
|  | 
			
			Année 1917
			
			
			
			Les troubles dans le Sud-Tunisien ne cessèrent cependant pas en 
			1917, malgré la défense française ultramoderne. S’il est vrai que 
			les Tripolitains semblaient surtout concentrer leurs forces contre 
			les Italiens en Libye, en Tunisie, on assistait en 1917 à des 
			attaques de harcèlement qui se prolongèrent jusqu’à 1918.
			
			
			Pendant les mois de février et mars 1917, des patrouilles du D.S.T. 
			eurent plusieurs accrochages. Dans un de ces petits combats, trois 
			cavaliers furent tués et trois autres blessés.
			
			
			En juin 1917, le poste de la compagnie saharienne a été razzié ; 
			tous les animaux de la compagnie furent emportés par les rebelles.
			
			
			Le 8 juillet 1917, une section d’avions pris part à la poursuite par 
			une patrouille de Mashahad Salih d’une caravane de fellaga. 
			Un vif combat s’engagea entre les deux partis.
			
			
			Le 7 juin 1917, dans le but d’arrêter la propagande hostile de 
			Khalifah Ibn ‘Askar et le recrutement de ses partisans, le général 
			Alix donna l’ordre d’opérer un nouveau bombardement de Nalout.
			
			L’opération fut effectuée par 4 avions de l’escadrille 542 en deux 
			sections. Un détachement de goumiers et les tracteurs-mitrailleurs 
			de l’aviation s’établirent à 8 km au sud-est de Galb Oumm ad-Doud 
			pour servir de repli aux avions. Un groupe léger, [spahis, une 
			section montée, deux sections de mitrailleuses, une compagnie et 
			demie du 4e bataillon d’Afrique] prit position à Ben-Gouaddal « 640 
			kilos de projectiles sont jetés faisant des dégâts matériels 
			importants. Les rebelles réfugiés dans les Rhars et les grottes 
			n’eurent aucune perte ». « Une surprise malheureuse allait, selon 
			les autorités militaires françaises, démontrer en même temps que la 
			mobilité extrême des rebelles, combien la sécurité d’une troupe est 
			fictive en pays arabe ».
			
			
			
			Le 11 juin 1917, un rezzou[1] 
			Touareg de 300 hommes parti de Naga (200 km sud-est de Ghadamès), 
			passa par Sinaoun, Zar et le Grand Erg et attaqua au petit jour le 
			peloton de méharistes d’al-Hajrah (18 km au nord-ouest de Bir 
			Kassirah), gardant les animaux de la compagnie saharienne au 
			pâturage. Le combat dura trois heures, jusqu’à l’arrivée du peloton 
			de Bir Kassirah, sous le commandement du capitaine Rissler. Cette 
			affaire coûta aux Français 8 blessés, 200 méharas enlevés, 100 autre 
			tués ou blessés (ces chiffres doivent être pris avec le maximum de 
			réserve). Le rezzou perdit une vingtaine d’hommes.
			
			Par suite d’un vent violent et d’avaries aux appareils, une section 
			d’avions envoyés de Tataouine à Bir Kassirah, ne purent intervenir 
			efficacement.
			
			A la suite de ce combat, la Compagnie saharienne fut placée par 
			décision ministérielle sous les ordres du général commandant le 
			Sud-Tunisien, pour les opérations militaires, zone saharienne 
			comprise.
			
			
			Le 31 juillet 1917, le groupe mobile d’Oumm Souigh, en fouillant la 
			Shi’bat an-Nakhlah, y surprit une centaine de rebelles et un combat 
			eut lieu entre les deux partis.
			
			
			Les 2, 3 et 4 août 1917, Vazin fut bombardée par les avions qui 
			réglèrent en même temps le tir des pièces de 90 de Dahibat.
			
			
			Le 12 août 1917, une opération fut montée par plusieurs colonnes 
			sous les ordres du lieutenant Bemadotte pour faire la cueillette des 
			fruits dans la Shi’bat an-Nakhlah. Une telle opération fut prescrite 
			par le général Boyer dans une série d’opérations ayant pour but 
			d’effectuer la récolte des fruits et des figues de tous les jardins, 
			alimentation principale des rebelles 
			
			
			Le 19 août 1917, plusieurs caravanes escortées tombèrent dans une 
			embuscade tendue par les rebelles à Ben Nijma (près de Dahibat). Les 
			pertes françaises furent sévères : 7 tués, 8 blessés, 100 chameaux 
			emportés par les rebelles.
			
			
			Le 26 octobre 1917 vers 14h, le groupe mobile de Dahibat de 
			plusieurs unités eut un engagement avec les rebelles venus de Wazin. 
			Le décrochage se fit facilement et le groupe mobile rentra à 
			Dahibat, ayant un caporal disparu, 5 blessés, des animaux tués et 
			blessés.
			
			
			Le 9 novembre, le même groupe mobile, renforcé au groupe mobile 
			d’Oumm Souigh, monta directement sur Saniat Oumm Guarjoum et marcha 
			vers le puits de la Mortaba pendant que la Place de Dahibat 
			bombardait Wazin et qu’un petit détachement de couverture était 
			installé à Gar’at ‘Afînah. Une section d’avions pris part à 
			l’opération. Vers 9h du matin, la compagnie de tête fut fortement 
			attaquée par des groupes nombreux de rebelles estimés à environ 500 
			hommes. Après un vif combat, la colonne se replia par échelons sur 
			la Saniat Oumm Garjoum et redescendit du Zahr : les pertes 
			françaises furent sensibles : 4 tués ou morts de leurs blessures, 2 
			disparus, un officier et 8 blessés. Les pertes musulmanes restèrent 
			inconnues.
			
			Les avions, par suite « de l’habileté des rebelles à se dissimiler à 
			leur approche, n’avaient pu donner que des renseignements impartiaux 
			».
			
			
			Pendant toute l’année, les patrouilles eurent à poursuivre des 
			bandes de rebelles dans le Zahr.
			
			
			
			
			La « conspiration panislamique » des Bani Zid
			
			
			
			Toujours pendant l’année 1917, les autorités coloniales découvrirent 
			un projet de « conspiration » (ou complot panislamique) impliquant 
			les Bani Zid à al-Hammah de Gabès qui formaient en quelque 
			sorte la liaison entre les tribus nomades du centre et de l’ouest de 
			la Tunisie. On sait que les Bani Zid avaient vigoureusement résisté 
			à l’occupation militaire française à partir de 1881. Un grand nombre 
			de ces gens était passé alors en dissidence en Tripolitaine et tous 
			ne sont pas revenus. Et les intelligences des Bani Zid avec les 
			chefs tripolitains n’ont pas cessé ; l’arrivée de Noury Bey avec un 
			firman du Sultan, les tentations réussies des sous-marins allemands 
			sur les côtes de la Tripolitaine et de la Tunisie pour débarquer des 
			armes et des munitions, les activités des Moujahidine 
			réveillèrent l’esprit de « conspiration » chez les Bani Zid.
			
			
			Le Khalifah des Bani Zid « ayant des aptitudes policières et 
			de la poigne » trouva la trace d’un complot panislamique : il saisit 
			des correspondances de Noury Bey, le frère d’Anwar et de Souleyman 
			al-Barouni appelant les Bani Zid au Jihad : « vous vous 
			plaignez, dit-on, de manques d’armes nous vous en enverrons ; mais 
			vous avez déjà celles que portent vos fils dont la France a fait des 
			soldats malgré eux ». Depuis deux ans, ils avaient été signalés 
			comme ayant des intelligences avec la Tripolitaine. Plusieurs 
			d’entre eux furent internés à Tunis, à Djerba, à Ghar al-Milh 
			et ailleurs. Un certain nombre des Sheikhs des Bani Zid fut condamné 
			à cinq ou dix ans de travaux forcés dans un procès qui se déroula en 
			1919.
			
			
			En résumé, l’année 1917 fut comme les deux précédentes, une année 
			pénible économiquement et militairement pour les autorités 
			françaises, une année de sécheresse. La récolte d’orge, de figues, 
			de dattes et d’olives fut presque nulle. Les pâturages n’ont pu 
			nourrir les troupeaux qui dépérissaient. Enfin de nombreux vols de 
			sauterelles ravagèrent en mai et juin, les régions de Médenine, Ben 
			Gardane, Zarzis et Matmatah. A en croire les sources officielles 
			françaises, ce fut grâce aux distributions d’orge et d’huile des 
			Affaires Indigènes que les populations des territoires du 
			Sud-Tunisien furent sauvées de la famine, qui régnait en 
			Tripolitaine, où l’on mourrait de faim (il ne mourrait rien qu’à 
			Nalout en novembre 1917, 8 à 10 personnes par jour).
			
			
			
			
			Année 1918
			
			
			
			Khalifah Ibn ‘Askar continua sa propagande et ses attaques contre 
			les postes français ; ‘Omar al-Guallati, panislamiste tunisien et « 
			adversaire irréductible des Français », fut désigné par Souleyman 
			al-Barouni pour prendre le commandement à Wazin, où se trouvaient 
			une cinquantaine de Moujahidine réguliers et 250 irréguliers. 
			Des armes et des munitions, des uniformes furent envoyé à Nalout. 
			Les postes rebelles furent munis de grenades.
			
			
			La récolte de l’année fut excellente et mit fin à la famine 
			générale.
			
			
			La défaite italienne sur le front de l’Isonzo en octobre 1917, la 
			révolution russe, les opérations des Moujahidine dans le sud 
			n’étaient pas ignorées des milieux musulmans dans la Tunisie 
			entière.
			
			Plus que jamais, 1’alliance poursuivit sa politique panislamique. La 
			pénétration des armées allemandes et turques dans les provinces 
			méridionales de la Russie, les mirent au contact de nombreuses 
			populations musulmanes. Les rêves allemands entrevoyaient déjà le 
			soulèvement du Caucase, de la Perse, de 1’Afghanistan, et de l’Inde. 
			Le prince Osman Fouad Pacha 
			remplaça en mai 1918 Noury Bey, frère d’Anwar, pour 
			coordonner les efforts des chefs tripolitains, et essaya de calmer 
			les désaccords et les mésintelligences qui éclataient à tout moment 
			entre eux.
			
			
			Les autorités françaises du D.S.T. continuèrent avec vigueur les 
			tournées de police et la poursuite des rebelles et des déserteurs.
			
			
			Combat du col Matous
			
			Le 3 mars 1918, 17 chameaux ont été enlevés près de Bir Darcen par 
			un petit groupe qui a pu échapper aux patrouilles françaises : un 
			goumier blessé.
			
			
			Le 18 mars, 7 chameaux furent enlevés au troupeau du fournisseur de 
			bois de Dahibat pâturant dans une région interdite.
			
			
			Le 27 mars, une bande de 40 Tripolitains razziait un troupeau de 150 
			têtes environ près de Ramadah. Le Makhzen de ce poste, sous les 
			ordres de l’adjudant Michel, lancé à sa poursuite, engagea un combat 
			de nuit au col de Matous, dans lequel furent tués un Bachaouch, un 
			cavalier et trois rebelles.
			
			
			Dans la nuit du 17 avril 1938, une patrouille d’al-Aouadi commandée 
			par l’adjudant Thomassin du cinquième bataillon d’Afrique reçut des 
			coups de fusil de 6 rebelles. L’adjudant fut tué.
			
			
			En mai 1918, plusieurs rebelles furent poursuivis entre Fatnassia et 
			Bir al-Atslah : un rebelle tué.
			
			
			Le service des renseignements français ayant fait connaître qu’un 
			groupe de 40 tentes était installé à 4 km environ sud-ouest de Wazin 
			; un ordre fut donné à l’escadrille 541 (5 avions) de le bombarder 
			par obus et par bouteilles de brome. Deux bombardements successifs 
			ont été effectués le 17 mai 1918.
			
			
			Une section de tracteurs-mitrailleurs éclairée par des goumiers 
			s’installa en repli à la frontière tripolitaine.
			
			
			Vers 8 heures du matin, un combat s’engagea à la mitrailleuse à 
			Dhahrat an-Nisf avec les rebelles descendant du col de Wazin qui 
			tentèrent d’encercler la section.
			
			Un groupe commandé par le capitaine Bouvet des Affaires Indigènes 
			(goum, spahis, section montée, section de 65, etc.) puis la colonne 
			mobile de Dahibat (cap. Bayard) appuya successivement la section des 
			tracteurs-mitrailleurs.
			
			La rupture du combat dirigé par le commandant de Bordesoulle, chef 
			de secteur fut obtenue facilement vers 11 heures par l’intervention 
			en masse de l’escadrille qui bombardait les rebelles.
			
			Un goumier fut blessé. Les rebelles eurent une dizaine de morts et 
			une vingtaine de blessés.
			
			
			Dans la nuit du 4 au 5 juin, le courrier postal partant de Dahibat 
			fut attaqué : un spahi blessé.
			
			
			
			Khalifah Ibn ‘Askar, d’après nos renseignements, reçut un renfort de 
			400 réguliers pour opérer contre les Français et on annonça 
			l’attaque prochaine des postes de Mashahad Salih et de 
			Ramadah.
			
			
			Dans le mois de juillet 1918, deux bandes de rebelles furent 
			poursuivies : la première dans les Matmata, la deuxième ayant razzié 
			vers Bir al-Hajjaj, fut rejointe en Tripolitaine par les cavaliers 
			de Bir ‘Ali et les chameaux repris. Un goumier fut tué. Un petit 
			combat eut lieu entre le makhzen et cinq rebelles dans la région de 
			Ramadah : un rebelle fut tué et deux autres blessés.
			
			
			En août 1918, il y a eu une recrudescence de l’activité des rebelles 
			; de nouveaux groupes de rebelles apparurent dans le territoire de 
			Tataouine et Matmata. Un petit poste de surveillance de Dahibat fut 
			attaqué. Un chasseur du quinzième groupe spécial fut tué.
			
			
			Une corvée de bois de Dahibat fut attaquée par une vingtaine de 
			rebelles. Les goumiers du poste intervinrent et après un léger 
			engagement le détachement de protection rentra à Dahibat sans perte.
			
			
			Le 19 août 1918, le convoi décadaire partant de Dahibat à minuit fut 
			brusquement attaqué à 2 km au nord de Dahibat. Une centaine de 
			chameaux et 4 chevaux furent emmenés par les rebelles. Les pertes 
			françaises furent 7 tués dont le lieutenant Gruzon, lieutenant du 
			Train et dix blessés.
			
			
			En septembre, le Khalifah des Touazine (Ben Gardane) Hamid 
			Ben Naji fut arrêté à la suite d’agissements suspects. Cette 
			arrestation, disait un rapport militaire français, produisit « une 
			grosse émotion dans le milieu indigène, mais affirme aussi aux yeux 
			de nos tribus que nous sommes disposés à employer la manière forte 
			contre ceux dont la conduite et le loyalisme laisseraient à désirer 
			».
			
			
			En septembre 1918, trois bandes de rebelles dont l’une d’eux fut 
			rejointe vers Bir Darsan : 3 hommes furent tués, deux blessés.
			
			
			Un petit groupe de déserteurs qui opérait entre Kabili et Gabès, 
			dévalisa les chameliers dont l’un portait le courrier postal, puis 
			une petite caravane et un convoi. Mais la complicité des populations 
			leurs permit d’échapper aux poursuites.
			
			
			Le 5 octobre, un petit détachement envoyé de Tataouine à Bir 
			Kassirah pour évacuer un malade grave fut attaqué au col de Bréga. 
			Un conducteur du Train et un tirailleur furent tués, un cavalier 
			blessé.
			
			
			Le 9 octobre, une patrouille de 5 cavaliers de Bir Atslah eut un 
			combat contre un groupe de 7 rebelles.
			
			
			Combat d’Oued Nakhlah
			
			Une harka[2] 
			(haraka) de 350 fusils environ attaqua, le 15 octobre 
			1918 vers l’Oued Nakhlah à 8 km au nord-ouest de Bir Kassirah, le 
			peloton Ragarou et la section mobile de mitrailleuses de la 
			compagnie saharienne protégeant le pâturage des chameaux. Pendant 
			huit heures le peloton résista énergiquement. L’arrivée de renforts 
			de Bir Kassirah (peloton du lieutenant Genevois) détermina la 
			retraite de la harka, qui laissa sur le terrain 4 morts et qui 
			emporta une quarantaine de blessés. Du côté français, 8 hommes 
			furent tués, dont le maréchal des logis Yvorel, commandant la 
			section mobile de mitrailleuses, et 12 blessés dont l’interprète 
			Ragarou.
			
			Une section d’avions (lieutenant Lamy) poursuivit les rebelles en 
			retraire et les bombarda avec des obus Brandt. 
			
			
			Une bande de déserteurs armés commettaient des assassinats dans la 
			région d’Aram et de Toujane. Les patrouilles de Makhzen les 
			recherchèrent mais la complicité des populations leur permit 
			d’échapper aux poursuites.
			
			
			En novembre 1918 enfin, les cadres turcs et allemands furent 
			rapatriés en exécutant des armistices conclues en Europe, les 
			insurgés autochtones restés seuls durent renoncer aux opérations de 
			guerre proprement dites.
			
			
			
			
			Le mouvement Fellaga
			
			
			
			Vers la fin de 1918 et durant les deux années 1919 et 1920, la 
			Tunisie fut le théâtre d’un mouvement Fellaga d’une certaine 
			ampleur. Ce mouvement déborda le cadre du Sud-Tunisien et s’étendit 
			aussi au centre-ouest et au Caïdat de Gafsa.
			
			Si les Fellaga étaient pour les autorités françaises et leurs 
			serviteurs autochtones apostats traîtres ainsi que les mécréants en 
			général, des « bandits », des « brigands », « criminels vulgaires » 
			et aujourd’hui des « terroristes », ils étaient pour le peuple 
			tunisien et musulman et tous les peuples du monde libre des « 
			partisans », des « combattants », des « Moujahidine ».
			
			En effet, « de nombreux déserteurs s’étaient groupés en bandes armés 
			et opéraient sous la conduite de certains chefs. Beaucoup de 
			déserteurs du caïdat des Hmama refluèrent vers le caïdat de 
			Gafsa où les montagnes en grand nombre leur offraient un refuge plus 
			sûr ». Attaquer les soldats français envahisseurs et les traîtres 
			tunisiens, razzier les tribus demeurées fidèles aux Français, piller 
			les fermes coloniales, etc., telles étaient les opérations 
			auxquelles ces Fellaga se livraient. Mais, à la suite de la loi 
			martiale décrétée, des soldats furent envoyés pour pourchasser ces « 
			Fellaga ». Les trains de nuit furent supprimés dans tout le 
			centre-ouest. Autour des chantiers d’Alfa, les soldats montraient la 
			garde sans relâche. 
			
			Même avec le concours de l’autorité militaire, il était d’autant 
			plus difficile de disperser ou de détruire des groupes de Fellaga 
			qui trouvaient parmi la population de nombreux complices. Grâce à 
			leurs indicateurs, les Khalifah, Sheikhs et Caïds arrêtèrent un 
			certain nombre. Pour affaiblir ce mouvement, « une décision 
			ministérielle promit l’amnistie à tous ceux qui déposeraient les 
			armes. Plusieurs dizaines finirent pour se rendre. Seuls les plus 
			compromis continuèrent à tenir le maquis ». Bashir Ibn ‘Ali Ibn 
			Sdira al-Hammami « était le plus célèbre » de tous les Fellaga. Sa 
			mort qui survint le 21 juillet 1920 porta un grand coup à ce 
			mouvement. Fasciné par son courage extraordinaire le peuple 
			tunisien, dans sa quasi majorité voyait en lui un héros et un 
			martyr. Le Khalifah ‘Ali Ibn Hajj Hmid écrivit le 29 
			octobre 1923 au résident général que Bashir (Ibn Sdira) disposait 
			d’une force de 75 Fellaga bien armés et fidèles à ses ordres.
			
			
			Un rapport non daté établit par les autorités coloniales françaises 
			dit à propos de la mort de ce Fellag : « La mort de Bashir, tué 
			traîtreusement » par Belgacem Ibn Muhammad Ibn ‘AbdAllah 
			(al-Agra’) « par un désir de vengeance et aussi par l’appoint de la 
			prime de 5.000 francs promise pour-la capture de ce bandit, mort ou 
			vif, eut pour effet de donner à la famille de ce brigand déjà 
			célèbre et devenu l’objet d’une véritable admiration parmi les 
			populations » du caïdat de Gafsa « un regain de popularité et de 
			prestige. On entend, en effet, dire couramment que Béchir était un
			Moujahid (combattant pour la foi), et on le considère un peu 
			comme un martyr. Lors des dernières fêtes de ‘Achoura, des femmes de 
			Gafsa qui n’ont aucun lien de parenté ni d’alliance avec le brigand 
			sont allées sur sa tombe se livrer à des manifestations de douleur 
			qui en disent long sur la mentalité des gens du pays ... ».
			
			
			Si nous voulions caractériser d’un mot l’opinion publique 
			arabo-musulmane au Maghreb pendant la Grande Guerre, nous pourrions 
			dire qu’elle était dans un état de tension, de Jihad 
			panislamique contre l’ingérence et la domination européenne et pour 
			se libérer de l’oppression coloniale.
			
			
			En dépit de la victoire définitive de 1’entente, les Turco-Allemands 
			pouvaient être satisfaits de leurs pertes : ils n’avaient consacré à 
			cette guerre qu’une centaine d’officiers turcs, environ 200 
			sous-officiers turcs et quelques Allemands contre plus de 100.000 
			soldats de l’entente.
			
			Il ne va pas sans dire que les nationalistes panislamiques agissant 
			de l’extérieur et de l’intérieur, ne faisaient que tourner leurs 
			regards vers Istanbul, siège du calife. Rien d’étonnant donc que la 
			population tunisienne dont une certaine fraction entretenait même 
			des rapports matrimoniaux avec des familles d’Istanbul, se montrait 
			particulièrement préoccupée par le sort réservé à l’empire ottoman : 
			la défaite de la Turquie, la pénétration des troupes alliées à 
			Istanbul et l’amputation de ce centre de l’Islam d’une bonne partie 
			de son territoire, de ses provinces arabes à l’Arménie, 
			provoquèrent, selon une note officielle française, « la mélancolie 
			de nos Algériens et Tunisiens même les plus loyalistes même ceux qui 
			ont contribué à cette défaite ».
			
			
			Par contre la nouvelle de l’armistice et la victoire définitive de 
			l’entente ont été bien reçues par un certain nombre de gens 
			notamment les chefs, les notables et les Jeunes-Tunisiens loyalistes 
			: elles étaient l’occasion de fêtes et de fantasias un peu partout 
			en Tunisie. Ces derniers venaient complimenter les autorités 
			françaises et les assurer de leur loyalisme et leur fidélité.
			
			Contrairement à l’image d’une Tunisie « calme et tranquille » 
			pendant la guerre, quoique maquillée de belles déclarations de 
			loyalisme, nous croyons avoir démontré, une autre image assez 
			différente. Les peurs des colons, qui pourraient être exagérées par 
			les besoins de la cause, étaient nourries de faits réels. La guerre 
			avait ébranlé assez fortement les fondements du Protectorat 
			(Tunisie). Des bandes composées de déserteurs, de « nomades 
			belliqueux » maintinrent un climat d’insécurité. Dans le nord les 
			incendies de forêts, des refus de payer l’impôt se multiplièrent.
			
			La haine de l’armée et de la guerre et les levées d’hommes 
			suscitèrent la colère. La capitale surtout était assez sensible aux 
			événements de l’extérieur et aux difficultés économiques dont les 
			effets conjugués menaçaient d’être explosifs. La poussée des prix, 
			la rareté du pain en 1917 entretenaient l’agitation, les émeutes et 
			les manifestations dirigées aussi bien contre les Français que 
			contre les israélites qui profitaient de la guerre. Ces 
			manifestations acquirent une extension sérieuse, et gagnèrent très 
			vite Bizerte, Sousse, Sfax, Kairouan, Béja, Menzel Bou Zalfah, Bani 
			Khallad, Nabeul etc. Tout cela prouve, évidemment que les craintes 
			des colons et du pouvoir ont été fondées.
			
			
			
			
			La lutte constitutionnelle
			
			
			
			Comme la résistance armée à la présence française n’était plus 
			possible, les Tunisiens, continuèrent la lutte constitutionnelle. 
			
			
			Des émeutes qui causèrent 118 morts eurent lieu à Tunis en 1938 
			suite à l’arrestation d’un dirigeant politique. 
			
			
			Entre 1942 et 1943, la Tunisie fut la scène de la troisième majeure 
			opération par les Forces Alliées (les britanniques et les 
			États-Unis) contre le Pouvoirs de l’Axe (l’Italie et l’Allemagne) 
			pendant la Seconde Guerre mondiale. 
			
			
			Entre 1957 et 1962, il y eut des affrontements entre les Tunisiens 
			et les Français à la frontière puis en 1958, suite à une attaque 
			aérienne française, sur le village tunisien de Saqiyah Sidi 
			Youssouf, à la poursuite de résistants algériens. 
			
			
			Entre 1952 et 1956, les activités de la résistance augmentèrent 
			châtiés par la contre-résistance des colons européens mais menée par
			Habib Bourguiba, surnommé « le Mangeur de Ramadan », qui 
			devint plus tard le premier président tunisien sous la Tunisie qui 
			devint finalement indépendante en 1956, tout en restant un vassal de 
			la France.
			
			
			En 1961, la garnison française de Bizerte prit le contrôle de la 
			ville mais se retira en 1963. 
			
			
			En 1983, il y eut des émeutes de pain et en 1985, le raid juif 
			contre le quartier général Palestinien à Tunis. 
			
			
			En novembre 1987, les docteurs déclarèrent Bourguiba inapte à régner 
			et, dans un coup d’état en douceur, le premier ministre Zine 
			al-‘Abidine Ben ‘Ali devint le nouveau président et le resta jusqu’à 
			sa fuite du pays en 2011, déguisé en femme voilée pour ne pas être 
			reconnut. 
			
			Il fut parmi les meilleurs vassaux de la France qui appliqua 
			strictement à la lettre tous les ordres qui lui furent donné 
			d’outre-mer et sa perte fut pour une plaie pour le monde.
			
			Lui et sa famille pillèrent la Tunisie et opprimèrent durement le 
			peuple qui fut privé de toute liberté. Ils furent accusés par la 
			suite de corruption et de pillage du pays et jugés in absenta en 
			2012.
			
			
			Bien sur un grand nombre de crimes, de massacres, de viols et 
			d’autres tragédies furent commis en Tunisie par l’armée française 
			sous l’occupation que je ne peux rapporter ici mais que vous 
			trouverez dans « le livre blanc sur la détention en Tunisie » 
			datant de 1953. Mais ce qui est pire, c’est que leurs 
			serviteurs Bourguiba et Zine al-‘Abidine commirent les même crimes 
			sous leurs règnes.
			
			
			Aujourd’hui en 2012, il y a un nouveau président en Tunisie mais 
			comme la structure de l’état est exactement la même que la 
			précédente et que la politique intérieure est toujours exercée de 
			l’extérieur, il n’y aura donc aucun changement et c’est donc un 
			retour à la case zéro, du moins pour le moment car on ne peut pas 
			faire du neuf avec du vieux.
			
			Pour tourner la page des années noires de corruption et de misère, 
			il faut définitivement remplacer tous ceux qui y contribuèrent d’une 
			quelconque manière. Tant qu’ils resteront au pouvoir, ils 
			continueront de gangréner l’état et de servir les ennemis de la 
			nation musulmane. 
			
|    | 

