Des évènements historiques de l’an 629 à l’an 708 de l’Hégire
Les Tatars
achevèrent la conquête de l’Arménie
En l’an 629 de l’Hégire (1232), les Tatars
achevèrent la conquête de l’Arménie, du pays de Khilat et des terres
de Khwarezm. Le calife fut terrifié par leurs avance et envoya
plusieurs messagers dont l’un à al-Malik al-Ashraf pour lui demander
de venir à son secours et les autres aux Arabes et d’autres encore
pour leur demander de l’aide. Il dépensa de grandes sommes d’argent
et il plaça des garnisons dans toutes les villes pour repousser
l’invasion des Tatars.
Au mois de Joumadah Thani, après avoir laissé
son fils al-Malik al-‘Adil Abou-Bakr comme son député, al-Malik
al-Kamil quitta le Caire en compagnie d’as-Salih Ayyoub. Al-Malik
al-Ashraf et al-Malik al-Mou’azzam, le souverain d’al-Jazirah,
partirent en avant avec les troupes tandis qu’al-Kamil se rendit
avec une légère escorte à Shawbak et à Karak d’où, il se rendit à
Damas en compagnie d’an-Nassir-Daoud, le prince de Karak suivit par
son armée.
Al-Kamil resta à Damas puis fit partir l’armée
dont il donna le commandement à son fils al-Malik as-Salih Ayyoub.
Le sultan al-Malik al-Kamil an-Nassir ad-Din
Muhammad fut alors informé que les Tatars étaient entré dans le
territoire de Khilat. Il se hâta alors de se partir en campagne, et
après avoir quitté Damas, il
campa à Salamiyyah ou les troupes s’étaient rassemblées bien
que la ville ne puisse toutes les contenir.
Vers la fin du mois de Ramadan, il quitta la
ville pour se diriger vers le désert de Syrie tandis que les troupes
se dispersèrent sur divers chemins du fait de leur grand nombre et
un grand nombre d’hommes et de bêtes moururent du manque d’eau.
Après avoir assiégés un certain nombre de jour
la ville de Khilat, les Tatars levèrent le siège et se retirèrent.
Al-Kamil fut informé de leur retrait alors qu’il était à Harran
alors il envoya ‘Imad-ad-Din Ibn ash-Sheikh auprès du calife tandis
qu’il partit lui-même pour ar-Rouha (Edesse) et l’armée vers Amid
qu’il rejoignit et prit la ville après l’avoir assiégée le 26 du
mois de Dzoul Hijjah.
La
marche d’al-Malik al-Kamil sur le Sultanat de Roum
En l’an 631 de l’Hégire (1233), le sultan ‘Ala'
ad-Din Kaykoubad Ibn Kaykhousrou as-Salajiki, le souverain du
Sultanat de Roum assiégea la ville de Khilat.
Al-Malik al-Kamil quitta le Caire avec son
armée dans la nuit du samedi 5 du mois de Sha’ban après avoir laissé
son fils al-Malik al-’Adil lieutenant sur la ville. Quand il arriva
à Damas, il écrivit aux princes et ordonna de se préparer avec leurs
armées pour attaquer le pays de Roum.
Au mois de Ramadan, le sultan quitta Damas pour
Salamiyah ou il campa et organisa son armée avant de se rendre à
Manbij. Il fut rejoint par l’armée d’Alep et d’autres troupes puis
se remit en marche vers al-Bira ou il fit son camp qui contenait
seize tentes royales pour les seize souverains qui l’accompagnaient,
ou dix-huit selon d’autres. Il passa alors en revue ses troupes,
régiment par régiment. En voyant ses troupes, il dit : « Jamais
pareille armée ne s’est rassemblée autour d’un souverain de l’Islam.
» Puis, il donna le signal du départ et les divers corps de son
armée se rendirent les uns après les autres vers le Darband.
Le sultan ‘Ala' ad-Din Kaykoubad se hâta de
placer des escadrons sur les routes qui conduisaient dans sa région
pour en interdire l’accès.
Al-Malik al-Kamil campa sur les rives
d’an-Nahr-al-Azrak qui se trouvait à l’entrée du Sultanat de Roum
tandis que les troupes de Kaykoubad campèrent dans l’espace qui se
trouvait entre le fleuve et le Darband ou elles construisirent un
mur à l’entrée du défilé (gorge) du Darband pour empêcher les
troupes d’al-Kamil de pénétrer. Puis, les soldats de Kaykoubad
combattirent les Égyptiens du haut de leurs retranchements et ces
derniers furent dans l’impossibilité de s’emparer du Darband
d’autant plus que les provisions vinrent à manquer dans l’armée
d’al-Malik al-Kamil. Une querelle naquit alors dans leur rang et le
sultan ordonna le retrait.
Au mois de Dzoul Qi’dah de cette même année, le
souverain du Sultanat de Roum s’empara de la citadelle de Khartabirt
et de six autres forteresses.
En l’an 632 de l’Hégire (1234), le sultan du
Sultanat de Roum assiégea et prit ar-Rouha et Harran d’assaut avant
de retourner dans son territoire prit en butin tout l’argent de ces
villes. Quand al-Malik al-Kamil apprit la perte de ces deux places,
il ordonna aux troupes de faire en toute hâte leurs préparatifs de
départ et de marcher vers les Passes.
En l’an 633 de l’Hégire (1235), les Tatars
marchèrent sur Mossoul et ravagèrent le pays.
La prise des Passes de Darband
Le sultan al-Kamil quitta le Caire et se rendit
dans les Passes (provinces orientales) ou il assiégea Édesse qu’il
prit le mercredi 13 du mois de Joumadah Awwal et fit plus de huit
cents prisonniers entre les émirs et les soldats. Puis, il détruisit
la citadelle et marcha sur Harran qu’il assiégea et prit après de
violents combats, le 14 du mois de Rabi’ Thani et fit aussi
prisonniers les troupes du sultan ‘Ala' ad-Din Kaykoubad soit 725
hommes qui pour la plupart moururent sur les routes.
Le sultan al-Kamil marcha ensuite sur
Dounayssir qu’il ruina quand il apprit que les Tatars étaient entrés
dans le Sinjar au nombre de cent escadrons de cinq cents cavaliers.
Le 17 Joumadah Awwal, il prit la citadelle de
Souwaydah par la force des armes qu’il rasa après avoir capturer
toute la garnison. Il conquit ensuite Katina et prit aussi toute la
garnison en captivité, le 19 du mois de Rajab puis, il fit envoyer
en Egypte tous les prisonniers dont leur nombre s’élevait à plus de
trois mille avant de retourner à Damas après avoir donné les
territoires des Passes à son fils al-Malik as-Salih.
Cette année, Dounayssir ainsi qu’un grand
nombre de villes appartenant au prince de Mardin furent détruites.
Lorsqu’al-Kamil rentra à Damas, le souverain du Sultanat de Roum
partit en campagne et assiégea Amid puis ravagea, le cinquième jour
du mois de Dzoul Qi’dah, la ville de Dara.
Cette année aussi, les croisés, qu’Allah les
maudisse, s’emparèrent de la ville de Cordoue en Andalousie.
Cette même année, al-Malik al-Mansour ‘Omar Ibn
‘Ali Ibn Rassoul, le souverain du Yémen, envoya à la Mecque une
armée sous le commandement de Shihab ad-Din Ibn ‘Aydab et lui confia
un trésor de guerre. Les Égyptiens le prirent, le firent prisonnier
et l’envoyèrent enchainé au Caire.
Toujours cette année, une épidémie dévasta
l’Egypte durant trois mois et un nombre considérable de gens
moururent au Caire et à Misr (Foustat). Douze mille morts furent
comptés rien que dans ces villes sans compter les personnes qui
moururent dans les campagnes.
En l’an 634 de l’Hégire (1236), les Tatars
s’emparèrent d’Irbil et tuèrent ou capturèrent toute la population.
Ils massacrèrent tellement de gens que la ville fut remplie de
cadavres puis ils se retirèrent.
Al-Malik as-Salih-Najm ad-Din Ayyoub Ibn
al-Malik al-Kamil, le prince de Hisn Kayfa, envoya un messager à son
père pour lui demander la permission d’engager les Khawarizmi qui
s’étaient révolté contre le sultan du Sultanat de Roum. Le sultan le
lui accorda et as-Salih les prit à son service dans al-Jazirah ce
qui augmenta considérablement ses forces.
Cette année, l’épidémie fut encore plus sévère
que l’année précédente.
Cette même année, al-Malik al-Kamil reçut un
ambassadeur que lui avaient envoyé les ayyoubides de Syrie; ce
personnage apprit au sultan que les princes l’avaient chargé de lui
dire : « Nous avons tous fait alliance ensemble contre loi. Ne sors
pas d’Egypte pour venir en Syrie et jure nous de ne point le faire.
»
L’envoyé du
calife arrive en Egypte
En l’an 635 de l’Hégire (1237), un messager du
calife vint trouver le sultan d’Egypte al-Malik al-Kamil et lui
demanda de lui envoyer une armée parce qu’il avait appris que les
Tatars marchaient sur Baghdad. Al-Malik al-Kamil se leva quand le
messager lui remit la lettre du calife, qu’il plaça sur sa tête,
ainsi que la somme de cent mille dinars égyptiens.
Le sultan ordonna de prendre deux cent mille
dinars du trésor public et d’équiper une armée avec cet argent puis
d’envoyer un détachement dix mille hommes des armées d’Egypte et de
Syrie au secours du calife. Le commandement de cette armée fut
donnée à al-Malik an-Nassir Daoud. Le sultan défendit d’utiliser
l’argent du calife et le lui fit renvoyer. Il chargea les émirs
Rouqn ad-Din al-Hijawi et ‘Imad ad-Din Ibn Moushaq de recruter les
troupes et ordonna à
an-Nassir Daoud de se mettre sous les ordres du calife. Quand
l’armée qui comptait environ trois mille cavaliers fut prête, elle
marcha vers Baghdad.
Cette année, les Tatars attaquèrent Baghdad. Le
calife envoya contre eux une armée et la plupart des Tatars furent
tués tandis que le reste prit la fuite.
La reprise
de Bayt al-Maqdis par al-Malik an-Nassir Daoud
En l’an 637 de l’Hégire (1239), alors que les
princes Ayyoubi étaient en conflit, les croisés bâtirent une
citadelle à Jérusalem dans laquelle ils intégrèrent la tour de Daoud
qui avait été laissé en état quand al-Malik al-Mou’azzam fit raser
les murs de la ville. Quand al-Malik an-Nassir Daoud en fut informé,
il marcha sur Bayt al-Maqdis qu’il pilonna avec ses mangonneaux et
après 21 jours de siège, il prit la ville par la force des armes, le
9 du mois de Joumadah Awwal avec une partie de l’armée égyptienne.
Quant à la tour de Daoud, elle ne fut prise que le 15 de ce même
mois. An-Nassir accorda la sécurité aux habitants mais se saisit de
leurs biens. Puis, il rasa la tour de Daoud, entra dans Jérusalem et
chassa les croisés. Ibn al-Jawzi écrivit ces vers :
« La Mosquée lointaine a cette habitude qui est
devenue connue dans tout l’univers :
Lorsque la mécréance s’établit et la souilla
par sa présence, Allah lui envoya un prince qui la vengea de cet
affront.
Ce fut un Nassir qui la vengea une première
fois et c’est un Nassir qui la vengea une deuxième fois. »
Le dimanche 14 du mois de Rabi’ Awwal eut lieu
un affrontement entre les croisés qui occupait la Palestine et
l’armée égyptienne ou les croisés furent battus. Les Musulmans
capturèrent leur cavalerie, leurs comtes, quatre-vingt cavaliers et
deux cent cinquante fantassins qui furent conduits au Caire. Dans ce
combat, 1 800 croisés furent tués et les Musulmans ne perdirent que
dix hommes.
Des
exactions des Khwarizmi
En l’an 638 de l’Hégire (1240), les Khwarizmi
ravagèrent le pays qui dépend de Qal’at Ja’bar et de Balis et
massacrèrent un grand nombre des habitants. Ceux qui s’échappèrent
se réfugièrent à Alep et Manbij.
Les Khwarizmi se joignirent avec Badr ad-Din
Lou' lou', le prince de Mossoul et leur force combinée s’éleva à
environ douze mille hommes qui marchèrent sur Alep. L’armée d’Alep
sortit à leur rencontre pour les affronter mais elle fut mise en
déroute et perdit un très grand nombre d’hommes. Les Khwarizmi
prirent alors tous les bagages de l’armée. La garnison de la ville
résista à leurs attaques mais tous les territoires furent dévastés.
Les armées coalisées commirent des actes abominables, massacrant ou
réduisant en captivité les habitants tandis que les édifices furent
ruinés. Les habitants de Manbij furent passés par l’épée et un
nombre incalculable de personnes périrent dans la place. La ville
fut pillée, les soldats violèrent les femmes dans la mosquée
‘Alamiyah, les enfants furent massacrés et lorsque tout fut ravagé,
ils se retirèrent. Les Khwarizmi montrèrent ainsi aux gens de quels
genres d’atrocités ils étaient capables.
Lorsqu’al-Mansour, le souverain de Homs apprit
que l’armée d’Alep avait été anéantie par les Khwarizmi, il partit
avec ses troupes pour Alep ou il arriva devant la ville, le samedi
23 du mois de Rabi’ Thani. Le sultan et la population sortirent
d’Alep pour l’accueillir ainsi que les troupes d’Alep qui se
réunirent sous le commandement de ce prince avec l’armée de Damas.
Al-Mansour traversa alors l’Euphrate et marcha sur Sarouj et
ar-Rouha ou il tomba sur les Khwarizmi et les mit en déroute puis,
il s’empara de tous leurs bagages et les força à s’enfuir jusqu’à
‘Ana.
L’alliance
d’al-Malik as-Salih ‘Imad ad-Din avec les croisés
Cette année, al-Malik as-Salih ‘Imad ad-Din
craignant les projets d’al-Malik as-Salih Najm ad-Din Ayyoub, envoya
un messager aux croisés et conclut un traité avec eux pour qu’ils
l’aident à faire la guerre au sultan d’Egypte. Il s’engagea à leur
donner en échange de leurs services, les citadelles de Safad et de
Shaqif avec les régions avoisinantes et partager avec eux Sa’idah,
Tibériade, ainsi que les territoires dépendants, la montagne d’Amila
et d’autres terres.
Le prince de Damas se décida à
attaquer l’Egypte quand il fut informé qu’al-Malik as-Salih
Najm ad-Din avait fait emprisonner des Mamalik, des eunuques, des
officiers de la garde rapprochée, plusieurs émirs et que le reste
des émirs égyptiens craignaient pour leur vie. Il se prépara pour la
guerre et envoya des messagers à al-Malik al-Mansour, le souverain
de Homs, d’Alep et aux croisés pour demander leurs aides. Il permit
aux croisés d’entrer à Damas et d’y acheter des armes ce qu’ils
firent et profitant de cette permission, ils achetèrent une immense
quantité d’armement et d’engins de guerre aux habitants de Damas.
Les Musulmans furent outrés de leur
comportement et allèrent trouver les juristes pour demander leur
avis juridiques (Fatwah). Le Sheikh ‘Izz-ad-Din Ibn ‘Abd as-Salam
déclara alors illicite la vente des armes aux croisés et interdit de
faire le sermon au nom d’al-Malik as-Salih Isma’il dans la grande
mosquée de Damas.
Lorsqu’al-Malik as-Salih Isma’il qui n’était
pas à Damas fut informé, il destitua le Sheikh ‘Abd as-Salam et
ordonna de l’emprisonner ainsi que le Sheikh Abou ‘Amrou Ibn
al-Hajib qui avait aussi critiqué la conduite du sultan, ce qui fut
fait.
Quand al-Malik as-Salih revint à Damas il les
libéra cependant, le Sheikh ‘Abd as-Salam fut mis aux arrêts dans sa
demeure et continua à émettre ses avis juridiques mais sans recevoir
personne. Le Sheikh lui demanda la permission d’assister à la prière
du vendredi, de recevoir son médecin et son barbier quand il aurait
besoin d’eux et de pouvoir se rendre aux bains, ce qui lui fut
accordé. Le souverain de Damas donna alors la charge de Khatib de
Damas qui avait été exercé par Izz ad-Din Ibn ‘Abd-as-Salam à ‘Alam
ad-Din Daoud Ibn ‘Omar Ibn Youssouf Ibn al-Khatib de Bayt al-Abar.
Al-Malik as-Salih quitta Damas avec ses
troupes, l’armée de Homs, d’Alep et d’autres encore puis marcha
jusqu’à ce arrive sur les rives du Nahr al-‘Awjah ou il campa.
Lorsqu’il fut informé qu’al-Malik an-Nassir Daoud campait à
al-Balqah, il marcha aussitôt contre lui, tomba sur son armée qu’il
mit en déroute.
Al-Malik an-Nassir Daoud s’enfuit jusqu’à Karak
tandis qu’al-Malik as-Salih Isma’il mit la main sur ses bagages, fit
prisonniers un grand nombre de ses soldats avant de revenir à
al-‘Awjah tandis que cette victoire renforca son pouvoir dans le
pays.
Al-Malik an-Nassir Daoud envoya un messager aux
croisés pour demander leur aide, leur promettant de leur remettre en
retour tout ce le sultan Salah ad-Din Youssouf leur avait pris.
Puis, il quitta al-‘Awjah et vint camper à Tall al-‘Ajoul où il
resta quelques jours. Voyant alors qu’il ne pourrait pas envahir
l’Egypte, il revint à Damas car lorsqu’al-Malik as-Salih Najm ad-Din
Ayyoub apprit qu’al-Malik as-Salih Isma’il était sorti de Damas pour
attaquer l’Egypte et qu’il avait avec lui une armée de croisés, il
envoya son armée contre le souverain de Damas et quand les deux
armées furent en présence, toutes les troupes syriennes passèrent du
côté égyptien et ensemble se retournèrent et attaquèrent les croisés
qu’ils mirent en fuite prirent un très grand nombre de prisonniers.
C’est pour ces derniers que le sultan fit bâtir la forteresse de
l’île de Rawdah (dans le Nil) et les collèges Salahiyah au Caire.
Toujours cette année, la paix fut conclue entre
les croisés et al-Malik as-Salih qui remit en liberté les comtes,
les chevaliers et les fantassins croisés qui étaient détenus
prisonniers en Egypte.
Durant la nuit du 25 du mois de Mouharram, cinq
personnes descendirent par les fenêtres de Qoubbah az-Zajaj dans le
Mashhad an-Nafissi et volèrent seize chandeliers d’argent qui se
trouvaient sur le tombeau. Ils furent arrêtés dans al-Fayoum et
amené au Caire le 4 du mois de Safar. L’un d’entre eux avoua que
c’était lui qui s’était introduit par les fenêtres et prit les
chandeliers déchargeant ainsi ses complices. Il fut donc pendu le 10
de ce même mois devant le Mashhad et son corps resta si longtemps
pendu au gibet que les os furent dépouillés de leur chair.
Cette année, dans le pays de Roum, un homme
nommé Il-Baba Ibn at-Tourkman se prétendit prophète. Il rassembla
autour de lui des disciples qui osèrent dire « Il n’y a de Dieu
qu’Allah et Il-Baba est l’envoyé d’Allah. » L’armée du sultan du
Sultanat de Roum marcha contre eux et les affronta dans une bataille
ou périrent dans les deux camps, quatre mille hommes dont Il-Baba et
avec sa mort sa rébellion prit fin.
Cette année aussi, un messager des Tatars
envoyé par leur souverain le Khakan arriva à Mayafariqin. Il apporta
des lettres adressées au prince de cette ville et aux souverains de
l’Islam qui commençait ainsi : « De la part du vicaire du maître des
Cieux, celui qui bouleverse la surface de la terre, le souverain de
l’occident et de l’orient, le Kakhan.»
Le messager dit à Shihab-ad-Din, le souverain
de Mayafariqin : « Le Kakhan t’a nommé son Silahdar et t’ordonne de
détruire les murailles de ta ville ». Le prince lui répondit : « Je
ne suis qu’un des princes et ma ville est bien peu de chose comparée
au pays de Roum, de Syrie et d’Egypte. Va trouver les souverains de
ces contrées et j’agirais comme eux. »
En l’an 639 de l’Hégire, les prix augmentèrent
en Egypte et chaque Ardab de blé fut vendu au prix de deux dinars et
demi.
Le dimanche, 29 du mois de Rabi’ Awwal, le
soleil fut entièrement éclipsé, le ciel devint totalement noir et
les étoiles apparurent si bien qu’on fut obligé d’allumer les lampes
en plein jour.
Le Sheikh
‘Izz ad-Din Ibn ‘Abd as-Salam se rend au Caire
Cette même année, le Sheikh ‘Izz ad-Din Ibn
‘Abd as-Salam arriva au Caire après avoir été chassé de Damas par
al-Malik as-Salih Isma’il. Al-Malik as-Salih-Najm ad-Din le reçut
honorablement et lui donna la charge de Khatib de la mosquée de ‘Amr
Ibn al-‘As (qu’Allah soit satisfait de lui) à Misr puis le jour de
‘Arafat, il le nomma Qadi de Misr et du Sud de l’Egypte en
remplacement du Qadi al-Qoudat Sharaf ad-Din Ibn ‘Ayn ad-Dawlah.
Cette année, lorsque Badr ad-Din Lou'lou' fit
la paix avec les Khwarizmi et leur donna la ville de Nissibin, ils
quittèrent Mossoul après qu’al-Malik al-Mouzaffar Ghazi Ibn al-Malik
al-’Adil, le prince de Mayafariqin, fit alliance avec eux. Ils
marchèrent ensuite sur Amid et l’armée d’Alep, sous le commandement
d’al-Malik al-Mou’azzam Fakhr ad-Din Touranshah, le fils du sultan
Salah ad-Din, sortit pour leur livrer bataille et les repoussa de
cette ville. Les Khwarizmi ravagèrent la région de Mayafariqin et
livrèrent plusieurs batailles contre les troupes d’Alep. L’armée
rentra alors à Alep et les Khwarizmi retournèrent piller la province
de Mossoul.
Cette même année, al-Malik al-Mansour, à la
tête d’une armée considérable, arriva du Yémen à la Mecque au mois
de Ramadan. Les Égyptiens qui se trouvaient à la Mecque s’enfuirent
après avoir incendié le palais du gouvernement de cette ville pour
détruire les armements et ce qui s’y trouvaient.
De l’attaque de Naplouse par les
croisés
Le vendredi 4 du mois de Joumadah Awwal de
l’année 640 de l’Hégire (1242), les croisés de ‘Akkah (Acre)
descendirent sur Nablous (Naplouse), ravagèrent le pays et firent
des prisonniers. Ils prirent le Minbar du Khatib et ils se
retirèrent le dimanche suivant après avoir causé des dégâts
considérables.
Les Tatars arrivèrent à Arzan ar-Roum tandis
qu’al-Malik al-Mouzaffar Ghazi combattit les Khwarizmi.
L’émir Iqbal quitta Alep avec l’armée pour
combattre les Khwarizmi avant de revenir.
L’assassinat du calife al-Moustansir Billah
Cette année, le calife al-Moustansir Billah
Abou Ja’far al-Mansour Ibn ath-Thathir Bi-Amrillah Abou Nasr
Muhammad Ibn an-Nassir Li-Dinillah Ahmad al-‘Abbassi, le commandeur
des croyants, mourut à l’aube du vendredi 10 du mois de Joumadah
Thani alors qu’il était âgé de de cinquante et un ans, quatre mois
et sept jours. Son décès fut causé par une piqûre d’une lame
empoisonnée. La durée de son califat fut de dix-sept ans, moins un
mois. Il a aussi été rapporté qu’il mourut le 22 de ce même mois et
que la durée de son règne fut de quinze ans, onze mois et cinq
jours. Ce fut sous son règne que les Tatars lancèrent leur campagne
pour s’emparer de Baghdad. Il fut aussi rapporté que son armée
s’élevait à plus de cent mille hommes. Il fut succédé par son fils,
al-Mousta’sim Billah Abou Ahmad ‘AbdAllah. Les responsables du
gouvernement poussèrent ce dernier à ramasser de l’argent en
diminuant considérablement les effectifs de l’armée, ce qu’il fit.
Le calife fit alors la paix avec les Tatars en leur payant un
immense tribut (Jizyah).
Cette même année, des pèlerins quittèrent
Baghdad pour La Mecque après que le pèlerinage d’Irak fut interrompu
durant sept années.
Les Tatars attaquent le Sultanat de
Roum (Asie Mineure)
En l’an 641 de l’Hégire (1243), les Tatars
attaquèrent l’Asie Mineure et soumirent le sultan Ghiyath ad-Din
dont ils firent leur vassal et l’obligèrent à payer un tribut. Ils
prirent aussi d’assaut les villes de Sivas et de que Qayssariyah et
obligèrent le souverain de cette ville à leur payer tous les ans 400
000 dinars. Ghiyath ad-Din s’enfuit à Constantinople pour leur
échapper et laissa la succession à son fils Rouqn-ad-Din qui était
encore un enfant et qui ne tarda pas à être assassiné.
Les croisés
reprennent Bayt al-Maqdis
Al-Malik an-Nassir Daoud et al-Malik as-Salih
Isma’il envoyèrent des messagers aux croisés pour s’allier avec eux
si ces derniers s’engageaient à les aider et à leur envoyer des
renforts pour lutter contre al-Malik as-Salih Najm ad-Din et en
échange les deux souverains leur remettraient Bayt al-Maqdis,
Tibériade et Ascalon. Lorsque les croisés prirent possession de ses
villes, ils rebâtirent les fortifications et les citadelles,
déposèrent des flacons de vin sur la Roche de la Qoubbah as-Sakhrah
à Jérusalem et accrochèrent des cloches dans al-Masdjid al-Aqsa.
Al-Malik as-Salih quitta alors le Caire et
campa à Birkat al-Joubb ou il resta quelque temps puis, écrivit aux
Khwarizmi pour leur demander de venir en Egypte pour combattre les
Syriens ce qu’ils firent.
En l’an 642 de l’Hégire (1244), arriva à Damas
une lettre de Badr ad-Din Lou'lou', le souverain de Mossoul qui
informait qu’il avait imposé à la population syrienne un impôt
annuel pour subvenir aux frais de guerre contre les Tatars et qui
était fixé à dix dirhems pour les riches, cinq dirhems pour les
moins fortunés et un dirhem pour les pauvres.
De la
reprise de Jérusalem par Houssam ad-Din Barakah Khan et les
Khwarizmi
Cette même année, les Khwarizmi commandés par
leurs émirs Houssam ad-Din Barakah Khan, Khan Birdi, Sarou Khan et
Koushlou Khan franchirent l’Euphrate au nombre de plus de dix mille
combattants.
Une partie de cette armée marcha sur la région
de Baalbek et une autre celle de Ghoulah de Damas qu’elles
ravagèrent et emmenèrent leurs habitants en captivité. Les habitants
s’enfuirent devant eux tandis qu’al-Malik as-Salih Isma’il se
retrancha dans Damas et réunit près de lui ses troupes qui étaient
déjà arrivées de Gaza. Les Khwarizmi donnèrent l’assaut sur
Jérusalem et passèrent par le fil de l’épée tous les croisés qui s’y
trouvaient. Ils massacrèrent les hommes, prirent en captivité les
femmes et les enfants.
Puis, ils marchèrent sur Gaza qu’ils
assiégèrent et au mois de Safar, ils envoyèrent des messagers à
al-Malik as-Salih Najm ad-Din pour l’informer de leur arrivée. Ce
dernier leur ordonna de rester à Gaza, leur promit de leur donner la
Syrie et donna des robes d’honneur aux messagers à qui il remit
d’autres robes d’honneur, de l’argent et des chevaux.
Jamal ad-Din Aqoush an-Najibi et Jamal ad-Din
Ibn Matrouh se rendirent chez les Khwarizmi tandis que le sultan
envoya à Gaza, une armée sous le commandement de l’émir Rouqn ad-Din
Baybars, un de ses plus proches Mamelouk qui était resté avec lui
alors quand il avait été emprisonné à Karak. Des Qaymari (une autre
tribu locale de Turcs) avaient rejoints les Khwarizmi et ensemble
étaient venus des Provinces Orientales.
La bataille
de Gaza
Après ces événements, l’émir Houssam ad-Din
Abou ‘Ali Ibn Muhammad Ibn Abou ‘Ali al-Hadbani partit avec un corps
de troupe pour tenir la garnison de Nablous. Al-Malik as-Salih
Isma’il envoya de Damas une armée sous le commandement d’al-Malik
al-Mansour, le prince de Homs, qui partit sans bagages avec ses
troupes pour Acre ou il demanda aux croisés de se mettre sous son
commandement pour faire la guerre aux armées égyptiennes. Puis, ses
soldats marchèrent sur Gaza où ils furent rejoints par les troupes
envoyés en renforts par al-Malik an-Nassir Daoud, le souverain de
Karak et sous le commandement de Thabit ad-Din Ibn Sounkour
al-Halabi et al-Waziri.
Ces troupes rencontrèrent les Khwarizmi à Gaza
tandis que les croisés levèrent leurs croix au-dessus des têtes des
soldats de Damas et d’al-Malik al-Mansour, le prince de Homs. Les
prêtres se signèrent tandis que devant eux se trouvaient des
récipients de vin dans lesquels les chevaliers se servaient.
Les croisés commandaient l’aile droite et
l’aile gauche tandis que les troupes de Karak se trouvaient au
centre avec al-Malik al-Mansour, le souverain de Homs. Les Khwarizmi
et les Egyptiens avancèrent et un lourd combat eut lieu entre les
deux armées. Al-Malik al-Mansour fut défait, al-Waziri prit la fuite
et Tahir ad-Din Ibn Sounqour al-Halabi fut pris prisonnier. Les
Khwarizmi se jetèrent là où le combat était le plus violent et ils
encerclèrent les croisés qu’ils passèrent par le sabre ou qu’ils
prirent prisonniers. Seuls ceux qui parvinrent à s’enfuir du champ
de bataille échappèrent à la mort. Les Khwarizmi s’emparèrent d’un
immense butin tandis qu’al-Malik al-Mansour retourna à Damas avec
quelques survivants.
Le 15 du mois de Joumadah Awwal, la nouvelle de
la victoire parvint à al-Malik as-Salih Najm ad-Din qui ordonna de
décorer le Caire, Misr et les deux citadelles de la Montagne et
l’île ar-Rawdah. De même, les tambours furent frappés plusieurs
jours successifs à l’occasion de cette victoire. Puis quelques jours
après, les prisonniers croisés arrivèrent avec les têtes de ceux qui
avaient péri dans le combat ainsi que Tahir ad-Din Ibn Sounqour, de
nombreux émirs et éminents personnages. Les croisés montés sur des
chameaux et leurs chefs sur des chevaux traversèrent ainsi la ville
du Caire. Le jour de leur entrée dans la ville fut un jour de fête.
Les têtes furent suspendues aux portes du Caire et les cachots
remplis de prisonniers.
Les Khwarizmi reprennent les villes
côtières de Jérusalem
Les émirs Baybars et Ibn Abou ‘Ali marchèrent
sur ‘Ascalon qu’ils assiégèrent mais comme la ville imprenable
résista Ibn Abou ‘Ali marcha alors sur Naplouse tandis que Rouqn
ad-Din Baybars resta sous les murs d‘Ascalon pour poursuivre le
siège. Les lieutenants d’al-Malik as-Salih Najm ad-Din Ayyoub
s’emparèrent de Gaza, des villes côtières, de Jérusalem, d’Hébron,
de Bayt Jibril et d’al-Aghwar. Karak, al-Balqah, Salt et ‘Ajloun
restèrent cependant aux mains d’al-Malik an-Nassir Daoud.
Mou’in ad-Din al-Hassan Ibn Sheikh al-Masha'ikh
quitta alors le Caire avec ses troupes, la tente royale et les
trésors. Le sultan écrivit aux Khwarizmi de se mettre sous les
ordres de ce dernier qui se rendit avec l’armée du Caire à Gaza. Les
Khwarizmi et l’armée se joignirent à lui et il marcha vers Bayssan
où il resta quelque temps avant de se diriger vers Damas qu’il
assiégea et où s’étaient retranchés al-Malik as-Salih Isma’il et
al-Malik al-Mansour Ibrahim, le souverain de Homs. Les Khwarizmi
ravagèrent alors la région de Damas.
Al-Malik as-Salih Isma’il envoya alors à Mou’in
ad-Din un tapis de prière, un vase et un bâton de pèlerin avec le
message suivant : « Tu ferais mieux de t’occuper à te servir de ces
objets plutôt que de faire la guerre aux rois. » Quand Ibn Sheikh
al-Masha'ikh reçut ces objets, il envoya à al-Malik as-Salih Isma’il
un luth, une flûte et une robe de femme en soie avec le message
suivant : « Si le tapis, le vase et le bâton sont les objets qui me
conviennent alors ce luth, cette flûte et cette robe de femme te
conviennent encore mieux » et il poursuivit le siège de la ville.
Cette même année, arriva une lettre de Badr
ad-Din Lou'lou', le souverain de Mossoul, demandant le tribut qui
avait été fixé pour faire la guerre contre les Tatars. Comme
d’habitude, ce fut le Qadi Mouhyi ad-Din Ibn Zaki ad-Din qui lut
cette lettre.
Cette année aussi, les Tatars s’emparèrent de
Shahrzour.
La
reconstruction des murailles de Bayt al-Maqdis et la reconquête de
Tibériade
En l’an 644 de l’Hégire (1246), le sultan se
rendit à Jérusalem et distribua en aumônes deux mille dinars
égyptiens. Il ordonna de mesurer le mur d’enceinte de Jérusalem ce
qui fut fait et il s’avéra que la muraille avait une circonférence
de six mille coudées Hashimites (un coudée Hashimi est égale à 66,5
cm soit environ 4 km). Le sultan ordonna alors de réparer l’enceinte
avec les revenus de Jérusalem et que si l’argent n’était pas
suffisant, il enverrait du Caire ce dont ils auraient besoin.
Cette même année, l’émir Fakhr ad-Din Ibn
Sheikh al-Masha'ikh, marcha sur Tibériade qu’il assiégea et arracha
aux croisés. Il rasa les citadelles que ces derniers avaient
restaurées, avant de marcher sur ‘Ascalon qu’il assiégea jusqu’à ce
que les croisés en furent chassé puis, il en fit aussi raser les
fortifications de la ville.
Toujours cette année, la discorde s’engouffra
dans les rangs des croisés.
Au mois de Joumadah Thani de l’an 645 de
l’Hégire (1247), le sultan al-Malik as-Salih quitta Damas pour Le
Caire après avoir donné l’assaut sur Ascalon qu’il prit et détruisit
ainsi que de la citadelle de Barzin qui dépend de Hamah, durant le
mois de Ramadan.
En l’an 646 de l’Hégire (1248), les croisés se
mirent en campagne pour conquérir l’Egypte.
Cette année aussi, le minaret oriental de la
grande mosquée de Damas brûla.
Du
débarquement du roi Louis Ibn Louis al-Fransis as-Salibi en Egypte
Au mois de Mouharram de l’année 647 de l’Hégire
(1249), le sultan al-Malik as-Salih Najm ad-Din Ayyoub qui était
malade, quitta Damas dans une litière quand il apprit que les
croisés s’étaient mis en campagne. Il campa donc à Ashmoum Tannah et
fit rassembler dans Damiette une grande quantité de provisions et
d’armements. Il ordonna à l’émir Houssam ad-Din Ibn Abou ‘Ali, son
lieutenant au Caire, d’armer les navires qui se trouvaient dans les
arsenaux de Misr. L’émir s’empressa d’exécuter cet ordre et fit
partir les navires les uns après les autres. Le sultan écrivit
également à l’émir Fakhr ad-Din et lui ordonna de venir camper sur
les rives du canal de Damiette avec les troupes égyptiennes, de
façon à faire face à l’armée croisée quand elle débarquerait. Il se
mit donc en route avec son armée et vint camper sur la rive en face
de Damiette dont il était séparé par le Nil.
Alors qu’il ne restait que neuf jours du mois
de Safar, à la deuxième heure du vendredi la flotte des croisés
arriva d’outre-mer et leur immense armée commandée par le roi Louis
Ibn Louis al-Fransis.
Le roi des croisés envoya au sultan un message
qui débutait par leur paroles de mécréance et qui disait : « Tu n’es
pas sans savoir que je suis le souverain des nations qui suivent la
religion du Christ comme je te reconnais pour être le souverain des
peuples qui suivent la religion de Muhammad. Sache que je ne te
crains pas et les Musulmans qui habitent l’Andalousie nous payent le
tribut et nous offrent des cadeaux. Nous les chassons comme des
troupeaux de bœufs, nous tuons leurs hommes, nous violons leurs
femmes, nous prenons en captivité leurs filles et leurs enfants et
nous désertifions leur pays. Ceci dit, même si tu me jurerais de me
reconnaître comme ton suzerain et que tu te présenterais devant moi
accompagné de prêtres et de moines et que tu tiendrais un cierge à
la main démontrant ton adoration de la croix, je marcherais quand
même contre toi et te combattrais jusqu’aux confins de ton empire.
Je t’ai donc mis en garde et t’informe que l’armée qui est sous mon
commandement est telle qu’elle couvre les montagnes et remplit les
vallées. Le nombre de mes soldats est comparable à celui des
cailloux qui couvrent les routes et que j’ai lancé contre toi avec
des épées qui trancheront le différend entre nous. »
Quand le sultan fut informé de son contenu, il
entra dans une terrible rage et fit répondre au roi par le Qadi Baha
ad-Din Zouhayr Ibn Muhammad : « J’ai reçu ta lettre dans laquelle tu
me menaces du nombre infini de tes troupes et de sa multitude mais
sache que nous sommes les maîtres des épées. Nulle aile de notre
armée n’a jamais été vaincue sans que nous l’ayons remplacée et
personne ne nous a provoqué sans que nous ne l’ayons détruit. Si tes
yeux avaient vu les éclats des lames de nos sabres, l’échelle de nos
destructions, les étendues de nos conquêtes de vos places fortes et
de vos villes en Palestine, s’ils avaient vu les ruines que nous
avons accumulées dans vos pays lointains ou proches, tu te mordrais
les doigts de dépit et de chagrin. Il ne fait aucun doute que si ce
jour est à nous, la fin sera contre toi et verra ta perte et tu
regretteras alors amèrement d’avoir entrepris cette campagne car
ceux qui agissent injustement verront leurs projets se retourner
contre eux. Quand tu auras lu ma lettre, médite donc ces versets : «
L’ordre d’Allah arrive. Ne le
hâtez donc pas. Gloire à lui ! » (Qur’an 16/1)
et : « Et certainement
vous en aurez bientôt des nouvelles ! » (Qur’an 38/88). Sache
que nous nous faisons aveuglement confiance à la parole d’Allah,
Glorifié et Exalté soit-Il dont les paroles sont les plus véridiques
et Qui a dit : « Combien de
fois une troupe peu nombreuse a, par la grâce d’Allah, vaincu une
troupe très nombreuse ! Et Allah est avec les endurants. » Les
sages ont dit que l’agresseur mordra la terre et ton insolence
causera ta perte. Salut ! »