Les évènements au Maroc et en Andalousie

 

Au mois de Rabi’ Thani de l’année 125 de l’Hégire (742), al-Walid Ibn Yazid Ibn ‘Abdel Malik fut nommé onzième calife et sous son règne le désordre gagna l’état et annonça le début de la chute de la dynastie des omeyyades. Mais avant d’aller plus nous allons revenir brièvement sur les évènements au Maghreb et en Andalousie, que nous avons laissé à la mort du gouverneur de l’Andalousie ‘Abdel ‘Aziz Ibn Moussa Ibn Noussayr qui succéda à son père, Moussa Ibn Noussayr partit en compagnie de  Tariq Ibn Ziyad à Damas.

 

Le calife Souleyman Ibn ‘Abdel Malik désista ‘Abdillah Ibn Moussa Ibn Noussayr et nomma à sa place Muhammad Ibn Yazid al-Qourayshi, le Mawlah des Qouraysh, gouverneur du Maghreb.

 

Lorsque ‘Omar Ibn ‘Abdel ‘Aziz devint calife, il nomma pour le Maghreb le Tabi’i Isma’il Ibn ‘Abdillah Ibn Mouhajir Dinar et envoya avec lui dix autres savants Tabi’i qui s’employèrent activement à enseigner la religion islamique aux tribus berbères et aux habitants du Maghreb. La majorité des historiens ont rapportés que durant le règne de Isma’il Ibn ‘Abdillah Ibn Mouhajir Dinar qui était un pieux gouverneur, il y eut une islamisation massive des tribus Berbères.

 

Quand Yazid Ibn ‘Abdel Malik succéda à ‘Omar Ibn ‘Abdel ‘Aziz, il nomma Yazid Ibn Abi Mouslim ath-Thaqafi, le Mawlah des Banou Thaqif, gouverneur du Maghreb. Yazid Ibn Abi Mouslim ath-Thaqafi avait été le chef de la police sous al-Hajjaj Ibn Youssouf ath-Thaqafi en Iraq. D’autres ont rapportés qu’il était son scribe et après la mort d’al-Hajjaj Ibn Youssouf, il retourna en Syrie. Lorsqu’il arriva à Kairouan (qayrawan), il occupa ses fonctions à peine un mois avant d’être assassiné à cause de sa dureté et aussi parce qu’il imposait la Jizyah aux tribus berbères musulmanes et violaient leurs femmes. Sa garde personnelle était des Berbères qui avaient été précédemment la garde personne de ‘Abdillah Ibn Moussa Ibn Noussayr, et lorsqu’il voulut tatouer leur noms sur leurs mains, ils le tuèrent et libérèrent les Musulmans de son mal. Du fait que c’était le chef de la garde personnelle de ‘Abdillah qui avait tué Yazid Ibn Abi Mouslim, les Omeyyades pensèrent que c’était lui qui leur avait suggestionné l’idée et lorsque le nouveau gouverneur Bishr Ibn Safwan al-Kalbi arriva, il le tua et envoya sa tête à Yazid Ibn ‘Abdel Malik à Damas.

Après l’assassinat de Yazid Ibn Mouslim, les Musulmans nommèrent à sa place Muhammad Ibn Yazid al-Qourayshi avant l’arrivée en 103 de l‘Hégire (721), du nouveau gouverneur Bishr Ibn Safwan al-Kalbi qui resta gouverneur jusqu’à ce qu’il tomba malade et mourut en l’an 109 de l’Hégire (727) après son retour d’une incursion en Sicile.

 

 

En l’an 110 de l’Hégire (728), ‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane as-Soulami, le nouveau gouverneur envoyé par le calife, arriva à Kairouan. ‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane avait une préférence inconditionnelle pour les tribus Qayssiyah et il ne tarda pas à désister tous les employés de Bishr Ibn Marwan et réussit à imposer quatre autres gouverneurs régional en Andalousie.

A cause des injustices, du fanatisme tribal, et des divisions appliquées par ‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane as-Soulami envers les gens et les employés de Bishr, Abou al-Khattar al-Houssam Ibn Dirar al-Kalbi qui était l’un d’entre eux et un poète, envoya un poème (qassida) incendiaire au calife Hisham Ibn ‘Abdel Malik Ibn Marwan  pour lui rappeler les qualités des Yéméni et leur support sans failles aux Bani Marwan dans les moments difficiles pour se voir traiter comme des moins que rien par son envoyé.    

 

Peu après, le calife Hisham Ibn ‘Abdel Malik Ibn Marwan qui était un homme sage, désista ‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane as-Soulami et la gouvernance du Maghreb fut donnée à ‘Oubaydillah Ibn al-Habhab as-Salouli, le gouverneur d’Egypte. Les Banou Saloul sont des Banou Mourah Ibn Saloul Ibn Sa’sa’ah Ibn Mou’awiyah Ibn Bakr Ibn Hawazin et Saloul est le frère de l’oncle as-Sa’sa’ah.

Le gouverneur d’Egypte nomma son fils al-Qassim Ibn ‘Oubaydillah Ibn al-Habhab gouverneur du Maghreb, ‘Ouqbah Ibn al-Hajjaj as-Salouli pour l’Andalousie et ‘Omar Ibn ‘Abdillah al-Mouradi pour Tanger. ‘Omar Ibn ‘Abdillah al-Mouradi fut l’un des gouverneurs les plus durs envers les Berbères et il était aussi un fanatique pour les tribus Qays comme l’avait été ‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane as-Soulami. Il commit de grandes injustices envers les Berbères bien qu’en Islam le fanatisme tribal et interdit comme l’injustice envers les Musulmans. Et sans conteste, nous pouvons dire que le fanatisme tribal, sous le règne des Omeyyades, revint en force dans l’état islamique.

Nous avons vu précédemment, au Khorasan, le nombre importants de Musulmans qui payaient la Jizyah alors que les polythéistes en étaient exemptés lorsque Nasr Ibn Sayyar chargea son adjoint de régulariser la situation et aussi avec ‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane as-Soulami, à Kairouan, qui fit payer la Jizyah aux tribus berbères musulmanes. Ainsi les khawarije saisirent l’occasion et trouvèrent des oreilles attentives pour leur doctrine corrompue chez ces tribus à qui ils demandèrent de se rebeller contre le calife Hisham Ibn ‘Abdel Malik.

Les Berbères leur dirent : « Le calife ne connait pas notre réelle situation et nous devons lui envoyer une délégation pour l’informer et trouver une solution à notre problème ». Ils envoyèrent donc une délégation sous le commandement de Mayssarah al-Moud’ouri en Syrie.

 

Lorsqu’ils arrivèrent à Damas, le secrétaire du calife, Abrash al-Kalbi ou Sa’id Ibn al-Walid al-Kalbi, prit leur doléance sans leur promettre un entretien avec le calife. 

La délégation Berbère lui dit : « Notre gouverneur nous utilise pour faires des razzias mais ne nous donnent jamais notre part du butin et lorsque nous assiégeons une ville ou une forteresse, il nous dit avancez tandis que lui et ses soldats arabes restent en arrière. Mais ce que nous ne supportons pas est qu’ils prennent toutes les belles femmes ».

Devant ces injustices, il convenait d’avertir aussitôt le calife, de punir les responsables et de prendre des rapides dispositions pour qu’elles cessent avant qu’elles ne conduisent à des situations incontrôlables pour l’état, ce dont ne se soucia guère Abrash qui temporisa et leur dit :

- « Ce n’est rien, ce n’est rien ! »

Une telle réponse idiote nous prouve que cet homme stupide n’aurais jamais du occuper le poste de secrétaire du calife. Il est cependant certain que le calife Hisham n’accepterait jamais cette injustice comme nous l’avons vu avec ‘Oubaydah Ibn ‘AbderRahmane as-Soulami qu’il désista aussitôt lorsqu’il reçut des plaintes à son sujet mais il est évident qu’il en porte la responsabilité car il charge des gens incompétents pour mener les affaires des Musulmans dont le sang, l’honneur et les biens sont inviolables. Le calife doit obligatoirement surveiller les gens qu’ils nomment et non pas les laisser à eux même. Il doit être sûr qu’ils rempliront leur tâche justement et effectivement et qu’ils ne le tromperont pas en utilisant leur statut pour s’enrichir personnellement, corrompre et opprimer les Musulmans qui finiront par se rebeller contre l’état à cause de lui. Et c’est exactement ce qui va arriver une nouvelle fois.

La délégation berbère qui parcourut plus de quatre-mille kilomètres pour se plaindre repartit avec une immense sensation d’humiliation et d’injustice aggravée et allait être la cause de la sévère sédition qu’il allait frapper le Maghreb et se propager dans l’Andalousie sous le commandement de Mayssarah al-Moud’ouri qui se rallia à la doctrine khariji soufariyah ainsi que l’ouest du Maghreb.

 

 

La rébellion des Berbères au Maghreb

 

En l’an 122 de l’Hégire (739), les rebelles, rejoint par les Carthaginois, tuèrent ‘Omar Ibn ‘Abdillah al-Mouradi, le gouverneur de Tanger, et le remplacèrent par ‘Abdel A’la Ibn Zourayj al-Ifriqi[1] ar-Roumi, le Mawlah de Moussa Ibn Noussayr. Puis leur immense armée marcha vers le gouverneur du Maghreb Isma’il Ibn ‘Oubaydillah al-Habhab qu’ils tuèrent. Lorsque ‘Oubaydillah al-Habhab fut informé, il déploya une immense armée des gens de Kairouan qu’il leur envoya sous le commandement de Khalid Ibn Habib Ibn  Abi ‘Abda' Ibn ‘Ouqbah Ibn Nafi’ al-Fihri. La troupe fut surnommée « l’armée des Nobles » à cause du nombre importants de nobles arabes qui prirent part à l’expédition.

L’armée des Nobles marcha sur Tanger ou Khalid Ibn Habib Ibn Abi ‘Abda' rejoignit l’armée de son père Habib Ibn Abi ‘Abda' envoyée en soutien et qui avait dû revenir de Sicile ou il combattait les mécréants. Khalid Ibn Habib traversa le fleuve de Chélif[2] et près de Tahert[3] eut lieu une féroce bataille entre Khalid et les khawarije tandis que son père reste en deçà du fleuve. L’armée de Khalid et des Arabes fut écrasée et anéantie si bien que nul d’entre eux ne sortit vivant de cette bataille, connue sous le nom de la bataille des Nobles.   

Avant la bataille, Mayssarah al-Moud’ouri se retira et les khawarije le tuèrent aussi et nommèrent à sa place Khalid Ibn Hamim az-Zinati.

Les nouvelles de cette défaite parvinrent aux Berbères en Andalousie qui se rebellèrent à leur tour.

 

 

En l’an 123 de l’Hégire (740), ils renvoyèrent ‘Ouqbah Ibn al-Hajjaj as-Salouli et le remplacèrent par ‘Abdel Malik Ibn Qatan al-Fihri. Ces révoltes poussèrent les Arabes de Kairouan à congédier ‘Oubaydillah Ibn Habhab et lorsque les nouvelles arrivèrent au calife, il dit :

- « Par Allah je vais sévir contre eux comme les Arabes sévissent et je vais leur envoyer une armée dont l’avant-garde sera chez eux et l’arrière garde chez moi ». Puis, il demanda à ‘Oubaydillah Ibn Habhab de se présenter chez lui. Le calife leur envoya Koulthoum Ibn ‘Iyad Ibn Qoushayri, des Banou Qoushayr Ibn Ka’b Ibn Rabi’ah Ibn ‘Amir Ibn Sa’sa’ah, et Koulthoum Ibn ‘Iyad était un fanatique tribal des Qays, en compagnie du fils de son frère Balj Ibn Bishr Ibn ‘Iyad Ibn Qoushayri qui était encore plus fanatique pour sa tribu que lui.     

 

Au mois de Ramadan de l’année 123 de l’Hégire (740), Koulthoum Ibn ‘Iyad Ibn Qoushayri arriva au Maghreb et cet idiot (ahmaq) ou il se mit à offenser (yastakhif) les Arabes du Maghreb et de l’Andalousie qui pour la plupart d’entre eux était des tribus yéménites Qahtaniyah. Alors les Arabes d’Ifriqiyah écrivirent au commandant des forces musulmanes, Habib Ibn Abi ‘Abda' al-Fihri et les Fihri sont des Qourayshi Moudari alors qu’il combattait les Berbères pour l’informer. Il écrivit à son tour à Koulthoum Ibn ‘Iyad et lui dit : « Le fils de ton oncle, le stupide (as-safi, sous-entendu : Balj Ibn Bishr) a dit ceci et cela, protégé par ton armée, (fait attention sinon) nous conduirons nos chevaux chez toi (sous-entendu : nous allons venir de te combattre) ». Koulthoum lui répondit et s’excusa pour son comportement.

Koulthoum et son armée se dirigèrent vers Tanger jusqu’à ce qu’il parvint au camp de Habib Ibn Abi ‘Abda' près du fleuve de Chélif. Lorsque Koulthoum et Balj le virent, Balj dit moqueur :

- « Est-ce donc celui-ci qui veut lancer ses chevaux contre nous ? » La sédition gagna leur rang à cause de cette parole et les deux armées s’entretuèrent, sans aucun gain pour elles, jusqu’à ce qu’ils conviennent d’un traité de paix mais les cœurs vivement remontés les uns contre les autres.

 

 

Au début de l’année 124 de l’Hégire (741), près de Tahert près du fleuve Sibou eut lieu une grande bataille entre les rebelles et Koulthoum Ibn ‘Iyad, à cause de la désopilante politique de Balj et de l’aveuglement stupide de son oncle à le suivre, les Arabes furent défaits. Un tiers de l’armée fut tué, tandis que le reste s’enfuit. Quand les Nobles arabes virent l’immense armée de rebelles, ils demandèrent à Koulthoum de creuser une tranchée autour du camp et lorsqu’il voulut donner son accord, Balj aveuglé par ses prétentions dit :

- « Et qui sont ces gens pour que nous les craignions et que nous nous retranchons. Mais il mordit rapidement la terre et s’enfuit avec dix-mille Arabes à Ceuta ou ils se fortifièrent tandis que Koulthoum Habib In Abi ‘Abda' fut tué. ‘AbderRahmane Ibn Habib Abi ‘Abda' al-Fihri s’enfuit en Andalousie à Cordoue (qortoba) ou il resta chez le gouverneur ‘Abdel Malik Ibn Qatan al-Fihri.

Les rebelles marchèrent alors sur Ceuta ou ils assiégèrent les Arabes qui s’y trouvaient jusqu’à ce qu’ils furent sur le point de mourir de faim, à cause de la dureté du siège, si bien qu’ils durent manger leurs montures. Puis Balj Ibn Bishr écrivit à ‘Abdel Malik Ibn Qatan pour lui demander la permission de traverser et de venir en Andalousie qui refusa. Mais lorsqu’il vit à quel point le siège était parvenu et qu’il ne faiblissait pas, il envoya des navires à Balj pour lui permettre de traverser et à ceux qui étaient avec lui, à la condition de rester en Andalousie une année seulement et de repartir ensuite pour le Maghreb. Lorsque Balj donna son accord, les navires les transportèrent, et déposèrent une partie d’entre eux dans l’ile d’Oumm Hakim, ou ils restèrent en otage et en garantie, en attendant de tous repartir.

 

 

Les batailles de Qan et d’al-Asnam contre les khawarije au Maghreb

 

Après la bataille de Maqdourah, les khawarije soufariyah sous le commandement d’Abi Youssouf al-Hawari et ‘Oukashah Ibn Ayyoub al-Fazari marchèrent sur Kairouan. Entre temps, le calife avait donné la gouvernance du Maghreb au gouverneur d’Egypte Handalah Ibn Safwan al-Kalbi, puis lui avait fourni une grande armée avant de lui ordonner de marcher sur le Maghreb.

    

En l’an 124 de l’Hégire (741), Handalah Ibn Safwan al-Kalbi arriva au Maghreb ou il se dirigea directement vers le camp des khawarije qui s’étaient divisés en deux groupes. L’un commandé par ‘Oukashah Ibn Ayyoub al-Fazari rencontra l’armée de Handalah et une féroce bataille s’ensuivit entre les deux armées. Handalah Ibn Safwan réussit à les battre près d’un lieu nommé Qan avant de revenir à Kairouan.

 

La deuxième armée des khawarije sous le commandement d’Abi Youssouf al-Hawari, plus grande et au nombre de trois-cent-mille combattants campa près d’un lieu nommé al-Asnam près de Kairouan. Handalah fit ses préparatifs en conséquence et quitta Kairouan à la tête d’une armée composée uniquement de Musulmans arabes.

Les historiens ont rapporté que les savants (‘oulama) et les Sheikhs (shouyoukh) haranguèrent les soldats pour le Jihad fis-Sabilillah, la sincérité dans leur acte et leur dévotion. Ils leur rappelèrent que leurs ennemis étaient les khawarije, et que si ceux-ci étaient vainqueurs, ils ne manqueraient pas de tuer tous les hommes et les femmes, tandis que les enfants seraient pris en esclavage. Puis les femmes (nissoi) des Musulmans sortirent aussi haranguer leurs hommes si bien que les combattants furent emplit de foi et demandèrent l’assistance et le secours d’Allah Exalté, le Très haut.

 

A la fin de l’année 124 de l’Hégire (741), eut lieu une des plus grande bataille de l’Islam ou les Musulmans restèrent fermes contre leurs innombrables ennemis les khawarije et combattirent férocement et Allah Exalté leur octroya la victoire. Une immense tuerie eut lieu dans les rangs des rebelles et des khawarije. Abdel Wahhab al-Hawari fut tué tandis que ‘Oukashah Ibn Ayyoub al-Fazari fut capturé et Handalah Ibn Safwan al-Kalbi ordonna de le tuer.

Les historiens ont rapporté que cent-quatre-mille Berbères furent tués au cours de cette bataille. On a rapporté que lorsque l’Imam Leyth Ibn Sa’d fut informé de la victoire, il dit :

- « La bataille à laquelle j’aurais aimé le plus assister après la bataille de Badr est celle de Qan et d’al-Asnam ».

 

  

La rébellion des Berbères en Andalousie

 

Lorsque ‘Abdel Malik Ibn Qatan envoya des navires à Balj Ibn Bishr pour lui permettre de quitter le Maghreb sous la menace des Berbères, il put quitter Ceuta ou il était assiégé pour l’Andalousie alors qu’il était en compagnie des soldats de Syrie. Les Yéménites d’Andalousie les accueillirent et leur fournirent tout ce dont ils avaient la nécessité tandis qu’ils se réparèrent à combattre les Berbères rebelles d’Andalousie qui étaient sous le commandement d’un homme que les Arabes appelaient Ibn Houdayn.

Près de Tolède et du fleuve Salit eut lieu une grande bataille et les soldats de Syrie furent durement éprouvés (balahan kabiran) et réussirent à infliger une cruciale défaite aux rebelles dont ils se rappelaient certainement encore les effets du siège qu’ils eurent à supporter et cela les motiva à combattre plus férocement encore contre les Berbères.

 

Après la bataille, ‘Abdel Malik Ibn Qatan demanda à Balj Ibn Bishr et ceux qui étaient avec lui de repartir pour le Maghreb. Balj lui dit :

- « Nous allons partir mais à du port d’Alvéra ou nous pourrons directement aller à Kairouan ».

- « Non », leur dit ‘Abdel Malik, « c’est impossible mes navires sont à Algésiras et ils vous déposeront à Ceuta comme prévu ».

- « Tu veux que nous retombions entre les mains de Berbères de Ceuta pour qu’ils se débarrassent de nous ? Il est mieux pour nous que tu nous jette directement à la mer ! »

 

Au mois de Dzoul Qi’dah de l’année 125 de l’Hégire (742), ils se rebellèrent contre lui, le sortirent de son palais, et nommèrent Balj Ibn Bishr leur émir. Alors les gardes qui gardaient les otages dans l’île d’Oumm Hakim leur coupèrent les vivre si bien qu’un homme des nobles de Ghassan mourut des suites de l’embargo sur eux. Les Arabes yéménites d’Andalousie accusèrent ‘Abdel Malik Ibn Qatan d’être responsable de sa mort et demandèrent à Balj de le leur remettre mais il ne put le faire et ils lui dirent :

- « Tu le protège (tahmi) parce qu’il est un Moudari comme toi ». Balj craignit alors de perdre le contrôle de la situation et leur remit ‘Abdel Malik Ibn Qatan qui était âgé d’environ soixante ans. ‘Abdel Malik Ibn Qatan avait réussi à s’enfuir le jour de la bataille de Harra qui eut lieu en l’an 63 de l’Hégire (682) lorsque Yazid Ibn Mou’awiyah envoya l’armée de Syrie combattre les gens de Médine. Les gens lui dirent :

- « O fuyard (ya fal), tu étais du nombre de nos sabres le jour de Harra, puis tu t’es enfui et trahis les soldats de l’émir des croyants, nous laissant manger les chiens et les peaux ». Puis, ils le tuèrent et le crucifièrent, en compagnie d’une carcasse de cochon sur sa droite et d’un chien sur sa gauche, au mois de Rabi’ Awwal de l’année 124 de l’Hégire (741).

 

La mort de ‘Abdel Malik Ibn Qatan ne fut pas un évènement sans reste mais allait conduire à une alliance entre Qatan et Oumayyah Ibn ‘Abdel Malik Ibn Qatan et les Berbères à l’expulsion des Arabes de Syrie. Ils furent rejoints par ‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi ‘Abda' Ibn Ouqbah Ibn Nafi’ et une bataille sanglante (damawi) eut lieu ou les soldats de Syrie l’emportèrent bien que Balj Ibn Bishr fut tué et Ils nommèrent Tha’labah Ibn Salamah al-‘Amili, et ‘Amila est une tribu Kahlaniyah Qahtaniyah yéménite, pour le remplacer.

 

Le calife Yazid Ibn Walid, le calife dépravé (fassiq) demanda au gouverneur d’Egypte Handalah Ibn Safwan de nommer un gouverneur yéménite sur l’Andalousie afin que les gens l’acceptent et que la sédition s’arrête et il nomma Abou al-Khattar al-Houssam Ibn Dirar al-Kalbi, celui qui avait envoyé le poème au calife si vous vous rappelez, qu’il envoya en Andalousie au mois de Rajab de l’année 125 de l’Hégire (742).

Lorsque ‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi ‘Abda' apprit la nouvelle il quitta l’Andalousie et se réfugia à Tunis.

Les gouverneurs d’Andalousie dépendait du gouverneur du Maghreb et à plus large échelle du gouverneur d’Egypte de la même manière que les gouverneurs du Khorasan dépendaient du Gouverneur d’Iraq et à plus large échelle, du calife en personne.

 

Les Musulmans d’Andalousie, sous le commandement de Habib Ibn Abi ‘Abda' Ibn Ouqbah Ibn Nafi’, se rebellèrent contre ‘Abdel ‘Aziz Ibn Moussa Ibn Noussayr, le gouverneur d’Andalousie, qui avait été nommé par son père Moussa Ibn Noussayr avant de partir en Syrie. Ils le tuèrent alors qu’il priait dans la mosquée de Séville et lorsqu’ils le tuèrent, le fils de sa tante Ayyoub Ibn Habib al-Lakhmi lui succéda pour une durée de six mois.

 

 

Samh Ibn Malik le premier à avoir traversé les Pyrénées

 

Au mois de Dzoul Hijjah de l’année 97 de l’Hégire (715), l’ordre de nommer Hourr Ibn ‘AbderRahmane ath-Thaqafi arriva. Ce dernier quitta Séville pour Cordoue ou il resta gouverneur jusqu’au mois de Ramadan de l’année 102 de l’Hégire (720). Il fut remplacé, suivant les ordres du calife ‘Omar Ibn ‘Abdel ‘Aziz, par Samh Ibn Malik al-Khawlani, Khawlan est une tribu Qahtaniyah.

Samh Ibn Malik est le premier à avoir traversé les Pyrénées pour le pays des Francs (franja) et la France à cette époque n’est pas ce qu’elle est aujourd’hui et ni même un pays défini mais le pays des Francs. Samh Ibn Malik razzia le pays des Francs et particulièrement, la région des sept villes dont il conquit Narbonne, Toulouse, dans la région Aquitaine ou le Duc d’Eudes (oudis) l’arrêta.

Le jour de Tarwiyyah (la veille du jour de ‘Arafat) le 8 du mois de Dzoul Hijjah de l’année 102 de l’Hégire (720), une bataille eut lieu, les Musulmans furent défaits et Samh Ibn Malik trouva le martyr. Les Musulmans se retirèrent sous le commandement de ‘AbderRahmane ar-Rafiqi à Narbonne. Puis ‘AbderRahmane ar-Rafiqi fut nommé gouverneur d’Andalousie en attendant la nomination d’un nouveau gouverneur par le calife en la personne d’Ambassah Ibn Souhaym al-Kalbi qui arriva au mois de Safar de l’année 103 de l’Hégire (721). 

 

 

Ambassah Ibn Souhaym al-Kalbi stoppé à Sens

 

Ambassah Ibn Souhaym al-Kalbi comme son prédécesseur continua le combat dans la voie d’Allah en France, et l’on sait combien l’accès en France est difficile en entrant par le sud à cause des chaines de montagnes. Il conquit tout le sud-est, la Provence, les Bouches du Rhône et remonta le fleuve jusqu’à Lyon. Aucun livre scolaire d’histoire français ne fait mention de ces conquêtes et on ne comprend pas pourquoi il serait honteux d’avoir été envahi par les « Arabes » excepté pour les partisans du « cochon à gogo ». 

 

Ambassah Ibn Souhaym al-Kalbi et ses hommes, poussés par leur foi, combattaient à dos de cheval et étaient armés seulement de sabres et de lances. Et tout le monde sait que lorsque les Musulmans sont poussés par leur foi, sincères et déterminés envers leur Seigneur, dans leurs intentions et leur but, quand bien même ils ne seraient que quelques milliers ou bien moins sont irrésistibles. Ambassah Ibn Souhaym al-Kalbi fut stoppé par une armée de Francs à moins de 100 kilomètres de Paris, à Sens, au mois de Sha’ban 107 de l’Hégire (725). Les Musulmans furent mit en déroute et Ambassah Ibn Souhaym al-Kalbi trouva le martyr puisse Allah Exalté lui faire miséricorde. Ces gens-là ne restaient pas dans le confort de leurs palais ni ne recherchaient les richesses de ce monde mais la gloire auprès d’Allah Exalté par l’une des deux excellences : le martyr ou la victoire.

 

‘Oudrah Ibn ‘Abdillah al-Fihri prit sa succession pour deux mois, jusqu’à l’arrivée de Yahya Ibn Salamah al-Kalbi au mois de Shawwal de l’année 107 de l’Hégire (725), le nouveau gouverneur qui le resta jusqu’à la fin de l’année 109 (727) avant d’être remplacé à son tour par Houdayfah Ibn Ahwas al-Qayssi. 

Houdayfah Ibn Ahwas al-Qayssi resta gouverneur six mois avant de décédé au mois de Rabi’ Awwal de l’année 110 de l’Hégire (728).

 

Au mois de Sha’ban de cette même année lui succéda ‘Uthman Ibn Abi Naf’ah al-Khath’ami jusqu’au mois de Mouharram de l’année 111 de l’Hégire (729), puis al-Haytham Ibn ‘Oubayd al-Kinani lui succéda pour cinq mois avant d’être remplacé par Muhammad Ibn ‘Abdillah al-Ashja’i pour deux mois.

 

 

‘AbderRahmane Ibn ‘Abdillah al-Ghafiqi et la bataille de Balat ash-Shouhadah

 

Au mois de Safar de l’année 112 de l’Hégire (730), lui succéda le chef, le grand guerrier (moujahid) ‘AbderRahmane Ibn ‘Abdillah al-Ghafiqi qui resta quelques années gouverneur avant de partir de nouveau à la tête d’une armée vers le sud de la France. Il captura la région d’Aquitaine avant de traverser la Garonne, puis Bordeaux. Le duc d’Aquitaine appela à l’aide Charles Martel, le chef des mérovingiens[4], qui arriva à la tête d’une forte armée et attaqua les Musulmans près de Châtellerault, lors de la fameuse bataille de Balat ash-Shouhadah (le Carré des Martyrs), plus communément connut dans l’histoire à tort sous le nom de la « bataille de Poitiers ». 

La bataille dura trois jours, et les Musulmans furent victorieux et ramassèrent un large butin. Le Duc d’Eudes attaqua alors l’arrière de l’armée (as-saqah), là où se trouve le butin et les Musulmans tentèrent de défendre leur prise mais le désordre gagna leur rang et l’armée des Musulmans fut mise en déroute après que leur émir, AbderRahmane al-Ghafiqi, fut tué par une flèche au mois de Ramadan de l’année 114 de l’Hégire (732), puisse Allah Exalté lui faire miséricorde. L‘armée des Musulmans se retira sous le couvert de la nuit et les francs ne furent pas en mesure de les rattraper.

 

‘Abdel Malik Ibn Qatan al-Fihri, fut nommé gouverneur d’Andalousie au mois de Shawwal de cette année et le resta jusqu’au mois de Ramadan de l’année 118 de l’Hégire (736), avant d’être désisté et remplacé par ‘Ouqbah Ibn al-Hajjaj as-Salouli, un redoutable combattant qui fut aussi tué dans le sud de la France, ou il combattait dans la voie d’Allah à Lui les Louanges et la Gloire, au mois de Safar de l’année 123 de l’Hégire (740).

‘Abdel Malik Ibn Qatan al-Fihri lui succéda au poste de gouverneur d’Andalousie pour la deuxième fois et fut tué un an après et un mois lors de la sédition de Balj Ibn Bishr et des soldats de Syrie qui le crucifièrent comme nous l’avons rapporté précédemment. Après sa mort, lui succéda Balj Ibn Bishr al-Koushayri pour une durée de onze mois à qui succéda Tha’labah Ibn Salamah al-‘Amiri pour une durée de dix mois qui fut remplacé par Abou al-Khattar Hissam Ibn Dirar al-Kalbi et Thouwabah Ibn Salamah al-Joudami.

 

Au mois de Mouharram de l’année 129 de l’Hégire (746), lui succéda ‘AbderRahmane Ibn Kathir al-Lakhmi, puis Youssouf Ibn ‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi ‘Abda' Ibn ‘Ouqbah Ibn Nafi’ al-Fihri qui resta gouverneur jusqu’à l’arrivée du Faucon des Qouraysh : ‘AbderRahmane ad-Dakhil alias ‘AbderRahmane Ibn Mou’awiyah Ibn Hisham Ibn ‘Abdel Malik Ibn Marwan en l’an 138 de l’Hégire (755).  

 

 

Au mois de Joumadah Awwal de l’année 126 de l’Hégire (743), ‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi ‘Abda' Ibn ‘Ouqbah Ibn Nafi’ al-Fihri (le grand père de son père est le célèbre conquérant ‘Ouqbah Ibn Nafi’) arriva à Tunis (ifriqiyah) ou il réunit ses partisans et au début de l’année 127 de l’Hégire (744), il partit à Kairouan d’où il envoya une lettre à Handalah Ibn Safwan al-Kalbi pour lui demander la permission d’aller à Médine qui lui fut accordé. Et il est connu que Handalah ne combattait que les mécréants ou les khawarije et il mit de côté son différend avec lui pour préserver les Musulmans et leurs forces pour s’unir dans le combat contre les khawarije.

 

Au mois de Joumadah Awwal de l’année 127 (744), ‘AbderRahmane Ibn Habib Ibn Abi ‘Abda' Ibn ‘Ouqbah Ibn Nafi’ al-Fihri arriva à Médine.

 

Après avoir brièvement passé en revue les évènements au Maghreb mais qui seront détaillés dans le prochain volume, nous allons revenir à l‘histoire des Omeyyades, là où nous l’avons laissée, c'est-à-dire au début de la succession de Walid Ibn Yazid.

 

 

Al-Walid Ibn Yazid succède à Hisham Ibn ‘Abdel Malik

 

Al-Walid Ibn Yazid succéda à Hisham Ibn ‘Abdel Malik décédé le dernier mercredi du mois de Rabi’ Thani de l’année 125 de l’Hégire (742), bien que Hisham tenta de le désister de la succession à cause de sa dépravation et c’est pour cela que Walid détestait Hisham.

Avant de devenir calife, al-Walid, ordonna au fils de son oncle al-‘Abbas Ibn Walid de partir à ar-Rassafah et d’estimer le nombre des enfants d’Hisham et leur richesse, excepté pour Maslamah qui avait souvent prit sa défense et n’agréait pas son père de son comportement envers al-Walid.

Et lorsqu’al-Walid devint calife, il montra un visage différent de ce que connaissaient les gens. Il dépensa de l’argent pour les malades, les gens dans le besoin et pour chacun d’entre eux, il attribua un assistant. Il augmenta aussi les allocations pour toutes les familles des Musulmans et un peu plus pour celles de Syrie si bien que l’argent de l’état diminua considérablement néanmoins la population se réjouit de ses générosité parce qu’elle aimait l’argent (al-flouss) mais les gens oublient rapidement les bienfaits comme nous allons le voir.

Al-Walid désigna ses fils al-Hakam et ‘Uthman ses futurs successeurs et les fit reconnaitre par les gens bien qu’ils n’avaient pas encore atteint l’âge de la puberté (houloum) et avant d’être tué.

Al-Hakam avait atteint l’âge de la puberté, s’était marié et avait déjà un enfant et son frère ‘Uthman venait juste de l’atteindre. Leur assassinat eut lieu lorsque Marwan Ibn Muhammad entra à Damas pour venger leur père mais les hommes de Yazid Ibn Walid décidèrent de les tuer dans leur prison avec Youssouf Ibn ‘Omar comme nous allons le voir par la suite.

 

Al-Walid Ibn Yazid envoya son frère Ghamr Ibn Yazid à la tête d’une armée razzier les Byzantins puis il désista Muhammad Ibn Hisham al-Makhzoumi, gouverneur de Médine, de La Mecque et de Taif, et le remplaça par son oncle Youssouf Ibn Muhammad Ibn Youssouf ath-Thaqafi à qui il demanda de capturer Muhammad et Ibrahim Ibn Hisham al-Makhzoumi, ce qu’il fit avant de saisir leurs biens et de les exhiber dans la ville. Puis, il reçut une lettre du calife lui ordonnant de les envoyer en Iraq à Youssouf Ibn ‘Omar afin qu’il les torture pour savoir où ils avaient caché leur argent. Et Youssouf les tortura tellement qu’ils moururent sous les supplices.

Quand les enfants des califes commencèrent à s’entretuer, ce fut le début du désordre dans l’état et aussi une des causes de la chute des Omeyyades. Lorsque les états utilisent ce genre de moyens contre les peuples, cela marque incontestablement le début de leur fin comme nous le vivons ces jours ci.

 



[1] Al-Ifriqi ou al-Afariqah sont des Carthaginois.

[2] Le Chélif (shlif) est un fleuve d’une longueur de 725 km du nord-ouest de l’Algérie, il prend sa source dans l’Atlas tellien et se jette dans Méditerranée.

[3] Tahert était une ville d’Algérie situé dans l’actuelle Wilaya (département) de Tiaret, proche de Tiaret.

[4] Les Mérovingiens constituèrent la première dynastie qui régna sur la majorité des territoires français et belge, ainsi que sur une partie de l’Allemagne et de la Suisse, immédiatement après l’occupation romaine de la Gaule.