331 de l’Hégire (942), les Byzantins firent un raid aussi loin qu’Arzan, Mayafariqin et Nissibin ou ils massacrèrent un grand nombre de gens et prirent des prisonniers. Ils demandèrent alors le suaire qui était préservé dans l’église d’Edesse dont il croyait que le Messie (paix sur lui) s’était essuyé le visage avec et que la marque de son visage s’est imprégnée dessus, en en échange des captifs. Il leur fut donc ramené et les prisonniers furent libérés.

 

Cette même année, les nobles de Wassit s’élevèrent contre Sayf ad-Dawlah qui s’enfuit pour Baghdad en utilisant les chevaux de relais utilisés habituellement par les messagers tandis que son frère Nassir ad-Dawlah partit pour Mossoul. Touzoun quitta Wassit et marcha sur Baghdad où il entra au mois de Ramadan. Al-Mouttaqi présenta à Touzoun une robe d’honneur et le nomma chef des émirs. Peu après, une méfiance réciproque s’installa entre al-Mouttaqi et Touzoun. Touzoun envoya Abou Ja’far Ibn Shirzad de Wassit à Baghdad qu’il gouverna en absence de Touzoun émettant des ordres et des prohibitions. Al-Mouttaqi écrivit alors à Ibn Hamdan et lui demanda de venir le rejoindre ce qu’il fit, à la tête d’une force considérable. Ibn Shirzad se dissimula tandis qu’al-Mouttaqi et sa famille partirent pour Tikrīt. Nassir ad-Dawlah avança avec une grande armée se composant d’Arabes et de Kurdes pour contenir Touzoun et les deux armées se rencontrèrent à ‘Oukbara, à environ 8 kilomètres de Tikrit et 80 de Baghdad. Mais Ibn Hamdan et le calife se retirèrent en désordre à Mossoul. Peu après, il y eut un deuxième engagement ou ils furent de nouveau vaincus tandis que le calife s’enfuit à Nissibin. Alors, le calife écrivit à al-Ikhshid Muhammad Ibn Toughj, dont la famille descendait des princes de Ferghana, le gouverneur d’Égypte lui demandant de venir le trouver.

Par la suite, la Maison de Hamdan causa au calife beaucoup de soucis et de vexations et il dut proposer une réconciliation avec Touzoun qu’il consentit et confirma sa parole en prêtant serment. Plus tard, après avoir entendu les nouvelles de la réconciliation avec Touzoun, al-Ikhshid envoya un message au calife qui se trouvait à Raqqah, lui disant : « O commandants des croyants, je suis votre serviteur et en vérité je connais les Turcs, leurs vilenies et leurs traîtrises. Que le Seigneur te protège, vient avec moi en Egypte où tu trouveras la sécurité ». Mais le calife refusa et al-Ikhshid revint à ses affaires.

 

 

En l’an 332 de l’Hégire (943), des nouvelles arrivèrent de la mort du maudit qarmate Abou Tahir de la variole et ses frères lui succédèrent.

 

Cette même année, un homme d’Ispahan conçut un plan pour pousser les qarmates à  s’entretuer et qui fut sur le point de les exterminer.

 

Un plan qui faillit amener la destruction des qarmates

 

Ibn Sanbar était l’ennemi de la personne connue sous le nom d’Abou Hafs l’associé. Alors qu’Abou Tahir était toujours vivant, il conçut le complot suivant. Ibn Sanbar fit venir un certain homme d’Ispahan et lui révéla certains secrets qu’Abou Sa’id al-Jannabi lui avait révélé à lui seul (à Ibn Sanbar) alors qu’il était toujours en vie et particulièrement les endroits où il avait caché certains trésors. Abou Tahir ignorait que son père Abou Sa’id avait communiqué ces secrets à Ibn Sanbar, qui donna les instructions suivantes à l’homme d’Ispahan. Va, dit-il, trouver Abou Tahir et dit-lui que tu es la personne à qui lui et son père ont invité les gens à lui porter allégeance[9]. Quand, il te demandera des preuves, révèle-le-lui les secrets que je t’ai confiés. Ibn Sanbar lui demanda alors que lorsqu’il aurait acquis le pouvoir, de tuer Abou Hafs l’associé ce que l’homme d’Ispahan promit avant de partir trouver Abou Tahir. Il lui montra des signes et révéla les secrets et Abou Tahir n’eut aucun doute à propos de sa sincérité. Il se leva devant l’homme d’Ispahan, lui abandonna son autorité et fit appeler ses partisans et leur dit que l’homme d’Ispahan était la personne à qui il les avait invités à porter allégeance et que le pouvoir lui appartenait maintenant.

L’homme d’Ispahan acquit ainsi la suprématie et quand il fut établi, il remplit la promesse qu’il avait faite à Ibn Sanbar et mit Abou Hafs à mort. Il ordonna alors à Abou Tahir et ses frères d’exécuter tous les hommes qu’il choisissait en utilisant la formule « ainsi-et-ainsi », ce qui signifiait qu’il avait des doutes religieux sur la personne en question et qu’elle devait être tuée. Il fit ainsi périr les commandants d’Abou Tahir, les uns après les autres et ceux qui étaient connus pour leur intelligence et leur bravoure.

Ses ordres furent exécutés sans résistance jusqu’à ce qu’il se soit débarrassé d’un grand nombre de ses partisans. Quand il ordonnait à un homme d’exécuter son frère, son père ou son fils, la personne ordonnée n’hésitait pas un instant et se dépêchait de réaliser l’ordre. Abou Tahir conçut de la peur envers lui et voyant qu’il contemplait sa propre exécution, il dit à ses frères : « J’ai commis une erreur concernant cette personne, il n’est pas le souverain légitime, qui connaît les pensées des cœurs, à qui aucun secret n’est dissimulé, qui peut guérir le malade et faire ce qu’il veut ». Alors ils allèrent trouver l’homme d’Ispahan et lui dire que leur mère était malade et lui offrir de venir la voir. L’ayant mise précédemment au lit couverte d’un châle, quand l’homme arriva et la vit, il leur dit : « C’est une maladie incurable, vous devriez la nettoyer (la tuer) ». Alors ils demandèrent à leur mère de s’asseoir, se quelle fit, et lui dirent qu’elle avait la santé parfaite, qu’il était un menteur et ils l’exécutèrent.

Les qarmates avaient sept vizirs, dont Ibn Sanbar était le principal. Abou Tahir avait deux frères, Abou al-Qassim Sa’id Ibn Hassan et Abou al-‘Abbas al-Fadl Ibn Hassan ainsi qu’un troisième frère, Abou Ya’qoub Ishaq, qui ne prit aucune part dans la direction de leurs affaires et qui passait son temps à boire et à danser. Les trois étaient en accord complet et quand ils voulaient arranger n’importe quelle affaire, ils montaient leurs chevaux, s’éloignaient de leur ville et décidaient leurs futures actions qu’ils ne révélaient à personne d’autre. Et à leur retour, ils exécutaient l’action sur laquelle ils s’étaient mis d’accord.

 

L’invasion de l’Azerbaïdjan par les Russes

 

Cette même année, l’armée d’une nation appelée les Russes envahit l’Azerbaïdjan. L’armée attaqua et saisit Barda’ah, et prit captif ses habitants.

Les Russes (de l’époque) sont une puissante nation qui ne connaissent pas la défaite, ni tourne le dos dans la bataille préférant périr ou être tué[10]. Ils ont pour pratique de porter des armures et de lutter avec la lance et le bouclier, ils portent une épée et un instrument ressemblant à un poignard et ses envahisseurs, luttent à pieds. Après avoir navigué sur la mer caspienne, ils traversèrent le vaste fleuve appelé le Kour, qui prend sa source dans les montagnes d’Azerbaïdjan et d’Arménie et se jette dans cette mer. C’est le fleuve de Barda’ah, qu’ils comparent au Tigre. Quand ils atteignirent le Kour, ils furent interceptés par l’officier de Marzouban, qui exerçait les fonctions de son gouverneur à Barda’ah, à la tête de trois-cents Daylamites et du même nombre de Sou’louk et de Kurdes. Il ordonna aussi aux gens de l’endroit de prendre les armes et il fut rejoint par environ 5.000 volontaires inquiets de lutter contre ces envahisseurs inconnus qu’ils pensaient se comporter comme les Grecs ou les Arméniens. Quand ils les engagèrent dans la bataille, une heure ne s’était pas écoulée avant que les Russes après avoir combattu férocement mirent en déroute l’armée de Barda’ah. Les volontaires et le reste des troupes abandonnèrent leur défense et s’enfuirent à l’exception des Daylamites, qui restèrent fermes sur leur position et furent tués jusqu’au dernier homme excepté ceux qui étaient montés. Les Russes poursuivirent alors les fugitifs dans la ville, où chaque soldat ou civil qui avait une monture pour le porter fuirent la ville qui fut capturée par les Russes.

Abou al-‘Abbas Ibn Noudar et un certain nombre de personnes sures, ont rapporté que lorsque les Russes entrèrent dans la ville, ils firent la déclaration suivante aux citoyens : « Il n’y a aucune dispute entre nous sur la religion, nous désirons seulement la souveraineté, c’est notre devoir de bien vous traiter et vous d’être fidèle envers nous ». Néanmoins, les armées vinrent contre eux de tous les côtés, pour être seulement mise en déroute par les Russes. Quand les Musulmans chargèrent les Russes, les gens de Barda’ah crièrent « Allah Akbar » et lancèrent des pierres aux Russes qui avaient ordonné aux habitants de Barda’ah de se retenir et ne pas se mêler entre eux et l’armée gouvernementale du calife. Mais, bien que ce conseil fut accepté par les classes respectables, les gens du commun et la foule ne purent se retenir et donnèrent libre cours à leurs sentiments en attaquant les Russes quand les armées du calife des chargèrent. Peu après, les Russes publièrent une déclaration qu’aucun des habitants de la ville ne devait rester dans la ville et qu’ils avaient trois jours pour la quitter à partir du jour de la déclaration. Tous ceux qui avaient des montures pour les porter avec leurs familles et leurs enfants quittèrent la ville et ils n’étaient qu’une petite minorité. Quand le quatrième jour arriva, la majorité des gens étaient encore là. Les Russes les passèrent par l’épée et tuèrent un innombrable nombre de Musulmans. Après le massacre, ils attachèrent dix-mille hommes et leurs familles ainsi que les femmes les enfants et ils furent emmenés dans une forteresse, appelée Shahristan, près de la ville, où ils avaient établi leur quartier, logé leurs troupes et dans laquelle ils se retranchèrent. Les Russes réunirent alors les hommes dans la mosquée publique, placèrent des gardes aux portes et demandèrent aux prisonniers de se rançonner eux-mêmes. L’un des prisonniers musulman proposa aux autres Musulmans un plan solide mais ils refusèrent de le suivre et furent par conséquent massacrés, leurs biens, leurs marchandises et leurs familles furent pillés.

Il y avait dans cet endroit un employé de bureau chrétien, appelé Ibn Sa’moun, au jugement solide, qui agit comme négociateur entre les partis et prit des dispositions avec les Russes, par que chacun soit rançonné pour vingt dirhems. Le plus sage parmi les Musulmans accepta cet arrangement, mais les autres le refusèrent. Ibn Sa’moun abandonna donc les négociations et les Russes retardèrent leur massacre, espérant recevoir cette quantité insignifiante de leurs victimes. Quand ils virent que rien ne se passait, ils passèrent les Musulmans par l’épée et massacrèrent tous excepté quelques-uns qui s’échappèrent par un étroit conduit qui ramenait de l’eau à la mosquée. Certains achetèrent leurs vies avec tous les trésors qu’ils possédaient. Dans certains cas, les Musulmans s’arrangèrent avec des Russes pour acheter leur vie contre une certaine somme et amenèrent les Russes dans leur maison ou leur magasin. Quand ils dévoilaient leurs trésors, les Russes augmentaient la somme que les Musulmans étaient convenus de payer et finalement les ruinaient.  Quand les Russes étaient convaincus qu’il ne restait ni or et ni argent, ils leur permettaient de s’en aller en leur donnant un morceau d’argile timbrée pour servir de laisser passer. Ainsi les Russes ramassèrent une grande quantité de richesse, retinrent les femelles et les jeunes hommes sur qui ils satisfirent leurs désirs et qu’ils asservirent.

Quand la terrible nature terrible de la calamité fut réalisée et que les Musulmans des différents pays entendirent les nouvelles, ils appelèrent à une expédition générale. Marzouban Ibn Muhammad rassembla ses troupes et demanda un enrôlement général. Les volontaires le rejoignirent de toutes les directions. Il marcha contre les Russes à la tête de 30.000 hommes, mais malgré ce nombre, il fut incapable de tenir tête contre les Russes ou produire un quelconque effet sur eux. Il avait pour habitude de les attaquer matin et soir et se retirait régulièrement vaincu. Les affrontements durèrent plusieurs jours et les Musulmans furent toujours vaincus. Quand les Musulmans réalisèrent qu’ils étaient incapables de battre les Russes, Marzouban commença à réaliser la situation, et chercha recours dans la stratégie. Quand les Russes entrèrent dans la ville, ils consommèrent excessivement des fruits dont ils trouvèrent de nombreuses sortes ainsi que des olives et des concombres. Cela produit une épidémie parmi eux, puisque leur pays était extrêmement froid, où aucun arbre ne grandit et qu’ils importaient des régions lointaines le plus petit fruit. Quand le nombre se trouva réduit, Marzouban, chercha un stratagème, et considéra de les embusquer durant la nuit. Il s’arrangea donc avec son armée pour qu’un certain nombre d’entre ses soldats lancent une attaque précipitée puis quand les Russes chargeraient, de se laisser mettre en déroute pour les encourager à les poursuivre et les laisser espérer qu’ils pourraient annihiler l’armée Musulmane. Quand les Russes arriveraient au-delà de l’endroit de l’embuscade, alors Marzouban avec ses hommes reviendraient à la charge et crieraient aux embusqués un cri sur lequel ils s’étaient mis d’accord ainsi quand les Russes arriveraient ainsi entre les deux forces, les Musulmans les auraient en leur pouvoir.

Le matin après l’arrangement de ce plan, Marzouban et ses hommes avancèrent et les Russes sortirent à leur rencontre et se rangèrent en ordre de bataille tandis que leur commandant était monté sur un âne. La procédure habituelle se produit et Marzouban avec les Musulmans s’enfuirent poursuivis par les Russes jusqu’à ce qu’ils arrivent au-delà de l’endroit de l’embuscade où ils auraient dû s’arrêter mais les Musulmans poursuivirent leur fuite.

Marzouban raconta ensuite comment, quand il vit ses hommes agir ainsi terrifiés par les Russes et que la lutte était inutile, il pensa que les Russes à leur retour, ne manqueraient pas de remarquer l’embuscade, et qu’ils tenteraient de la détruire. Il rapporta : Je me suis retourné avec mes gardiens personnels, mon frère et mes servants, décidé à mourir martyr. Sur ce, la plupart des Daylamites eurent honte de leurs actions. Nous chargeâmes alors en poussant le cri convenu aux embusqués qui sortirent de derrière les Russes, et luttèrent bravement contre eux. Ils tuèrent sept-cents d’entre eux, dont leur commandant tandis que le reste retourna dans la forteresse dans la ville où ils avaient établi leur quartier, où ils avaient stockés une grande quantité de nourriture, de marchandises et où ils avaient logés leurs captifs et leurs trésors.

Pendant que Marzouban les assiégeait, sans autre plan que les réduire par un siège prolongé, les nouvelles l’atteignirent qu’Abou ‘AbdAllah Houssayn Ibn Sa’id Ibn Hamdan était entré en Azerbaïdjan et atteint Salmas, où il avait uni ses forces à celles de Ja’far Ibn Shakkouyah le Kurde qui était à la tête des hordes Hadayan. Marzouban fut donc contraint de laisser un de ses officiers pour lutter contre les Russes et avec cinq-cents Daylamites, mille-cinq-cents cavaliers kurdes et deux-mille volontaires; il procéda à Auran, où il engagea Abou ‘AbdAllah. Un engagement insignifiant s’ensuivit quand il y eut une lourde chute de neige. Les hommes d’Abou ‘AbdAllah, dont la plupart étaient des Arabes, devinrent désordonnés et l’abandonnèrent. Alors il dut se retirer vers une des villes fortifiées, mais fut intercepté sur son retour par une expédition de son cousin Nassir ad-Dawlah, qui l’informa de la mort de Touzoun à Baghdad, de la désertion de ses troupes et sa détermination de descendre avec eux à Baghdad pour lutter contre Mou’iz ad-Dawlah, qui était entré et avait pris possession de la ville après le départ de Touzoun. Il ordonna donc à Abou ‘AbdAllah d’évacuer l’Azerbaïdjan et de le rejoindre, ce qu’il fit.

 

Les hommes de Marzouban continuèrent à attaquer et assiéger les Russes jusqu’à que ces derniers devinrent las. L’épidémie qui les touchait devint de plus en plus sévère et quand l’un d’eux mourrait, il était enterré avec ses armes, ses vêtements, son équipement, sa famille, ses esclaves et tout ce qui était attaché et telle était leur pratique. Lorsqu’ils furent vaincus, les Musulmans creusèrent leurs tombes sortirent un certain nombre d’épées qui sont très demandées à ce jour pour leur acuité et leurs excellence. Quand le nombre des Russes fut réduit, ils quittèrent de nuit la forteresse dans laquelle ils avaient établi leurs quartiers, emportant avec eux sur leur dos, tous ceux qu’ils purent de leur trésor, de leurs pierres précieuses, d’habits fins et brûlèrent tout le reste. Ils emmenèrent avec eux autant de femmes, de garçons et de filles qui voulurent et se dirigèrent vers le Kour, où les navires dans lesquels ils étaient arrivés de leur pays, les attendaient ainsi que leurs équipages. Ils embarquèrent, partirent et que  Allah Exalté  sauva les Musulmans d’eux.

 

 

Al-Mouttaqi quitta Raqqah pour Baghdad le 4 du mois de Mouharram, 333 de l’Hégire (944). Touzoun sortit à sa rencontre et ils se rencontrèrent entre Anbar et Hit. Touzoun descendit de sa monture, embrassa la terre et al-Mouttaqi lui ordonna de remonter, mais il ne fit pas ainsi et marcha à pied devant lui jusqu’au camp qu’il avait monté pour lui. Quand le calife descendit, Touzoun le saisit ainsi qu’Ibn Mouqlah et ceux qui étaient avec lui. Peu de temps après, il aveugla le calife avec un fer chauffé à blanc, l’emmena à Baghdad avec ses yeux cautérisés et son anneau royal et sceptre lui furent retirés. Touzoun fit alors venir ‘AbdAllah le fils d’al-Mouktafi et lui porta allégeance comme calife et il fut surnommé al-Moustakfi Billah. Alors al-Mouttaqi aveuglé lui porta aussi allégeance et témoigna ainsi de sa propre renonciation le 20 du mois de Mouharram, ou d’après certains autres, de Safar.

Et ceci nous prouvera encore une fois, à quel degré d’instabilité était parvenu l’état abbasside. S’il était permis de faire ainsi au calife, que dire alors du commun des musulmans.

Et l’année ne s’était pas encore écoulée avant que Touzoun mourut à son tour. Quant à al-Mouttaqi, il fut emmené sur une île en face de Sindiyyah, un village situé sur le canal ‘Issa entre Anbar et Baghdad, où il fut emprisonné. Il resta emprisonné vingt-cinq ans jusqu’à sa mort au mois de Sha’ban 357 de l’Hégire (967).

 

Durant le règne d’al-Mouttaqi, vécut Hamdi le voleur à qui, Ibn Shirzad quand il était gouverneur de Baghdad, lui accorda la licence de vol en échange d’un paiement de 25.000 dinars par mois et selon Ibn Athir 15.000 dinars, en échange du silence du préfet de police Abou al-‘Abbas. La terrible précarité qui prévalait alors à Baghdad ainsi que les lourdes et incessantes pluies, avaient dépeuplé à demi la ville. Les maisons privées, les édifices publics, les mosquées, les bains et le palais étaient devenus des ruines et abandonnés par les gens mourant de faim. Hamdi avait l’habitude de tomber à l’improviste sur les maisons des gens avec des flambeaux et des lumières et d’emporter leur propriété. Iskouraj le Daylamite qui tint le poste de préfet de police à Baghdad, l’attrapa et le scia en deux durant l’année 332 (943).

 

 





[1] Le premier des trois jours du pèlerinage, le 8 de Dzoul Hijjah.

[2] Voir Qur’an, Sourate 105.

[3] La Rigole de 90 cm de long était en or.

[4] Qur’an 17 :79.

[5] Un mithqal est le poids d’un dinar.

[6] Déviants.

[7] Kinkiwar était une forteresse près de Jazirat Ibn 'Omar.

[8] De Daylam.

[9] Selon Ibn Khaldoun, le Qarmate porta allégeance au Mahdi 'Oubaydallah jusqu'en 317 de l’Hégire (929), quand Abou Tahir enleva la Pierre Noire. Le Mahdi lui écrivit une lettre si sévère à ce sujet, qu’Abou Tahir renonça à sa fidélité.

[10] Ces descriptions réfèrent à l’époque ou le texte a été écrit.