Les procédures secrètes du procès de Benghazi, le 15 septembre 1931

 

Tribunal spécial de Benghazi.

Interrogatoire du prisonnier

 

Le quinzième jour du mois de septembre de l’année mille-neuf-cent-trente et un à Benghazi dans le bureau d’enquête de la prison régionale.

Devant nous, le Dr Giuseppe G. Franceschino, l’enquêteur, avec le procureur général en la personne de l’avocat militaire cav. off. Giuseppe Bedendo, le juge investigateur, assisté par le sous-employé de bureau mentionné, parut le détenu

OMAR EL MUCTAR

Qui a été questionné quant à ses détails personnels par l’interprète M. Giovanni Valenza.

Il a répondu : Mon nom est Omar El Muctar, le fils d’Aescia ben Mahareb, 73 ans. Né à Defna, kabyla Menefa, ailet Brahidan, beit Farhat, marié avec enfants, lettré, aucun casier judiciaire, chef du zavia Senussi à Gsur.

Notifié des délits d’accusation, il a répondu : je prends note des procédures prises contre moi avec le mandat de capture pour les délits selon l’art. 284-285 du code pénal.

Accusé : Je ne me suis jamais soumis au gouvernement italien, j’avais seulement des conversations avec lui. Si Hassen Rida m’avait soutenu dans mes demandes, j’aurais été avec le gouvernement.

Accusé : Il y avait deux chefs : après la dissolution du « dor » de Hassen j’étais le seul qui restait. Les rebelles m’ont obéi aveuglément et toutes les mesures prises par eux ont été ordonnées par moi.

Accusé de torturer nos prisonniers, il a répondu : « La guerre est la guerre ».

Accusé : Je n’ai jamais donné des ordres pour la mutilation des prisonniers : je les voyais toujours mort sur le champ de bataille et je n’ai jamais vu leurs corps outragés.

Accusé : Je ne suis pas celui qui a donné l’ordre de reprendre les hostilités après le pacte avec le régime, parce que j’étais loin. À mon opinion c’est les Italiens qui ont repris les hostilités en mettant Saleh El Auami en prison et en ouvrant le feu sur nos hommes à Zuetina, qui sur l’ordre d’Idris étaient allés chercher des provisions.

Accusé : De mon point de vue aussi, le fait de rompre les négociations fut la faute du gouvernement italien qui m’a fait rompre avec Hassen, qui est alors allé à Benghazi : j’ai écrit aussi à Marshal Badogbo et n’ayant reçu aucune réponse, je suis parti et repris la guérilla.

Accusé : J’étais présent dans un certain nombre de batailles sans pouvoir les spécifier.

Accusé : Les gens des villes m’ont détesté parce que je leur ai apporté une mauvaise conscience et je les ai détestés en échange parce qu’ils ne m’ont pas aidé pour la cause de leur religion, pour laquelle j’ai lutté seul.

Accusé : Je n’ai pas donné l’ordre de tuer le directeur Gubba : les Mohafdia, conduit par la faim, pillèrent et assassinèrent avec et sans mes ordres.

Accusé : Le commandant Bassi fut tué dans une bataille : la guerre est la guerre et nous étions tous dedans et comme c’était permis, nous avons tué.

Accusé : J’admets avoir donné des commissions aux officiers et aux chefs, mais seulement à mon subordonné.

Accusé : Parce que Fadil Bu Omar avait été plus tôt dans le territoire de Gbail et était donc capable de tout reconnaître, peut-être m’a-t-il persuadé du besoin de nommer le sottomesso Omar Bubaker Gbail chef de Musa ailet.

Accusé : Auparavant, il y avait des contacts continuels entre le sottomessi et les rebelles : Il se peut aussi qu’Omar lui-même se soit avancé comme chef.

Accusé : Excepté Iorio Carmin[1] (lusuf el Musulmani), condamné par la Cour Militaire à Gialo en décembre 1928, il n’y avait nul autre déserteur italien dans le « douar ». Il y avait aussi un certain Omar e1 Musulmani, aussi à Gialo, mais je ne sais pas s’il était le déserteur que l’on m’a mentionné comme étant corporel d’artillerie. Il y avait aussi un troisième dont j’ignore le nom aussi, je ne sais pas ce qui leur est arrivé.

Accusé : je répète, j’ai pris part à toutes les batailles. Si quelquefois je n’étais pas là, l’opération fut remportée selon mon ordre.

Accusé : Quant au Lieutenant Aviere Beali, j’avais donné des ordres qu’il devrait être tenu par Abdul Hamid el-Akbar parce qu’il avait de l’argent : quand le gouvernement italien arriva avec son immense force, je ne sais pas que les Mohafdia lui ont fait du fait qu’ils ne s’inquiètent même pas d’enterrer leurs morts, surtout dans une grande bataille.

Accusé : Environ, il y avait moins de mille hommes dans le douar dont quatre-cents étaient montés.

Accusé : Le lieutenant Bead a été tué dans le Wadi, mais je ne sais pas s’il a été enterré.

Accusé : Il se peut que certains Italiens à Porto Bardia aient payé des dîmes, comme c’est arrivé à Barce, mais je ne peux pas dire qui ils étaient. Mais on m’a informé que les citoyens italiens de Barce avaient payé des dîmes pour que l’on prenne soin de leur bétail mais je ne sais pas qui ils étaient. Aissa el Aquach est un racketteur et je ne sais pas ce qu’il a reçu en paiement.

Accusé : Les collectionneurs de dîmes sont commandés par le « Caimacan » et pas par moi et sont responsables de leurs actions à lui.

Accusé : J’ai entendu parler du raid contre la Fattoria lung cependant, je n’étais pas là à cette époque parce que j’étais dans le territoire Abeidat. Je ne sais pas qui a mené ce raid.

Accusé : J’ai aussi pris part aux raids mais je ne me rappelle pas desquels.

Accusé : Nous n’avons pas d’endroits fixes où nous pouvons trouver refuge, en restons toujours en mouvement par nécessité à cause des situations dans les territoires des Brasa et des Abid.

Accusé : Pour vivre, en dehors des raids, nous tirons profit des chameaux, que nous envoyons en Egypte où ils sont vendus et avec le revenu nous achetons des provisions.

Accusé : Les chefs les plus influents au-dessous de moi sont : Abdul Hamid al-Akbar caimacan de l’Auaghir dor, il y a aussi le commandant Osman Sciamo, caimacan et commandant des Brahasa-Dorsa dor ; Ahmed Musa est caimacan et commandant de l’Ahasa-Abeidat : le chef de mon tabur est Bubaker Zigri.

Accusé : Je reconnais avoir été pris les armes à la main le 8 septembre dernier à Zavia Beda sur un plan appelé Got-Illfu, près de Slonta ; je n’avais toujours pas tiré un coup de fusil parce que nous avons étions encerclés par les troupes gouvernementales.

Accusé : Dans d’autres occasions j’ai tiré : vous semble-t-il possible que je sois dans une bataille sans tirer ?

Accusé : Il y a environ deux ans, j’ai été blessé à l’épaule droite par une bombe lancée d’avion je devrais dire plutôt l’épaule gauche. C’était un éclat de bombe.

Accusé : Nous n’avons ni canons, ni mitrailleuses. Ce que nous avons réussis à capturer étaient sur mes ordres enterrés par les personnes familières avec de tels endroits et je ne sais même pas où.

Accusé : Abd-el-Gader, de Misurata, dont j’ignore le nom du père, était un bon artificier et je ne sais pas ce qu’il fait en Egypte.

Accusé : Mon fils Mohamed Sahle a treize ans : il est en Egypte avec la famille.

Accusé : Je ne sais pas maintenant ce qui va arriver au douar et s’ils me désigneront un successeur dont je ne peux prédire le nom ou s’ils passeront En Egypte.

Accusé : Ce n’était pas mon idée, étant donné les mesures de Gouverneur Graziani, pour traverser la frontière : Moi et mes hommes avions décidé plutôt de mourir pour notre religion.

Accusé : Je dénie absolument que les rebelles avaient l’intention de se rendre.

Accusé : Il est vrai qu’à d’autres époques j’ai préparé un masbhata contre ceux qui avaient l’intention de me quitter, masbkata, qui portait aussi la signature d’autres chefs. Aujourd’hui ce n’est plus ainsi, nous sommes à découvert et celui qui veut nous quitter ne peut être arrêté et part ainsi avec son fusil.

Accusé : Nous n’avons pas de cartouche en réserve. Les Mohafdia les vendent et les échangent entre eux. Ceux qui étaient intelligents, dans les temps approprié, ont pris leurs dispositions.

Accusé : Nous n’en magasinons pas de provisions dans les grottes.

Accusé : Je dénie que nous recevons des provisions par la mer, elles ne viennent que de Sollum.

Accusé : Quand les campements étaient dans leur territoire nous avons été aidés de chaque façon possible par les sottomessi, avec le paiement de dîmes, l’abri dans les tentes et les renseignements sur les mouvements de troupe.

Accusé : Je ne m’excuse pas pour ce que j’ai fait parce que c’était la volonté de Dieu.

Accusé : je ne suis pas en correspondance avec Idris.

 

L.T.C-et S.

(F. a) Omar el Muctar (en arabe)

Valenza

Franccschino

Bedendo

De Cristofano Edoardo Cane. Mre ff.

 

 

L’audition dactylographiée contre ‘Omar al-Moukhtar

 

Ouverture de l’audition. Le procureur général Bedendo a demandé que la mention soit faite qu’aujourd’hui était l’anniversaire de son altesse royale le prince de Piémont et, dans la certitude qu’il était le porte-parole fidèle et le représentant des gens, il demanda le plus sincère « alalà ».

Les Italiens et les gens locaux se levèrent et applaudirent longuement. Quand le silence fut restitué et le serment exigé de l’interprète, Mr. le président, colonel Marinoni, demanda à l’accusé ses détails et il a dit que son nom était OMAR EL MUCHTAR, 74 ans, né à Giarabub, chef du dor. Puis il demanda s’il avait des condamnations, il répondit négativement, puisqu’il nia connaître qu’il y avait des mandats d’arrêts contre lui.

Après cela l’employé de bureau, le lieutenant De Cristofano a lu l’acte d’accusation à haute voix.

Les procédures ont alors continué.

Président : Vous avez lutté contre qui ?

Omar : J’ai lutté contre le gouvernement italien.

Président : Dans combien de batailles avez-vous pris part ?

Omar : Dans beaucoup, je ne peux pas les compter exactement. Aussi celles auxquels je n’ai pas pris part ont été conduites selon mon ordre.

Président : Avez-vous ouvert aussi le feu ?

Omar : Oui, plusieurs fois.

Président : Avez-vous donné l’ordre de tuer le lieutenant Beati ?

Omar : Il a été capturé et durant un certain temps, il vécut avec le dor. Un jour alors que j’étais absent une troupe du gouvernement italien s’approcha du dor et ensuite le mehafdia l’a tué. La guerre est la guerre et je ne sais pas s’il a été enterré.

Président : Avez-vous donné l’ordre pour que tous les prisonniers soient tués ?

Omar : Je n’ai pas donné d’ordres pour cela.

Président : Était-ce vous qui avez donné l’ordre de tuer les hommes qui étaient allés réparer la ligne téléphonique à Gaar Benighden, marquant ainsi la reprise d’hostilités ?

Omar : Oui, j’ai donné l’ordre de tuer ceux-là et des autres.

Président : Aussi bien que l’escorte de carabinier ?

Omar : La guerre est la guerre.

Président : Pourquoi avez-vous repris des hostilités ?

Omar : A cause du conflit survenu entre moi et Sidi Reda, dans lequel des gens différents sont intervenus pour l’accentuer.

À ce point, le conseil du procureur remercia l’interprète du travail qu’il avait fait et constatant que sa voix était trop faible et ne pouvait donc pas être entendue par les chefs et les Arabes qui étaient assis dans la cour, alors qu’il était commun dans les procès militaires que le public devrait suivre les procédures pour décider si l’accusé était coupable ou autrement, le président demanda à le remplacer avec le colonel Cav. Lumbroso.

Le président fit appel au colonel Lumbroso qui prêta serment.

Président : La cour veut savoir pour quelles raisons les hostilités ont été reprises.

Omar : Parce que le gouvernement est intervenu entre moi et Sidi Reda.

Président : Avez-vous été obligés d’attendre la réponse à votre lettre envoyé à H E. Badoglio ?

Omar : La réponse est arrivée, mais sans sens.

Président : Et qui êtes-vous ?

Omar : Je suis le représentant de Sidi Ahmed ash-Sherif mais les documents qui prouvent cette déclaration ont été dispersés.

Président : Avez-vous distribué des commissions d’officiers à votre mehaftfia ?

Omar : Oui,

Président : Est-ce vous qui donniez toujours les ordres de bataille ?

Omar : Aussi loin que les premières batailles sont concernées, il y avait d’autres commandants. J’ai donné les ordres pour ceux juste avant l’accord et pour ceux après l’accord. J’ai été le chef durant dix ans.

Président : Comment avez-vous été capturés ?

Omar : La bataille a commencé autour de Zuuia Beda. J’ai été blessé et suis tombé sous mon cheval qui a été tué. Les soldats gouvernementaux m’ont alors capturé.

Président : Avez-vous donnez votre nom ?

Omar : Je l’ai fait tout de suite.

Président : Aviez-vous votre fusil ?

Omar : J’avais un fusil et six cartouches.

Premier ministre : Avez-vous réalisé des pillages et des raids ?

Omar : Oui.

Fosses : Avez-vous ordonné au sottomessi de payer des dîmes ?

Omar : Au début oui, plus tard non parce que les gens étaient trop loin.

P.C. : L’autre jour le tribunal de guerre extraordinaire a été convoqué à Marsa Brega pour juger Omar Bubacher Sabail ailet Musa pour avoir été trouvé en possession de certains documents. J’ai l’honneur de vous montrer, M. le Président, l’un d’entre eux. Du document il est clair que le susmentionné Omar Bubacher a été nommé à la tête de l’ailet par Omar el Muchtar et autorisé à recueillir des dîmes, comme cela est apparu dans les comptes rendus et faire de la propagande pour les Senoussi.

Le document porte la date du 17 avril 1930 et était ultérieur à la reprise des hostilités. Il porte la signature et le sceau d’Omar Muchtar. Le document a été donné au président qui l’a fait examiner par l’accusé, en lui demandant s’il le reconnaissait comme sien.

Omar : Une fois la tribu a payé des dîmes.

P.C. : Ne vous écartez-pas, la date est après que les choses soient revenues à la normale ?

Omar : La tribu Gaoail a été placée sous le commandement de Saif el Fadil et dépendait de lui.

P.C. : Mais la signature et le sceau sont les vôtres ? Que le document dit-il ?

Omar : Rapporte qu’il ne peut pas lire, mais reconnaît sa signature.

P.C. : Il ne peut pas lire. Et peut-être le document est écrit en italien au lieu de l’arabe, ou vous n’avez pas les lunettes que vous avez perdues dans la récente bataille en vous enfuyant et dont vous avez eu l’audace de réclamer au gouverneur.

Après que le président ait questionné les juges, le procureur et l’avocat de la défense s’ils avaient des questions pour l’accusé, le capitaine Lontano demanda : « Avez-vous jamais reçut des paiements du gouvernement italien ? »

Omar : Non, jamais.

Défense : Avez-vous déjà lutté contre les Turcs avant notre occupation ?

Omar : Quelquefois.

Défense : Avez-vous été instruit par les Senoussi ?

Omar : Depuis l’âge de seize.

Ayant accompli son interrogation de l’accusé, le président fit appel au procureur le colonel Bedendo, qui, parmi un silence respectueux, commença son discours :

Le discours du procureur général : 

« ... Donc nous voyons de plus en plus chaque jour comment la gloire de ce héros légendaire, qui prend toujours la fuite aux moments dangereux, est sur le déclin. Si à cette occasion Omar Muchtar fut capturé, c’était en raison du fait qu’il fut encerclé par nos braves troupes et que le cheval qui essayait de l’emporter hors de la bataille a été tué.

Ce n’est pas par hasard si l’on tient ce procès dans l’ancien parlement arabe, maintenant le Palazzo del Littorio ! Son Excellence a voulu démontrer clairement à chacun comment la politique des temps précédents a été remplacée.

Il l’a commandé pour qu’autant d’Italiens que de gens locaux puissent être ici pour entendre les charges à l’encontre d’Omar, pour qu’ils en toute âme et conscience le jugent honnêtement, comme la cour le fera.

Nous pourrions dire ici beaucoup de choses d’Omar el Muchtar, mais nous voulons nous limiter et procéder selon l’impératif de la justice et non pas sur les bases de la curiosité et la vengeance.

Cela ne signifie pas que le gouvernement italien a abandonné ces gens à leur assignation : plusieurs fois il a choisi le bon moment pour tenter des accords, mais votre mauvaise foi rompait toujours de tels traités. El Beiada et Gasr Benigdem en sont de brillants exemples et il est inutile aujourd’hui pour Omar de s’excuser en disant qu’il a écrit à Son Excellence Badoglio et qu’il n’a pas reçu de réponse convenable.

Le gouvernement italien vigoureux ne marchande pas sa propre souveraineté ; il fait autant de concessions que possible. Ce qui est bien pire pour ceux qui n’apprécient pas un tel geste.

Vous avez dit que vous avez vouliez vivre honnêtement dans cette terre. Mais vous ne l’avez pas désiré parce que vous vous êtes révoltés contre la souveraineté du gouvernement italien. Vous avez donné l’ordre à Gasr Benigdem de tuer et de torturer les carabiniers supervisant les travaux de réparation de la ligne téléphonique alors qu’il y avait la paix entre nous.

Vous avez saisi l’occasion de petites garnisons pour les surprendre et tuer. Vous n’êtes pas un soldat, mais un bandit clandestin. Le vrai soldat tue son adversaire dans la guerre, mais ne le torture pas tandis que vous avez profané les cadavres de nos officiers et de nos soldats. Vous avez tué nos blessés. Pas l’un d’entre eux ne nous est revenu. Vous vous êtes vantés dans une audition publique d’avoir pris part à toutes les batailles et même si vous n’étiez pas présent, vous avez donné les ordres.

Vos hommes ont attaqué nos troupes chaque fois qu’ils étaient en plus grands nombres, mais vous vous enfuyiez toujours, comme auparavant nos démagogues incitaient nos ouvriers et se cachaient pour échapper à leur juste punition.

Le fait que vous vous enfuyiez toujours est prouvé par une déclaration vous avez fait lors d’une autre occasion. Vous avez été aussi blessés à l’épaule, en vous enfuyant, par un éclat de bombe lancé par notre glorieuse aviation, cette aviation, qui, selon vos propres mots, vous a faits partir de vos grottes, de votre wadis et vous a poursuivi dans vos fuites. Vous vous enfuyiez toujours et cela est prouvé par vos lunettes et votre sceau qui sont restés à l’endroit de la bataille, ces lunettes que vous avez eu la témérité de réclamer pendant votre interrogatoire ce matin.

Je ne crois pas, cependant, que vous aurez beaucoup de temps à consacrer à la lecture. Vous avez donné des ordres de tuer des prisonniers : vous devez répondre pour ces meurtres. Vous menez vos disciples contre les forces armées du gouvernement italien, qui seul dirige cette colonie, pour arracher la colonie de sa patrie ; vous devez répondre de ce crime. Vous avez mené des pillages et des raids dont vous devez aussi rendre compte.

El Beida, Gasr Benigdem, la fort de Giona, le notaire Rognoni, le commandant Bassi, le lieutenant Bead, Marshal Hubner et des douzaines et des douzaines d’autres crimes : ce qui sont votre gloire et pour lesquels vous répondrez bientôt.

Vous avez dit que Dieu vous a abandonné cette fois : s’Il a failli, la justice humaine vous a rattrapé.

Vous n’avez aucun remords pour ce que vous avez fait ni pour les conditions dans lesquelles vous avez placé les gens de ce pays. Reconnaissez-le : vous êtes responsables.

Je demande que la cour, ayant décidé que l’accusé est responsable des crimes dont il est chargé, le condamne pour le crime le plus sérieux d’entre tous, à savoir d’avoir pris les armes pour arracher cette colonie de la mère-patrie, en prononçant la peine de mort qui prendra en compte les autres sentences imposées pour les crimes moindres.

La demande du Procureur général fut reçue avec un murmure général d’approbation, qui fut immédiatement réprimée par le président.

L’avocat de la défense, fit appel, et demanda que la cour tienne compte de l’âge de l’accusé et de son fanatisme religieux et qu’elle devrait lui donner l’avantage des circonstances atténuantes.

Ayant demandé à l’accusé s’il avait quelque chose à rajouter pour sa défense et obtenu une réponse négative, la cour se retira dans la salle de conseil. Une demi-heure après, elle est revenue dans la salle d’audience, où, dans un silence respectueux, le président lu la sentence de culpabilité à l’encontre d’Omar qui fut jugé coupable des crimes chargés contre lui le condamnant à mort.

Lorsque l’interprète traduisit la sentence à l’accusé, ce dernier dit : « A Dieu nous sommes et à Dieu nous reviendrons » à quoi le procureur général ajouta : « Très bien, carabinier, emmenez-le ».

Le public sortit lentement les uns après les autres, commentant favorablement la sentence.

Fin du texte.

 

La seule chose que le gouvernement a omit de faire est de ce juger lui-même pour les innombrables crimes qu’il commit contre les Musulmans qui sont bien plus pire que ceux de ‘Omar al-Moukhtar qui ne faisait que défendre son pays. Mais il est commun que les tyrans et les injustes ne se posent jamais de questions sur leur propre crime néanmoins, ils y répondront tous devant le tribunal divin auquel ils ne croient point mais dont les morts goûtent déjà leur futures sentences.

 

Avant sa pendaison, le général lui fit l’offre finale de devenir un laquais au service des Italiens et de vivre comme les autres chefs de ses gens mais il répondit : «  Je ne cesserai pas de lutter contre vous et vos gens jusqu’à ce que vous quittiez mon pays ou que je perde la vie. Et je jure par Celui qui connait le contenu des cœurs des hommes que si mes mains n’étaient pas attachées, je lutterais maintenant contre vous à mains nues et dans l’état ou je suis ». Le général lui demanda :  

- Avez-vous combattu l'Etat italien?
Omar: Oui
- Avez-vous encouragé les gens à se battre contre l'Italie?
Omar: Oui
- Etes-vous conscient de la sanction pour ce que vous avez fait?
Omar: Oui
- Depuis combien d'années luttez-vous contre l'Italie?
Omar: Depuis 20 ans.
- Regrettez-vous ce que vous avez fait?
Omar: Non
- Savez-vous que vous serez exécuté?
Omar: Oui
Le juge dit :
- C'est une triste fin pour un homme comme vous.
En entendant ces mots, Omar Moukhtar répondit:
- Au contraire, c'est la meilleure façon de mettre fin à ma vie!
Le juge voulut l'acquitter et l'expulser du pays s'il consentait à appeler les Moujahidine à arrêter le Jihad. Alors Puis Omar Mukhtar dit alors cette célèbre réplique :
- " Mon index qui affirme dans chaque prière qu'il n'y a de Dieu qu'Allah et que Muhammad est le Messager d'Allah ne peut pas écrire un mensonge, nous ne nous rendons pas mais nous gagnons ou nous mourons !"

Le général italien rit alors et ordonna de le pendre après un faux procès alors que la corde était déjà préparée à l’extérieur.

Sa pendaison secoua le monde musulman entier et son nom est toujours commémoré de nos jours. Puisse Allah Exalté élever sa position dans le paradis.

 

 

Témoignage

 

Léopold Asad dans son livre « The Road to Mecca » résuma les phases des fascistes militaires dans la guerre comme suivante :

(1) Tentative de soumission par les unités militaires régulières,

(2) Utilisation d’avions et de jeeps, et finalement la plus destructeur fut,  

(3) Les camps de concentration massifs pour la population entière de Cyrénaïque.

 

Du 6 mars au 3 septembre 1923, les Italiens estimèrent les pertes à : 800 Bédouins tués, 230 capturés et 1.000 blessés, en plus de 700 chameaux et de 22.000 moutons tués ou confisqués (Assad croit que ces nombres sont infiniment petits par rapport à la réalité). C’est un nombre énorme pour un pays de Bédouins avec une petite population. Voici comment la deuxième phase a été conduite :

« Les Italiens adoptèrent la nouvelle tactique des raids surprises par les unités mécanisées sur les campements Bédouins, en abattant homme et bête sans distinction et en détruisant les réserves de grain. Dans ces raids, sur ce qui dans une guerre non coloniale serait considéré comme la population civile, le but était de tuer autant du Bédouin que possible pour terrifier les cœurs des bergers de Cyrénaïque. Quand les pluies sont arrivées, les transports mécanisés ne pouvaient plus être utilisé et les camps furent bombardés et mitraillés par l’aviation ».

 

Asad décrit alors les derniers stades et comment c’est devenu hystériquement mauvais à cause de trop de résistance :

« Graziani était résolu à arracher l’initiative aux guérilleros. Il réorganisa ses forces pour le dernier round dans la « guerra senza quartiere (la guerre sans quartier) » dans de petites patrouilles mobiles pour conserver tout [le désert] le pays sous surveillance et attaquer l’ennemi où il le rencontrerait, ne lui laissant aucun répit. Pour empêcher les guérilleros d’obtenir des provisions et des renforts de la population civile il désarma les membres des tribus, leur confisqua des milliers de fusils, des millions de balles et fit de la possession d’arme, un crime capital. Il institua le « tribunale volante », une cour militaire aéroportée d’un point à l’autre pour juger et exécuter tous ceux qui avaient une quelconque relation avec les guérilleros. Il réduisit les unités libyennes de plus de deux tiers, avec l’intention de les dissoudre complètement plus tard. En même temps, il distribua aux 750 Libyens retenus dans le service d’armement des fusils d’un calibre différent pour prévenir la fuite de munitions. Il fit aussi fermé les demeures des Sanoussi, confisqua leurs propriétés et exila leur Sheikhs dans l’île d’Istica. Il améliora aussi les communications de la colonie, diminuant ainsi son problème d’approvisionnement et économisa la main-d’œuvre ».

« On peut douter de l’efficacité de toutes ces mesures s’il n’avait pas mis en place ses immenses camps de concentration pour la population tribale entière de Cyrénaïque dont le général n’avait que faire des sentiments. De toute manière, les Italiens ne faisaient pas plus que ce que les autres (nations européennes) avaient fait avant eux et après eux, pour une armée, lutter contre les guérilleros c’est lutter contre une population entière. Les premiers camps de concentration de janvier 1930 furent trouvés trop près des régions d’opérations militaires car les prisonniers, malgré la proche surveillance, réussissait à toujours à approvisionner la résistance ; donc la plupart des Bédouins furent emmené au Barqah al-Baydah et au Sirtica. Dans ce pays désolé furent rassemblés dans les plus petits camps possibles 80.000 hommes, femmes et enfants et 600.000 bêtes en été 1930. La faim, la maladie et les cœurs brisés causèrent des carnages dans la population emprisonnée. Le bédouin mourut en cage. La perte de bétail fut aussi grande à cause du pâturage insuffisant près des camps ou les humains et les bêtes déjà décimés par le combat, furent pratiquement exterminés par les camps ».

« Les guérilleros se retrouvèrent ainsi coupés des sources locales d’approvisionnement et furent forcés de compter de plus en plus sur l’Egypte pour les nécessités minimales de vie et de la guerre. Pendant des années une partie considérable de leurs provisions vint de là, les produits bédouins, l’argent levé par les charges de douane et les fonds levés partout dans le monde arabe et musulman. Les provisions passèrent à travers le port d’as-Salloum et l’administration des frontières égyptienne ferma les yeux sur les provisions entrant en Cyrénaïque ainsi que les réfugiés en sortant. Le Marmarica avait été déclaré par [Graziani] une zone militaire, ses gens étant déplacés dans les camps de concentration et la frontière fermée fut patrouillée par les voitures blindées et les avions avec instructions de détruire toutes les caravanes qu’ils rencontreraient mais malgré ces précautions, les provisions continuèrent de parvenir aux patriotes. Graziani décida donc de mettre en place une ligne de fil de fer barbelé de la mer à Jaghboub et aux dunes au sud, une distance de plus de 300 km. Le travail fut accompli au début de septembre de 1931 et le contrôle le long de ce mur de barbelé fut exercé à travers des postes fortifiés, un système téléphonique et l’aviation ».

 

« Trois colonnes avec beaucoup de véhicules blindés et de lourds canons nous assaillirent de trois côtés. Leurs avions descendirent bas et bombardèrent les maisons, les mosquées et les palmiers…, nos fusils étaient inutiles contre leurs voitures blindées…, je me suis caché dans les palmeraies attendant la chance de passer à travers les lignes italiennes. Le jour suivant…, le général italien ordonna de détruire les palmiers de l’oasis, les puits et tous les livres de la bibliothèque de Sayyid Ahmad furent brûlés. Et le jour suivant, il ordonna que certains de nos aînés et ‘Oulama soient embarqués dans un avion d’où ils furent jetés de très haut pour s’écraser au sol… Et durant toute la deuxième nuit, j’entendis de ma cachette les cris de nos femmes et le rire des soldats... »

Fin de citation.

 

 

L’indépendance

 

En 1934, la Libye fut complètement pacifiée et le nouveau gouverneur italien Italo Balbo commença une politique d’intégration entre les Arabes et les Italiens.

 

En 1939, des lois passèrent permettant aux Musulmans de rejoindre le Parti Fasciste national et en particulier l’association musulmane de Littor (Associazione Musulmana del Littorio) et les réformes de 1939 permirent la création d’unités militaires libyennes dans l’armée italienne. Par conséquence, pendant la Seconde Guerre mondiale, il y eut un fort soutien en faveur de l’Italie et de Libyens musulmans se sont inscrits dans l’armée italienne.

Les Italiens créèrent de nombreuses et diverses entreprises en Tripolitaine et Cyrénaïque

 

Le 13 septembre 1940, l’autoroute de Mussolini fut utilisée pour l’invasion de l’Egypte par les forces italiennes postées en Libye.

 

En novembre 1942, les forces alliées reprirent la Cyrénaïque et avant février 1943, les derniers soldats allemands et italiens avaient été éconduits de Libye.

Dans la première période d’après-guerre, la Lybie resta sous l’administration britannique tandis que les Français contrôlaient Fezzan.

 

En 1945, Idriss revint d’exil au Caire mais refusa de retourner en Cyrénaïque jusqu’au retrait de tous les contrôles étrangers.

Aux termes du traité de paix de 1947 avec les alliés, l’Italie, qui espérait maintenir la colonie de Tripolitaine et la France le Fezzan, renonça à toutes les revendications en Libye. La Libye resta ainsi unie.

 

Le 24 décembre 1951, la Libye déclara son indépendance avec les représentants de Cyrénaïque, de Tripolitaine et de Fezzan qui déclarèrent leur union tandis que le pays prit le nom de Royaume-Uni de la Libye et Idris as-Senoussi se vit offrir la couronne.

 

Après l’indépendance, la Libye fit face à un certain nombre de problèmes. Il n’y avait aucun collège dans le pays et juste seize diplômés universitaires. Aussi le pays avait juste trois avocats avec pas un seul médecin, ingénieur, expert ou pharmacien dans le royaume. Il fut estimé que seulement 250.000 Libyens étaient lettrés et que 5 % de la population étaient aveugles, ou atteint de maladies répandues telle que le trachome.

 

En avril de 1955, l’exploration du pétrole débuta dans le royaume, les premiers champs de pétrole furent découverts en 1959 et les premières exportations en 1963. Bien que le pétrole améliora radicalement les finances de la Libye, le ressentiment populaire grandit puisque la richesse resta concentrée dans les mains de l’élite.

La monarchie prit fin en septembre 1969 quand un groupe d’officiers militaires menés par Gaddafi organisa un coup d’état contre le roi Idriss qui était en Turquie pour traitement médical.

 

En 1977, Gaddafi rebaptisa l’état en Joumouhiriyah, « l’état des masses », et s’attribua le titre de « chef et guide de la révolution de Libye » puis d’avocat du panafricanisme ensuite de « roi des rois » puis de « chef des chefs arabes » et  enfin « d’imam des Musulmans ».

 

Le tyran brutal Gaddafi exécuta un très grand nombre de Lybiens et dirigea la Lybie d’une main de fer. Suite à des mouvements populaires infructueux et des tentatives de coups d’états, en février 2011, des protestations de masse antigouvernementales se levèrent contre Gaddafi à Benghazi, Baydah et Zintan.

 

Le 20 octobre 2011, les combattants rebelles prirent Sirte et dans le processus Gaddafi fut capturé, tué et secrètement enterré dans le désert.

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...Photos de la

De la chute à la victoire



[1] Carmine Iorio Giuseppe, né à Naples en Italie en 1883 dans une famille chrétienne. Il joignit l’armée en 1901, expert des armes légères, il devint sergent et fit parti de la force des 15.000 marines qui, en octobre 1911, bombarda et attaqua Derna qui tomba après dix jours de résistance de 3.500 Moujahidine. En 1916, il quitta la garnison de Derna et se rendit aux Moujahidine qui l’emmenèrent à al-Fadil Bou ‘Omar, un des commandants de ‘Omar al-Moukhtar, puis qui se convertit à l’Islam et prit le nom de Youssouf al-Mouslim. Il se maria avec une fille de Koufra nommée Tibra Moussa al-Majibri avec qui il eut deux enfants, un garçon nommé Muhammad et une fille ‘Ayshah. Il s’engagea alors dans la résistance contre les Italiens et ‘Omar al-Moukhtar le nomma lieutenant. Il participa à un certain nombre de batailles dont celles de Marsa Brega, Bir Bilal et Souloug. Douze ans après, suite à une trahison, il fut capturé près de l’oasis de Jialo en 1928. Comme certains hauts fonctionnaires fascistes suivaient personnellement son cas, il fut rapidement jugé sur place pour haute trahison et condamné à la peine capitale. Il lui fut ensuite donné le choix de reconversion à son ancienne religion en échange de la vie sauve mais il refusa et voulut seulement que sa famille soit protégée par ses compatriotes Moujahidine et quelle vive en paix avec ses compatriotes musulmans. Des témoins historiques ont rapporté qu’il se tint bravement et lut quelques versets du Qur’an avant d’être abattu par le peloton d’exécution dans le marché de Jialo où il fut enterré.