Les Raïs
ou
Voici quelques livres interessants que vous pouvez directement
télécharger dont certains ont été traduit de l'arabe par
des orientalistes donc à pas prendre pour argent
comptant ou leur attribuer une quelconque authenticité.
J'ai retiré toutes les introductions mais pas les notes
car cela m'aurait pris trop de temps. Je vous invite
donc à vous en tenir au texte et d'éviter les notes. Je
n'attribue aucune confiance à ces traducteurs pour ma
part.
Si j'ai mis ces livres en ligne c'est surtout qu'ils
contiennent certaines vérités mais j'ignore le degré de
corruption puisque je ne dispose pas des livres
originaux. Nul n'ignore qui étaient les orientalistes et
que leur mission. Atendez-vous à
l'habituel vocabulaire de circonstance.
- Le miroir aux affects haineux : L'image du Barbaresque
et du captif chrétien dans la France et l'Europe du
début du XVIIe siècle. Un texte sur la manipaltion des
masses pour lever
contre les Turcs et les Barbaresques (les Musulmans) eux des croisades à volonté (ici).
Des méthodes testées qui marchent toujours de nos jours.
- Tarikh al-Ifriqiyah lil Qayrawani. Histoire de
l'Ifriqiyah (Tunisie) jusqu'à l'an 1092 de l'Hégire
(1680) par le seul historien tunisien (d'après le
traducteur). J'ai laissé la courte introduction (ici).
- Ghazawat 'Aroudj wa Khaayr ad-Din.
Volume I
et Volume
II
- Raïs Hamidou. Le dernier Raïs algérien (ici).
- Tashrifat. Extraits de registres admistratifs de la
Régence d'Alger (ici).
et enfin la cerise sur le gateau et du sur à 100% :
Voici les trois volumes de Moulay BELHAMISSI Marine
et Marins d'Alger (1518-1830). Je pense que le
travail de Mr Belhamissi pour le sujet suffira largement
et que le mien est désormais tout à fait inutile. Insha
Allah, j'essaierai de vous présenter une version PDF
améliorée d'ailleurs, je vais m'occuper de cela dès
maintenant.
- Marine et Marins d'Alger (1518-1830) Tome I - Les
navires et les hommes (ici).
- Marine et Marins d'Alger (1518-1830) Tome 2 - Face à
l'Europe (ici).
- Marine et Marins d'Alger (1518-1830) Tome 3 - Grandeur
et decadence (ici)
|
Introduction
Les Barbaresques
Définition Wikipedia :
Barbaresque est un terme tombé en désuétude au XIXe siècle qui
désignait les pirates opérant dans le bassin méditerranéen après
la conquête musulmane qui fit de la Méditerranée un vaste lac
musulman. La durée de leur activité en mer Méditerranée est
telle qu'elle peut être décrite depuis les premiers temps de
l'Islam, alors associée à la conquête musulmane sur le continent
européen, qui, une fois la péninsule ibérique prise, se prolonge
par des incursions en Septimanie jusqu'à des prises de villes en
Provence.
Dictionnaire de L'académie
française (8 ème édition)
Qui appartient aux peuples de
Barbarie. Navire, corsaire barbaresque. Les États barbaresques.
Pirates ou Corsaires ?
Par définition, les pirates
agissent seuls, pour leur propre compte et uniquement pour
s’enrichir tandis que les corsaires agissent sur commande d’un
monarque contre les navires d’une puissance ennemie clairement
désignée. Le but est d’affaiblir sa puissance navale et de
couper ses voies d’approvisionnement, tout en s’enrichissant
aussi par les prises réalisées ce que l'on nomme sous un autre
nom : le Jihad Naval.
Ceci dit, afin de d'en savoir
un peu plus sur un sujet que j'ignorais totalement, j'ai
découvert trois siècle d'une histoire passionnate sur les mers
que je tiens à vous partager. Voici un
excellent article du professeur Moulay Belhamissi de
l'Université d'Alger qui servira d'introduction au sujet des
Barbaresques et qui nous rapporte autre chose que les contes
ancestraux et médiévaux dont on bourre le crâne des gens depuis des
siècles et ou l'on fait passer les Musulmans de l'époque pour
des Barbares (les Terroristes de l'époque en d'autre terme et si
vous utilisez Google pour "barabaresque" vous verrez que
les contes sont maintenant incrustés durs comme fer dans la
conscience populaire et que la relation entre ces deux mots a
aussi été faite)
cependant ceux qui les accusent et bien qu'ils essaient par tous
les moyens de blanchir (dans tous les sens du terme) l'Histoire et l'humanité à travers toute
leur panoplie d'armes, ont incontestablement leurs mains
souillées de sang et bien pire que ces malheureux Barbares quils
accusent, les absents ayant toujours tords.
A-t-on jamais entendu un
mécréant s'excuser pour un crime commis contre un Musulman ?
Jamais, c'est pourquoi les trois millions d'Algériens tombés
sous 160 ans d'occupations attendront encore longtemps puis,
vous ne trouverez jamais un mécréant faire l'apologie d'un
Musulman sauf si c'est un traitre ! Donc à chaque fois que vous
les entendez faire les louanges d'un Musulman vous comprendrez
ce qu'il était en vrai. Il est sans espoir qu'un mécréant
reconnaisse ses crimes envers l'humanité tant qu'il est vivant
mais quand il mourra il pourra alors faire grincer ses
violoncelles avec ses cordes vocales à volonté et se lamenter sur ses
crimes pour l'éternité.
Les barbaresques ou les
Moujahidine Bahri sont donc nés suite aux pillages et aux
innombrables enlèvements de Musulmans (y comprit femmes et
enfants) de leurs villes ou villages par les forces navales
croisées, prédominantes à l'époque sur les mers, qui allaient
les vendre sur les marchés d'esclaves en Europe et qui
rapportaient des sommes considérables d'argent pour leurs
propres états, l'argent étant le nerf de la guerre. Ainsi pour
les empêcher, les Musulmans créèrent des flottes "commandos"
véloces pouvant se déplacer rapidement et disparaitrent aussi
rapidement, de nuit comme de jour et entreprirent la reconquête de
la mer Méditerranée et avec l'apparition des canons, il
devinrent redoutables. Il serait faux de croire que ces
Moujahidine étaient uniquement des "Arabes (comme les fameux "Arabes"
de Poitiers qui étaient en fait tous des Berbères excepté leur chef)"
mais un très grand nombre de convertis italiens, anglais,
hollandais et autres rejoindront leurs rangs, prendront un nom
musulman et gagneront la gloire du martyr comme des rois sur les
mers. Ces moujahidine allaient en retour écumer la mer de la
même manière que leurs ennemis le faisait,
oeil pour oeil, dent pour dent comme
nous l'avons déjà vu dans le volume 2 de l'Abrégé de
l'Histoire du Maghreb ou nous avons déjà effleuré le sujet.
En attendant la suite de nos
travaux, cet article de BelHamissi (l'original est
ici
avec toutes les références et des détails supplémentaires) vous
permettra d'éveiller votre curiosité sur le sujet ainsi qu'une
visite sur le site
SKIKDA de Mr Kamel Boussaboua s'impose. Vous y trouverez de
plus larges informations sur le sujet à travers sa page
Histoire de l'Algérie.
...
|
Je viens juste d'apprendre via l'article
de 'Abdelkader
Boutaleb que Mr Moulay Belhamissi est décédé en 2009. Je prie donc Allah Exalté à Lui
les Louanges et la Gloire de lui faire miséricorde et de le
récompenser largement pour ses excellents travaux qui sont :
• L’Algérie vue par les voyageurs
marocains à l’époque ottomane
• Histoire de Mazouna des origines à nos jours
• Histoire de Mostaganem des origines à nos jours
• Alger par ses eaux
• Les Arabes et la mer dans l’histoire et la littérature
• Histoire de la marine algérienne 1516-1830
• Captifs algériens en Europe chrétienne
• Alger, la ville aux mille canons
• Al-Bahr Wa-Al-Arab Fi Al Tarikh Wa-Al-Adab
Selon Abdelkader Boutaleb :
Enseignant-chercheur El Hadj Moulay est frustré par le
traitement (qu’il juge injuste, biaisé et partiel) accordé à la
marine algérienne par l’historiographie dominante. Il s’attelle
donc à la tâche et effectue des recherches aux quatre coins du
monde.
Selon lui :
« Il fallait résoudre trois ou quatre
problèmes avant d’écrire une histoire dépassionnée. Les
historiens français, par exemple, avaient fait une sélection
documentaire partisane, manifestement orientée qui a fait
endosser aux Turcs tout ce qui n’allait pas en Algérie. A titre
indicatif, la marine algérienne, pour eux, était une
malédiction. De leur point de vue, la marine n’était là que pour
spolier les butins des Occidentaux. Quand on réunit toute cette
production européenne de l’Algérie du XVIe - XVIIe S., qu’est-ce
qu’on constate ? Que l’histoire de l’Algérie était en fait
assimilée à celle de la piraterie que les captifs européens
subissaient l’enfer à Alger, alors qu’il n’y avait aucune trace
des captifs algériens retenus en Europe. Par conséquent, il
fallait revoir toute cette vision tronquée et fausse de
l’histoire, en allant consulter les milliers d’archives à la
Chambre de commerce de Marseille et au Quai d’Orsay. Comme
l’historien est insatiable, j’ai pris mon bâton de pèlerin pour
faire le tour du Bassin méditerranéen, en commençant par Malte,
qui a toujours été, sur le plan maritime, l’adversaire des
Algériens. Puis ce fut au tour de l’Espagne, de la France…
L’article intitulé ‘‘Le raid algérien sur l’Islande en 1627’’
que j’ai publié a eu un large écho et un intérêt insoupçonné.
Comment des Algériens sont-ils partis sur des bateaux en bois au
péril de leur vie, malgré les dangers de la mer du Nord.
Finalement, c’était une expédition heureuse, car les marins ont
mis la main sur un riche butin dont un butin humain de 400
femmes qui ont épousé des dignitaires dont le roi du Maroc. Une
seule est retournée dans son pays, rachetée par le roi du
Danemark. Jusqu’à nos jours, tous les ans, il y a une fête
commémorant cet événement à Reykavik. C’est dire que le souvenir
du raid est resté vivace. » (*)
El Hadj Belhamissi qui ne veut aucunement produire un travail
partisan, en réaction aux écrits prédominants, passe plus d’une
décennie à rassembler, traiter et analyser une documentation
recueillie dans les plus grands centres d’archives connus. Il
est d’ailleurs fier de confier sa méthodologie :
« J’ai voulu donner du poids au sujet, car je n’ai jamais été
friand de sujets cuisinés, préparés ou traités par d’autres.
J’ai toujours travaillé sur des archives vierges. C’est pourquoi
mes travaux sur la marine consistaient à corriger les erreurs
voulues par les historiens européens, à savoir que les corsaires
n’étaient pas des brigands mais des soldats qui agissaient sous
les ordres de l’Etat. De plus, les combats en mer n’étaient pas
une spécialité algérienne mais un phénomène général qui remonte
à l’Antiquité. S’il n’y avait pas de combats inter musulmans,
les Européens ne s’empêchaient pas de livrer bataille entre eux.
Enfin, un motif de fierté, je suis le seul à avoir évoqué les
captifs musulmans en Europe que les deys ont toujours défendus
avec le souci constant de les libérer. C’était une question
d’honneur et de dignité. »
A suivre...
Course et
contre-course en méditerranée ou comment les algériens tombaient
en esclavage
Moulay
Belhamissi - Université d’Alger
I
L'enlèvements des riverains
II La capture
en mer
III Les
risques à l'étranger
IV La guerre
des escadres
Trois siècles de luttes
acharnées, de guerres meurtrières et d’atrocités entre une jeune
Régence active et entreprenante à ses débuts, et la plupart des
nations maritimes d’Europe mues par des préjugés anti-musulmans,
un esprit de croisade et des appétits politico-économiques,
engendrèrent toutes sortes de heurts et de malheurs. Aux
milliers de morts de part et d’autre, de disparus en mer,
s’ajouta le pitoyable lot de captifs.
C’est ainsi que dans de
nombreux états chrétiens (Portugal, Espagne, France, Angleterre,
Etats italiens, Malte et jusqu’à l’ancienne Russie) représentant
une chrétienté militante, des milliers d’Algériens tombèrent aux
mains de leurs ennemis et connurent les affres de l’esclavage.
Peut-on connaître dans le
détail les circonstances de leur capture ?
Longtemps, la non-exploitation
des sources appropriées rendit difficile toute tentative de
tirer de l’oubli le drame qui les frappa.
Les critères occidentaux ont
fait de l’esclavage en Méditerranée l’apanage des seuls
Musulmans. Et tout a été dit et redit sur les malheurs des
Chrétiens retenus à Alger, Tunis ou Tripoli. Consuls, prêtres,
voyageurs, chroniqueurs et captifs ont multiplié les récits sur
« l’enfer » de Barbarie. Par contre, le sort des Musulmans
enlevés et condamnés à la galère ou aux travaux forcés fut à
peine effleuré ou timidement décrit.
Pourtant, les nombreux
documents d’archives, souvent inédits, les témoignages, les
correspondances, les traités conclus avec Alger font mention de
la tragédie vécue par les captifs musulmans.
Concernant la capture par
laquelle tout commençait, nous nous proposons d’étudier « les
quatre zones de dangers qui guettaient les Algériens » :
L’enlèvement sur leur propre
littoral
La chasse organisée sur mer
Les risques des côtes et ports
européens
Les incessantes batailles
navales
I L'enlèvements des
riverains
Procédé classique et ancien !
Bien avant l’arrivée des Turcs au Maghreb central, les
nombreuses incursions chrétiennes sur les littoraux étaient un
moyen aisé et peu risqué d’acquérir des esclaves, afin
d’alimenter les marchés spécialisés ou les galères.
Le voyageur oriental Abd al
Basat ibn Khalal visita le pays en 1464. Il fut amené à Tlemcen,
onze Francs capturés sur la côte de Honaan. Ils s’y étaient
rendus à bord d’un vaisseau afin de piller et razzier les
riverains. Ensuite, il prit le bateau d’Oran vers Tunis. Mais
les vicissitudes de la navigation obligèrent les passagers à
descendre à Bougie. Ecoutons le récit de l’auteur : « Nous y
trouvâmes, dit-il, des Berbères qui, à notre vue, prirent la
fuite, croyant que notre bateau était celui des corsaires
chrétiens qui avaient volontairement et par ruse, changé de
costumes pour s’emparer des Musulmans ».
Lors de la première occupation
d’Oran, quand la dynastie des Zyanides agonisait, les pirates
espagnols pourchassaient les Maghrébins de la cité. Dans une
lettre au Corrégidor d’Oran, Moulay ’Abd Allah se plaignait que
: « des Maures qui ont été faits prisonniers par les gens de
Carthagène ne sont pas de Tabaqrat (petit village près de
Honaan) et sujets du roi, ce que ce dernier attestera par écrit,
signé de sa main et s’il le faut, en donnant sa parole royale. »
Chaque année, l’Ordre de Malte
« armait une douzaine de galères et opérait contre les côtes non
défendues. »
Alenzo de Contreras fut un
chasseur d’esclaves et de butin. Ses confessions montrent qu’il
écumait les rivages du Maghreb et du Proche-Orient ; il s’en
vantait sans rougir : « Nous y fîmes tant de prises que ce
serait long à compter, l’on revint, dit-il, tous riches… Nous y
fîmes d’incroyables voleries sur mer et sur terre. »
Juan Rey, patron de barque de
La Ciotat, longeant le littoral algérien, enleva en 1563 une
vingtaine d’habitants et s’en alla les vendre à Gênes comme
galériens.
Au XVIIe siècle, les coups de
main se multiplièrent. En 1607, les chevaliers de Saint Etienne
se rabattaient sur Bône et s’emparèrent d’un riche butin et de
deux cents riverains. Puis en 1611, une flotte, sous les ordres
du Marquis Santa Cruz ; ravagea l’île de Kerkenna et, en
revenant, incendia la ville de Gigel, arrachant des dizaines de
citadins à leurs foyers.
Vers 1612, plusieurs jeunes,
dont le propre fils du pacha, avaient été kidnappés par un
corsaire génois, alors que « cette jeunesse algérienne sur la
sérée d’un jour de printemps prenait ses bats au rivage de la
mer ». Quant à Monsieur le Chevallier N. de Clerville, il
n’arriva pas à Cagliari en janvier 1662 les mains vides. En
route, il s’empara d’un sandale turc avec ses quarante huit
hommes, « puis, passant à Stor (Stora) il prit douze mores qu’il
a vendus ici. »
La liste des corsaires
capturant des Musulmans est longue. Le Sieur Piquet commandait
Bastion de France, près de la Calle. En 1698, pour se soustraire
à ses devoirs envers le gouvernement d’Alger, « il fit armer
ceux qui pêchaient le corail, chargea si diligemment ce qu’il
avait de meilleur dans la place… avec cinquante Mores » qu’il
partit vendre à Livourne aux galères de Toscane.
Parlant des habitants de
Majorque, Dancour disait qu’ils sont « tous bons matelots,
corsaires et grands voleurs, écumant continuellement les côtes
de Barbarie d’où ils enlèvent quantités d’esclaves ». En effet,
la course chrétienne sévissait d’Oran à la Calle. Les razzias
concernaient les endroits mal défendus. Le valencien Juan
Canète, Maître d’un brigantin de quatorze bancs, basé à Majorque
« arrivait de nuit, y ramassait les Musulmans qui dormaient sous
les remparts ».
L’activité des Espagnols
restait soutenue tout le long de la période. En 1717, un
brigantin de Majorque « prit cinq Turcs sur le bâtiment de
service du Bastion qui allait de cette ville à Bône ». Deux
corsaires d’Iviza ramassèrent en 1755 « sept bâtiments et
quatre- vingt esclaves sur la côte algérienne. »
De tous les ports d’Espagne,
des navires armés parvenaient jusque devant le rivage algérien
pratiquant le rapt et le pillage.14 Le 21 mai 1775 plusieurs
galiotes européennes donnèrent la chasse, sous les remparts de
la Calle, à trois sandales de la région. « Si un bâtiment put
se sauver, les autres furent capturés avec vingt deux membres de
l’équipage qui furent vendus à Malte ».
Le chevalier de Valbelle,
écrit de Grammont, débarquait à l’improviste et enlevait des
hommes dont le nombre atteignit cinq cents qui allèrent grossir
la chiourme de Malte. Le comte de Verée s’embusquait hardiment
dans une petite crique voisine d’Alger. Il s’empara à la pointe
du jour, d’un bateau « sur lequel il trouva quatre gentilshommes
maures et le neveu du Pacha ».
Des années durant, les
incursions maltaises avaient entretenu sur les côtes algériennes
, un état permanent d’insécurité. Gosse avoue que « les
chevaliers de Saint-Jean vécurent du pillage des ennemis de la
foi ».
II La capture en mer
Le péril majeur pour les
marins et les passagers était d’être enlevés en mer. Une
rencontre inattendue, un abordage réussi et voilà la fin de la
liberté et le commencement d’une vie de tourmente et d’enfer !
Les corsaires chrétiens, très actifs, sillonnaient la
Méditerranée et l’Atlantique.
Perafon de Ribera commandait
la place de Bougie en 1534. Dans une lettre adressée à Charles
Quint le 17 mai, il rappelait la décision de son maître par
laquelle ce dernier lui accordait le 1/5 sur les prises faites
avec sa galiote « sauf, dit-il, en ce qui concerne les Maures et
les Turcs qui doivent servir sur les galères », ce qui lui
paraissait juste.
Après avoir relâché à Oran
(occupée par les Espagnols), Ph. De Condi, général des galères
de France, enleva à l’abordage le 22 juillet 1620 deux bâtiments
algériens et « mit aux fers une cinquantaine de marins. »
Le Chevalier Razilly, en
mission au Maroc, rencontra en 1629, non loin de Salé, un bateau
d’Alger, commandé par Muhammad Khodja, s’en empara et l’équipage
tomba en esclavage. La même année, une tartane algérienne se
laissa prendre par un bateau et l’équipage envoyé aux galères.
Les accrochages avec le
chevalier Garnier, en septembre 1634, coûtèrent à la flotte
d’Alger des centaines de tués et de prisonniers. Deux galiotes
algériennes allaient à Istanbul en 1638 quand elles furent
attaquées et prises par des galères toscanes. Le Pacha tomba
prisonnier ainsi que d’autres « chefs et gens de marque ».
Dans une lettre de Cadiz (le
27 novembre 1655), on peut lire : « Le commandant Gidéon de
Wilde a capturé en pleine mer et amené ici un navire turc de
qualité, équipé de 32 pièces (canons). A bord se trouvaient 250 turcs et
environ quarante esclaves. Les Turcs seront vendus pour le
remboursement des frais et, en plus, pour le butin des officiers
et matelots. Avant-hier, les esclaves chrétiens sont partis à
bord d’un navire hollandais qui allait de Venise à Amsterdam. »
Le Chevalier d’Escrainville,
représentant de la France à Malte, se vantait d’avoir enlevé en
1664 et 1665, avec deux vaisseaux seulement, quatre bâtiments
musulmans d’un convoi, ce qui rapporta deux cent mille écus. Et
les corsaires anglais Prince Frédéric et Prince George,
s’attaquant à un bâtiment français, non loin de nos cités,
s’emparèrent de six Algériens qui se rendaient à Livourne.
La chasse aux Musulmans était
soit le fait de corsaires « privés » qui se moquaient des traits
conclus, soit le fait d’escadres. L’état de guerre permanent ou
presque avec la Régence en fournissait le prétexte.
Godefroi d’Estrades écrivait
de Londres à Louis XIV le 9 mars 1662, la lettre dont voici un
extrait : « Le meilleur parti que votre Majesté puisse prendre
pour exécuter ce dessein, c’est d’obliger la flotte que le Roi
d’Angleterre tient dans le Levant et à Tanger d’amener à Toulon
tous les esclaves qu’elle fait dans ces mers et de les vendre à
un commissaire que Votre Majesté commettra pour cela au lieu des
les aller trafiquer en Espagne comme elle fait… Et de cette
façon, l’on m’assure que dans peu de temps, elle en aura un
nombre suffisant mais qui lui en coûtera 360 qui est le même
prix qu’ils vendent en Espagne. Comme ce sont tous des gens
faits à la mer et accoutumés à l’air de nos côtes, il est sans
doute que V/M. en tirera un meilleur service que ceux de Guinée.
»
Interpellant le Diwan d’Alger,
le général Mortemart disait en 1687 : « J’ai arrêté un de vos
navires parce que son passeport était trop vieux…A l’égard des
six Turcs retenus par un navire de mon escadre, sur ce que le
passeport de leur caravelle s’est trouvé daté de deux ans… »
Quelques jours après le fameux
vaisseau algérien Le Soleil tomba également entre les mains des
corsaires avec ses cent vingt-cinq hommes d’équipage. Le
bâtiment revenait du Texel lorsque se fiant au traité de paix de
1684, il se laissa contrôler par un navire français, opération
qui aboutit à la capture des « marins, raïs, écrivain, timonier,
soldats, teinturier, boulanger, barbier… » tous prenant le
chemin de la détention. Le 5 août, ce fut le tour d’une
caravelle avec ses soixante-cinq matelots.
Le Sieur Fourmilier coutumier
de ces pratiques eut souvent l’occasion d’enlever des Algériens.
En janvier 1687, il confia trois esclaves au duc de Mortemart «
dont le vaisseau amiral Le Magnifique touchait Marseille le 16
».
Les croisières rapportaient
beaucoup plus que les razzias isolées. Une seule sortie permit
au duc de Noailles de capturer cinquante et un Algériens.
L’année suivante un autre vaisseau de la Régence fut pris par
d’Amfreville, chef d’escadre qui commandait Le Sérieux : il
rencontra fin novembre dans la « mer de Sardaigne » le bâtiment
algérien qui, se jugeant hors d’état de combattre fut contraint
d’aller s’échouer sur la côte méridionale de l’île près de San
Antonio et de Vaca. Il était pourvu de trente-six canons et de
trois cents hommes… On ramena tout ce monde à Toulon.
L’année suivante, cinq
Algériens en mission à Salé furent pris ainsi que leur barque
chargée de blé par un navire français qui confisqua leurs biens
et les conduisit à Marseille.
A la tête de douze vaisseaux
de guerre, Tourville captura un bâtiment algérien dans le
détroit de Gibraltar : le Raïs Vali se défendit vaillamment avec
son artillerie et sa mousqueterie mais son navire fût coulé et
ses hommes prirent le chemin de la captivité.
Une barque espagnole qu’on
avait armée à Pignon « qui est tout proche du dit Mellit, prit
une frégate d’Alger avec dix sept Maures et trois femmes : une
Juive et deux Maures ».
Au total, près de deux cents
Algériens capturés en deux mois.
Cette chasse en mer permettait
à l’Europe et plus particulièrement au Roi de France, de
pourvoir ses galères en rameurs. Si, en vingt-sept mois, Louis
XIV ne put acheter que 257 galériens, ses vaisseaux mirent la
main, en deux mois de croisière, sur 241 captifs. Peu importait
leur âge ! Muhammad Ibn’Abd al Rahmès d’Alger, matricule 3653,
avait dix ans… Un de ses compagnons d’infortune en avait
soixante- dix-neuf !
Deux corsaires de Malte
s’emparèrent, en 1711, d’une unité de la Régence qui fut
conduite à Majorque avec ses deux cents hommes d’équipage.
Parallèlement, de grands
drames endeuillaient la capitale. Celui du navire Le Dantzik en
fut un. L’Augustus III fut enlevé aux Dantzikois en 1749. Grand,
beau, neuf… Le Dey en fit un vaisseau amiral. Mais en décembre
1751, lors d’un violent combat contre les navires de guerre
espagnols, et après une résistance qui dura quatre jours, il fut
incendié. Les pertes humaines furent considérables ! Trois cent
quatre-vingt marins capturés et quatre-vingt blessés dont le
raïs Chérif.
Quatre années plus tard, une
formation de chebecs espagnols appuyée par des vaisseaux, coula
trois unités algériennes, non loin du Cap Saint Martin. Plus de
cinq cents matelots furent conduits à Carthagène. L’armement de
ces bâtiments comprenait mille cent hommes « tous jeunes,
choisis et embarqués de bonne volonté sous le commandement des
trois plus fameux Raïs de la Régence : Hadj Mïs, Husayn
Barboucha et Husayn dit le petit ».
Barcelo, corsaire espagnol
promu amiral, prit entre 1762 et 1769 dix-neuf navires dont les
équipages furent envoyés aux galères. Dans un dossier des
archives espagnoles, il est question, en 1784, de prisonniers
maures pris sur un navire français.
Après une délicate mission à
Istanbul, Si Hasan, sur le chemin du retour à bord du navire
français La Septimane, spécialement affrétée par le Dey, fut
enlevé par les Espagnols. Il venait de quitter Tunis et, arrivé
en face de l’île de la Galite, il fut assailli par deux
bâtiments de guerre. Avec sa suite et sa cargaison, il fut
conduit à Carthagène où il subit « toutes sortes de mauvais
traitements ».
Le Marquis de Castries donnait
en novembre 1781 au dey Muhammad Ibn’Uthmin des nouvelles du
Raïs Cadoucy capturé par les Gênois dans les eaux de France,
entre Saint-Tropez et l’île Sainte Marguerite.
Parfois en mer, une mutinerie
des captifs chrétiens se déclenchait quand la surveillance se
relâchait. En cas de réussite, on vendait les Musulmans marins
ou voyageurs comme esclaves. On s’emparait du navire et on
libérait les esclaves chrétiens.
Les pèlerins n’échappaient pas
à ces captures, sur leur route vers Alexandrie. En effet, il
partait annuellement, deux ou trois bâtiments, chargés de
fidèles, malgré les risques de l’entreprise.
Un vaisseau d’Alger, commandé
par le Raïs Bostandji cinglait en mai 1687 vers l’Egypte, avec «
cent trente passagers de Fès qui passaient à Alger pour aller à
la Mecque ». Il fut capturé par les Anglais. « On a pris
beaucoup d’or » dit un document.
Deux années plus tard, huit
Algériens qui voulaient accomplir leur devoir religieux,
embarquèrent sur un navire anglais. A leur sortie de Tunis, ils
furent enlevés par des corsaires français.
La prise endeuilla tout Alger.
Le drame de ces victimes amena le gouvernement à adresser
requête sur requête. En décembre 1690, un mémoire envoyé à Louis
XIV à leur sujet décrit le triste sort de ces captifs et les
préoccupations des Algériens qui réclamaient : « qu’il leur soit
restitué huit pauvres pèlerins … gens de place et de vertu
exemplaires, qui n’avaient aucune part à la guerre et qui furent
pris les années passées sur un vaisseau anglais en compagnie des
Tunisiens. Ces pauvres gens, ajoute le mémoire, avaient
abandonné leur patrie, comme des religieux en dessein d’aller se
prosterner au pied de la Maison de Dieu qui est à la Mecque et
ils ont été amenés esclaves… »
Tout Algérien, important ou
pas, commerçant ou matelot, soldat ou pèlerin était concerné. La
capture nécessitait corruption, complicité ou trahison (comme
les drones de nos jours).
En pleine guerre turco-russe,
des négociants algériens, en 1771, montés sur la polacre
française La Rose, venaient d’Alexandrie à Alger. Ils furent
arraisonnés par un navire russe, faits esclaves et conduits à
Malte.
Le capitaine Claude Bartole,
de Saint-Tropez, commandait en 1777 la polacre L’heureux Saint
Victor. Il fut arrêté le 28 août de cette année par une frégate
espagnole La Vierge des Carmes et conduit à Carthagène avec ses
184 passagers algériens qui regagnaient Alexandrie, dans le but
d’accomplir leur devoir religieux.
Quelques années plus tard,
Hadj’Uthman voyageant d’Alger à Istanbul signalait en 1796 à
Hassan Pacha, la capture « dans les eaux orientales » de
cinquante Musulmans qui se trouvaient à bord d’un bâtiment
Maltais.
III Les risques à
l'étranger
Certains Algériens se
trouvaient, pour une raison ou pour une autre (voyage
d’affaires, commerce, transit) dans un port étranger. Il
arrivait aussi aux marins de la Régence de mouiller dans les
ports européens, conformément aux accords conclus. Dans ces cas
le danger était toujours présent.
Un brigantin français, chargé
d’orge et venant de Tripoli, via Malte, accosta en Espagne. A
peine arrivés, les cinq passagers musulmans, dont un Algérien,
Qara Muhammad, furent arrêtés par la douane espagnole.
On n’était à l’abri nulle
part, pas même chez des amis. Incidents et drames se
multipliaient.
Début 1620, un navire
algérien, fut jeté par la tempête près de Cherbourg. On s’empara
violemment du bâtiment, de sa cargaison et de son équipage « qui
n’avait donné lieu à aucune plainte ». Quelques jours après, las
de courrir et de garder les captifs, on les lâcha à travers
champs, en plein hiver, sans vivres ni ressources… Quant au
Raïs, on le jugea. Le lieutenant de l’Amirauté le condamna à
être pendu45. Rappelons qu’un traité de paix et de commerce
avait été conclu le 21 mars 1619 entre la Régence et la France !
Le cas n’est pas isolé. Le 31
octobre 1689, à Palma, une tartane algérienne était retenue au
lazaret, arraisonnée par les Mayorquins. Les Musulmans (ils
étaient 74 aux ordres de Méhmet Bibi, alias Robocalis) furent
faits prisonniers.
La passivité ou la complicité
française encourageait les assaillants. Les traités signés
restaient souvent lettre morte.
En septembre 1716, un vaisseau
français coula au fond dans un endroit peu profond du port de
Syracuse. Il avait à bord 159 passagers musulmans (Turcs et
Algériens) dont 26 femmes et enfants. Les Siciliens se saisirent
sur le champ de tout ce monde et de leurs biens…Voici une longue
lettre envoyée par les captifs au Dey Bib‘Al le 27 janvier 1717
: « Gloire à Dieu, le Tout puissant et miséricordieux… A notre
roi et souverain maître, à nos seigneurs du conseil et à tous
nos frères, les vrais croyants d’Alger, nous vous certifions
qu’étant sortis… du port d’Alger à bord du vaisseau français
commandé par le capitaine Guillaume Aquilton nous arrivâmes à
Tunis en bonne santé. Ils s’y embarqua avec nous plusieurs
personnes pour le Levant.
Nous mouillâmes dans peu de
jours à Malte munis de lettres pour le consul français… Une
tempête dans le golfe de Tibes… Nous priâmes le capitaine de
cingler vers Tripoli que nous avions sous le vent ; mais il nous
répondit que Malte ou la Sicile lui convenait également. Enfin,
après avoir battu les mers pendant 4 jours, nous abordâmes
Syracuse. Nous formâmes un petit camp sur le rivage avec les
voiles du vaisseau et nous abordâmes le pavillon blanc en signe
d’amitié.
Nous fûmes entourés d’une
multitude de gens à pied et à cheval. Ils pillèrent tous nos
effets et nous menèrent à Syracuse, puis à un endroit où on nous
obligea à une quarantaine de quatre lunes (mois).
Nous fûmes ensuite partagés en
deux compagnies et confinés pendant deux mois dans des châteaux
forts séparés. Nous sommes présentement enfermés tous ensemble
dans une maison où l’on a enregistré nos noms, nos qualité et
lieu de naissance ».
Ceux qui ont de quoi payer une
bonne rançon resteront ici, mais les indigents vont avoir les
galères en partage. Quelle affligeante pensée que 159 Musulmans,
outre 26 femmes ou enfants gémissent ici dans l’esclavage ! Ceux
de notre sexe pourraient supporter la servitude avec quelque
fermeté ; mais Seigneur ! les femmes et les enfants réclament
votre secours… Si vous qui êtes ici bas notre roi et notre père,
le leur procurez bientôt, vous deviendrez responsable de tous
les pêchés qu’ils pourront commettre… »
A Syracuse vers la fin de
Muharram, l’an 1129. Ibrahim Cheri ben Assem, Muhammad ben Hadj
Mustapha, ‘Ali ben Ramdhène
Les vicissitudes de la
navigation, le caprice des vents et la furie des vagues
poussaient quelquefois marins et passagers à des extrémités.
Deux Chebecs d’Alger ayant été
jeté par mauvais temps sur les côtes de France, entrèrent dans
la rade de Toulon. Ils furent retenus durant vingt jours puis
autorisés à repartir . Une frégate du roi, Le Zéphir, mettait la
voile en même temps que les chebecs, « confiants, tant sur la
côte de France ». Mais un des deux navires fut attaqué par une
galère espagnole et poursuivi jusqu’au port. Quelques marins se
jetèrent à l’eau, d’autres prirent des chaloupes de secours.
Tous voulaient éviter d’être pris par l’assaillant. Le Raïs,
présumant qu’il allait être capturé par l’Intendant, s’abstint
de tirer. Peine perdue ! Les soldats furent pris et jetés sur la
galère espagnole…
Rien n’était moins sûr que les
ports de France. Fezoullah Raïs l’apprit à ses dépens. Il
commandait une galère du Dey, un jour, il se saisit d’un
bâtiment gênois « chargé de café et de riz ». Il s’en rendit
maître mais fut bientôt attaqué par des corsaires de Gênes. Il
se réfugia avec sa prise sur les côtes « et sous la protection
des canons ». Mais les armements ennemis, sans tenir compte des
batteries, vinrent enlever le tout à quelques mètres du fort.
Cargaison et équipage furent transférés à Gênes.
Les protestations énergiques
d’Alger firent agir le ministre français. Celui-ci tranquillisa
le Dey : « J’attends, dit-il, d’un jour à l’autre des réponses
du Sénat auprès duquel S.M. Impériale a fait réclamer le navire
génois, sa cargaison ou leur valeur dans le cas où il aurait été
vendu ou dénaturé. Je voudrais que le nouveau consul (de Gênes)
pût amener avec lui cet équipage et vous garantir la certitude
de la restitution de la prise ».
D’autre part, il faut signaler
que, même dans les ports musulmans, les Algériens couraient le
risque d’être pris. Un exemple, autre autres, suffira pour
montrer l’extension du danger. En mars 1828, Porto Farine, un
navire d’Alger armé de 6 canons y était entré. Il fut aussitôt
attaqué et ses 63 marins embarqués sur la frégate française
L’Astree.
IV La guerre des
escadres
L’assistance permanente
accordée par Alger au Sultan ottoman dans ses nombreuses guerres
mobilisa une grande partie de la flotte. Les accrochages ne
manquaient pas : « Aucun événement, notait Baudicour, ne
s’accomplissait sur le bassin de la Méditerranée sans que les
corsaires algériens y prissent part. La force principale de
toute la marine ottomane reposait sur eux ».
Mais ces heurts coûtaient
cher. Ils causaient des pertes en hommes et en matériel. De très
nombreux marins et parmi les meilleurs, tombaient entre les
mains de l’adversaire.
La bataille de Tunis en 1535
fit perdre à Khayr al Dine, des fustes et des hommes. Celle de
Preveza en 1538 également. En 1540, alors qu’une formation
algérienne voguait vers Gibraltar, elle fut surprise par une
escadre espagnole. Le choc fut bref mais dur. Des dizaines de
matelots y laissèrent ou leur vie, ou leur liberté.
La guerre de Lépante, en 1571,
coûta cher à la Régence : des morts, des blessés et des
prisonniers par centaines. Le butin de Lépante (1571) a-t-on
dit, fut d’abord un butin humain. Parmi ces derniers, on citera
l’ex-pacha d’Alger, Muhammad ainsi que plusieurs notables, dont
le fils du Pacha‘Ali. Ils passèrent de longues années en
captivité.
Le témoignage de Haedo, même
s’il se rapporte à la fin du XVIe siècle laisse deviner
l’ampleur des pertes humaines : « En 1590 nous dit-il, quatorze
Raïs de galiotes et brigantins se trouvaient dans les prisons de
Castel Novo, pris à différentes époques et par diverses
personnes, parmi eux, Mostefa Arnaout, célèbre corsaire
algérien, homme puissant, marié à une parente du capitaine
Arnaout Mami. »
Les pertes étaient encore plus
élevées quand les marines espagnole et française coopéraient
contre les Algériens. Ouvertement parfois, secrètement souvent,
les deux flottes assenèrent des coups sensibles aux Raïs.
Ainsi le Chevalier Garnier, en
septembre 1634, mena une action contre la marine de la Régence
qui perdit nombre de tués et de captifs.
Puis vint le grand désastre.
Les combats de la Vélone en août 1638 permirent aux Vénitiens de
détruire dix-huit navires. L’amiral Capello, avec ses vingt
bâtiments, surprit la flotte ancrée dans le port. Entassés, les
Algériens ne purent ni manœuvrer ni se servir de leur
artillerie. Quant au total des tués, et des prisonniers, il fut
impressionnant.
En 1657, l’Amiral Husayn se
battait dans les Dardanelles mais il fut fait prisonnier par les
Vénitiens.
La coalition des marines
chrétiennes privait la flotte algérienne de ses meilleurs
capitaines et de ses meilleures unités.
La capture de La Perle d’Alger
eut lieu en juin 1663. Ce navire avait livré bataille, un an
auparavant, au vaisseau français La Lune. Il dut, cette fois, se
rendre au bâtiment français Le Soleil commandé par Duquesne.
En 1695, deux cents Algériens
et en 1698 quatre-vingt furent victimes des corsaires du
Souverain pontife.
Toutes les nations chrétiennes
avaient pour but d’affaiblir voire de détruire cette importante
marine.
En 1709, les chevaliers de
Malte, commandés par Mongon, avaient pris La Capitaine d’Alger,
pourvue de 650 hommes et de 46 captifs chrétiens. Le combat des
trois vaisseaux d’Alger contre les quatre maltais fut si dur que
deux cents Turcs et deux esclaves furent tués et tout l’équipage
fait prisonnier.
Les Espagnols, malgré la
résistance des Algériens, purent en 1751 mettre la main sur le
fleuron de la flotte de la régence, Le Dantzik. La bataille,
longue et meurtrière, se solda par 320 matelots capturés, 80
blessés dont le Raïs et 22 tués.
Il serait trop long et
fastidieux de relater ici tous les évènements tragiques qui
endeuillèrent la Marine, la privant de ses meilleurs hommes. En
effet, de Preveza à Navarin (1827), les guerres d’escadre
avaient causé la perte de centaines de Raïs et de marins. Les
coups de mains, les croisières et les blocus firent le reste.
Cette longue période de
conflits armés et de tensions persistantes vit un grand monde de
Raïs, matelots, mousses, enfants, femmes, vieillards,
commerçants ou pèlerins prendre le douloureux chemin de
l’esclavage pour de longues années ou pour la vie.
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Si cet article concerne uniquement les
Algériens quand est-il alors du reste du littoral musulman ?
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