La préparation pour la réunification de l’Andalousie

La première étape politique de ‘AbderRahmane an-Nassir fut de réunifier à nouveau l’Andalousie sous un seul gouverneur et de chasser les Goths du nord.

 

En l’an 300 de l’Hégire (912), soit la même année de sa nomination, Ibn Hafsoun attaqua la ville de Rayyah soumise aux Omeyyade et l’assiégea. An-Nassir à la tête d’une grande armée libéra la ville peu de temps après et poursuivit Ibn Hafsoun et durant trois mois reconquit un nombre importants de ses forteresses.

Ibn Hafsoun fut consterné d’avoir perdu autant de forts aux mains d’un tout jeune venu à peine au pouvoir. Alors il décida d’attaquer une autre ville du nom de Talash. Il s’ensuivit une grande bataille entre an-Nassir et Ibn Hafsoun qui fut battu et qui perdit un grand nombre d’hommes et de Chrétiens qui étaient venus le soutenir. Et pour résultat, an-Nassir captura d’autres forteresses.

Les gens furent étonnés de la rapidité d’action d’an-Nassir. Les autres Emirs les avaient habitués à la lenteur tant pour la préparation que pour la mise en marche des armées. Tandis que le jeune an-Nassir dès le début de son règne était déjà couronné de succès contre ses ennemis.

Alors Ibn Hafsoun demanda de l’aide aux ‘oubaydiyine ismaéliens au Maghreb.

 

A cette époque, et comme nous l’avons vu précédemment, le Maghreb Arabe (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye actuelle) était tombé aux mains d’un groupe de vils et infâmes fanatiques ismaéliens (isma’iliya) d’origine juive et aussi appelés à tort les fatimides qui capturèrent l’Egypte et voulurent aussi s’étendre au nord vers l’Andalousie. Ils trouvèrent chez Ibn Hafsoun l’opportunité qu’ils cherchaient pour pénétrer en Andalousie et des échanges de messages secrets eurent lieu entre les deux.

An-Nassir qui fut élevé pour diriger, parfaitement informé des intentions d’Ibn Hafsoun se dirigea avec son armée vers Sidonie (shadonia) et Carmona (qarmona) aux mains d’Ibn Hafsoun. Il captura les deux villes et fit brûler tous les navires envoyés du Maghreb pour soutenir Ibn Hafsoun.

 

En l’an 301 de l’Hégire (913), décéda (halaka) ‘AbderRahmane Ibn Hajjaj à Séville et son fils Muhammad Ibn ‘AbderRahmane Ibn Hajjaj lui succéda. Mais un homme du nom d’Ahmad Ibn Maslamah, aussi du clan des Banou Hajjaj, se révolta contre lui. Muhammad demanda de l’aide à ‘AbderRahmane an-Nassir qui aussitôt dépêcha une troupe qui captura Séville et mit fin au règne des Bani Hajjaj.

 

Les nouvelles des victoires rapides et successives parvinrent à tout le monde et aussi à Ibn Qoussay à Saragosse. Il envoya un messager à an-Nassir lui faisant part de sa reconnaissance et de sa soumission à son califat et à ses ordres.

 

En l’an 302 de l’Hégire (914), profitant de la division des Musulmans, le gouverneur de Léon, Ordogne II marcha sur Mérida gouvernée par ‘AbdAllah al-Jiliqi. Il sema sur sa route, massacres, viols et destruction jusqu’à ce qu’il parvienne à Badajoz (batalios) près de Mérida (marida) ou les gens lui envoyèrent une immense somme d’argent et se soumirent a lui. Ordogne (ardonio) fut satisfait de cela et rebroussa chemin. Il eut peur de trop avancer du fait que Mérida était proche de Cordoue et de rencontrer an-Nassir.

 

En l’an 304 de l’Hégire (916), les Chrétiens voyant qu’ils pouvaient impunément pénétrer les terres des Musulmans et y faire ce qu’ils voulaient sans que personne ne s’opposent à eux, convoitèrent plus de butin. Les gouverneurs de Léon et de Navarre s’allièrent et marchèrent sur Tolède la capitale du centre alors aux mains des Banou Dzi Noun.

Si l’Andalousie était unifiée, ils n’auraient jamais pu se permettre cela mais les Musulmans étaient divisés et ils en profitèrent et rentrèrent dans la ville. Les Banou Dzi Noun se retrouvèrent seul, ne demandèrent de l’aide à personne et ne reconnaissait aucune autorité.

Les Chrétiens prirent Tolède qu’ils détruisirent et brûlèrent sa mosquée, violèrent les musulmanes et prirent un immense butin avant de retourner au nord.

 

An-Nassir se rendit compte que ces états indépendants ne pouvaient pas se protéger eux même et qu’il devait faire quelque chose avant que toute l’Andalousie ne chute aux mains des Chrétiens et qu’ils accomplissent les pires crimes comme nous le verrons par la suite.

Comment ces petits villes états pouvaient se considérer comme des états alors qu’ils n’avaient ni force et ni puissance ? Alors ‘AbderRahmane an-Nassir se dit que toutes ces villes indépendantes devaient être sous un commandement unique même s’il devait employer la force pour cela. Mais avant cela, il était important de donner une leçon aux Chrétiens pour qu’ils ne recommencent plus ce genre d’acte.

 

En l’an 304 de l’Hégire (916), ‘AbderRahmane an-Nassir ordonna à son ministre Ahmad Ibn Abi ‘Abdah de se diriger sur Léon. L’armée de Léon s’opposa à lui et s’ensuivirent un grand nombre de batailles entre les deux années sans qu’aucune victoire décisive ne soit remportée par aucun des deux camps.  

 

En l’an 305 de l’Hégire (917), ‘Omar Ibn Hafsoun décéda à Barbastro et son royaume se divisa entre ses trois fils. Ja’far à Barbastro, ‘AbderRahmane à Tarash et Souleyman à Abda. ‘AbderRahmane an-Nassir en profita aussitôt et attaqua Abda qu’il conquit. Souleyman se soumit à lui et an-Nassir l’honora et l’intégra dans son armée. Lorsque ‘AbderRahmane l’apprit, il se soumit aussi sans combattre et an-Nassir l’honora de même.

 

La bataille finale pour la réunification 

An-Nassir se prépara pour la bataille finale qui allait unifier l’Andalousie.

 

En l’an 308 de l’Hégire (920), Ja’far Ibn Hafsoun fut tué à Barbastro et lui succéda son frère Souleyman qui s’était soumis à an-Nassir mais il trahit sa confiance et lorsqu’il eut plus de liberté, il se révolta à nouveau contre lui. ‘AbderRahmane lui envoya un certain nombre d’armées sur une période de deux ans pour le combattre et venir à bout de sa rébellion mais sans succès.

 

Cette même année, dans le plus grand secret, ‘AbderRahmane an-Nassir en personne à la tête d’une importante armée marcha sur Léon. Mais bientôt les Chrétiens furent informés de son avance  et ils envoyèrent leurs armées vers la ville d’al-Faraj.

Le gouverneur d’al-Faraj, une toute petite ville musulmane, en appela à sa population et la défense de la ville. Il réussit à mettre sur pied une petite armée comprenant femmes, enfants, vieillards et sortit à la rencontre des Chrétiens. Et à la grande surprise, cette petite armée, réussit à défaire l’armée des Chrétiens qui furent chassés et poursuivit tout le long de cette journée.

An-Nassir en fut informé et il fut très satisfait du comportement de ces Musulmans. Puis bientôt la nouvelle toucha d’autres villes et de plus en plus de gens venus de toute l’Andalousie, ranimés aux valeurs du combat dans la voie d’Allah (jihad fis-sabilillah) se joignirent à son armée. 

An-Nassir se dirigea sur Tolède aux mains des Bani Zi Noun et particulièrement Loub Ibn Tabarshiyah qui lorsqu’il fut informé de l’arrivée de l’armée d’an-Nassir sortit de la ville avec les dignitaires. Loub l’accueillit et lui porta allégeance et Tolède se rangea sous le commandement de ‘AbderRahmane an-Nassir.   

 

La bataille de Maubeuch 

L’Andalousie pratiquement unifiée fit réapparaître la puissance des Musulmans prouvant que la division est synonyme de faiblesse et l’unité synonyme de force.

 

En l’an 308 de l’Hégire (920), ‘AbderRahmane an-Nassir sortit pour une des plus grande et importante bataille de l’histoire d’Andalousie : la bataille de Maubeuch que la plupart des Musulmans ignore comme notre histoire. Une histoire qui pourtant dès que l’on en a connaissance, fait revivre les cœurs et donne envie de briller comme le firent nos ancêtres.

 

Cette année, ‘AbderRahmane an-Nassir se dirigea vers la ville de Salem (madinatous-salim) qui à cette époque n’était pas connue mais elle allait par la suite devenir une base militaire pour les Musulmans. An-Nassir captura tous les villes et forts des alentours avant de s’arrêter à Salem (salim) pour y réorganiser ses forces.

Cette ville se trouvait au sud du fleuve Duera (douira) qui est un fleuve principal des régions du nord et qui sépare les territoires chrétiens et musulmans. Les Chrétiens au nord du fleuve et les Musulmans au sud.

‘AbderRahmane an-Nassir choisit cette ville comme base de ses opérations d’où il envoya différents corps de troupes capturé de nouvelles régions.

- Il envoya Sa’id Ibn Moundir, son ministre, vers la forteresse de Warshamah. Sa’id mit le siège sur la forteresse puis la conquit, prenant tout ce qui était utile avant de la brûler et de la détruire jusqu’à ses fondations et la rendre inutilisable à l’avenir.

- ‘AbderRahmane an-Nassir en personne se dirigea sur la forteresse de Qashtar. Lorsque les Chrétiens apprirent la nouvelle de la chute de Warshamah, ils abandonnèrent la forteresse et s’enfuirent. Lorsqu’an-Nassir arriva, il trouva la forteresse totalement vide. Il prit tout ce qu’il y avait dedans puis la détruisit totalement ainsi que plusieurs autres forts qui se trouvaient dans la région. Puis il assiégea la forteresse de Qolognia qui tomba après une courte durée après que ses habitants aient tous fuient.

Puis an-Nassir ordonna à Muhammad Ibn Loub, un de ses commandants, de marcher vers la forteresse de Qalqarah. Les habitants informés des chutes successives de toutes les autres forteresses se sauvèrent avant l’arrivée de sa cavalerie et Muhammad trouva la forteresse vide.

Puis an-Nassir de nouveau se dirigea vers la forteresse de Qalharah qu’il trouva aussi vide. Puis il traversa l’Ebre (abra), un petit bras du fleuve en direction du nord. Lorsque les Chrétiens furent informés de toutes ses conquêtes victorieuses et de la capture de beaucoup de régions qui étaient en leur possession, Sancho (shanja), roi de Navarre en personne se dirigea vers ‘AbderRahmane an-Nassir pour le stopper.

Les deux armées se rencontrèrent près du fleuve d’Ebre et avant que l’avant garde des Musulmans aient eut le temps de traverser, Sancho donna l’assaut et la bataille entre l’armée de Navarre et l’avant garde des Musulmans eut lieu au milieu du fleuve. Quant au reste de l’armée des Musulmans, elle était toujours sur la rive.

L’avant garde des Musulmans écrasa l’armée ennemie qui s’enfuit. ‘AbderRahmane an-Nassir réorganisa rapidement ses forces avant de marcher sur Navarre. Les Chrétiens se réfugièrent dans les montagnes d’où ils harcelèrent sans succès les Musulmans qui continuèrent leur avancée. Puis an-Nassir réorganisa une nouvelle fois ses forces en vue de la bataille qui s’annonçait, une terrible bataille qui allait décimer l’armée de Navarre.

L’armée battue de Navarre se réfugia dans la forteresse de Maubeuch ou elle fut rejointe par l’armée de Léon et de toutes les autres forces chrétiennes qui avaient fui l’avance des Musulmans.

Sitôt arrivé ‘AbderRahmane an-Nassir mit le siège, les pilonna avec ses catapultes et finalement donna l’assaut. Il conquit ainsi la dernière de leurs principales forteresses dans la région. Il fit un immense butin et assit son pouvoir sur la région.

La bataille de Maubeuch dura trois mois consécutifs et an-Nassir ne voulut pas poursuivre les Chrétiens plus en avant, avant d’avoir réorganisé toutes ces forces : l’armement, les vivres et tout ce qui est nécessaires pour conduire de longs sièges et pour consolider ses arrières.

 

Je n’ai pu trouver hélas plus de détail sur ces événements connus sous le nom de bataille de Valdejunquera.

 

La chute de Talavera et la politique de la terre brûlée 

En l’an 309 de l’Hégire (921), Ordogne (ardonio), le gouverneur de Léon, à la tête d'une immense armée, avança sur Talavera (talbira) qu’il captura de même que toute la région. Il mit en pratique une nouvelle technique qui peina beaucoup les Musulmans : la politique de la terre brûlée. Sachant qu’il ne pourrait pas indéfiniment occuper les terres conquises des Musulmans, il brûla systématiquement avant de se retirer tout ce qui pouvait être brûlé y compris les cultures pour que les Musulmans ne reviennent plus habiter ces lieux si bien qu’il ne resta plus un seul musulman au nord.

‘AbderRahmane an-Nassir ordonna à son ministre Ahmad Ibn Abi ‘Abdah de se diriger vers San Estéban (san istifan) la plus importante forteresse du Royaume de Léon ou il mit le siège. Lorsque les nouvelles du siège de sa forteresse parvinrent à Ardonio, il se mit en marche à la tête d’une immense armée tout en appelant à l’aide les Francs et le roi de Navarre qui lui envoyèrent des renforts.

Lorsque les espions d’Ahmad Ibn Abi ‘Abdah l’informèrent de l’arrivée d’une prodigieuse force, il sut qu’il ne pourrait pas y faire face. Il ordonna un retrait immédiat tout en restant constamment informé du mouvement des troupes adverses.

Lorsque la rencontre entre les deux armées fut imminente et pour réduire les pertes des Musulmans, il fit ce qu’aucun commandant d’armée ne fait jamais ou si peu. Il ordonna à son armée de se retirer rapidement et pour protéger le retrait de sa troupe, à la tête d’un petit nombre de guerriers ayant jurés de combattre jusqu’à la mort, il attendit l’arrivée de l’armée ennemie.

Lorsque les Chrétiens arrivèrent, ils trouvèrent ce commando de jeunes martyrs les attendant qui face à cette innombrable armée, combattirent courageusement et intelligemment, résistant assez longtemps pour permettre au reste de l’armée d’atteindre une position sure, jusqu’à ce qu’ils atteignirent tous le martyr, puisse Allah le Très Haut leur faire Miséricorde.

 

En l’an 310 de l’Hégire (922), ‘AbderRahmane an-Nassir donna à Badr Ibn Ahmad Ibn Abi ‘Abdah le commandement d’une nouvelle armée et demanda à tous ceux qui lui avaient porté allégeance d’envoyer des renforts. Bientôt venus de tous les coins de l’Andalousie, des milliers d’hommes intégrèrent la nouvelle armée de Badr.

Les nouvelles de cette armée parvinrent au nord et les Chrétiens firent de même et réunirent leur force pour la prochaine bataille qui s’annonçait. Sitôt prêts, ils dépêchèrent leur force à la rencontre des Musulmans mais les Musulmans arrivèrent avant eux et avant que l’armée ennemie ne s’établisse et s’organise les Musulmans fondirent sur eux et les écrasèrent lors de la fameuse bataille de Matounia. L’alliance des deux royaumes de Léon et de Navarre perdit un nombre considérable de soldats lors de cette bataille.

 

La bataille de Pampelune 

En l’an 311 de l’Hégire (923), sous le commandement de Sancho, les forces réunies de Navarre et de Léon traversèrent le fleuve Duera en direction de Buquera encore aux mains de Muhammad Ibn Loub et de Moutrif Ibn Moussa Ibn Zi Noun qui ne purent arrêter l’immense armée. Sancho (shanja) donna l’assaut sur la forteresse et tua tout ce qui s’y trouvait à l’intérieur.

Les nouvelles que les Chrétiens avaient de nouveau traversés le fleuve et commit les pires atrocités contre les Musulmans parvinrent à ‘AbderRahmane an-Nassir qui décida alors d’agir.

 

Et les rumeurs coururent qu’an-Nassir était invincible du fait qu’il ne perdit pas une seule bataille depuis le début de son règne. ‘AbderRahmane an-Nassir ne s’arrêta pas là, il préparait sa vengeance contre les croisés du nord après leur crime de Buquera. Il prépara une immense armée et se mit en route, en l’an 312 de l’Hégire (930), vers les royaumes du nord ou allait avoir lieu une nouvelle et terrible bataille historique que très peu de Musulmans connaissent : La bataille de Pampelune (ma’rakatou bambalona).

 

‘AbderRahmane an-Nassir se déplaça en personne à la tête de son armée. Il dépêcha ‘Abdel Hamid Ibn Sayl à la tête de l’avant garde qui réussit à stopper l’avance de l’armée ennemie.

En même temps, alors qu’an-Nassir avait besoin de toute l’aide possible pour contrer la nouvelle menace, certains préoccupés uniquement par la recherche du pouvoir et des richesses du vain bas-monde et nullement préoccupés de la défense des Musulmans, en profitèrent pour se rebeller contre lui dans l’est. ‘AbderRahmane Ibn Wassah et Muhammad Ibn ‘AbderRahmane Ibn Sayl se révoltèrent à Tadmir (todmair) et Valence (bolensia).

An-Nassir eut peur d’être attaqué sur deux fronts lors de son offensive décida de stopper son avance et de se diriger vers les rebelles. Il réussit à capturer les deux villes hormis une forteresse dans laquelle se réfugia Ibn Sayl et qui lui résista.

Ne pouvant pas soutenir son siège plus longtemps craignant que les Chrétiens en profitent pour capturer d’autres terres et y semer d’autres terreurs, il laissa un corps de troupe sur place et se dirigea vers le nord.

Tandis qu’il avançait, il trouva sur sa route toutes les forteresses des Chrétiens vides jusqu’à ce qu’il parvint aux pieds des montagnes du Défilé de Markaway. Sachant combien un défilé peut contenir de danger pour une armée en mouvement et propice pour des embuscades, ‘AbderRahmane an-Nassir s’arrêta et réorganisa son armée. Les Chrétiens tentèrent de l’attaquer mais sans succès.

L’avant garde d’an-Nassir réussit à passer le défilé sans la moindre perte et parvint à une importante ville du nom  d’Asconte (ashqonta) qu’elle captura. Lorsque Sancho, roi de Navarre fut informé, il réunit toutes les troupes disponibles et marcha sur an-Nassir alors que son armée se trouvait encore dans le défilé.

Grâce à son génie militaire ‘AbderRahmane an-Nassir anéantit l’armée des mécréants et il y eut tellement de morts que son armée dut passer sur les dépouilles. An-Nassir continua son avance jusqu’à Pampelune, la ville la plus importante du Royaume de Navarre ou il prit d’assaut toutes les forteresses avoisinantes. La nouvelle que rien ne pouvait stopper an-Nassir arriva aux habitants de Pampelune qui fuirent et lorsqu’il arriva il trouva la ville totalement vide qu’il ordonna de détruire.  

Lorsque Sancho (shanja), roi de Navarre, vit ses défaites consécutives et la perte de sa capitale, il réunit ses forces dans la forteresse de Qays. Mais les espions d’an-Nassir lui rapportèrent aussitôt la nouvelle et sans perdre un instant, il se dirigea vers lui et l’attaqua.

Sancho qui ne s’attendait pas à cette attaque éclair fut totalement prit par surprise. Il réussit à s’enfuir à San Sabine tandis que ‘AbderRahmane an-Nassir prit la forteresse de force et la rasa. Sancho réunit d’autres forces mais an-Nassir fondit une nouvelle sur lui et écrasa son armée forçant Sancho et les rescapés à se cacher dans les montagnes.

Ces bonnes nouvelles parvinrent aux Musulmans qui s’étonnèrent des prouesses du jeune homme d’à peine 23 ans et beaucoup de ses ennemis reconnurent alors ses compétences exceptionnelles et vinrent lui porter allégeance et parmi eux les Banou Zi Noun.

‘AbderRahmane an-Nassir qui était resté longtemps absent en expédition retourna à Cordoue en l’an 313 de l’Hégire (925).

 

La mort de Souleyman Ibn ‘Omar Ibn Hafsoun 

En l’an 314 de l’Hégire (926), Sancho, à qui il restait quelques parcelles de territoire, réunit une nouvelle armée et reprit Pampelune.

Son très jeune fils Garcia Junior (gharciya al-asghar) prit la succession de son père. Mais étant trop jeune pour diriger c’est sa grand-mère Tota qui prit en charge les affaires du fait qu’elle avait la charge de l'enfant.

Un des commandants militaire de Navarre ayant vu que le pouvoir étant tombé aux mains d’une vieille femme et d’un enfant s’entendit avec Ordogne, le roi de Léon et se rebella contre Garcia et sa grand-mère et les expulsa de Navarre. Ceux-ci et leur partisans trouvèrent refuge à Cordoue ou ils demandèrent de l’aide à ‘AbderRahmane an-Nassir.

An-Nassir pesa le pour et le contre pour satisfaire leur demande. S’il leur accordait son aide, la division augmenterait parmi eux et ils pourraient mieux en venir à bout.

Il envoya une armée avec eux pour reconquérir Pampelune et effectivement Tota et Garcia entrèrent en vainqueur, récupèrent le pouvoir et établirent de bonne relations avec An-Nassir qu’ils n’allaient pas tarder à trahir comme cela est de coutume chez eux.

 

Pendant ce temps, Barbastro, la capitale du sud-est, était toujours aux mains des Bani Hafsoun.

‘Abdel Hamid Ibn Sabil, un homme d’an-Nassir réussit à attaquer et à tuer Souleyman Ibn ‘Omar Ibn Hafsoun et le frère de Souleyman, Hafs, annonça aussitôt sa rébellion mais peu après, porta allégeance à an-Nassir qui lui pardonna. Barbastro et tout le sud-est revint sous l’emprise des Omeyyade après quarante-sept années de rébellion et ainsi prit fin de la rébellion des Hafsoun.

 

Durant ce temps, les ‘oubaydiyine régnaient d’une main de fer au Maghreb et étendaient leur prise de pouvoir sur l’Afrique.  

 

‘AbderRahmane an-Nassir prend le titre de calife et émir des croyants 

En l’an 317 de l’Hégire (929), à Bagdad la capitale des Abbassides, Mou'anath al-Mouzaffar tua le calife al-Mouqtadir Billah et nomma al-Qadir as-Souri calife. Les nouvelles parvinrent à an-Nassir qui annonça que cet homme al-Qadir Billah as-Souri n’était pas le calife des Musulmans mais juste une image et qu’en aucun il ne méritait d’être appelé émir des croyants.

Des lors, ‘AbderRahmane an-Nassir prit le titre de calife, d’émir des croyants et le surnom d’an-Nassir alors qu’auparavant il avait toujours été appelé tout simplement émir. Pour la première fois dans l’histoire de l’Andalousie, le gouverneur prit le titre d’émir des croyants. Et ainsi le règne de ‘AbderRahmane an-Nassir fut appelé le règne du califat (khilafah).

Certains historiens ont rapporté cet évènement au 02 du mois de Dzoul Hijjah de l’année 316 de l’Hégire (928) et ‘AbderRahmane an-Nassir fut sans conteste l’un des plus puissants califes omeyyade d’Andalousie.

 

La menace ‘oudaydi 

Bientôt les gouverneurs du Maghreb cherchèrent aussi de nouveaux espaces à conquérir et se tournèrent vers l’Andalousie.

 

En l’an 318 de l’Hégire (930), une lourde flotte de guerre ‘oubaydi attaqua Almeria (mariya), une ville portuaire à l’embouchure d’un fleuve principal au sud-est de l’Andalousie, une des principales bases navales des Omeyyades et y causèrent un grand ravage.

‘AbderRahmane an-Nassir pensa que s’il ne faisait rien bientôt les ismaéliens reviendraient pour reconquérir l’Andalousie. Il organisa alors ses forces, fit rapidement bâtir une nouvelle flotte militaire, reconstruisit le port détruit et fit ce que personne des précédents gouverneurs Andalous ne fit. Il s’embarqua aussitôt en expédition punitive contre les ismaéliens et conquit Ceuta (sabta), la ville qui fait face au Detroit de Gibraltar (madiq jibal tariq).

A partir de cette ville forteresse, il protégea l’Andalousie de toutes nouvelles aventures guerrières et il alla jusqu’à harceler les ‘oubaydi sur leur propre terre.

Mais il ne put rester bien longtemps absent du fait que des gens, peu soucieux de la grandeur des Musulmans et uniquement préoccupés des valeurs terrestres, se rebellèrent à Tolède.

An-Nassir réunit un groupe de savants Musulmans et les envoya à Tolède pour mettre fin à cette rébellion. Ils tentèrent de conseiller les rebelles et firent leur possible pour éviter de fâcheuses actions mais les rebelles s’entêtèrent. Alors an-Nassir leur envoya une armée qui faillit dans sa mission de capturer de la ville.

 

Le roi de Léon profita de cette division entre les Musulmans et envoya une armée au secours de Tolède. Lorsque ‘AbderRahmane an-Nassir fut informé, il envoya une armée intercepter cette troupe avant qu’elle ne parvienne à Tolède et se joigne à l’armée de rebelles. Commandant lui-même cette armée, il réussit à détruire l’ennemi avant qu’il ne parvienne à Tolède. Lorsque les rebelles furent informés de la défaite de cette armée, ils faiblirent et se soumirent à an-Nassir, trois années après le début de leur rébellion.

 

Mais ce n’était pas la fin de la guerre entre les Chrétiens et ‘AbderRahmane an-Nassir et bientôt allait avoir lieu, une autre majeure bataille, la bataille d’al-Khandaq (tranchée).

 

La désastreuse bataille d’al-Khandaq 

Rappelons que le nord était divisé en trois royaumes :

- Le royaume de Léon au nord-est, le plus important, le plus près des Musulmans, le plus dangereux et le plus puissant.

- Le royaume de Navarre au centre nord, aux mains de Tota et de Garcia secourus par an-Nassir après qu’il eut recapturé pour eux Pampelune et,

- Le royaume des Français au nord-ouest.

 

En l’an 321 de l’Hégire (932), Ramirez II (romiro thani) prit le pouvoir et mit sept ans pour mettre fin à tous les troubles intérieurs qui secouaient le royaume de Léon. Puis ayant fortifié ses arrières, il avança vers les terres musulmanes jusqu’à parvenir à la forteresse de Waghshamah que les Musulmans fuirent avant l’arrivée des Chrétiens réputés pour leurs abominables crimes. Lorsque ‘AbderRahmane an-Nassir fut informé, il leva aussitôt son armée et marcha sur la forteresse. Mais lorsque les ennemis d’Allah apprirent qu’il était le commandant de l’armée, ils prirent peur et fuirent avant son arrivée.

An-Nassir sachant que cette région volatile était soumise à un danger permanent venant de Léon, il pensa à affaiblir les forces de l’ennemi avant qu’elles ne grossissent et deviennent plus dangereuses.

 

En l’an 323 de l’Hégire (934), alors qu’il marchait sur Léon, le gouverneur de Saragosse (sarqasta) Muhammad Ibn Hisham at-Tajibi nommé par an-Nassir trahit sa confiance et annonça sa rébellion et son détachement de l’état. Il ne se contenta pas de cela mais appela Ramirez à l’aide et invita les petites villes avoisinantes à se joindre à sa rébellion. Les gouverneurs des petites villes refusèrent de trahir Allah et Son Messager (Saluts et Bénédictions sur lui) et de s’associer avec les ennemis de l’Islam mais Ramirez prit cela positivement du fait de savoir que certains apostats (mourtadine) étaient prêts à trahir leurs amis et lui venir en aide.

Il envoya donc une armée pour aider Saragosse tandis que Tota trahit son pacte avec an-Nassir et s’engagea dans l’alliance contre lui et c’est une particularité propre à ces gens de trahir toujours leurs promesses comme le Très Haut l’a mentionné dans Son Livre dans la Sourate at-Tawbah.

Alors an-Nassir commença secrètement ses préparatifs pour la fameuse bataille à venir appelée dans l’histoire des Musulmans la bataille du Fossé (al-khandaq).

 

Tota s’avança du nord et rejoint l’armée des apostats (mourtadine) tandis que ‘AbderRahmane an-Nassir se mit en marche en l’an 326 de l’Hégire (937) vers la forteresse avancée d’Ayyoub (qal’at ayyoub) pour faire face à l’ennemi. Il donna l’assaut à la forteresse, la captura et tua un commandant des apostats et un autre de Léon. Puis, il marcha sur Saragosse mais la ville lui résista. Il laissa alors Ahmad Ibn Ishaq à la tête d’un détachement pour mettre le siège sur la ville tandis qu’il avança vers les forces ennemies alliées pour arrêter leur avance. 

Cependant, Ahmad Ibn Ishhaq, était lui aussi un traître, un prétendant au pouvoir et il envoya un messager aux ismaéliens du Maghreb pour demander de l’aide contre an-Nassir. Mais ‘AbderRahmane an-Nassir était clairvoyant. Il envoya secrètement un assassin qui tua tous ceux qui avait pris part au complot avant de prendre le commandement du siège. Ceci nous enseigne que la bonté est bonne mais que le commandant doit toujours avoir des yeux secrets qui l’informent en permanence. 

Oumayyah Ibn Ishaq, le frère d’Ahmad Ibn Ishaq, sitôt informé de l’assassinat de son frère se rebella lui aussi à Santarem (shantarine). Un des commandants d’an-Nassir se dirigea vers lui et le vaincu mais il réussit à s’enfuir et trouva refuge chez Ramirez.

 

Entre temps, Saragosse tomba aux mains du commandant d’an-Nassir qui entra dans la ville et Muhammad Ibn Hisham at-Tajibi vaincu demanda pardon et an-Nassir lui pardonna, l’honora et le remit en poste cherchant à calmer les esprits.

Enfin libre, il se dirigea vers Pampelune (bambalona) et il rasa systématiquement toutes les forteresses ennemies qu’il trouva sur sa route, avant d’arriver et de mettre le siège sur Pampelune. Apres un certain temps, Tota se soumit à lui et demanda un arrangement, donna des garanties et paya l’impôt de guerre (jizyah). An-Nassir accepta et quitta le royaume de Navarre et se dirigea vers le plus grand danger à savoir Léon.

 

Au mois de Shawwal de l’année 327 de l’Hégire (938), ‘AbderRahmane an-Nassir à la tête d’une armée dont l’équivalent n’a jamais été précédemment vu, soit 100.000 hommes, marcha sur Zamora (samora), la plus grande ville fortifiée de Léon protégée par sept murailles. Les Chrétiens eurent peur de son avancée et préparèrent toutes leur force disponible. Auparavant c’était toujours eux qui attaquaient les Musulmans mais maintenant le contraire arrivait et an-Nassir en personne les assiégeaient.

An-Nassir fit tomber la première muraille avec ses lourdes catapultes, puis la seconde muraille s’effondra aussi. Puis les fortifications et le château de la troisième tombèrent aussi.  Si Zamora tombait alors la prochaine et dernière étape serait Léon. Les Chrétiens renforcèrent leurs positions alors qu’une grande joie remplie le cœur des Musulmans du fait de leur succès et ils se réjouirent de leur grand nombre et oublièrent que la victoire ne vient que du Très Haut Seul. Ils se réjouirent de leurs forces et de leurs pouvoirs exactement comme cela se passa lors de la bataille de Hounayn avec le Messager d'Allah (Saluts et Bénédictions d'Allah sur lui) et dont le Très Haut nous rappelle l’évènement dans la Sourate at-Tawbah.

Les Chrétiens effectuèrent une sortie telle une vague déferlante. Ils écrasèrent et rompirent la force des Musulmans qui s’enfuirent de tous les côtés et avec eux an-Nassir se dirigea vers Salamanque (shalmanqah) ou il réorganisa rapidement ses forces. Ramirez profita de l’occasion et poursuivit an-Nassir joint en cela par Tota de Navarre qui trahit pour la deuxième fois le pacte avec ‘AbderRahmane an-Nassir et les forces se firent face à face au fossé de Salamanque.

An-Nassir dont l’armée restait encore abattue par les événements précédents fit une sortie. Mais la charge faillit et les Musulmans se sauvèrent. Les Chrétiens attaquèrent à leur tour de toute leurs forces cette armée désemparée et le commandant de l’armée des Musulmans Najda Assaqallabi[1] trouva la mort, Muhammad at-Tajibi fut fait prisonnier et an-Nassir blessé.

Suite à cette ignominieuse défaite, la première depuis son arrivée au pouvoir, an-Nassir fuit avec seulement cinquante cavaliers et ne s’arrêta pas avant d’arriver à Cordoue.

La bataille du Fossé ou de Simencas fut l’une des pires défaites que connurent les Musulmans dans l’histoire de l’Andalousie. 

Certains historiens ont rapporté que cette défaite est due aux dissensions entre Arabes, Berbères et les Saqalibah qui s’élevèrent dans les rangs de l’armée d’an-Nassir.

 

Les Chrétiens poursuivirent leur avance et Ramirez décida de profiter de la lourde défaite des Musulmans pour attaquer et essayer de capturer Cordoue.

100.000 hommes et juste 50 qui réussirent à s’enfuir ! Quelle aubaine pour lui. Alors il marcha sur Cordoue et se présenta aux Musulmans un des plus graves dangers auquel ils eurent à faire face.

Oumayyah Ibn Ishaq qui s’était réfugié chez Ramirez, bien qu’il fut un traître lui et son frère, fut peiné de ce qui arriva aux Musulmans car il gardait au fond de lui de la sympathie pour l’Islam. Il alla voir Ramirez et lui dit :

- « Je connais parfaitement an-Nassir et sa retraite n’est qu’un piège dans lequel il veut t’attirer. Il veut que tu sois loin de tes arrières et lancer sur toi une armée toute prête qu’il tient pour la circonstance à Cordoue et en finir avec toi une bonne fois pour toute ». Ramirez crut Ibn Ishaq et se contenta du butin.

Et l’histoire a retenu l’action d’Ibn Ishaq qui fut protégé par sa foi.

Lorsqu’Oumayyah Ibn Ishaq vit que Ramirez se retirait avec son armée, il envoya un messager à an-Nassir et lui demanda la sécurité pour sa vie. An-Nassir accepta, lui pardonna et l’honora pour avoir stoppé Ramirez. 

 

‘AbderRahmane an-Nassir ne baissa pas pour autant les bras et reprit des préparatifs pour une nouvelle campagne militaire. Durant trois ans, il envoya des messagers pour faire libérer les prisonniers Musulmans. Il y eut plus de 50.000 Musulmans entre les morts et les prisonniers lors de la bataille du fossé.

Cela apprit à an-Nassir les conséquences des revers militaires ce qui l’amena et ses soldats à prendre plus de précautions lors de ses manœuvres et à placer leur confiance en le Très Haut et non pas sur leur nombre ou sur leur force. Et surtout que la victoire vient d’Allah Seul et sans associé. Il aurait pu perdre la vie et voir la fin de l’Andalousie juste à cause d’une débâcle mais cela ne fit que lui donner plus d’assurance.

 



[1] Assaqalabi est le nom donné aux enfants européens qui furent élevés par les Musulmans et qui devinrent Musulmans.