En
l’an 99 de l’Hégire (717), ‘Omar Ibn ‘Abdel ‘Aziz devint le huitième
calife omeyyade. Sa mère était Oumm ‘Assim Bint ‘Assim Ibn ‘Omar Ibn
al-Khattab al-Farouk (qu’Allah soit satisfait de lui). ‘Omar Ibn
‘Abdel ‘Aziz, qui avait pour grand père ‘Omar Ibn al-Khattab
(qu’Allah soit satisfait de lui), du côté de sa mère, décéda en l’an
101 de l’Hégire () et il fut l’une des importantes figures du monde
islamique.
Lorsque ‘Omar Ibn ‘Abdel ‘Aziz devint calife, il choisit
méticuleusement ses gouverneurs et nomma Isma’il Ibn ‘AbdAllah Ibn
Abi al-Mouhajir Dinar gouverneur du Maghreb. Les historiens sont
unanimes à rapporter qu’Isma’il Ibn ‘AbdAllah Ibn Abi al-Mouhajir
Dinar islamisa le Maghreb d’autant plus que le calife l’avait fait
accompagner de 10 savants Tabi’in à qui il avait demandé de
vouer à Allah Exalté la sincérité de leurs intentions et de ne
ménager aucun effort pour apprendre aux Berbères la religion
islamique.
Les
historiens sont aussi unanimes à rapporter que le Maghreb ne
s’islamisa vraiment que sous l’autorité d’Isma’il Ibn ‘AbdAllah Ibn
Abi al-Mouhajir Dinar et cela ne veut pas dire que les Berbères
n’étaient pas précédemment Musulmans, ils l’étaient mais la foi ne
s’était pas vraiment implantée dans leur cœur et ils apostasièrent
plusieurs fois.
Lorsque ‘Omar Ibn ‘Abdel ‘Aziz décéda en l’an 101 de l’Hégire (719),
il fut succédé par le fils de son oncle, al-Yazid Ibn ‘Abdel Malik
qui nomma Yazid Ibn Abi Mouslim gouverneur du Maghreb.
Yazid
Ibn Abi Mouslim avait été le commandant en chef de la police d’al-Hajjaj
Ibn Youssouf et qu’attendez-vous donc que fasse le commandant en
chef de la police d’al-Hajjaj sinon d’opprimer les gens. Et
effectivement, il causa de grand tort aux Berbères et ces derniers
le tuèrent, un mois après son arrivée et nommèrent à sa place Muhammad
Ibn ‘al-Yazid al-Qourayshi avant d’écrire au calife pour l’informer
de sa nomination.
En
l’an 103 de l’Hégire (721), le calife al-Yazid Ibn ‘Abdel Malik
nomma Bishr Ibn Safwan al-Kalbi al-Qahtani gouverneur du
Maghreb et qui décéda en l’an 109 de l’Hégire (727) après avoir mené
une bataille victorieuse en Sicile.
En
l’an 110 de l’Hégire (728), ‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane
as-Soulami al-Qayssi al-Moudari un xénophobe des Moudari lui succéda
et lorsqu’il arriva à Kairouan, il maltraita les employés de Bishr
Ibn Safwan al-Kalbi, le précédent gouverneur. De plus, il nomma
quatre gouverneurs pour l’Andalousie qui devint dépendante du
gouverneur du Maghreb qui était précédemment désigné par le
gouverneur d’Egypte.
Les
quatre gouverneurs de l’Andalousie furent :
-
‘Uthman Ibn Abi Naf’ah al-Khaf’ami al-Qahtani,
-
Houdayfah Ibn Ahwas al-Qayssi al-Moudari al-‘Adnani,
-
Al-Haytham Ibn ‘Oubayd al-Kinani, de la tribu Kinana, al-Moudari et,
-
‘AbderRahmane Ibn ‘AbdAllah ar-Rafiqi al-Qahtani.
Le
gouverneur ‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane as-Soulami était un
tyran qui maltraita les employés du précédent gouverneur Bishr Ibn
Safwan al-Kalbi dont Abou Khattar al-Houssam Ibn Dirar
al-Kalbi qui était un célèbre poète. Les tirades des poètes eurent
toujours une grande importance dans l’histoire des Musulmans, comme
nous l’avons précédemment vu dans nos traductions, et peuvent avoir
des effets vraiment incendiaires.
Abou
Khattar al-Houssam Ibn Dirar al-Kalbi écrivit donc un poème
au dixième calife Hisham Ibn ‘Abdel Malik Ibn Marwan, et dans lequel
il se plaignit du comportement du nouveau gouverneur et de ses
employés. Le calife procéda donc directement au désistement de
‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane as-Soulami et nomma à sa place,
pour le Maghreb, ‘Oubaydillah Ibn Habhab as-Soulami
qui était gouverneur d’Egypte et qui fut à son tour désisté en l’an
123 de l’Hégire (740) avant de mourir cette même année.
‘Oubaydillah Ibn Habhab as-Soulami nomma à son tour
‘Ouqbah Ibn Hajjaj as-Salouli as-Soulami al-Qayssi al-Moudari
al-‘Adnani gouverneur d’Andalousie. ‘Oubaydillah Ibn Habhab
as-Soulami, comme cela est connut, était aussi un chauvin Qayssi, un
opprimant injuste, un tyran et particulièrement envers les Berbères.
Son
abject comportement entraina une succession d’évènements d’une
extrême gravité et si le gouverneur était injuste comment étaient
donc ses employés ? Ils étaient aussi injustes que lui sinon pire.
Ils considéraient les belles jeunes femmes berbères comme mécréantes
alors qu’elles étaient musulmanes et les enlevaient pour le calife
Hisham Ibn ‘Abdel Malik qui aimait aussi les agneaux blancs. Et sans
que ce dernier le sache ou ait ordonné de tels actes, les employés
de ‘Oubaydillah Ibn Habhab as-Soulami allait trouver
les fermiers et parfois éventraient plus de 100 brebis pleine sous
leur yeux sans même trouver un seul agneau blanc !
Qui
donc pouvait profiter de ces injustices sinon les khawarije !
Les
khawarije qui apparurent sous les Omeyyades et qui furent
extrêmement actifs pour la propagation de leurs idées déviantes
bénéficièrent encore une fois de l’injustice des gouverneurs pour
propager leurs concepts meurtriers. Ils envoyèrent leurs prêcheurs
pour inciter les fermiers à s’élever contre leurs gouverneurs.
Mais
les pauvres Berbères leur dirent : « Nous n’irons pas à l’encontre
de nos gouverneurs ou du calife à cause de ce que commettent
certains ignorants ». Les khawarije répondirent : « Ces ignorants
n’agissent que sur les ordres de leurs supérieurs » et telle était
leur doctrine : « Si le calife n’était pas injuste, leur employés ne
le seraient pas ».
Les
Berbères décidèrent d’envoyer une délégation au calife à Damas, pour
l’informer de leurs problèmes, ce qu’ils firent aussitôt sous le
commandement de Mayssarah al-Moudouri.
Dans
les évènements qui suivent, il y a une excellente leçon à tirer
d’autant plus que la situation des pays Musulmans d’aujourd’hui en
est une excellente preuve. Le secrétaire du calife doit être un
homme pieux qui doit informer le calife de tous les évènements du
fait qu’il est le relais entre lui et les sujets du calife qui ne
peut pas tout gérer seul. Si le secrétaire est malhonnête, s’il ne
fait pas son travail consciencieusement et omet d’informer le calife
d’évènements majeurs, il ne peut que s’ensuivre la destruction de
l’état.
Et
tel était le secrétaire du calife Hisham Ibn ‘Abdel Malik, un homme
du nom de Sa’id Ibn Walib surnommé Abrash al-Kilabi qui était un
homme orgueilleux, dur et injuste. Lorsque la délégation Berbère
arriva, il ne leur permit ni de rencontrer le calife ni même
l’informa de leur présence et de leur affaire, des hommes qui
avaient pourtant parcouru des milliers de kilomètres pour le
rencontrer.
Mayssarah al-Moudouri et ses compagnons Berbères repartirent pour le
Maghreb, très fâchés et très en colères et la parole venimeuse des
khawarije fit son chemin dans leur esprit. Dès qu’ils rentrèrent
chez eux, ils se rebellèrent et tuèrent ‘Oubaydillah Ibn Habhab
as-Soulami puis Mayssarah al-Moudouri al-Boutri, de la tribu des
Boutr, annonça qu’il rejoignait les khawarije as-souffariyah.
Un
grand nombre de khawarije, des Hashimiyine, se réfugièrent
chez les tribus Berbères au Maghreb, ou ils étaient inconnus, loin
de la police et des armées Omeyyades qui les pourchassèrent sans
répit[1]
et leur arrivée coïncida avec la période ou les Berbères étaient
opprimés. Comme vous le savez, les khawarije se divisèrent entre un
certains nombres de groupes, shourat, azariqah, souffariyah,
ibadiyah, chacun jetant l’anathème sur l’autre et de même les
Berbères se divisèrent en deux groupes principaux quand ils
adoptèrent leurs déviances.
Les
Berbères du Maghreb central-ouest et extrême, de l’Algérie actuelle
et du Maroc, adoptèrent la déviance kharijite ibadiyah, de ‘Abdillah
Ibn Ibad at-Tamimi, tandis que ceux du Maghreb central-est
adoptèrent celle la déviance kharijite souffariyah de « soufrat
al-oujouh », les visages burinés par l’adoration, ou de
Mouhallad Ibn Abi Souffrah al-Azdi. Mais l’origine exacte des
souffariyah, telle qu’elle est rapportée par l’ensemble des
historiens, viendrait de ‘AbdAllah Ibn Souffar at-Tamimi.
Les
Berbères souffariyah appelèrent alors à la création d’un état
berbère islamique indépendant raciste du fait que leur pays était
contrôlé par les Arabes. Afin que vous connaissiez qui se trouvait
derrière ces complots, sachez que l’instigateur de cette idée
dangereuse fut le fils de Tarif Ibn Sham’oun, un juif converti à
l’Islam qui adopta les déviances des khawarije. Salih Ibn
Tarif Ibn Sham’oun se fit proclamer prophète et imposa au Berbères
une religion en langue berbère. Il se fit passer aussi pour le Mahdi
attendu, qu’il était « salih al-mou'minin » mentionné
par le Qur’an : « alors ses alliés seront Allah, Gabriel
et les vertueux d’entre les croyants (salih al-mou'minin)[2] ».
Puis,
ce Khabith leur prescrivit le jeûne au mois de Rajab à la
place du mois de Ramadan, leur ajouta le lavage du ventre et des
flancs, cinq prières durant le jour et autant la nuit, le mariage
avec plus de quatre femmes, l’interdiction d’épouser des musulmanes,
l’interdiction de manger les têtes de tous les animaux et
l’interdiction de tuer les coqs. Il est courant de nos jours, au
Maroc, que les gens enterrent les os de coqs et il ne fait aucun
doute que cette coutume vient de l’époque des khawarije. Il leur
ordonna aussi de laisser pousser leurs cheveux et de faire des
nattes sur les côtés comme les juifs le font toujours de nos jours.
Parce
qu’il se rebella contre eux, les Arabes surnommèrent Mayssarah
al-Moudouri « al-Haqir » « le détestable, l’ignoble »
et en l’an 122 de l’Hégire (739), Salih Ibn Tarif al-Yahoudi
fut rejoint par les tribus berbères de Miknassah et de Bourghwatah.
Qui pourra arrêter le feu de la rébellion qui lorsqu’il s’allume et
consume tout sur son passage ?
Ces
khawarije commencèrent par tuer ‘Omar Ibn ‘AbdAllah al-Mouradi, un
des employés de ‘Oubaydillah Ibn Habhab as-Soulami,
qui gouvernait Tanger et nommèrent à sa place un homme du nom de
‘Abdel A’lah Ibn Jourayj al-Ifriqi ar-Roumi qui avait été un des
Mawlah de Moussa Ibn Noussayr.
Sa
tribu des Afariqah s’allia à Mayssarah al-Moudouri si bien que ce
dernier se retrouva à la tête d’une immense force armée qu’il
utilisa pour tuer Isma’il Ibn ‘Oubaydillah Ibn Habhab
et anéantir son armée qui était venue à sa rencontre.
Lorsque ‘Oubaydillah Ibn Habhab qui était à Kairouan
fut informé de ces évènements, il ordonna de lever une puissante
armée composée uniquement de nobles Arabes pour lutter contre les
Berbères et nomma à la tête de cette armée Khalid Ibn Habib
Ibn Abi ‘Abdah Ibn ‘Ouqbah Ibn Nafi’ qui marcha sur Tanger.
En
cours de route, il s’unifia à l’armée de son père Habib Ibn
Abi ‘Abdah Ibn ‘Ouqbah Ibn Nafi’ qui luttait dans la voie d’Allah en
Sicile, qui lorsqu’il fut informé des sombres évènements du Maghreb
abandonna son Jihad, et s’embarque avec son armée pour venir
au secours des Arabes Musulmans de Kairouan. Vous n’êtes pas sans
savoir que c’est sous le règne des Omeyyades que se propagèrent le
chauvinisme et le tribalisme xénophobe.
Les
deux armées se mirent de nouveau en route et Khalid Ibn Habib
traversa avec son armée la rivière (wadi) Chélif près de la
ville de Tahart tandis que son père resta avec sa propre armée de
l’autre côté du Wadi.
Les
deux armées se rencontrèrent et celle des nobles Arabes réussit à
battre celle des khawarije Berbères rebelles, sous le commandement
de Mayssarah al-Moudouri, qui s’enfuit dans le plus grand désordre
et rejoignit un autre groupe de khawarije qui tuèrent Mayssarah et
nommèrent à leur place un autre khariji plus dur nommé Khalid Ibn
Hamid az-Zinati.
Cette
innombrable armée berbère enragée qui cherchait à se venger des
armées du calife omeyyade revint donc au combat et cette fois ci
anéantit totalement l’armée de Khalid Ibn Habib qui avait
traversé la rivière et cette bataille fut appelée la bataille des
Nobles (ghazwat al-ashraf), une bataille xénophobe et
raciste, les Arabes contre les Berbères.
Lorsque les Berbères en Andalousie furent informé de cette bataille,
ils se rebellèrent à leur tour contre le gouverneur ‘Ouqbah Ibn Hajjaj
as-Salouli et le chassèrent en l’an 123 de l’Hégire (740) et
nommèrent à sa place ‘Abdel Malik Ibn Qatan al-Fihri qui était alors
âgé de 90 ans.
Suite
à la défaite de son armée et des nouvelles alarmantes d’Andalousie,
le calife Hisham Ibn ‘Abdel Malik Ibn Marwan se rendit compte de la
faiblesse de son gouverneur à Kairouan, ‘Oubaydillah Ibn Habhab
et dit : « Par Allah, je vais me fâcher contre eux d’une colère
arabe et je vais leur envoyer une armée dont l’avant-garde sera chez
eux et l’arrière garde ici ». Comme vous l’avez lu, il a bien dit
une « colère arabe » et non pas une colère islamique ! Alors que le
Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) a bien dit
que « le chauvinisme est une abomination ! »
De
même, face à leur précarité et à la menace imminente des Berbères,
les Arabes de Kairouan se réunirent et décidèrent d’agir. Ils
commencèrent par désister ‘Oubaydillah Ibn Habhab qui
retourna chez le calife qui envoya à sa place Koulthoum Ibn ‘Iyad
al-Qoushayri, al-Moudari al-Qayssi à la tête d’une très grande
armée.
Koulthoum Ibn ‘Iyad al-Qoushayri demanda l’aide du fils de son frère
Balj Ibn Bishr Ibn ‘Iyad al-Qoushayri et lorsque ce dernier arriva
avec son oncle à Kairouan au mois de Ramadan de l’année 123 de
l’Hégire (740), ils traitèrent durement les Arabes d’Ifriqiyah car
ils n’appartenaient pas à la même tribu. En effet la majorité des
habitants de l’Ifriqiyah et de l’Andalousie étaient d’origine
yéménite Qahtaniyyah tandis que Koulthoum et Balj étaient
Moudari Qayssi.
Les
Arabes de Kairouan écrivirent alors au général des forces armées
Habib Ibn Abi ‘Abdah qui se trouvait dans la garnison (mourabitan)
de Tilimsen. Habib Ibn Abi ‘Abdah n’avait pas traversé le
Wadi lors de la Bataille des Nobles car il attendait des
renforts du calife mais son fils avait été tué au cours de cette
bataille avec une partie de son armée.
Habib
Ibn Abi ‘Abdah écrivit une lettre à Koulthoum et Balj dans laquelle
il leur dit : « Le fils de ton oncle, le
stupide (as-safi, sous-entendu : Balj Ibn Bishr) a dit ceci
et cela, protégé par ton armée, (fait attention sinon) nous
conduirons nos chevaux chez toi (sous-entendu : nous allons venir de
te combattre) ».
Le Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) nous a
bien mit en garde contre le chauvinisme et vous voyez combien le
tribalisme ou le nationalisme peut s’avérer ravageur. Les armées des
Musulmans étaient prêtes à s’affronter entre-elles alors qu’un
danger bien plus grand les menaçait. A cause de ces abominations, le
Jihad dans la voie d’Allah fut abandonné au profit des
mécréants qui amassaient leurs armées aux frontières des Musulmans.
Koulthoum Ibn ‘Iyad écrivit une lettre d’excuse à Habib Ibn
Abi ‘Abdah avant de se mettre en marche pour combattre les khawarije
berbères. Il marcha sur Tanger avant de rejoindre le camp de Habib
Ibn Abi ‘Abdah qui se trouvait toujours au même endroit près du
fleuve Chélif.
Lorsque Balj Ibn Bishr vit Habib
Ibn Abi ‘Abdah, provocateur il dit
à son oncle : « Est-ce celui-là qui t’a menacé ? » et suite à sa
parole, les deux armées s’affrontèrent, les Qahtan contre les
Moudar. Néanmoins Koulthoum Ibn ‘Iyad réussit à ramener le calme
mais le mal était fait.
Les
deux armées mirent leur différent de côté et ensemble attaquèrent
les Berbères mais à cause du mal de Balj
Ibn Bishr et de son oncle qui avait fait son chemin dans
l’esprit, les armées du calife et de Kairouan furent écrasées.
Gloire à Allah Exalté qui a dit dans Son livre : « …et ne vous
disputez pas, sinon vous fléchirez et perdrez votre force[3]. »
Un
grand nombre d’entre eux périt et la plupart des historiens ont
dit : « Un tiers fut tué, un tiers fut pris prisonnier et un tiers
s’enfuit ». Habib Ibn Abi
‘Abdah, Koulthoum Ibn ‘Iyad et Moughith ar-Roumi furent tué lors de
la bataille tandis que Balj Ibn Bishr
réussit à s’enfuir avec 10.000 combattants et se réfugia à Ceuta
dans l’ancienne forteresse de Julian sur les rives de la
méditerranée. Cette bataille prit le nom de la bataille de Maqdourah
et lors de cette bataille s’enfuit aussi ‘AbderRahmane Ibn
Habib Ibn Abi ‘Abdah en Andalousie et il aura aussi un grand
rôle dans l’histoire du Maghreb, comme nous allons le voir. Il se
réfugia à Cordoue chez ‘Abdel Malik Ibn Qatan al-Fihri, tous des
Fihri.
Balj Ibn Bishr dont le mal allait continuer de s’étendre fut assiégé
par les Berbères qui s’étaient lancés à sa poursuite. Le siège dura
si longtemps que les assiégés finirent par manger leurs montures,
puis tous les animaux de la ville, puis les peaux d’animaux et le
cuir tanné de leurs selles et de leurs ceintures.
Lorsqu’il ne put plus endurer le siège, Balj Ibn Bishr écrivit à
‘Abdel Malik Ibn Qatan al-Fihri et lui dit : « Aide moi à traverser
car nous avons plus que supporter le siège ». Mais le gouverneur
d’Andalousie ‘Abdel Malik Ibn Qatan al-Fihri refusa de les aider
pour la même raison de tribalisme xénophobe. Mais peu après, les
Berbères d’Andalousie, qui l’avaient nommé à ce poste, se
rebellèrent contre lui et craignant qu’ils nomment quelqu’un d’autre
à sa place, ‘Abdel Malik Ibn Qatan envoya à Balj des navires pour le
transporter en Andalousie mais avec des conditions. Il lui dit :
« Je t’autorise à traverser si tu m’aide à venir à bout des Berbères
et de nos ennemis les khawarije néanmoins quand cela sera fait, tu
devras quitter l’Andalousie et retourner au Maghreb d’où tu viens ».
Balj Ibn Bishr n’ayant aucun autre choix accepta.
Les batailles d’al-Qarn et d’al-Asnam
Suite à leur victoire à la bataille de Maqdourah, la rébellion des
Berbères khawarije prit une nouvelle dimension et se répandit à
travers l’Afrique du nord. De nouveaux chefs berbères khawarije
souffariyah apparurent dont Abou Youssouf al-Houari et ‘Oukashah Ibn
Ayyoub al-Fazzzari qui décidèrent de poursuivre leur action sur
Kairouan.
Le calife Hisham Ibn ‘Abdel Malik écrivit à son gouverneur d’Egypte
et lui dit : « Je rajoute le Maghreb sous ton autorité. Pars en
personne pour mettre fin à cette rébellion ». Handalah Ibn
Safwan, le gouverneur d’Egypte, leva une très grande armée et marcha
sur Kairouan ou il arriva en l’an 124 de l’Hégire (741).
Handalah
Ibn Safwan, en personne, partit combattre les Berbères qui avaient
une prodigieuse et innombrable force. Les Berbères séparèrent leur
armées en deux dont l’une commandée par ‘Oukashah Ibn Ayyoub
al-Fazzzari as-souffari qui partit à la rencontre de Handalah
Ibn Safwan et les deux armées se rencontrèrent au lieu-dit al-Qarn.
Handalah
Ibn Safwan réussit à écraser l’armée des Berbères khawarije et se
retira aussitôt à Kairouan pour mieux se préparer. Mais la seconde
armée des Berbères, sous le commandement d’Abou Youssouf ‘Abdel Wahid
al-Houari qui était l’armée la plus nombreuse marcha à sa poursuite
jusqu’à ce qu’elle arrive près de Kairouan au lieu-dit al-Asnam, qui
se trouve en Algérie actuelle et ou lieu un terrible tremblement de
terre dans les années 80 qui fit des milliers de morts.
‘Oukashah Ibn Ayyoub al-Fazzzari n’était pas un Berbère mais un
Arabe et lorsque nous disons les Berbères khawarije il y avait parmi
eux des Arabes khawarije et nous pouvons nous poser la question, que
faisaient donc les Arabes khawarije aux côtés des Berbères et ce
n’était plus juste une guerre contre les Berbères seuls mais aussi
contre les Arabes !
Le chauvinisme tribal se propagea pratiquement dans tout l’empire
islamique comme vous avez dû le remarquer si vous avez déjà lu nos
précédents travaux sur l’Histoire des Omeyyades et des Abbassides.
Comme nous trouvons plusieurs races chez les Musulmans, mais aussi
dans les armées des Omeyyades, il en était de même chez les
khawarije.
Abou Youssouf ‘Abdel Wahid al-Houari arriva à al-Asman près
de Kairouan et le grand historien musulman al-Hafiz Ibn
Kathir a rapporté que son armée s’élevait à 300.000 combattants.
Handalah Ibn Safwan le brave général musulman fit regrouper à
Kairouan tous les Musulmans arabes capables de porter une arme et
leur en distribua une si bien que son armée se retrouva augmentée.
Les savants Musulmans de Kairouan participèrent aussi à l’effort de
guerre en motivant les gens pour le combat et leur demandèrent
d’être sincères envers Allah Exalté lors de la rencontre avec
l’ennemi tout en leur rappelant que si les khawarije prenaient la
ville, ils risquaient d’endurer les pires horreurs et que la mort
était préférable. Il est bien connut combien les khawarije étaient
impitoyables envers les populations Musulmans civiles.
Il a été rapporté que même les femmes Musulmans sortirent pour
motiver les hommes avant la bataille.
Lorsque les préparatifs de son armée furent enfin achevés, Handalah
Ibn Safwan sortit à la rencontre des khawarije. L’armée des
Omeyyades et des gens de Kairouan fit bravement face aux
innombrables khawarije et maintinrent leur position sans jamais
reculer malgré les déferlements successifs de milliers de
combattants. Et avec la grâce d’Allah Exalté et Loué soit-Il, ils
réussirent à vaincre les khawarije et à les tuer en si grand nombre
que leurs corps jonchèrent remplirent le monde (mahalat dounia).
Abou Youssouf ‘Abdel Wahid al-Houari fut tué. ‘Oukashah Ibn
Ayyoub al-Fazzzari fut capturé prisonnier et aussitôt exécuté selon
les ordres de Handalah. 180.000 khawarije furent tués au
cours de la bataille d’al-Asnam. L’Imam Leyth Ibn Sa’d
lorsqu’il fut informé des nouvelles de l’éclatante victoire, il
dit : « Il n’y a pas de bataille à laquelle j’aurais aimé le plus
assister, en plus de Badr, que celle de Qarn et d’al-Asnam », et ce
pour vous monter l’importance de cette bataille.
Le calife Hisham Ibn ‘Abdel Malik mourut en l’an 125 de l’Hégire
(742), avant d’être informé de la victoire de Handalah Ibn
Safwan, et le fils de son frère al-Walid Ibn Yazid lui succéda.
Lorsque Balj Ibn Bishr débarqua en Andalousie, les Arabes yéménite
traitèrent avec affection leurs frères de Syrie qui étaient réduits
à l’extrême. Puis peu de temps après eut lieu une bataille entre les
Berbères, sous le commandement d’Ibn Houdayn et les Arabes près de
Tolède au lieu-dit Wadi Saliq ou l’armée de Syrie écrasa
littéralement l’armée des Berbères khawarije.
Après la bataille Ibn Qatan demanda à Balj Ibn Bishr de tenir ses
promesses et de revenir d’où il était parti au Maghreb en passant
par Jazirat al-Khadrah, Algésiras. Il voulait secrètement que les
Berbères khawarije du Maghreb anéantissent son armée lorsque ce
dernier débarquerai à Tanger mais les Syriens comprirent son
intention, se rebellèrent contre lui et nommèrent à sa place Balj
Ibn Bishr gouverneur d’Andalousie au mois de Dzoul Qi’dah de l’année
123 de l’Hégire (740).
Ainsi fut donc désisté ‘Abdel Malik Ibn Qatan qui, sous ses ordres,
le commandant de la garnison de Jazirat al-Khadrah avait pris en
otage un certain nombre de compagnons de Balj Ibn Bishr lors de sa
traversée pour s’assurer de ses engagements mais le commandant de la
garnison maltraita ces otages si bien qu’un certain nombre d’entre
eux mourut dont un des nobles de Syrie de la tribu ghassassinah. Les
Yéménites se révoltèrent donc à cause de sa mort contre le
commandant de la garnison et mirent un autre gouverneur à sa place
avant d’écrire à Balj Ibn Bishr pour lui demander de leur envoyer
‘Abdel Malik Ibn Qatan qui était le responsable de la mort de leurs
frères.
‘Abdel Malik Ibn Qatan était alors âgé de plus de 90 ans et Balj Ibn
Bishr essaya de les retenir mais ils se rebellent contre lui à son
tour et lui dirent : « Tu es un Moudari et tu protèges un Moudar »,
‘Abdel Malik Ibn Qatan al-Fihri et Balj Ibn Bishr
al-Qoushayri était tous les deux de la tribu de Moudar. Balj Ibn
Bishr eut donc peur des répercussions de cette révolte et remit donc
ce vieil homme (sheikh al-kabir) aux rebelles qui dirent à ce
dernier : « Tu as échappé à nos sabre le jour de Harrah (en
l’an 63 de l’hégire) puis tu nous as rendu à manger les chiens à
Ceuta et tu as vendu les soldats de l’émir des croyants. Nous
demandons vengeance ». Alors ils le tuèrent et le crucifièrent avec
à sa droite un porc et sa gauche un chien.
Voilà ce qu’engendre le chauvinisme tribal et le meurtre du
gouverneur de l’Andalousie allait être la cause d’une grave
dégradation de la situation.
Les Balladiyoune, ou les habitants arabes qui vinrent habiter au
Maghreb et en Andalousie, sous le commandement de Qatan et Oumayyah
Ibn ‘Abdel Malik Ibn Qatan se rebellèrent à leur tour avec les
Berbères contre Balj Ibn Bishr mais furent écrasés par les syriens.
Al-Yazid Ibn Walid, le nouveau calife, voulut mettre fin aussi aux
rebellions en Andalousie et choisit Abi al-Khattar al-Houssam
Ibn Dirar al-Kalbi al-Qahtani qu’il nomma Wali de
l’Andalousie au mois de Rajab de l’année 125 de l’Hégire (742).
Lorsqu’ Abi al-Khattar al-Houssam Ibn Dirar al-Kalbi
arriva en Andalousie ‘AbderRahmane Ibn Habib
Ibn Abi ‘Abdah Ibn ‘Ouqbah Ibn Nafi’ al-Fihri s’enfuit en Ifriqiyah,
à Tunis où il réussit à devenir gouverneur avant de se diriger vers
Kairouan ou se soumit à lui Handalah Ibn Safwan, le héros des
batailles de Qarn et d’al-Asnam, pour éviter les effusions de sang
inutile. Il ne voulut pas de nouveau trouble et lui dit : « Tu veux
le pouvoir, le voici donc ».
Néanmoins un mois après sa prise de pouvoir, c’est tout le Maghreb
qui se leva contre ‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi
‘Abdah et les khawarije en profitèrent pour revenir en force.
‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi ‘Abdah qui était un
coriace gouverneur, fit capturer tous leurs chefs, les uns après les
autres, jusqu’à tous les éliminer de même que tous les rebelles si
bien qu’en l’an 135 de l’Hégire (752), il avait aussi éliminé leurs
Imams à Tripoli (tarablous) ainsi que tous ceux qui
les avaient aidés d’une quelconque manière dont al-Harith Ibn
Salim, ‘Abdel Jabbar Ibn Qays al-Kouwari et Isma’il Ibn Ziyad
an-Nakoussi.
Comme nous l’avons mentionné dans l’Histoire des Omeyyades et des
Abbassides, le règne des Omeyyades prit fin en l’an 132 de l’Hégire
(749) et ‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi ‘Abdah qui
contrôlait désormais le pouvoir, envoya une lettre de soumission à
‘Abou al-‘Abbas as-Saffah, le premier calife abbasside. Et
lorsque le deuxième calife abbasside Abou Ja’far al-Mansour prit le
pouvoir, il lui envoya des vêtements noirs, le signe distinctif des
Abbassides, avec une lettre l’invitant à sa soumettre aux
Abbassides.
‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi ‘Abdah envoya des
présents au calife al-Mansour et lui écrivit à son tour une lettre
disant : « Je me soumets à ton pouvoir. Sache que l’Ifriqiyah est
aujourd’hui totalement islamique et il n’existe pas une partie ou
les habitants ne sont pas Musulmans donc je ne reçois rien, ni bien
ni argent, alors ne me demande pas d’argent », ce qui n’était pas
une manière très polie de s’adresser à ce puissant calife abbasside
qui n’entreprit aucune action à son égard du fait de son éloignement
et du temps que cela aura pris pour réunir les moyens nécessaires et
les envoyer sur place pour le corriger.
Néanmoins, le calife al-Mansour se fâcha et lui envoya une lettre
menaçante. Lorsque ‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi
‘Abdah reçut la lettre, il réunit les gens en lançant l’appel
Salat Jami’a ou prière générale comme cela était la coutume
depuis le Messager d’Allah (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui)
pour appeler les Musulmans à se rendre tous à la mosquée pour
écouter un important discours. Puis, il monta sur le Minbar
ou la chaire et leur lut la lettre du calife qu’il insulta. Puis il
dit : « J’espérais que ce traitre d’al-Mansour appelle au bien et
qu’il le fasse mais il m’apparait différent de ce que j’attendais de
lui. Je lui ai porté allégeance pour l’implémentation de la justice
mais maintenant je lui retire mon allégeance comme je retire
maintenant mes sandales » et il retira ses sandales et ordonna de
brûler les vêtements noirs qui lui avaient été envoyés.
Au mois de Dzoul Hijjah de l’année 137 de l’Hégire (754), Ilyas Ibn
Habib, le frère de ‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn
Abi ‘Abdah, tua ce dernier. ‘AbderRahmane Ibn Habib
Ibn Abi ‘Abdah avait nommé Ilyas Ibn Habib gouverneur de
Tunis et lorsqu’il vint pour le remplacer, ce dernier avait
dissimulé un poignard qu’il lui enfonça dans le dos si fort que la
lame ressortit par sa poitrine et ‘AbderRahmane Ibn Habib
Ibn Abi ‘Abdah mourut.
Et combien de fois cette parole véridique « quiconque tue par l’épée
périt par l’épée » fut confirmée !
‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi ‘Abdah est celui qui
tua al-‘As et ‘Abdel Mou'min les enfants du calife al-Walid Ibn
Yazid lorsqu’il retourna chez lui avant la chute de la dynastie des
Omeyyades. Al-‘As et ‘Abdel Mou'min Ibn al-Walid Ibn Yazid s’étaient
enfuis comme des milliers d’autres Omeyyades lorsque les Abbassides
prirent le pouvoir et s’étaient répandus à travers le monde. Ils
s’étaient réfugiés chez ‘AbderRahmane Ibn Habib alors
qu’ils étaient plus petits qu’Ilyas Ibn Habib et ‘Abdel
Warith Ibn Habib al-Fihri.
Ilyas Ibn Habib s’était demandé pourquoi son frère les
avaient tués et en retour le tua de cette manière.