Abou Thabit ‘Amir Ibn ‘AbdAllah Ibn Abou Ya’qoub

 

L’émir des Musulmans ‘Amir, surnommé Abou Thabit, naquit le 1 Rajab de l’année 683. Il fut désigné à Tlemcen al-Jadida, aussitôt après la mort de son grand-père, par une assemblée de croyants auxquels se joignirent, dans la matinée du jeudi 8 du mois de Dzoul Qi’dah les Sheikhs des Bani Marine et des Arabes. Il mourut un an, trois mois et un jour après sa nomination, le dimanche 8 du mois de Safar de l’année 708 de l’Hégire dans la Casbah de Tanger.

Aussitôt qu’on lui porta allégeance, il rassembla les Sheikhs des Banou Marine et des Arabes pour leur demander conseil au sujet de la continuité ou de l’arrêt du siège de Tlemcen et leur avis fut unanime pour le retour. Lorsque tous les préparatifs de départ furent faits, l’émir envoya un ambassadeur à Abou Zayyan Muhammad Ibn ‘Uthman Ibn Yaghmourassan, pour conclure la paix avec lui et lui abandonna toutes les conquêtes de son grand-père Abou Ya’qoub, excepté Tlemcen al-Jadida, qui avait été construite pendant le siège, et à condition qu’il n’y entrerait pas, qu’il n’y changerait absolument rien, qu’il pourvoirait à l’entretien de la mosquée et du palais, et qu’il n’inquiéterait point les habitants qui voudraient y demeurer. Ces conditions acceptées, l’émir rappela toutes ses troupes éparses dans le pays qu’il rendit à leurs habitants.

En même temps, il écrivit à tous les chefs Arabes pour leur annoncer la mort de son grand-père et son avènement, et envoya à Fès son cousin Abou ‘Ali al-Hassan Ibn ‘Amir Ibn ‘AbdAllah Ibn Abou Youssouf à la tête d’une grande armée avec l’ordre de prendre le commandement de la ville, d’ouvrir les portes des prisons, de corriger les vices et de distribuer de l’argent aux nobles et au peuple et tout cela fut fait.

Puis, il fit périr l’émir Abou Yahya, l’oncle de son père et son oncle l’émir Abou Salim Ibn Abou Ya’qoub, et quitta Tlemcen pour le Maghreb avec une innombrable armée, le 1 du mois de Dzoul Hijjah de l’année 706 de l’Hégire (1305).

Ayant appris que le chef des troupes de Marrakech, Youssouf Ibn Muhammad Ibn Abi Ayad s’était déclaré indépendant après avoir tué le gouverneur al-Hajj Mas’oud, il se mit en route pour aller le combattre et se fit devancer par un corps de cinq-mille cavaliers, sous les ordres d’Abou al-Hajjaj Youssouf Ibn ‘Issa al-Hashimi et de Ya’qoub Ibn Aznaj qui rencontrèrent Ibn Abi Ayad sur les rives d’Oumm al-Babiyah et le mirent en déroute et Ayad alla se réfugier dans le Jabal ‘Askourah, chez un Sheikh ‘Askouri qui le trahit et l’enchaîna.

 

L’émir des Musulmans, Abou Thabit, entra à Marrakech le 1 du mois de Sha’ban de l’année 707 de l’Hégire (1307) ou Ibn Ayad enchaîné lui fut présenté et qu’il fit périr sous le bâton et envoya sa tête à Fès, où elle fut exposée. Puis, il fit exécuter ses partisans et ses complices au nombre de plus de six-cents hommes et un nombre égal fut exécuté à Aghmat.

 

Le 15 du même mois, l’émir des Musulmans marcha sur Tamezouart pour attaquer les Saksiwi et la tribu de Raqinah et lorsqu’il arriva à Tamezouart, il établit son camp quand les Saksiwi vinrent lui porter allégeance et lui offrir des présents. Il envoya alors son commandant Ya’qoub Ibn Aznaj avec trois-cents cavaliers pour aller à Hahah détruire les Berbères de Raqinah qui prirent la fuite devant lui dans les pays du Sud tandis qu’Ibn Aznaj revint à Tamezouart rejoindre l’émir.

Abou Thabit retourna alors à Marrakech, où il entra le 1 du mois de Ramadan qu’il quitta le 10 pour Ribat al-Fath. Il passa par le pays des Sanhadja et traversa l’Oued Oumm al-Babiyah dans de grandes barques, au passage de Qitamah.

Dans la province de Tamsna, il fut rejoint, par une troupe d’arabes des Bani Khilouth, des ‘Assami, des Bani Jabbar et Hashim qui vinrent le saluer et se retirer, mais il n’en laissa pas partir un seul et les incorpora dans son armée jusque sous les murs d’Anfa ou il fit jeter en prison soixante de leurs Sheikhs, et en fit crucifier trente autres sur les murs de la ville, pour les punir d’avoir coupé les routes et infesté tout le pays de leur brigandage. Il retourna alors à Ribat al-Fath où il fit crucifier trente bandits arabes sur les murs des deux villes de Ribat et Salé.

 

Le 15 du mois de Shawwal, il quitta la ville pour aller détruire les Bani Riyyah d’Abou Twil, d’al-Jaza'ir et de Fas Azgbar avant de revenir à Fès qu’il quitta de nouveau le 14 du mois de Dzoul Hijjah pour assiéger Ceuta. Il s’arrêta trois jours au Qsar de ‘Abdel Karim ou il réunit les Berbères, les Bani Marine et les Arabes avant de partir en en campagne.

Il prit alors d’assaut la forteresse d’Aloudane et ravagea les terres de Damna, dont il massacra les hommes et cela en châtiment de leur soumission à ‘Uthman Ibn Abou al-‘Oulah auquel ils avaient servi d’éclaireurs dans le pays, à qui ils avaient porté allégeance et assisté, et avec qui, ils étaient entrés dans le Qasr de ‘Abdel Karim et à Assilah qu’ils avaient pillés. L’émir se retira alors à Tanger, où il arriva le 1 du mois de Mouharram de l’année 708 de l’Hégire (1308) d’où il envoya des troupes à Ceuta, et commença la construction de la ville de Tétouan. Il envoya aussi le Faqhi Abou Yahya Ibn Abi as-Sabour auprès à Ibn al-Ahmar, pour lui demander d’évacuer Ceuta et attendit le retour de son envoyé mais la mort vint le surprendre, et il rendit l’âme le dimanche 8 du mois de Safar pour être succédé par son frère Souleyman.

 

 

Abou ar-Rabi Souleyman

 

L’émir des Musulmans Souleyman Ibn ‘AbdAllah Ibn Abou Ya’qoub Ibn Abou Youssouf Ibn ‘Abdel Haqq, surnommé Abou ar-Rabi, devint émir à Tanger, le mardi 9 du mois de Safar de l’année 708 de l’Hégire alors qu’il était âgé de dix-neuf ans et neuf mois.

Il fit arrêter son oncle ‘Ali plus connu sous le nom d’Ibn Bazijah, qui s’était auto-désigné pour la succession et un grand nombre de croyants lui avait déjà porté allégeance. Il rappela auprès de lui l’armée de Tétouan et après avoir distribué de l’argent aux Bani Marine, aux Arabes, aux Andalous, aux étrangers et aux Chrétiens, il partit pour Fès.

Sitôt après son départ, Ibn Abi al-‘Oulah sortit de Ceuta accompagné de ses enfants et de ses frères avec une troupe nombreuse pour attaquer le camp durant la nuit mais l’émir des Musulmans, prévenu à temps, leva les tentes à minuit et se porta lui-même au-devant d’Abi al-‘Oulah, auquel il livra bataille et ce dernier fut tué et tous ses soldats furent massacrés ou fait prisonniers.

 

L’émir des Musulmans arriva à Fès au mois de Rabi’ Awwal de cette même année où il distribua de l’argent autour de lui, tranquillisa le pays, et organisa son gouvernement. Les rois lui adressèrent leur soumission, et il renouvela le traité de paix avec l’émir de Tlemcen.

 

Le 30 du mois de Dzoul Qi’dah, l’émir fit exécuter son secrétaire le Faqhi Abou Muhammad ‘AbdAllah Ibn Abi Madiyan, dont les fonctions durèrent neuf mois et vingt et un jours.

 

Dans les premiers jours de Dzoul Hijjah, l’émir expédia son commandant Tashfine Ibn Ya’qoub al-Watassi, à la tête d’une superbe armée des Banou Marine pour assiéger Ceuta. Tashfine Ibn Ya’qoub donna l’assaut le lundi 10 du mois de Safar de l’année 709 (1309), aidés par les Sheikhs et les habitants de la ville qui ne voulaient plus du gouvernement andalous. Il fit part aussitôt de la victoire à l’émir des Musulmans, en lui envoyant les Sheikhs de Ceuta tandis qu’il fit jeter en prison Abou ‘Ali ‘Omar Ibn Rahou Ibn ‘Abdel Haqq qui avait dirigé les combats.

Au mois de Joumadah Awwal, il fit la paix avec Ibn al-Ahmar, à condition que ce dernier lui remettre Algésiras, Ronda et leurs dépendances. De plus, il lui demanda sa sœur en mariage, et Ibn al-Ahmar ayant consenti à tout, lui envoya de fortes sommes d’argent et des chevaux pour combattre dans la voie d’Allah à Lui les Louanges et la Gloire.

 

Au mois de Joumadah Awwal de l’an 710 de l’Hégire (1310), le ministre AbderRahmane Ibn Ya’qoub al-Watassi et le chef chrétien Gonçalvès (ghanssalou), s’enfuirent à Ribat après avoir comploté avec un groupe des Bani Marine pour détrôner l’émir Souleyman en faveur de ‘Abdel Haqq Ibn ‘Uthman Ibn Muhammad Ibn ‘Abdel Haqq. Quand ils furent près de Ribat, ils mandèrent ‘Abdel Haqq, qui vint à eux, et le proclamèrent émir des Musulmans et celui-ci commença aussitôt à rassembler des troupes et envoya des courriers aux principaux Bani Marine et aux Sheikhs arabes, pour leur demander de le reconnaître comme souverain. Quand l’émir des Musulmans, Souleyman, apprit cela, il marcha sur Ribat en envoyant en avant une nombreuse troupe des Bani Marine sous le commandement de Youssouf Ibn ‘Issa al-Hashimi et de ‘Omar Ibn Moussa al-Faddoudi.

Les rebelles, à la nouvelle de son approche à laquelle ils ne s’attendaient pas du tout, réalisèrent leur vain complot et la nuit venue s’enfuirent de Ribat à Tlemcen, d’où ils passèrent en Andalousie.

L’émir des Musulmans, Souleyman, entra à Ribat et fit exécuter les principaux personnages qui avaient proclamé ‘Abdel Haqq et s’étaient soumis à son gouvernement. C’est là qu’il tomba malade et qu’il mourut, le mardi soir 30 du mois de Joumadah entre les deux prières de Maghrib et de ‘Isha.

Son règne dura deux ans et cinq mois, durant lesquels il y eut constamment de mauvaise récolte et la disette. Les propriétés augmentèrent tellement qu’on ne pouvait plus bâtir une maison pour moins de 1000 dinars d’or. On faisait un grand commerce de bêtes de somme, d’étoffes et de bijouterie, et c’est à cette époque que l’on commença à faire usage des carreaux vernis, du marbre et des sculptures dans les constructions.

 

 

Abou Sa’id ‘AbdAllah ‘Uthman, Ibn Abou Youssouf Ibn ‘Abdel Haqq

 

‘AbdAllah ‘Uthman, l’émir des Musulmans, Ibn Abou Youssouf Ibn ‘Abdel Haqq fut surnommé Abou Sa’id et aussi as-Sa’id bi-Fadlillah naquit le vendredi 29 Joumadah Thani de l’an 675 de l’Hégire (1276). C’était un homme avenant, pieux, craignant le Très-Haut, miséricordieux, doux et modeste, digne et intelligent.

Il fut nommé dans la nuit du mercredi 20 Joumadah Thani de l’année 710 de l’Hégire (1310), dans la Casbah de Ribat et tous les ministres, les secrétaires, les Sheikhs et les personnages de la cour lui portèrent allégeance cette nuit au cours de laquelle, il envoya des courriers dans toutes les directions pour porter les nouvelles de la mort de Souleyman et de son avènement. Il envoya aussi son fils, l’émir Abou al-Hassan ‘Ali à Fès où il entra à l’heure de ‘Asr du mercredi 1 du mois de Rajab.

Il descendit à la ville nouvelle, siège de leur gouvernement et demeure de leurs rois, dont il prit le commandement et qu’il organisa. Il s’assura du palais, des trésors et des dépôts d’armes et de munitions. Il ordonna de battre le tambour et de faire des réjouissances publiques.

Le mercredi matin, 1 Rajab, l’émir des Musulmans sortit de la ville en grande pompe et tous les Bani Marine, les Arabes, les Andalous, les étrangers, les chefs, les Chrétiens, les Fouqaha, al-Qoudat, les pieux et les Sheikhs de la ville lui portèrent allégeance. Son élection fut unanime et sortit spontanément de tous les cœurs. Et cela parce qu’Allah Exalté avait réuni en lui toutes les qualités et toutes les vertus, sans lesquelles il n’aurait pas pu soutenir un empire.

 

Lorsqu’il se fut assuré les rênes du gouvernement, il distribua des sommes d’argents aux Bani Marine, aux Arabes et aux troupes, fixa des salaires pour les Fouqaha et pour les savants et fit des largesses aux personnages âgées de sa cour. Il organisa lui-même les affaires de son pays et de ses sujets, corrigea les injustices, diminua les impôts et fit ouvrir les portes des prisons, à l’exception de celles qui renfermaient les criminels, les assassins et les personnes arrêtées par application de la Shari’ah. Il fit distribuer des aumônes aux nécessiteux et aux pauvres dans la gêne et supprima l’impôt annuel des habitants de Fès. Les affaires des croyants s’améliorèrent, la prospérité s’accrut et s’affermit constamment sous son règne, qui fit le bonheur de ses sujets par la grâce d’Allah le Très Haut.

Roi de l’époque, il gouverna les riches et les pauvres, les puissants et les faibles, il protégea l’opprimé et ouvrit sa porte aux malheureux. Tant de justice et d’impartialité n’étaient point connues avant lui et l’abondance et la sécurité régnèrent.

 

Dans les derniers jours du mois de Rajab, l’émir des Musulmans, Abou Sa’id, quitta Ribat et se rendit à Fès, où il reçut les députations des habitants, des Fouqaha, des Qoudat (juges) et des Shouyoukh, qui s’empressèrent de venir le saluer et le féliciter sur son avènement au pouvoir. Il célébra la fête de la rupture du jeûne dans cette capitale, et partit au mois de Dzoul Qi'dah pour Ribat al-Fath inspecter les affaires de ses sujets, s’informer de celles de l’Andalousie, et faire construire des navires pour chasser les ennemis. Il arriva dans ce port où il célébra la fête du sacrifice, mit de l’ordre aux affaires, expédia plusieurs navires et revint à Fès.

 

En l’an 711 de l’Hégire (1311), il donna à son frère, l’émir Abou al-Baqa ‘Iyash, le gouvernement d’Algésiras, Ronda et de leurs dépendances en Andalousie, et il ordonna de nouveaux armements à l’arsenal de Salé pour faire la guerre aux ennemis d’Allah.

 

Cette année-là, il y eut une grande sécheresse et les croyants se réunirent auprès de lui et ensemble, Ils sortirent pour demander la pluie au Très-Haut et il se rendit à la mosquée accompagné des docteurs, des savants et des lecteurs qui chantaient des louanges et des supplications à Allah Exalté, à Lui les Louanges et la Gloire, marchant lui-même à pied pour s’humilier devant la majesté d’Allah Très Haut. Un grand nombre de pauvres suivaient le cortège et l’émir des Musulmans fit d’abondantes aumônes. Cette procession eut lieu le mardi 24 du mois de Sha’ban.

Le mardi 27, l’émir sortit de nouveau avec toutes ses troupes et Allah Exalté exauça sa prière et combla ses vœux par une pluie abondante. L’émir ne revint que lorsque tout le pays fut suffisamment arrosé.

 

En l’an 713 de l’Hégire (1313), Ibn Hannou al-‘Askouri se révolta dans le pays de ‘Askourah, et l’émir des Musulmans marcha contre lui et attaqua sa forteresse, qu’il prit avec l’aide d’Allah. Puis, il pénétra dans le pays du rebelle, s’empara de ses biens, et, l’ayant, enchaîné, il le fit marcher devant lui, captif et humilié, jusqu’à Fès, où il le jeta en prison.

 

Au mois de Dzoul Hijjah de l’année 714 de l’Hégire (1314), l’émir des Musulmans, Abou Sa’id, donna à son fils, le distingué, l’émir Abou ‘Ali ‘Omar, le commandement des pays occidentaux de Sijilmasa et du Dar’a jusqu’au Sahara, avec des pouvoirs absolus. En cette même année, il confia le gouvernement de Ceuta et le commandement de la flotte au commandant Yahya Ibn al-Faqhi Abi Talib al-‘Azfi.

 

En l’an 715 de l’Hégire (1315), il donna ordre de bâtir la porte située devant le pont de la ville nouvelle de Fès et ses murs d’enceinte avant d’aller à Marrakech pour mettre de l’ordre aux affaires avant de revenir à Fès.

 

En l’an 716 de l’Hégire (1316), Yahya Ibn al-Faqhi traversa à Gibraltar, qu’il prit après un siège de quelques jours. Peu après, il détruisit dans le détroit la flotte croisée, dont il tua le chef, Jarnak, fléau dont les Musulmans furent ainsi délivrés par la grâce d’Allah.

Au mois de Shawwal, ce Yahya se révolta à Ceuta et refusa de répondre à l’appel de l’émir, qui envoya son ministre Abou Salim Ibrahim Ibn ‘Issa al-Irnani, l’assiégé avec son armée pendant quelque temps.

 

En l’an 719 de l’Hégire (1319), l’émir des Musulmans sortit de Fès pour Tanger, où il alla examiner la situation des affaires de Ceuta et de l’Andalousie puis, il ordonna de bâtir des puits près de l’Oued Hassan, près du cimetière des Aghzaz, et revint à Fès.

 

Au mois de Sha’ban de l’an 720 de l’Hégire (1320), il partit pour Marrakech et y resta tout le temps nécessaire pour mettre de l’ordre aux affaires de son gouvernement et à celles de ses sujets. Il restaura aussi la ville dont il donna le commandement à Jandoum Ibn ‘Uthman avant de revenir à Fès vers la fin de l’année.

 

En l’an 721 de l’Hégire (1821), il fit fortifier Tawrirt et y plaça une garnison de cavaliers, de fantassins et d’archers. Et cette même année, il fit bâtir les murs d’enceinte d’Agarsif.

 

En l’an 723 de l’hégire (1323), il y eut une grande sécheresse au Maghreb. Les croyants firent des prières, et l’émir sortit conformément à la Sounnah pour demander la pluie et faire des sacrifices.

 

En l’an 724 de l’Hégire (1324), le Maghreb fut affligé par la famine. Les denrées devinrent partout rares et chères, les herbages disparurent entièrement, et cette situation dura depuis le commencement de l’année 724 jusqu’au mois de Joumadah Awwal de l’année 725 de l’Hégire, où Allah, à Lui les Louanges et la Gloire, donna la pluie à Ses créatures, qu’Il combla des bienfaits de Sa miséricorde.

Durant cette désastreuse famine, l’émir des Musulmans fit plus de bien qu’on ne saurait le décrire et fit tout son possible pour combler les soins des nécessiteux et des pauvres.

 

Ici finit le livre « kitab al-anis al-moutrib bi-rawd al-qirtas fi akhbar moulouk al-maghrib wa tarikh madinat fas » de ‘Ali Ibn ʻAbdAllah Ibn Abi Zar’ al-Fassi.

 

 

Les successeurs d’Abou Ya’qoub Youssouf

 

Avec la mort d’Abou Ya’qoub Youssouf en l’an 706 de l’Hégire (1307), un état d’anarchie régna au Maroc. Abou Ya’qoub Youssouf fut succédé par Abou Thabit ‘Amir, mais son règne ne dépassa pas au-delà d’une année. Abou Rabah Souleyman, qui suivit quant à lui régna deux ans seulement. Abou Sa’id ‘Uthman régnera sans éclat vingt et une années, et la stabilité du règne des Banou Marine ne fit restitué que sous le règne d’Abou al-Hassan qui prit la succession en l’an 731 de l’Hégire (1331).

 

 

Abou al-Hassan

 

Abou al-Hassan était ambitieux et voulut établir un empire dans le Maghreb sous l’hégémonie des Banou Marine. Il se maria avec une sœur du souverain Abou Bakr des Banou Hafs et cela lui fournit l’occasion de se mêler des affaires du Banou Hafs de Tunisie.

 

En l’an 733 de l’Hégire (1333), Abou al-Hassan reprit Gibraltar au roi croisé de Castille avant d’attaquer l’Algérie et de capturer Tlemcen, la capitale de l’Algérie, en l’an 737 de l’Hégire (1337).

 

En l’an 739 de l’Hégire (1339), il ordonna une autre attaque sur l’Espagne et envoya une grande force commandée par son fils qui fut tué lors d’une attaque irréfléchie sur Jerez.

 

En l’an 740 de l’Hégire (1340), il traversa à son tour à la tête d’une force en Andalousie mais fut vaincu par les forces de Castille sur la rive du fleuve Salado.

 

En l’an 744 de l’Hégire (1344), il subit un nouveau revers en Andalousie et perdit Algesiras. Après avoir failli ses campagnes en Andalousie, Abou al-Hassan projeta de conquérir l’Afrique du Nord et quand Abou Bakr, le souverain des Banou Hafs de Tunisie décéda en l’an 746 de l’Hégire (1346), il profita de cette occasion pour revendiquer le trône de la Tunisie du fait de sa proximité avec le dernier Sultan des Banou Hafs. Abou al-Hassan envahit donc la Tunisie en l’an 747 de l’hégire (1347) et prit Tunis. Avec la conquête de la Tunisie, le rêve d’unir le Maghreb sous la bannière politique des Banou Marine devint une réalité.

Mais le triomphe d’Abou al-Hassan fut de courte durée et ses problèmes commencèrent peu après son occupation de la Tunisie. En substituant le gouvernement direct à celui du système des tribus soumises au souverain, Abou al-Hassan déposséda les chefs arabes en Tunisie de leurs privilèges féodaux et ces derniers se révoltèrent.

Abou al-Hassan emprisonna plusieurs d’entre eux en l’an 749 de l’Hégire (1348) et de ce fait, les tribus arabes se révoltèrent à leur tour et choisirent pour chef un prince Mouwahhidi du nom d’Abou Dabbous Ahmad. Abou al-Hassan attaqua les rebelles près de Kairouan, mais fut défait et dut s’enfermer dans la ville.

La défaite de Kairouan engendrèrent des révoltes à l’ouest et Abou Bakr le fils de Fazalah qu’Abou al-Hassan avait nommé le gouverneur de Bône renia son allégeance à Abou al-Hassan suivit par le souverain de Bejaïa puis celui de Constantine et enfin c’est toutes les tribus berbères d’Algérie qui rejoignirent la rébellion.

La plus sérieuse de toutes ces révoltes fut celle d’Abou ‘Inan le propre fils Abou d’al-Hassan, qui avait été nommé gouverneur de Tlemcen et au mois de Rabi’ Thani de l’année 749 de l’Hégire (1348). Abou ‘Inan se déclara souverain et prit tout le Maroc.

Fazal Ibn Abou Bakr avec l’aide des tribus arabes se rendit maître d’une grande partie de la Tunisie et l’empire qu’Abou al-Hassan avait construit se désintégra et Abou al-Hassan lui-même fut réduit au statut d’un roi sans pays.

 

En l’an 750 de l’Hégire (1349), Abou al-Hassan quitta Kairouan pour l’ouest et se rendit en Algérie où il fut rejoint par son autre fils Nassir, le gouverneur de Biskra. Après avoir rassemblé une petite force, Abou al-Hassan et Nassir marchèrent sur Tlemcen qui entre temps était retournée aux mains des Banou Zayyan. Dans la confrontation qui s’ensuivit Abou al-Hassan fut vaincu et son fils Nassir tué. Abou al-Hassan s’enfui d’abord vers le sud à Sijilmasa poursuivit par Abou ‘Inan puis à Marrakech, Abou ‘Inan toujours à sa poursuite et Abou al-Hassan fut vaincu hors de Marrakech. Abou al-Hassan s’enfuit de nouveau et se réfugia avec la tribu Hintatah dans le Haut Atlas mais l’infatigable Abou ‘Inan continua sa chasse et Abou al-Hassan fut forcé d’abdiquer officiellement en faveur d’Abou ‘Inan.

 

Abou al-Hassan mourut peu après en l’an 752 de l’Hégire (1351) après un règne instable de vingt années.

 

 

Abou ‘Inan

 

Au pouvoir, Abou ‘Inan attaqua les Banou Zayyan qu’il vainquit dans la plaine de Wanjad au nord de Oujda. Le sultan Abou Sa’id ‘Uthman des Bani Zayyan fut pris captif et exécuté ainsi les Banou Marine reprirent Tlemcen avant de prendre Bejaïa en l’an 754 de l’Hégire (1353) et Constantine en l’an 757 de l’Hégire (1356).

 

En l’an 758 de l’Hégire (1357) Abou ‘Inan envahit la Tunisie tandis qu’Abou Ishaq, le souverain des Banou Hafs, s’enfuit à al-Mahdiyah. Abou ‘Inan ne put tenir longtemps la Tunisie car il fut forcé par ses propres troupes à évacuer la Tunisie car ces dernières voulaient revenir au Maroc.

 

Abou al-Fazal, un frère d’Abou ‘Inan, se révolta à Souss mais sa rébellion fut écrasée et Abou al-Fazal tué et en l’an 759 de l’Hégire (1358), Abou ‘Inan fut étranglé par son ministre al-Foudoudi.

 

 

Les successeurs d’Abou ‘Inan

 

Après la mort d’Abou ‘Inan, la dynastie des Banou Marine sombra dans le chaos. Quand tous les pouvoirs passèrent aux mains des ministres, ces derniers devinrent fabricants de roi. Et durant les huit années suivantes quatre souverains se partagèrent le pouvoir :

1 - Abou Bakr Sa’id de l’an 759 à 760 de l’Hégire (1358-1359).

2 - Abou Salim Ibrahim de l’an 761 à 762 de l’Hégire (1359-1361).

3 - Abou ‘Omar en l’an 762 de l’Hégire (1361) et,

4 - Abou Zayyan de l’an 762 à 767 de l’Hégire (1361-1366).

Abou Zayyan fut tué par son ministre ‘Omar Ibn ‘AbdAllah al-Yabani quand le Sultan voulu le désister.

 

 

Abou Faris ‘Abdel ‘Aziz

 

Quand Abou Faris ‘Abdel ‘Aziz fut nommé émir des Banou Marine en l’an 767 de l’Hégire (1366) par le ministre assassin ‘Omar Ibn ‘AbdAllah Yabani, l’administration de l’état retrouva un peu de stabilité et lorsque Abou Faris eut consolidé sa position il tua le ministre et reprit le pouvoir en main. Sous le régime du précédent souverain,  Marrakech était devenu indépendant sous Abou Fadl un prince des Banou Marine.

 

En l’an 769 de l’Hégire (1368) ‘Abdel ‘Aziz marcha sur Marrakech qui revint dans le giron du gouvernement de Fès. Muhammad V, le gouverneur de Grenade pressa Abou Faris d’extrader Ibn al-Khatib, le ministre de Muhammad V de Grenade qui avait trouvé refuge au Maroc mais Abou Faris refusa sa demande et cette affaire envenima les relations entre les deux pays. Abou Faris ‘Abdel ‘Aziz décéda en l’an 774 de l’Hégire (1372).

 

 

Les successeurs d’Abou Faris ‘Abdel ‘Aziz

 

Après la mort d’Abou Faris ‘Abdel ‘Aziz, l’anarchie revint dans les affaires du Maroc. Abou Faris ‘Abdel ‘Aziz fut succédé par Abou Muhammad. Muhammad V de Grenade prit  Gibraltar au Banou Marine en l’an 776 de l’Hégire (1374) et demanda de nouveau à l’émir des Banou Marine l’extradition d’Ibn al-Khatib ainsi que la ville de Ceuta mais l’émir des Banou Marine rejeta ses deux demandes. Sur ce, Muhammad V libéra deux princes des Banou Marine qu’il avait sous sa garde, Abou al-‘Abbas Ahmad et ‘AbderRahmane et les envoya au Maroc pour lever la rébellion.

Les rebelles assiégèrent Fès et Abou Muhammad fut trahi par son ministre qui permis à Abou al-’Abbas de capturer le pouvoir à Fès. L’autre prétendant, ‘AbderRahmane captura Marrakech et annonça son indépendance tandis qu’Abou al-’Abbas donna suite au deux demandes de Muhammad V. Il abandonna Ceuta au Banou Nasr et fit exécuter Ibn al Khatib.

 

Abou al-’Abbas gouverna de l’an 776 à 786 de l’Hégire (1374 à 1384) avant d’être renversé par al-Moustansir. Al-Moustansir régna deux ans avant d’être succédé par Muhammad mais son règne ne dépassa guère une année. Abou al-’Abbas revint sur le trône en l’an 789 de l’Hégire (1387) et régna six ans avant de mourir en l’an 795 de l’Hégire (1393). Abou Faris II qui devint le nouvel émir des Banou Marine gouverna quant à lui de l’année 795 à 800 de l’Hégire (1393 à 1398).

 

 

Abou Sa’id ‘Uthman

 

Après le décès d’Abou Faris, son fils Abou Sa’id ‘Uthman lui succéda et il régna difficilement durant vingt-deux années durant lesquelles la dynastie des Marine Banou entama sa phase finale tandis que le Maroc tomba victime de l’occupation étrangère.

 

À l’aube du neuvième siècle de l’Hégire (quinzième siècle), les croisés d’Espagne non seulement insatisfait d’avoir expulsé les Musulmans d’Espagne, occupèrent aussi les terres musulmanes de l’autre côté de la Méditerranée.

 

Le Portugal entreprit aussi des expéditions contre la côte Atlantique du Maroc et prit les villes d’Agadir en l’an 806 de l’Hégire (1404), Safi en l’an 811 de l’Hégire (1408) et Azemmour en l’an 816 de l’hégire (1413).

 

En l’an 818 de l’Hégire (1415), ils prirent aussi le port de Ceuta sur la Côte méditerranéenne. S’alliant avec les Banou Nasr de Grenade, Abou Sa’id ‘Uthman fit une tentative sans succès de chasser les Portugais de Ceuta.

Avec l’occupation de ses ports par le Portugal, le Maroc fut privé d’accès à la mer et par conséquence perdit son commerce maritime, qui affecta son économie. À cause de son échec de chasser les Portugais du Maroc, l’émir des Banou Marine devint impopulaire et le prestige du Maroc au niveau international tomba. Le mécontentement général de nouveau souverain des Marine Banou culmina avec l’assassinat d’Abou Sa’id ‘Uthman en l’an 823 de l’Hégire (1420).

 

 

‘Abdel Haqq Ibn Abou Sa’id ‘Uthman et la chute des Bani Marine

 

 

Sa’id d’Abou ‘Uthman fut succédé par son fils ‘Abdel Haqq qui était encore un bébé alors âgé d’un an. Le pouvoir fut saisit par le régent Abou Zakariyyah Yahya, le gouverneur de Sala de la tribu des Banou Wattis, des cousins des Banou Marine.

 

Ainsi après l’année 823 de l’Hégire (1420) alors que l’autorité officielle était toujours aux mains des Banou Marine, le véritable pouvoir était exercé par les Banou Wattis comme Wizarah (ministres).

Abou Zakariyyah Yahya s’avéra être aussi bon commandant qu’administrateur. À ce stade, deux prétendants apparurent au Maroc et réclamèrent le trône. L’un d’entre eux était soutenu par l’Algérie tandis que l’autre celui de Grenade mais Abou Zakariyyah Yahya vaincu les prétendants.

 

Par la suite, Abou Zakariyyah Yahya entreprit des campagnes contre les Portugais et en l’an 841 de l’Hégire (1437) il chassa les Portugais de Tanger mais ne put les chasser de Ceuta. Entre temps ‘Abdel Haqq avait grandi mais Abou Zakariyyah Yahya ne lui permis pas d’exercer l’autorité qu’il continua à exercer lui-même, bien que la période de régence soit finie.

Abou Zakariyyah Yahya fut tué en l’an 852 de l’Hégire (1448) en luttant contre certaines tribus et fut succédé par un autre ministre, ‘Ali Ibn Youssouf, un émir des Banou Wattis. ‘Ali ne vécut pas longtemps et décéda en l’an 861 de l’Hégire (1457). Il fut succédé par Yahya, un fils du défunt régent Abou Zakariyyah, qui était un orgueilleux despote. Il entra en conflit avec le Qadi de Fès qu’il fit exécuter et cela le rendit impopulaire dans les cercles religieux.

 

‘Abdel Haqq profita de cette occasion et fit assassiner Yahya mais ne put régner plus de soixante-dix jours et lorsqu’il assura l’autorité lui-même, il débuta son règne en massacrant les notables des Banou Wattis ce qui lui valut la déloyauté de ces sujets.

 

Profitant de cette situation dans la cour du Maroc, les Portugais occupèrent Qasr al-Kabir entre Ceuta et Tanger en l’an 862 de l’Hégire (1458). ‘Abdel Haqq ne put marquer aucun succès contre les Portugais et il devint rapidement impopulaire et l’état en faillite financière, il dut emprunter de l’argent aux Juifs de Fès et nomma l’un d’entre eux son ministre des finances.

Sous les mesures financières introduites par le Juif Haroun, les soufis et les Sheikhs qui avaient été exempts jusqu’ici durent payer pour la première fois des taxes et les cercles religieux furent forcés de se rebeller contre ‘Abdel Haqq.

Le Sheikh de la mosquée de Kairouan, la principale autorité religieuse en Afrique du Nord à cette époque, émit un arrêté juridique, une Fatwa, qui soutenait la révolte et ‘Abdel Haqq, incapable de la réprimer, tomba entre les mains des rebelles et fut décapité en l’an 869 de l’Hégire (1465). Et avec sa mort, prit fin la dynastie des Banou Marine dont le règne dura environ deux-cents ans de l’an 667 à 869 de l’Hégire (1269 à 1465).