Récapitulatif sur les exactions des qarmates

 

Avant de continuer notre chronologie, nous allons faire un petit résumé sur les qarmates que nous n’avons pas beaucoup mentionné, depuis leur raid contre les pèlerins à La Mecque.

La menace des qarmates n’était pas finie et le calife abbasside dû leur fournir des sommes d’argent pour qu’il n’attaque pas les convois de pèlerins. Mais malgré cela, au moins de Dzoul Qi’dah de l’année 323 de l’Hégire (934), Abou Tahir le qarmate, attaqua une caravane de pèlerins qui se défendirent parce qu’ils étaient accompagnés d’un détachement de soldats et qui revinrent en Iraq sans avoir effectué leur pèlerinage. Les jours passèrent et le vil Abou Tahir mourut de la variole en l’an 338 de l’Hégire (949). En 339 (950), les qarmates prirent la Pierre Noire de Hajar à Koufa, qu’ils déposèrent dans la mosquée afin que les gens la voient puis, la ramenèrent à La Mecque.

 

En l’an 354 de l’Hégire (964), les qarmates attaquèrent le ‘Oman ou se trouvait le khariji Shourah. Une bataille s’ensuivit entre eux, et les qarmates défaits retournèrent humiliés à Hajar. Les rapports entre les qarmates ismaéliens et les Hamdan duodécimains (ithna ‘ashariyyah) étaient excellents.

 

En l’an 358 de l’Hégire (968), Abou Taghlib Ibn Hamdan al-Hamdani leur envoya des présents dans leur capitale à Hajar.

 

En l’an 360 de l’Hégire (970), Abou Taghlib Ibn Hamdan se maria avec la fille de ‘Izz ad-Dawlah Bakhtiyar le rafidi.

Cette même année, les qarmates, sous le commandement de Houssayn Ibn Ahmad Ibn Abou Sa’id al-Jannabi surnommé Houssayn Ibn Bahran, accompagné de renforts envoyé par ‘Izz ad-Dawlah Bakhtiyar, attaquèrent Damas et tuèrent le chef ‘oubaydi Ja’far Ibn Falah, et chassèrent les fils de leurs oncles les ‘oubaydi ismaéliens battini en Egypte.

 

Puis, en l’an 363 de l’Hégire (973), ils attaquèrent Égypte sans succès et en 366 (976), leur chef Abou Ya’qoub Youssouf Ibn Houssayn le qarmate mourut ainsi qu’al-Houssayn Ibn Ahmad Ibn Houssayn Ibn Bahran et après sa mort, les affaires des qarmates déclinèrent considérablement.

 

En l’an 375 de l’Hégire (985), ils furent lourdement battus lors d’une bataille près de Koufa contre l’armée de Samsam ad-Dawlah et en 378 (988), al-Oussayfir al-Mountafiqi, le chef de la tribu arabe iraquienne des Banou Mountafiqi les écrasa lors d’une grande bataille et les chassa à Ihsa ou les qarmates se réfugièrent. Puis, al-Oussayfir al-Mountafiqi partit pour Qatif ou il prit possession de leur argent, de leurs biens et de leurs esclaves avant de revenir dans son camp à Basra.

 

 

Durant l’année 363 de l’Hégire (973), le calife al-Mouti’ investi Abou al-Hassan Muhammad Ibn Oumm Shayban al-Hashimi du bureau du Qadi, après qu’il l’ait décliné et il lui stipula certaines conditions, parmi lesquelles, qu’il ne devrait pas recevoir de salaire pour le bureau judiciaire, ni être investi d’une robe d’honneur, ni de ne présenter des requêtes concernant les choses contraires à la loi. Il attribua à son secrétaire un salaire mensuel de trois-cents dirhams, pour son chambellan cent-cinquante dirhams, au fonctionnaire spécialisé dans la division des héritages, cent dirhams, aux trésoriers de la cour judiciaire et aux assistants six-cents dirhams et il lui écrivit une charge comme suit :

« C’est ce que le servant d’Allah, al-Fadl al-Mouti’ le commandant des croyants, a commandé à Muhammad Ibn Salih le Hashimite, à quelle heure il l’a appelé pour ces choses appartenant au bureau judiciaire sur lequel il l’a nommé, parmi les habitants de la ville de la paix, la ville d’al-Mansour et la ville est, Koufa et les régions arrosés par l’Euphrate et leurs dépendances, Wassit, Karkhi, le cours de l’Euphrate et du Tigre, la route du Khorasan, Houlwan, Karmissine, Diyar Moudaraf, Diyar Rabia’h, Diyar Bakr, Mossoul et les deux villes sacrées, Yaman, Damas, Emèse et le département de Qinassrine, al-‘Awassim, le Caire, Alexandrie, la province de la Palestine, la Jordanie et toutes leurs dépendances et au-delà.

Les devoirs du chef du bureau judiciaire avec lequel il l’a investi, l’investigation dans la condition des juges, la considération de tout ce que le cours de décisions judiciaires implique, dans toutes les provinces et les pays que l’empire comprend et dans lequel la prérogative abbaside détermine, le maintien de ceux dont il approuve la méthode et la conduite et la suppression de ceux dont le caractère et la disposition sont blâmables, d’être attentif sur les intérêts privés et publics, incluant ceux de la foi et ceux tolérés sous sa protection, de la connaissance du calife qu’il est le chef de sa maison, de l’éminente continence de la vie, pure dans sa foi et sa confiance, célèbre pour sa vertu et conduite sans tache, un centre d’intérêt pour son érudition et sa sagacité, reconnut pour sa patience et intelligence, habillé des vêtement les plus sublimes de vertu, le pur, l’aimé, se réjouissant dans la sérénité surnaturelle, instruit dans les affaires mondaines, conscient des choses qui menacent le salut à venir.

Le calife lui a conseillé la crainte d’Allah, car en vérité c’est un bouclier de protection et qu’il devrait faire du Livre d’Allah, le sujet de ses études dans tout qu’il fait, ordonne, ses décisions et décrets conformément à lui (le Livre d’Allah), son guide vers qui il devrait se tourner pour obtenir de l’aide, son support sur lequel il doit dépendre et qu’il devrait prendre la loi de l’apôtre d’Allah comme la balise avec laquelle il doit avancer, le modèle qu’il doit suivre, qu’il devrait observer le consensus, l’enseignement et suivre les Imams Orthodoxes et utiliser ses propres facultés dans les cas qui ne sont pas trouvés dans le Livre, la Loi et l’accord général des fidèles, qu’il devrait convoquer à ce Conseil les gens de sagesses et de jugement sur qui il peut dépendre et d’être le même dans le regard et les mots aux deux plaideurs quand ils comparaitront devant lui et accorder à tous les deux sa justice et son équité, pour que le faible soit en sécurité de sa tyrannie et que le fort désespère de sa partialité. Il lui a ordonné, en plus, de considérer avec une affection pleine de sollicitude ses assistants, ses aides, et ceux de ses surveillants et instruments sur qui il dépend, les retirant de la mauvaise adoption de conduite répréhensible et en vérifiant n’importe quelle tendance à l’enrichissement illégale », et il poursuivit un long discours au même effet.

Je remarque ici que les califes avaient l’habitude de nommer le Qadi résident dans leur métropole, sur le service judiciaire à travers tous les territoires et les provinces sous leur souveraineté et le Qadi nommait un député de son choix sous son autorité dans chaque région et dans chaque ville. C’est pour cette raison, qu’il était appelé le Qadi des Qadi et personne d’autre n’était ainsi appelé ainsi ni même distingué. Auparavant, il y avait le Qadi simple ou le Qadi d’une telle ville. Mais de nos jours, dans une seule ville simple, il y a quatre conjoint et chacun d’entre eux est appelé Qadi des Qadi et peut-être, un simple Qadi de ses anciens subalternes avait une juridiction deux fois plus grande que n’importe lequel des chefs Qadis possède maintenant et effectivement le Qadi chef tint alors une autorité plus étendue qu’il est apprécié par les souverains de notre temps (c’est toujours l’auteur qui s’exprime).


At-Ta'i’ Billah, le vingt-quatrième calife abbasside 

 

Toujours cette même année, le calife al-Mouti’ fut frappé de paralysie et perdit la locution. Sabouktakin, le chambellan de ‘Izz ad-Dawlah le convoqua pour abdiquer et démissionner du gouvernement en faveur de son fils ‘Abdel Karim Ibn Mouti’ qui fut surnommé at-Ta'i’ Billah et dont la mère s’appelait ‘Attab. Il lui remit le gouvernement, le jeudi 13 du mois de Dzoul Qi’dah. La durée du règne d’al-Mouti’ fut de vingt-neuf ans et quelques mois et son abdication fut attestée par le Qadi, Ibn Oumm Shayban. Après sa renonciation, il fut appelé le Sheikh vertueux.

L’Imam ad-Dahhabi a rapporté qu’al Mouti’ et son fils furent impuissants entre les mains de la Maison Bouwayh et que l’autorité du califat continua à décliner jusqu’à l’accession d’al-Mouktafi ou il se rétablit un peu, mais l’influence des hérétiques ‘oubaydi d’Egypte était prédominante, leurs ordres obéis et leur pouvoir contesta la souveraineté des Abbassides durant leur temps.

Al-Mouti’ partit avec son fils à Wassit ou il mourut durant le mois de Mouharram 364 de l’Hégire (974). Ibn Shahin remarqua : « Il abdiqua volontairement autant que je peux l’assurer ».

Al-Khatib a rapporté une tradition sur l’autorité de Muhammad Ibn Youssouf al-Qatan d’al-Mouti’ Billah, qu’Ahmad Ibn Hanbal a dit : « Quand les amis d’un homme meurent, il devient humble ».

 

Al-Mouti’ abdiqua pour son fils alors qu’il était âgé de quarante-trois ans. Le nouveau calife At-Ta'i’ Billah Abou Bakr Abdel Karim défila portant la cape royale, accompagné par les troupes et précédé par Sabouktakin. Le jour suivant, il investit Sabouktakin du bureau de Sultan, lui remit une bannière attachée à une lance et lui donna le titre de Nassir ad-Dawlah. Peu de temps après, un malentendu se produisit entre ‘Izz ad-Dawlah et Sabouktakin. Ce dernier appela les Turcs à son aide, ils répondirent à son appel et les hostilités prirent place entre lui et ‘Izz ad-Dawlah.

 

Cette même année, il y eu un conflit civil parmi le peuple, qui résultat à la dévastation de Baghdad. Un groupe de gens appelés « la Sounnah », se rangèrent aux côtés de Sabouktakin, et firent ouvertement la guerre contre les shiites. Il y eut une rupture entre les deux groupes et les shiites se retranchèrent dans les banlieues de Karkh sur la rive ouest. Il y eut une série de batailles entre eux et Karkh fut brûlé une deuxième fois. Les commerçants furent réduits à la pauvreté, leurs marchandises, leurs valeurs, leurs familles et leurs habitations furent saisies par les bandits qui les firent chanter. L’ordre prit fin tandis que le gouvernement était impuissant. La dispute entre les deux fractions minoritaires, qui avaient été autrefois sur des questions religieuses particulières, devint politique aussi bien que religieuse, puisque les shiites adoptèrent les slogans de Bakhtiyar et des Daylamites, tandis que le groupe de « la Sounnah » adopta celle de Sabouktakin et des Turcs.

 

Au mois de Dzoul Hijjah de cette année 363 (973), la Khoutbah[1] et les invocations pour al-Mou’iz al-‘oubaydi furent dites dans les villes sacrées,

 

 

En l’an 364 de l’Hégire (974), ‘Adoud ad-Dawlah d marcha sur Baghdad pour aider ‘Izz ad-Dawlah contre Sabouktakin. Baghdad et ses possessions excitèrent sa cupidité et il décida de l’acquérir. Il s’attira les bonnes grâces des troupes et se retourna contre ‘Izz ad-Dawlah, qui se retira alors de la vie publique. ‘Adoud ad-Dawlah écrivit aux provinces sous l’autorité d’at-Ta'i’ et leur annonça la nomination à l’autorité suprême de ‘Adoud ad-Dawlah. Suite à cela, une dispute survint entre at-Ta'i’ et ‘Adoud ad-Dawlah suite à laquelle, la Khoutbah au nom d’at-Ta'i’ fut arrêté à Baghdad et dans d’autres villes du 10 du mois de Joumadah Awwal, jusqu’au 10 du mois de Rajab, où elle fut restituée.

 

Cette même année, puis celle d’après, l’hérésie ismaélienne ‘oubaydiyah devint rampante et se répandit en Egypte, en Syrie, à l’est et à l’ouest. La prière de Tarawih fut abolie par les ‘oubaydi.

 

 

Durant l’année 365 de l’Hégire (975), Roukn ad-Dawlah Ibn Bouwayh renonça en faveur de ses fils aux dominions qu’il avait en sa possession. Il remit Fars et Kirman à Fanakhisrou ‘Adoud ad-Dawlah, Rayy et Ispahan à Mouayyid ad-Dawlah, Hamadan et Dinawar à Fakhr ad-Dawlah.

 

Au mois de Rajab, se tint une session judiciaire dans le palais de Sultan ‘Izz ad-Dawlah où siégea le chef Qadi Ibn Ma’nif et jugea des cas, sur la demande de ‘Izz ad-Dawlah afin que ce dernier puisse être témoin et qui voulait voir comment la procédure de sa cour était conduite.

 

Cette même année, une mésentente se produisit entre ‘Izz ad-Dawlah et ‘Adoud ad-Dawlah car un page turque appartenant à ‘Izz ad-Dawlah fut emprisonné. Il voulut le récupérer et son chagrin devint si profond qu’il refusa de manger, pleura, fuit la société et cessa de tenir audience dans sa cour. Il écrivit à ‘Adoud ad-Dawlah l’implorant de lui restituer le garçon, se rabaissa et se ridiculisa devant les gens. Il fut réprimandé pour sa conduite, mais ne s’en abstint pas et offrit en rançon pour le garçon deux filles esclave qualifiées dans le luth, dont l’une d’entre elles fut achetée pour cent-mille dinars. Et, il dit au messager : « S’il rechigne à le restituer, ajoute tout ce que tu crois utile sans hésiter car en vérité, je serais content de l’avoir, même si je devais aller aux confins de la terre », et ‘Adoud ad-Dawlah lui restitua le jeune.

 

Toujours cette même année, la Khoutbah au nom de ‘Izz ad-Dawlah fut arrêté à Koufa et remplacée pour ‘Adoud ad-Dawlah.

 

Cette année, al-Mou’iz li-Dinillah, le régnant ‘oubaydi d’Egypte mourut. Son fils Nizar lui succéda et il fut surnommé al-’Aziz.

 

 

En l’an 366 de l’Hégire (976), décéda al-Moustansir Billah al-Hakam Ibn Nassir li-Dinillah, le souverain omeyyade d’Andalousie. Son fils Hisham al-Mouayyid Billah lui succéda.

 

Cette même année, Roukn ad-Dawlah al-Houssayn Ibn Bouwayh décéda et il fut succédé par son fils Fanakhisrou ‘Adoud Ad-Dawlah.

 

Toujours cette même année, le calife ‘Abbasside at-Ta'i’ se maria à Shahabar, la fille de ‘Izz ad-Dawlah Ibn ‘Izz ad-Dawlah al-Bouwayhi.

 

 

Durant l’année 367 de l’Hégire (977), une bataille eut lieu entre le fils de son oncle ‘Izz ad-Dawlah Bakhtiyar et ‘Adoud ad-Dawlah. Ce dernier fut victorieux et il prit prisonnier ‘Izz ad-Dawlah et l’exécuta ensuite avant de partir pour Baghdad. Le Calife at-Ta'i’ investit ‘Adoud ad-Dawlah d’une robe royale et le couronna d’une couronne sertie de joyaux, lui remit un bracelet, une épée et lui attacha deux bannières de sa propre main. L’une de ces bannière était ornementée d’argent et l’autre d’or.

 

 

En l’an 368 de l’Hégire (978), le calife at-Ta’i’ ordonna que les tambours soient frappés devant la porte de ‘Adoud ad-Dawlah, le matin, au coucher du soleil et à la tombée de la nuit et que la Khoutbah devrait être lue en son nom sur les chaires de la capitale. 

Ibn al Jawzi a rapporté que ces deux ordres n’ont été jamais publiés avant lui, ni autorisés pour les régents désignés. Mou’iz ad-Dawlah désira que les tambours soient frappés pour lui à Baghdad et le sollicita d’al Mouti’ qui ne le lui permit pas et ‘Adoud ad-Dawlah n’appréciât pas ce privilège.

 

 

Durant l’année 369 de l’Hégire (979), l’ambassadeur d’al-’Aziz le régnant de l’Egypte, arriva à Baghdad et ‘Adoud ad-Dawlah demanda au Calife at-Ta'i’, d’ajouter à ses titres (de ‘Adoud ad-Dawlah) « Taj al-Millat » (Couronne de la Foi), de lui présenter une robe d’honneur et de le couronner.  At-Ta'i’ consentit, mit son siège près de son trône et autour de lui se levèrent cent hommes en épées et en apparat. Il fut placé devant lui le Qur’an du Calife ‘Uthman, sur ses épaules la Cape Apostolique, dans sa main le sceptre et il fut ceint avec l’épée du Messager d’Allah (saluts et bénédictions d’Allah sur lui). Un rideau envoyé par ‘Adoud ad-Dawlah fut monté et ce dernier avait demandé qu’il soit placé comme un voile devant at-Ta'i’, afin que personne ne puisse voir le calife avant sa propre apparition. Les Turcs et Daylamites entrèrent tandis que les nobles et les officiers d’état se tenaient se tenaient de chaque côté. Alors la permission fut  donnée à ‘Adoud ad-Dawlah d’entrer et il entra, le voile fut levé et ‘Adoud ad-Dawlah embrassa la terre. Le général Ziyad fut frappé de crainte révérencielle et demanda à ‘Adoud ad-Dawlah : « Qu’est-ce que cela ? O roi, est-ce la toute-puissance ? » ‘Adoud ad-Dawlah fut le premier prince, depuis la promulgation de l’Islam à recevoir le titre de « Malik[2] ». Il se retourna vers lui et lui répondit : « C’est la vice-gérance du Tout-Puissant sur la terre » et il avança de nouveau, avant d’embrasser une nouvelle fois, sept fois la terre. Alors le calife at-Ta'i’ regarda Khalis le servant et lui dit : « Permet lui de s’approcher ». Et ‘Adoud ad-Dawlah monta sur l’estrade et embrassa deux fois la terre devant le calife qui lui dit : « Approche-toi de moi ». Il s’approcha donc, embrassa son pied et at-Ta'i’ tendit sa main droite vers et lui ordonna de s’asseoir sur le siège que le calife avait préparé à cet effet. Après s’être excusé, le calife lui demanda à plusieurs reprises de s’assoir et lui dit : « Je t’adjure de t’assoir ». Alors, ‘Adoud ad-Dawlah embrassa le trône et s’assis. Alors at-Ta'i’ lui dit : « En vérité, je pense confier à tes soins ce qu’Allah m’a confié des affaires de tous mes sujets de l’est à l’ouest de la terre ; leurs charges et leurs affaires dans tous leurs aspects, à l’exception de mes affaires personnelles ». ‘Adoud ad-Dawlah répondit : « Puisse Allah m’aider dans l’obéissance et le service du commandants des croyants ». Alors le calife lui attribua une robe d’honneur et partit.

Je remarque (c’est l’historien qui s’exprime) que je considère ce fait comme une preuve qu’il était un calife si impuissant et que le califat ne fut jamais aussi faible dans l’histoire qu’à ce moment précis et que le pouvoir et l’autorité de n’importe quel Sultan aussi grande et aussi forte que celle de ‘Adoud ad-Dawlah. De notre temps, les choses parvinrent à un tel degré que le calife visitait le sultan au début de chaque mois pour le féliciter  et que le maximum que le sultan lui condescendait, était de descendre de son estrade et les deux s’asseyaient ensemble en bas de l’estrade. Alors, le calife se levait et partait comme une personne ordinaire et le sultan s’asseyaient dans le Hall d’état. J’ai été informé, que le sultan al-Ashraf Barsabayf[3] quand il marcha à Amidah pour engager l’ennemi, le calife l’accompagna, en allant devant lui et en agissant comme son chambellan pendant que toute la dignité et l’honneur étaient réservés pour le sultan. Le calife apparaissant comme un des nobles dans la suite du sultan.

 

Cette même année, ‘Adoud ad-Dawlah envoya une armée sous le commandement de son ami confidentiel Abou al-Qassim ‘Ali Ibn Ja’far Wadhari, à qui il attacha le chrétien Abou al-‘Ala, appelé aussi ‘Oubaydallah Ibn al-Fadl, à la poursuite des Banou Shayban.

La tribu des Banou Shayban était réfractaire, et avait pris l’habitude de piller, d’attaquer et de voler et leur poursuite était devenue désespérée car ils avaient des chevaux excellents sur lesquels ils comptaient pour s’enfuir lorsqu’ils étaient poursuivis. Durant une nuit, leurs raids pouvaient couvrir 120 kilomètres ou plus. Le soir, ils étaient dans un endroit et le matin suivant à 120 kilomètres de cette distance et vice versa. Le gouvernement ne put jamais découvrit leur camps ou les poursuivre avec succès. Ils avaient un chef et avaient en plus des alliances matrimoniales et autres, avec les Kurdes qui avaient pris possession de Shahrazour, un endroit qui continua à résister au sultan et dont les habitants ne se soumettaient pas, grâce à la force de leur ville et le fait qu’ils soient nés rebelles et courageux. ‘Adoud ad-Dawlah voulut commencer par Shahrazour pour séparer les Banou Shayban des Kurdes de l’endroit. Le voyage d’Abou al-Qassim Wadhari débuta peu de temps après sa récupération d’une assez longue maladie qui reprit sur la route et provoqua sa mort.

Les nouvelles parvinrent à ‘Adoud ad-Dawlah, qui écrivit à Abou al-’Ala alias ‘Oubaydallah Ibn al-Fadl, l’invitant à prendre le commandement de la mission et d’accomplir l’objet de l’expédition. Abou al-‘Ala' obéit et démontra sa valeur bien connue. Il conduisit l’entreprise d’une manière qui écarta de son maître des troubles supplémentaires et satisfit toutes les attentes. Il arriva à Shahrazour ou il établit son camp devant la ville. Les portes de celle-ci lui furent ouvertes et il y entra avec une petite force ayant fait une trêve avec les habitants et accepté leur soumission, car ni eux et ni la ville ne faisait partie de son objectif primordial. Les Banou Shayban s’enfuirent vers le nord en direction du Zab, selon leur coutume, au galop quand ils étaient poursuivis

Abou al-‘Ala' alla à Daqouqah, où il resta quatre jours et une partie du cinquième, occupé à arranger différents complots et plans, avec une correspondance continuelle, où la courtoisie, la conciliation et les promesses furent employées, jusqu’à ce que les Banou Shayban le considèrent inoffensif. Il ne se hâta pas mais attendit qu’ils se soient approchés de lui avec leurs clans et ensuite il les attaqua de nuit et leur délivra un terrible coup, qui emporta leurs vies et leurs possessions, leurs progénitures et leurs hommes forts. Il obtint un énorme butin et tua un très grand nombre de leurs combattants. Il partit avec deux cents têtes des tués et huit cents prisonniers, dont parmi eux plusieurs de leurs chefs et notables. Il entra à Baghdad le jeudi 8 du mois de Rajab et le 14 de ce même mois, il exhiba les captifs coiffés de longs burnous et de vêtements colorés sur des chameaux. Ils furent alors placés dans les prisons et les cachots, tandis que ceux qui s’étaient enfuis se dispersèrent dans les régions lointaines. Ainsi leur ardeur se refroidit et les régions de Baghdad et du Sawad furent libéré de leur malice.

 

Toujours cette année, Adoud ad-Dawlah ordonna de reconstruire les maisons et les rues de Baghdad, puisqu’elles avaient été en partie abîmées par l’incendie volontaire et en partie démolies. Il commença par les mosquées publiques, qui étaient aussi délabrées, en dépensant d’énorme somme sur elle. Certains des bâtiments qui ne pouvaient être réparés, furent démolis sur son ordre et remplacés par des constructions solides, élevées, fournies et décorées. Il ordonna de fournir des rémunérations régulières aux managers, aux muezzins, aux imams, aux lecteurs et des allocations aux étrangers et aux pauvres qui se réfugiaient à l’intérieur car tout cela avait été précédemment négligé.

Ensuite, il ordonna la restauration des banlieues et restitua leurs fonds. Dans ces réformes, il compta sur des agents fiables, supervisés par le greffier des ‘Alid. Il contraignit alors les propriétaires de terrains qui avaient souffert du feu et de la dévastation pendant les émeutes de restaurer les bâtiments, leurs fournitures et leurs décorations, dans leur état initial. On permit à ceux qui n’avaient pas les moyens de le faire, d’emprunter de la Trésorerie et de rembourser quand les circonstances de l’emprunteur seraient améliorées. Si le propriétaire était douteux ou absent, un administrateur était nommé et on lui remettait les sommes qu’il exigeait. Baghdad fut ainsi reconstruite et devint plus impressive qu’elle ne l’avait été.

L’attention fut alors consacrée aux maisons et aux habitations sur les deux rives du Tigre ; les digues furent reconstruites et les terrasses réparées après qu’elles eussent été en ruines. Il ordonna aux hauts fonctionnaires et membres de la cour dont les noms étaient attachés aux maisons sur les rives de faire tout leur  possible pour les restaurer et les embellir.

Ces maisons et ses palais étaient tombés en ruine lorsque Bakhtiyar avait démoli le palais d’Abou al-Fadl al-‘Abbas

Ibn Houssayn Shirazi avait exproprié au vizir, un palais qui n’avait aucun rival à Baghdad en grandeur et en beauté. Le vizir avait planté un jardin d’environ dix Jaribs remplis des palmiers et d’autres arbres, d’herbes parfumées, de fleurs exotiques et rares et y avait érigé des salons magnifiques et de vastes habitations. Le prix dépensé pour les matériaux sembla à Bakhtiyar une belle somme et il fut tout à fait satisfait après cela de vendre des matériaux du bâtiment et par conséquence, démolit quelques magnifiques bâtiments qui ne pouvaient pas être facilement restitués, alors qu’ils le pouvaient tous. ‘Adoud ad-Dawlah abolit alors la pratique de démolition et de vente de matériaux et ordonna la restauration du jardin qui formait la cour du palais de ‘Abbas Ibn Houssayn, et aussi celui du Jardin Zahir au centre de l’est de Baghdad ; ces travaux furent réalisés et ces endroits inutilisés furent remplis des fleurs, des plantes ramenées de Fars et d’ailleurs, après qu’ils aient été hantés par les chiens et qu’ils devinrent des dépotoirs pour les carcasses et les ordures.

Il y avait à Baghdad de nombreux canaux, tels que Nahr al-‘Abarah, Nahr de la Mosquée des gens d’Anbar, Nahr al-Bazzazin, Nahr al-Dajaj, Nahr al-Qalla’in, Nahr de Tabiq et son aqueduc menant au Tigre et le Sarat, Nahr ‘Issa et un Nahr dans le quartier Harbiyyah, arrosé par le Doujayl. Ces canaux avaient de nombreux conduits différents utilisés pour arroser les jardins des gens et pour fournir de l’eau potable dans les parties éloignées du Tigre. Leurs canaux avaient été obturés par la vase et leurs emplacements couverts. Les jeunes générations qui étaient arrivés ignoraient tous de ces canaux tandis que les pauvres furent contraints de boire l’eau indigeste des puits, ou alors peinaient une longue distance pour aller chercher de l’eau du Tigre. Adoud ad-Dawlah donna des ordres que les canaux principaux et les conduits soient nettoyés et remit en fonction.

Sur les canaux principaux tels que Nahr ‘Issa, le Sarat et le Khandaq, il y avait eu des ponts, qui étaient tombés en ruine à cause du manque d’entretien, négligés ou abandonnés et dans ces cas aucune route n’était praticable. D’autres, avaient été légèrement réparés par les gens de la région et selon leurs moyens portés à l’économie et remettant toujours à plus tard la catastrophe qui guettait le bétail, les femmes, les enfants, ou ceux qui les traverseraient. Tous ces ponts furent solidement reconstruits. Il fut de même avec le pont de Baghdad. Personne ne pouvait le traverser sans risquer sa vie, surtout s’il était à cheval car il était si étroit, fragile et bondé. Des solides péniches massives furent sélectionné pour cela, et il fut élargi comme une large route, protégé avec des grilles et mis sous la garde de surveillants et de gardes.

Les domaines du Sawad furent placés dans les mains de personnes compétentes et ce processus commença l’année précédant les activités que nous venons de mentionner. Il y avait eu de sérieuses inondations, donc des réserves de terre et des instruments de toutes sortes furent réunis et beaucoup de canaux et de barrages furent restitués. De l’argile, de la chaux et du ciment furent aussi fournis et il fut exigés des habitants, bien qu’avec indulgence, de réparer les choses. Ils furent gardés et inspectés et le plus grand soin fut pris pour les protéger.

Le commencement de la collection du Kharaj[4] fut remis au jour de l’an de Mou’tadid, alors qu’auparavant il était prélevé avant le mûrissement des récoltes. Un système solide de taxation fut imposé au public et les ajouts arbitraires et la chicanerie abolie. L’attention fut portée aux contestations et la rectification encouragée. Les taxes sur les caravanes de pèlerins furent supprimées, les différentes formes d’outrages et de violence qu’ils subissaient s’arrêtèrent. Des aubes (roue à eau) furent construites aux points d’eaux sur la route, des puits creusés et des sources activées. Les couvertures furent de nouveau envoyées pour la Ka’bah, des cadeaux furent présentés aux membres des familles nobles résidant à Médine ainsi qu’à d’autres personnes nécessiteuses et des réserves de nourriture leur furent fournies par terre et mer.

De larges allocations furent attribuées aux savants, aux juristes, aux exégètes, aux théologiens, aux traditionalistes, aux généalogistes, aux poètes, aux grammairiens, aux métriciens, aux médecins, aux astrologues, aux arithméticiens et aux ingénieurs. Dans le palais de ‘Adoud ad-Dawlah, un endroit fut spécialement aménagé pour les personnes ayant un talent spécial et les philosophes distingués. Cet endroit était près de son propre appartement et était la chambre qui était inaccessible. Là, de telles personnes pouvaient se rassembler pour échanger leurs idées à l’abri du commun du peuple. Il leur fut assigné des allocations et des honoraires réguliers et leurs études furent donc revivifiés. Leurs dévots se rassemblèrent après avoir été dispersés, les jeunes furent encouragés à faire des études, les vieux à s’instruire, le talent fut libéré et les compétences fleurirent comme jamais il n’avait été le cas précédemment. D’énormes sommes furent payées par la Trésorerie et dépensée dans ces projets et d’autres consacrés au profit des Musulmans nécessiteux de la communauté musulmane et des communautés protégées. La permission fut donnée au vizir Nasr Ibn Haroun pour construire des églises, des monastères et de fournir de l’argent sur les pauvres de ces communautés.

 

Le suicide de Moutahhar

 

Cette même année, après la mort de ‘Imran Ibn Shahin, quand ‘Adoud ad-Dawlah fut libéré de ses plus importants ennemis sérieux et que Bakhtiyar et Abou Taghlib furent tués, il prit possession de leurs terres et de leurs forces et s’établit à Baghdad. Puis ses pensées se dirigèrent surtout vers la reconquête de l’Egypte et après cela au territoire des mécréants byzantins et ce qui se trouve au-delà d’eux. Il se sentait offensé par la proximité des rebelles nabatéens, d’être défié par des petits chefs locaux, des personnes qui s’étaient réfugiées dans les roseaux, les lagunes et les marais, convaincus qu’il devait les exterminer. Dans son salon, il fit allusion à Hassan Ibn ‘Imran et les Marais et demanda que quelqu’un de le soulager de ce souci. Abou al-Wafa et Moutahhar offrirent leurs services et chacun se déclara compétent pour la tâche. Il fut décidé d’envoyer Moutahhar. ‘Adoud ad-Dawlah expédia une armée sous son commandement se composant de troupes de grades différents et lui fournit les armes, l’argent, les réserves et la logistique. Il mit sous ses ordres Abou al-Hassan Muhammad Ibn ‘Omar al-‘Alawi qui se trouvait à Koufa, et qui revint à Wassit pour le rejoindre.

Une robe avec d’autres honneurs furent attribuées à Moutahhar qui partit en campagne un samedi du mois de Safar. ‘Adoud ad-Dawlah nomma Abou ar-Rayyan Muhammad Ibn Muhammad al-Isbahani de se décharger de ses devoirs de vizir, d’administrateur d’affaires et de collectionneur de revenu, non pas à cause de ses achèvements professionnels, mais comme un homme d’expérience, qui par la longue pratique était informé des procédures, à agir comme intermédiaire entre ‘Adoud ad-Dawlah et ses vizirs, qui étaient ses collègues (à Abou ar-Rayyan Muhammad), pour l’exécution de ses ordres.

Quand Moutahhar s’établit dans Bazbouni, un département de Jamidah, il tint conseil et écouta les avis. Le plan adopté était peu solide car il avait été à plusieurs reprises essayé par ses prédécesseurs et s’était avéré inutile. Il consistait à construire un barrage en amont sur les embouchures des canaux pour assécher le Marais où l’armée Nabatéenne avait pris refuge et la construction d’une route qui permettrait d’approcher leurs forteresses à pied. L’argent fut infructueusement dépensé pour ce projet, la navigation du Tigre fut arrêtée, les taxes sur les marchandises cessèrent, les dépenses pour le siège augmentèrent et l’enrôlement de troupes fut nécessaire. Le niveau de l’eau monta contre les barrages ou Hassan Ibn ‘Imran fit quelques brèches pour inonder le Marais. À peine Moutahhar avait-il construit un barrage sur un côté que des brèches apparaissaient dans les autres et s’il gardait l’un d’entre eux, les autres étaient percés. Puis, il y eut une bataille entre lui et Hassan Ibn ‘Imran où il manqua de lui infliger la défaite écrasante qu’il avait espéré.

Les guerres que Moutahhar avait menées étaient des batailles importantes ou il ne fit jamais preuve de patience et d’endurance. Cette dernière bataille le vexa et l’épuisa. Il soupçonna Muhammad Ibn ‘Omar al-‘Alawi d’échanger des messages secrets avec le chef du Marais, et lui divulguait les secrets de la stratégie employée contre lui et le conseillait par intérêt, recevant secrètement de lui en échange, des cadeaux et des compliments.

Le caractère austère et dur de Moutahhar était notoire et il avait un penchant à soupçonner le mal. Il conçut de l’angoisse et de l’inquiétude, et s’imagina être incapable de s’occuper de cette affaire qui impliquerait la perte de son grade en plus de la perte du vizirat en faveur d’Abou al-Wafa, son ennemi rival, qui serait maintenant capable de découvrir ses défauts. Il préféra la mort que tomber sous le contrôle et le pouvoir de ses ennemis.

Le mardi 11 du mois de Sha’ban, il siégea dans son camp et les employés, les officiers et les hommes de différents ordres vinrent le saluer. Il abrégea leurs salutations et leur demanda de se retirer avant de se retirer lui-même dans sa tente privée. Puis, il appela son médecin il demanda de lui faire une saignée ; son idée étant que quand le médecin serait parti, il retirerait le bandage de la blessure et se laisserait saigner à mort. Cependant, il avait été précédemment saigné pour une maladie qui lui était arrivée avant son départ de Baghdad.

Le médecin l’informa qu’il n’avait pas besoin de saignement et il réprimanda le médecin en lui demandant de se retirer. Il congédia alors les esclaves qui étaient en attente et quand il fut seul, il prit son poignard et se rompit toutes les artères des deux bras, qu’il laissa couler sur ses vêtements. Sa vie s’écoula par ces endroits essentiels. Un gardien privé qui entra remarqua que la chaise, où il était assis, était recouverte de sang. Ses cris alertèrent les gens qui se précipitèrent et trouvèrent Moutahhar qui respirait encore si bien qu’ils supposèrent qu’il avait été la victime d’un assaut. Il avait encore assez de force pour les informer que c’était son propre travail et que c’était Muhammad Ibn ‘Omar al-’Alawi qui l’avait contraint à faire cela. Il mourut immédiatement après et il fut ramené là où il naquit, à Karazin, dans le Fars, pour être enterré. Ce fut un événement extraordinaire, le cas d’un homme qui se suicida de peur de déplaire à son maître. Nous demandons à Allah Exalté de nous guider, de nous protéger et de nous préserver !

‘Adoud ad-Dawlah envoya alors ‘Oubaydallah Ibn al-Fadl, de retour de sa victoire sur les Banou Shayban, au camp de Moutahhar pour assumer la charge de ses effets et pour s’arranger avec le chef du Marais sur la base d’un paiement immédiat d’argent et une trêve jusqu’à que son cas soit reconsidérée. Il alla au sud, accomplit sa mission avec succès, ramena de l’argent de Hassan Ibn ‘Imran et prit un otage. Il revint alors et entra dans la capitale, un mercredi vers le milieu du mois de Dzoul Qi’dah.

 

Cette même année, Muhammad Ibn ‘Omar al-‘Alawi fut arrêté dans le Marais et expédié à Fars suite aux accusations de Moutahhar juste avant sa mort. Abou al-Wafa Tahir Ibn Muhammad fut envoyé pour saisir ses biens et entra en possession d’une énorme quantité d’argent, d’armes et de différentes sortes de marchandises que l’on ne pensait pas qu’un tel homme aurait pu amasser. Ses propriétés en large nombre, irrigués par l’Euphrate et s’étendant jusqu’au Sawad, furent aussi confisquées. Des faveurs furent montrées à son frère Ahmad Ibn ‘Omar al-‘Alawi, à qui fut donné la charge du pèlerinage et un fief généreux.

 

 

En l’an 370 de l’Hégire (980), un rapport arriva d’Abou ‘Ali Hassan Ibn ‘Ali at-Tamimi que Ward le Byzantin avait été arrêté.

Quand l’empereur byzantin Romanus mourut, Nicéphore, un homme énergétique et capable, était parti en campagne dans le territoire islamique, où il causa des dégâts. À son retour, alors qu’il s’approchait de Constantinople, il apprit la mort de Romanus. Les officiers en chef de l’armée se rassemblèrent près de lui et lui dire : « L’empereur est mort laissant derrière lui deux fils qui sont trop jeunes pour être utiles, personne d’autre que toi n’est qualifié pour gouverner l’empire et tu dois accepter pour l’intérêt de l’empire et de ses habitants ». Il déclina mais lorsqu’ils insistèrent il donna son accord. Il se présenta aux princes, leur rendit hommage et se présenta comme leur chambellan et député avant de prendre la couronne et de se marier avec leur mère. Plus tard, il lui donna des raisons de griefs et cette femme réussit à exécuter l’empereur imprudent.

Elle entra en contact avec le fils de Zimis, le pressa à assassiner Nicéphore et s’établir empereur à sa place. Le complot fut arrangé et, accompagné par dix de ses compagnons intimes, il vint secrètement de nuit au palais où elle et Nicéphore résidait. Nicéphore avait l’habitude de s’asseoir la plupart de la nuit, où il s’occupait des affaires et lisait les chroniques. Deux gardes étaient postées à la porte de la chambre où il s’était retiré pour se reposer. Quand le fils de Zimis fut à l’intérieur du palais, il se dirigea vers cet endroit, exécuta les gardes et assassina Nicéphore. Il y eut alors une clameur et lorsque les faits furent connus et que le fils de Zimis était devenu le maître, ce dernier fit arrêter Léo, le frère de Nicéphore et Ward, le fils de Léo.

Il aveugla Léo et Ward et les envoya dans une forteresse dans la mer, où ils furent emprisonnés. Puis, il marcha vers les provinces syriennes, où il accomplit différents exploits et avança vers Tripoli (tarablous), qu’il assiégea après avoir rencontré de la résistance des habitants.

La mère des deux princes avait un frère appelé Barkmous qui avait occupé le poste de vizir de l’empire sous le règne de l’empereur Romanus. On a rapporté qu’il empoisonna secrètement la nourriture et la boisson de l’empereur et, le fils de Zimis, qui était en campagne, ressentit les effets de l’empoisonnement dans son corps et se mit en route pour Constantinople, mais mourut en cours de route  et Barkmous, devint le maître d’affaires.

Ward Ibn (le fils de) Mounir était un des commandants en chef qui résidait à cette époque dans les unes des provinces. Aspirant au pouvoir suprême, il rassembla des forces, recruta des Musulmans des frontières et correspondit avec Abou Taghlib Ibn Hamdan, avec qui il forma une alliance matrimoniale et politique. Les deux empereurs avaient envoyé contre lui armée après l’armée, qu’il mit successivement en déroute tandis que son pouvoir augmentait progressivement, il marcha sur Constantinople. Les empereurs, jugeant la situation sérieuse, libérèrent Wardis le fils de Léo, le prirent à leur service et le firent jurer fidélité avant de l’envoyer à la tête d’une immense armée pour rencontrer Ward. Une série de batailles s’ensuivirent, où ils déployèrent un grand courage avant de s’opposer dans un duel où ils se couvrirent mutuellement d’injures avec des massues jusqu’à ce que leurs casques soient tombés de leur tête. Ward fut vaincu, entra dans le territoire islamique avec ses troupes vaincues et arriva à 4 kilomètres de Mayafariqin, où se trouvait, à cette époque, le chambellan Abou ‘Ali Hassan Ibn ‘Ali at-Tamimi. De là, Ward envoya son frère en mission près de ‘Adoud ad-Dawlah, qui le reçu aimablement et lui donna une promesse écrite de sécurité et d’aide.

Un envoyé de l’empereur byzantin vint trouver à son tour ‘Adoud ad-Dawlah et réussit à l’incliner du côté de l’empereur, contre Ward. ‘Adoud ad-Dawlah décida de prendre des dispositions, d’arrêter ce dernier et écrivit à Abou ‘Ali at-Tamimi de concevoir les moyens nécessaires pour son arrestation. Après un échange de messages sur la nécessité d’une rencontre, Abou ‘Ali sortit, l’arrêta ainsi que son frère, son fils, un certain nombre de ses partisans et les ramena à Mayafariqin avant de les envoyer à Baghdad.

Avant l’arrestation de Ward, ses chef se réunirent en sa présence et lui dirent que la promesse d’aide de sécurité de ‘Adoud ad-Dawlah était incertaine et que d’autre part, les messages entre lui et les empereurs byzantins pouvaient conduire à un abandon de sa promesse et nous remettre aux empereurs. Il répondit que cette proposition était sans valeur, qu’il avait une haute opinion de ‘Adoud ad-Dawlah et qu’il serait impropre après s’être approché de se retirer avant de se soumettre à son jugement. Quand Ward s’opposa à leur proposition et les abandonna, beaucoup d’entre eux l’abandonnèrent et partirent.

Ward, son frère et son fils restèrent et furent emprisonnés avant d’être libéré par Samsam ad-Dawlah à la fin de ses jours.

 

Cette même année, ‘Adoud ad-Dawlah quitta Hamadan pour Baghdad et le Calife at-Ta'i’ sortit à sa rencontre, bien que cela n’ait jamais été la coutume des califes. Quand la fille de Mou’iz ad-Dawlah mourut, le calife al-Mouti’ lui rendit visite et lui présenta ses condoléances et Mou’iz ad-Dawlah embrassa la terre devant lui. À cette occasion, le messager de ‘Adoud ad-Dawlah, alla demander à at-Ta'i’ de le rencontrer et il fut incapable de décliner.

‘Adoud ad-Dawlah fut informé qu’at-Ta'i’ détestait sa fille et la privait de ses droits conjugaux. Il fut peiné et demanda à Tanoukhi d’aller trouver le calife et de l’informer que la mère de la jeune mariée désirait une augmentation des faveurs du service du calife envers sa fille.

 

 

Les négociations entre Abou Ishhaq Ibn Shahram et les Byzantins

 

En l’an 372 de l’Hégire (982), Abou Ishhaq Muhammad Ibn ‘Abdallah Ibn Muhammad Ibn Shahram arriva accompagné par un envoyé de l’empereur byzantin pour négocier le cas de Ward entre ‘Adoud ad-Dawlah et l’empereur byzantin alarmé. Abou Bakr Muhammad Ibn at-Tayyib Ash’ari surnommé Ibn al-Baqilani fut envoyé avec la réponse et revint accompagné par un envoyé appelé Ibn Qounous qui fut renvoyé accompagné par Abou Ishhaq Ibn Shahram qui réclama à l’empereur byzantin un certain nombre de forteresses. Avec lui, arriva un envoyé appelé Nicéphore al-Kaniklious (le gardien d’écritoire) apportant un généreux présent.

Les extraits d’une biographie trouvée dans les écritures d’Ibn Shahram témoignèrent de son intelligence, sa prudence et sa fermeté lors des négociations. En voici une partie : « En atteignant Kharshanah, j’appris que le général byzantin avait quitté Constantinople et avait commencé ses préparations et qu’il y avait avec lui un envoyé de Halab surnommé Ibn Mamak et Koulayb, le beau-père d’Abou Salih as-Sadid. Koulayb était un des partisans du général byzantin Bardas et était parmi les rebelles qui avaient bénéficié de l’amnistie et s’était établi sur le territoire byzantin après avoir été mis à l’amende et après s’être vu confisquer les domaines qui lui avait été accordé, ainsi qu’à d’autres, quand il leur livra la forteresse de Barzouyah après avoir capitulé. Mais il l’emporta sur le chambellan et le général byzantin en trouvant le moyen de les écarter de Halab et d’ailleurs ce qui suffit pour éloigner le danger imminent qui planait sur ces villes, en offrant un paiement sécurisé immédiat de taxes foncières pour Halab et Homs, puisque c’était son parent qui avait promis et qu’il ne s’opposerait pas à lui. Rien n’avait donc encore été décidé avec l’envoyé de Halab mais une demande fut faite pour les arriérés de taxe foncière des années précédentes.

Lorsque le général byzantin arriva près de la route postale, moi et Ibn Qounous l’avons rejoint. Il s’avéra être jeune, suffisant et opposé à l’achèvement de la trêve sur différents terrains, l’un étant qu’il ne pouvait renoncer à ces nécessités pour le moment et que cela porterait préjudice à sa réputation et l’autre, que le régnant byzantin en était avide et nous craignons sa malice et enfin ses propres espoirs personnels et vœux. Néanmoins, il fut courtois envers nous et accepta la proposition de paix proposée en manifestant ses remerciements.

Il demanda alors la raison de ma présence et je l’informais. Ibn Qounous attira son attention sur les termes stipulés et il dit : « Si les chefs réussissaient à obtenir de nous qu’on leur concède à l’amiable les régions et les forteresses qu’ils demandent, chacun d’entre eux commenceraient à comploter pour éviter la nécessité de garder une force armée et de payer de l’argent ». Je répondis que lorsque la politique était soutenue par la force et la compétence, c’était une preuve de noblesse de caractère et que la soumission devait être montrée. « Mais qu’en est-il de Halab  demanda-t-il ? Cela ne fait pas partie de votre territoire et son gouverneur n’a aucun égard pour vous. Son envoyé ici et Koulayb nous remettent le tribut et demandent notre protection. Quant aux forteresses, elles furent prises à l’époque de mon oncle Nicéphore et d’autres souverains et nous n’avons pas le pouvoir de les abandonner. Si vous pouvez faire une autre proposition, faites-le, sinon préparez-vous pour le long voyage de retour ». Je répondis : « Si vous avez l’ordre de votre souverain pour mon départ je partirais, mais si cela vient seulement de vous, le souverain doit entendre mes propres mots et moi sa réponse, pour revenir avec la réponse officielle ». Et il me permit de poursuivre ma route.

Donc je partis pour Constantinople et fit mon entrée après avoir été rencontré et courtoisement escorté par les fonctionnaires de la cour. Je fus honorablement logé dans le palais du Nicéphore Kaniklious avant d’être convoqué en présence du chambellan qui dit : « Nous sommes au courant du contenu du message, mais expose tes points de vues ». Sur ce, je produisis l’agrément actuel qu’il inspecta et dit ensuite : « N’était-il pas question de renoncer au tribut du territoire d’Abou Taghlib, tant passé que futur, conclut avec al-Baqilani conformément à vos vœux et n’a-t-il donné son accord pour nos conditions quant à la restitution des forteresses que nous avions prises et à l’arrestation de Ward ? Votre maître a accepté cet accord et s’est conformé à nos vœux, car tu as sa ratification de la trêve sous sa propre main ». Je lui dis qu’al-Baqilani n’avait conclu aucun arrangement et il répondit qu’il n’était pas parti avant d’avoir établit les termes d’accord, dont la ratification se trouvait sous la main de son souverain qui devait être envoyée et qu’il avait précédemment présenté sa lettre approuvant toutes les stipulations. Par conséquence je fus poussé à trouver un moyen pour remédier à cette situation et réfuter l’adversaire.

Je dis donc : « Ibn al-Baqilani ne parvint à aucun accord avec vous ; ce fut Ibn Qounous qui établit le contrat et fit une copie dans la langue grecque ». Alors le chambellan éclata et demanda à Ibn Qounous qui avait autorisé cela ? A quoi, il répondit que ni lui et ni Ibn al-Baqilani n’avaient convenu de quoi que ce soit et je me retirais.

Quelques jours plus tard, le chambellan me convoqua et se remit à lire l’accord. Il marqua une pause à un certain point où il dit : « Ce qui pourrait être convenu avec Ibn Shahram sur la base de ce qui est contenu dans la troisième copie », et dit que c’était la première copie, mais où donc étaient les deux autres ? En faisant allusion à ce passage je vis la gaffe qu’il avait commis en le mentionnant et lui dit : « Le sens de ce passage est que l’accord devait être établit en trois exemplaires, une copie pour rester avec l’empereur byzantin, une pour la ville de Halab et la troisième pour la capitale (Baghdad). Ibn Qounous s’opposa en disant que ses instructions avaient été de mettre par écrit le sens exact de l’accord ». Le chambellan dit que cette copie était celle de l’empereur ; que la deuxième copie mentionnait le renoncement aux forteresses, et que la troisième ne faisait aucune mention de Halab ; que l’accord avait été signé sur les termes convenus avec Ibn al-Baqilani et que l’unique raison d’avoir envoyé cette copie était d’obtenir le sceau du souverain. A quoi je dis : «  Cela ne peut être ainsi ; mes instructions consistent simplement en ce que j’ai exposé en ce qui concerne Halab et les forteresses, conformément à l’accord que tu as vu ». Il répondit : « Ward était en force ici et vous nous avez tous fait prisonniers, il ne pouvait pas demander plus que tu demandes ; que dire alors quand il est un prisonnier ! »

Je répondis : « Tes prétendus arguments que Ward était ici en force n’a aucun poids, car tu es bien conscient que quand Abou Taghlib, qui n’est pas même comparable au plus bas des partisans de ‘Adoud ad-Dawlah aida Ward, il déjoua les souverains byzantins pendant sept ans ; comment aurait-il été si ‘Adoud ad-Dawlah lui avait porté assistance avec son armée ? Ward, bien que prisonnier entre nos mains, n’est pas exposé comme vos captifs ( les prisonniers musulmans dans les prisons byzantines) le sont, à la mutilation. Sa présence dans la capitale est la meilleure sécurité pour nous, car nous n’avons pas fait de lui un captif. Si nous l’avions fait, il aurait pu désespérer de nous et partir mais à présent il agit avec nous et il est rassuré par l’apparat et la sécurité dont il est témoin dans la capitale. Nous tenons, en vérité, toutes les ficelles ».

Mes paroles l’impressionnèrent et le confondirent car il savait qu’elles étaient vrais et il dit : « Ce que tu demandes ne peut être accordé ; nous ratifierons, si tu le veux, ce qui fut convenu avec al-Baqilani, tu peux disposer ». Je répondis : « Si tu veux que je parte sans avoir eu une audience avec le souverain je le ferai ». Il me dit qu’il avait parlé pour le souverain, mais qu’il demanderait une audience pour moi.

Quelques jours après, je fus de nouveau convoqué et me rendis à l’audience. Le souverain byzantin demanda de lui rapporter ce qui s’était précédemment passé en ma présence et dit : « Tu es venu pour une raison répréhensible ; ton envoyé est venu et obtint notre consentement sur certains termes, dont la restitution des forteresses prises pendant la révolte. Tu demandes maintenant que l’on te cède d’autres forteresses prises par mes prédécesseurs. Sois tu consens à ce qui a été originalement stipulé ou retire toi en paix ». Je répondis : « Mais al-Baqilani n’agréa rien du tout et quant au document qu’il apporta, vous nous avez dépossédés, selon ses termes, de la moitié de notre territoire ; comment pouvons-nous admettre une telle chose contre nous ? Vous n’avez en votre possession aucune des forteresses dans Diyar Bakr qui maintenant nous appartient. Tout ce que tu peux, c’est de le contester et tu ignores quelle sera l’issue du conflit ». Le chambellan  intervint et dit : « Cet envoyé est qualifié dans la controverse et peut inventer une histoire parfaite. La mort nous est préférable que la soumission à ces termes. Permet-lui de retourner chez son maître ». Le souverain sortit et je me suis retiré.

Quand j’eus passé deux mois dans Constantinople, je fus convoqué par le chambellan. Il était en compagnie du maréchal, le père du général qui avait été aveuglé, et un certain nombre de patriciens et nous avons discuté la question des forteresses. Ils offrirent de céder le tribut de Hisn Kayfa, tenu par la mère d’Abou Taghlib, à quoi, je répondis : « Et je, vous céderai en retour le tribut de Samand » ; et me demandant ce que je voulais dire, je répondis : « Ce sont seulement les limites extrêmes qui sont spécifiées dans un accord. Pour être clair, c’est tout ce qu’il y a dans les limites comprises dans la paix ; Hisn Kayfa est à cinq jours de voyage d’Amid, comment se fait-il que vous l’avez nommé ? »

La dispute quant à Halab continua jusqu’à ce que le maréchal ait dit : « Si le gouverneur de Halab nous paie le tribut, nous saurons que vos déclarations n’étaient pas été justifiées et qu’il nous préfère à vous ». Je répondis : « Et quelle assurance ai-je que vous n’inciterez pas son secrétaire et beau-père Koulayb à vous remettre un paiement pour être cité comme preuve ? » Et sur ce, je partis.

Ensuite, je fus convoqué par le souverain alors que le tribut envoyé de Halab était arrivée et je trouvais leur précédent ton changé en véhémence et fureur, car ils dirent : « Voici le tribut de Halab qui vient d’arriver et son souverain nous a demandé de partager avec lui celui de Harran et de Sarouj, de l’aider contre vous et d’autres pouvoirs ». Et je dis : « Je sais que votre réception du tribut est une astuce, car ‘Adoud ad-Dawlah n’a pas imaginé que vous considéreriez légal le souverain de Halab pour agir comme vous l’avez fait, sans quoi, il aurait envoyé une armée pour arrêter la vôtre. Et quant à votre histoire du souverain de Halab, je suis mieux informé quant à ses vues et tout ce que l’on vous a dit de lui est faux ; la seigneurie de Halab est à ‘Adoud ad-Dawlah ». Ils me demandèrent si j’avais autre suggestion et sur ma réponse négative, ils me demandèrent de prendre congé du souverain et de partir avec mon escorte. Je répondis que je le ferais immédiatement.

Ibn Shahram fut déterminé à sortir de l’impasse de cette difficile situation.

Il continua : Je considérais la position, percevant que le chambellan, le maréchal et le reste d’entre eux étaient opposés à la paix proposée. Ces militaires craignaient que leurs épées ne soient plus exigées et que leur salaire soient réduits, comme il était de coutume chez les byzantins en temps de paix. La seule solution qui me restait, était de gagner et d’apaiser le souverain. Je lui dis donc : « Sa majesté considérera-t-elle la conduite de ‘Adoud ad-Dawlah  envers elle, de la non-assistance à son ennemi et dans la non attaque de son territoire pendant le temps qu’elle était préoccupée par les révoltes contre elle ? Car vous savez que si vous le satisfaites, étant le monarque de l’Islam, c’est bien et bon, mais dans le cas contraire, vous devrez satisfaire des milliers de vos partisans et leur consentement est incertain. Et si vous manquez de le faire, vous aurez peut-être à satisfaire ‘Adoud ad-Dawlah plus tard. Tu dois savoir, aussi, que tous ceux autour de lui sont opposés à la paix proposée ; il est le seul en sa faveur et il est capable d’accomplir son désir et personne ne se hasardera à le contester. Je perçois que tu es en faveur de la paix avec lui, mais peut être que ton désir n’est pas partagé par ceux autour de toi ». Il fut touché par mon discours et son expression montra son inquiétude que je sois conscient de l’opposition de ses conseillers. Il quitta alors la salle d’audience et je me retirais.

Maintenant, la personne nommée pour me porter attention était le conseiller le plus confidentiel du souverain, celui qui imposa la signature pourpre de sa part et qui était au courant de tous ses actes officiels, Nicéphore al-Kaniklious, qui m’avait accompagné comme envoyé et je lui avais demandé de se retirer avec moi, ce qu’il avait fait.

Quand nous fumes seuls, je lui parlais ainsi : « Je veux que tu transmettes un message de ma part au souverain. Mon séjour ici s’est prolongé, informe-moi ainsi de sa décision finale : si elle répond à mes désirs, c’est bien et bon ; sinon, je n’ai aucune raison de rester plus longtemps ». Et j’offris un magnifique cadeau que j’avais apporté avec moi au Kaniklious, accompagné de promesses de la part de ‘Adoud ad-Dawlah. Mon message était le suivant : « La première précaution de sa Majesté devrait être de faire garder sa personne, ensuite sa souveraineté et enfin ses partisans. Tu ne dois pas te fier à celui dont l’intérêt est de te porter préjudice, car c’est l’aide d’Abou Taghlib contre toi qui a provoqué ce qui est arrivé dans ton territoire. Qu’adviendra-t-il alors si ‘Adoud ad-Dawlah joint les forces contre sa Majesté ? La conclusion de la paix entre toi et le premier homme et souverain de l’Islam n’est pas, je vois, au goût de tes conseillers. Maintenant un homme manque de réaliser seulement ce dont il n’a aucune expérience et tu as l’expérience de sept années de révolte contre toi et ton règne. De plus, la continuation de l’état n’implique pas la nécessité de ton existence, car les Byzantins sont indifférents y comprit vers leur empereur …(le texte original est illisible ici). Ceci uniquement dans le cas que ‘Adoud ad-Dawlah ne bouge pas en personne. Je te donne un bon conseil, considère donc mes mots et agit de ton mieux ». Nicéphore à son retour dit : « La réponse est que les choses sont comme tu le dis, mais je n’ai pas le pouvoir de m’opposer au corps général, qui me considère déjà comme un traître. Néanmoins je mènerai l’affaire à bien et agirait autant que je suis capable ».

Par une coïncidence extraordinaire, le chambellan tomba soudain gravement malade et fut incapable de sortir. Ma correspondance avec le souverain continua et il m’accorda plusieurs audiences successives et conversa avec moi en personne, le Kaniklious m’apporta de l’aide suite à sa haine et sa jalousie du chambellan, jusqu’à ce que la paix fut agrée conformément à toutes les stipulations dans l’accord excepté l’exclusion de Halab qui était exclu de l’accord. Sur mon insistance particulière sur ce point et mes propos : «  Sans Halab, je ne peux accepter ». Il dit : « N’insiste pas car nous ne céderons pas plus que ce que nous avons cédé, et nous n’évacuerons pas plus de territoire dont nous recevons le tribut, excepté sous la contrainte. Mais je te confierais une lettre pour mon ami ton souverain, car je connais sa nature noble et que dès qu’il saura la vérité, il ne s’en déviera pas ». Puis, il demanda à ceux qui étaient présent de se retirer et me dit alors secrètement à l’abri des oreilles : « Dit à ton souverain que je désire vraiment sa bonne volonté, mais que je dois en avoir la preuve. Si vous voulez que nous vous transférions le tribut de Halab, ou que je vous laisse le recueillir sous la condition qu’Ibn Hamdan soit évincé de Halab. Exécutez ce que vous avez promis par la bouche d’Ibn Qounous (faisant allusion à la capitulation de Ward) ». Je dis : « Je n’en ai pas entendu parler, je n’étais pas présent et je trouve cela peu improbable ». Alors, il se fâcha et me dit : « Renonce à ce délai, tu n’as rien de plus pour arguer avec moi ». Il ordonna alors d’écrire la réponse, j’écrivis la mienne et attendit pour prendre congé.

En ayant peur que le destin, comme cela arrive dans de tels cas, provoque la mort de l’homme dont ils exigèrent la capitulation pour que nous ne gagnions rien et la paix impliquait tout notre territoire jusqu’à l’Euphrate, le territoire de Shar en plus de la perte de la perte de Halab, je dis : « Tu sais que je suis un domestique sous les ordres et pas un souverain et que je ne dois pas transcender les instructions que je vous rapportées fidèlement. Quant à vos stipulations de Halab,  je vous jure que je n’ai rien entendu sur cela à Baghdad. Mais votre majesté est-elle disposée à considérer un plan qui s’est présenté avec moi comme étant le meilleur qu’elle puisse adopter ? »  Et quel est-il, demanda-t-il ? Je dis : « Pour établir un traité de paix entre nous incluant tout notre territoire de Homs aux régions de Shar sans mentionner aucune personne, vous jurerez cela sur votre religion, le signerez avec votre main et la cachèterez avec votre sceau en ma présence. Votre envoyé la transmettra à la capitale avec moi, où il sera soit ratifié, ou votre envoyé le rapportera ». Je fus demandé : Et vas-tu donner une réponse écrite similaire ? Oui, répondis-je, si vous la transmettez sur mes termes requis. Mais tu, dit-il, mentionnera dans ton document la capitulation de l’homme ? Je répondis : « Je ne peux pas mentionner ce qui est en dehors de mon autorité ». Je vais faire donc, dit-il, deux accords, l’un pour ce qui est au-delà de l’Euphrate et du territoire de Shar et l’autre étant de Homs et de Halab comme stipulé. Ainsi ton Souverain pourra choisir soit sur ce qui s’étend au-delà de l’Euphrate sur les termes de son éjection de Ward, ou l’autre traité concernant Homs et de Halab. J’ai suggéré que l’accord soit établi sans faire mention de cette question, ce à quoi il répondit : « Alors écrit le toi-même, car je ne donnerai rien d’écrit sans recevoir la contrepartie ». Laisse donc ton interprète, dis-je, faire donc une copie de mes mots, et si ‘Adoud ad-Dawlah accepte vos propositions, ils pourront être copiés en sa présence et signés par lui. Sur ce fondement les termes furent mit par écrit et la paix fut ratifiée pour dix ans. Quand cela fut fini, je dis : « N’envoie pas ton envoyé comme un simple courrier mais informe le de ce que tu veux qu’il fasse conformément à cet accord que nous avons convenu et de ce qu’il sait lui-même et ratifie ce qu’il approuvera ». Il fut d’accord avec ces termes et les spécifia dans le document.

Lorsque le chambellan revint après sa guérison, il fut grandement en colère pour plusieurs raisons : l’une étant l’intimité du Kaniklious avec son maître, l’autre la conclusion des affaires en son absence; et enfin sur la question de Halab et Homs et les promesses que lui avait fait Koulayb. Mais, le souverain byzantin apaisa les sentiments du chambellan.

Selon le rapport de certains des courtisans, il dit : « Il n’y a nulle personne plus proche de moi que toi comme tu le sais. Tu (le chambellan) as de l’affection pour moi et me tiens en ton estime. Pu es le plus proche moi en lignée et en affinité. Tu dois protéger nos vies et ne pas faire attention à ce que le maréchal peut dire, ni écouter ses conseils ou lui faire confiance. Tu connais l’histoire d’Ibrahim de lui et son fils Bardas, comment ils nourrirent de la traîtrise à notre règne et eurent l’intention de nous tromper ».

J’ai demandé à mon informateur qui était Ibrahim et il m’a dit : Un envoyé du général qui s’était révélé si fidèle au souverain que le général l’avait envoyé aux Musulmans pour tout compte fait, vous demander de l’aider dans la rébellion qu’il projetait.

Le chambellan accepta la déclaration du souverain et lorsqu’il me convoqua, je remarquais un changement dans son ton et qu’il était plus familier avec moi bien que son apparence témoignait de sa désapprobation des termes convenus. Kaniklious fut nommé envoyé pour partir avec moi car le souverain n’avait trouvé personne d’autre plus fiable que lui mais il refusa. Il fit alors pression sur lui et le chambellan l’aida, en disant : « Nous sommes toi et moi, les deux personnages les plus importants de la cour et l’un d’entre nous doit y aller. Et il (le chambellan) était si excité par l’affaire que j’ai pensé qu’il voulait vraiment le (Kaniklious) voir loin de lui à cause de sa jalousie de ses (Kaniklious) relations intimes qu’il avait avec le souverain.

Ce fut, brièvement, le sens des mots utilisés par Ibn Shahram pour la négociation ».

 

À ce moment, ‘Adoud ad-Dawlah avait des problèmes de santé et son accès lui fut défendu. Il ordonna qu’un rapport de ce qui s’était passé soit déposé devant lui. Cette maladie s’avéra fatale pour ‘Adoud ad-Dawlah et après sa mort, l’envoyé byzantin eut une audience avec Samsam ad-Dawlah à qui il remit les présents et l’informa des raisons de sa présence. Deux accords furent établis, l’un étant celui d’Ibn Shahram sur la base qu’il était complet et permanent et l’autre, le précédent accord fait avec Nicéphore.

Le résultat des délibérations fut que : Nicéphore devait rester à Baghdad et qu’il devait envoyer son propre messager avec l’un venant de la capitale (Baghdad) pour prendre l’agreement du souverain byzantin et la garantie pour Ward, son frère et son fils, d’un sauf-conduit et une garantie les assurant de son approbation et de leur rétablissement à leurs anciennes fonctions et fortunes. Et qu’alors, ils devaient alors être conduits au souverain byzantin par Nicéphore, tandis que Ward devrait rester dans le territoire musulman et être empêché de s’approcher du territoire byzantin s’il complotait quoi que ce soit. Et alors, quand le traitement équitable des deux autres (le frère et le fils de Ward) serait devenu manifeste conformément à l’engagement, alors Ward devrait être envoyé après eux au cours de la troisième année conformément au même engagement, sur les termes non moins satisfaisants que pour les cas de son frère et de son fils.

Et que la somme payée comme tribut pour Homs et Halab par Ibn Hamdan au souverain byzantin devait, comme envoyer Ward aux byzantins, être payée dans la trésorerie de Samsam ad-Dawlah et que si Ibn Hamdan retardait le paiement, le souverain byzantin devait le contraindre et épargner ainsi à Samsam ad-Dawlah la nécessité d’envoyer une force contre lui. Qu’un équivalent, des présents que Shar avait l’habitude de faire au souverain byzantin, serait assigné à ce dernier à condition qu’il ne devait pas aider Shar[5] ni le protéger s’il se réfugiait chez les byzantins. Les deux accords ont été envoyés ensemble et tous les deux furent ratifiés. Et plus tard survint la libération de Ward de son emprisonnement.

 

Le 8 du mois de Shawwal de cette année, ‘Adoud ad-Dawlah Fanakhisrou al-Bouwayhi mourut mais la nouvelle fut dissimulé et il fut enterré à Najaf.

Le calife at-Ta'i’ nomma Sultan son fils Samsam ad-Dawlah pour le remplacer et lui donna le titre de Shams al-Millat. Il lui attribua sept robes d’honneur, le couronna et lui remit deux bannières. Samsam ad-Dawlah s’habilla alors de noir et porta le deuil de son frère tandis des pleureuses défilèrent dans les rues pour la même cause.

 

L’histoire suivante fut rapportée par Abou Nasr Khwashadah :

« Il y avait dans al-Qasr un certain nombre de servants qui recevaient leur paie mensuelle de la trésorerie de la capitale. Alors qu’il ne restait plus que trois jours avant la fin du mois, je fus convoqué par le prince qui me demanda d’ordonner au trésorier de débourser un certain nombre de dirhems et de les donner à Abou ‘AbdAllah Ibn Sa’dan afin qu’ils les remettent aux servants d’al-Qasr. Je lui dis que je ferai mais j’oubliais. Quatre jours plus tard, il me questionna sur l’affaire et je m’excusai de ma distraction, mais il me réprimanda avec véhémence. Je dis : « Le nouveau mois a commencé hier et la somme doit être transmise en une seule fois. Il n’y a donc aucune raison de s’inquiéter ». Il me dit : « Ton ignorance du caractère sérieux de ta faute est plus désastreux que la négligence que tu as affiché. Ne t’es-tu pas rendu compte que si nous distribuons aux hommes leur paie quand il reste encore un jour avant la fin du mois, nous sommes leurs bienfaiteurs ? Alors que, si nous laissons passer le mois et qu’un autre commence, ils se présentent à leur maréchal pour lui rappeler leur dû et il doit alors leur faire une promesse. Ils viennent de nouveau le jour suivant et il doit s’excuser. Puis, le troisième jour, ils vocifèrent dans leurs demandes, de manière à ce que nous perdons toute la gratitude et eux la retenue, si bien que nous perdons plus que nous gagnons.

Peut-être que ‘Adoud ad-Dawlah pensait à ce qui pouvait être trouvé dans la vie de Mou’tassim. Sans aucun doute, il ne peut y avoir aucune objection d’imiter ou d’apprendre des Hashimite, les plus véridiques dans les discours, les plus honorables dans la réussite et les plus nobles dans la généalogie de toute l’humanité. Ils sont des montagnes pour la ténacité, des océans de connaissance, les bannières de la guidance, suprêmes dans le spirituel et le temporel, les champions dans la guerre et la discussion, les dirigeants et les Imams sains et compétents. La munificence ne peut pas surpasser leurs générosités et l’obscurité est chassée par leurs lumières ». 

 

 

Durant l’année 373 de l’Hégire (983), mourut Mouayyid ad-Dawlah, le frère de ‘Adoud ad-Dawlah.

 

 

En l’an 375 de l’Hégire (985), Samsam ad-Dawlah proposa de taxer la soie et le coton tissé à Baghdad et ses environs, dont l’agriculture lui rapportait un million de dirhams par an, mais les gens se rassemblèrent dans la mosquée d’al-Mansour et voulurent arrêter les prières du vendredi. Le tumulte se répandit dans la ville et Samsam ad--Dawlah dû abandonner son projet.

 

La Résurgence et la fin des qarmates

 

Cette même année, Ishhaq et Ja’far de Hajar, deux des six qarmates appelé les « sayyids », vinrent, prirent possession de Koufa et offrirent la prière au nom de Sharaf ad-Dawlah. Une grande inquiétude fut ressentie à Baghdad, par suite de la terreur que ces gens inspiraient, mais aussi à cause de leur bravoure intrépide qui poussa beaucoup de monarques, à épouser leurs doctrine déviante et à se faire amis avec eux. ‘Adoud ad-Dawlah et Bakhtiyar avant lui leur avaient assignés des fiefs dans Wassit et Saqi al-Fourat. Leurs demandes furent régulièrement accordées et leurs exigences réalisées. Leur représentant Ibn Shahouyah vécut dans la capitale comme un vizir. Il obtint des audiences des souverains, qui adoptèrent ses idées, tandis que les nobles avaient peur de lui, supportèrent son arrogance et obéirent à ses commandes à cause de ses relations avec les souverains.

Quand les nouvelles parvinrent qu’ils avaient saisi Koufa, le vizir Abou ar-Rayyan commença par leur adresser une lettre courtoise contenant néanmoins une légère réprimande, les invita à la paix et à l’amitié, en leur offrit ce qu’ils voulaient obtenir. Il compta sur Ibn Shahouyah comme médiateur, après l’avoir déjà libéré de la captivité et le couvrit de générosités et d’honneurs pour ce qu’il avait subi. La réponse des qarmates fut évasive et l’arrestation d’Ibn Shahouyah servit pour alimenter de sévère réprimande. Ils envoyèrent alors leurs partisans dans plus en plus de régions pour recueillir les impôts pour leur propre compte jusqu’à ce que la patience fût épuisée. Un de leurs officiers en chef appelé Abou Qays al-Hassan Ibn al-Moundir, avec un certain nombre d’hommes, entra à Jami’ayn et le chambellan envoya contre lui Abou al-Fadl al-Mouzaffar Ibn Mahmoud de Baghdad à la tête d’un certain nombre de Daylamites, de Turcs et d’Arabes. Abou al-Qassim Ibn Za’faran fut envoyé à Ibrahim Ibn Marh al-’Ouqayli pour l’inciter à bouger avec sa tribu.

Le chambellan Abou al-Fadl arriva au pont de Babil et trouva l’ennemi lui faisant face. Ils construisirent un pont sur l’Euphrate et le pont à peine avait-il été complété, qu’Ibrahim Ibn Za’faran arriva, se rendit sur le même terrain que les qarmates et une escarmouche s’ensuivie. Le pont établit, les légers cavaliers turcs avec la cavalerie daylamite traversa et participèrent unis à l’effort d’Ibrahim et de ses hommes. Les qarmates furent mis en déroute et leur chef Abou Qays fut capturé avec un certain nombre de ses officiers. Ibrahim Ibn Marh se précipita vers lui et le décapita suite à une querelle privée. Les forces qarmates mises en déroute se retirèrent à Koufa. On envoya à un messager à Baghdad, où il y eut des démonstrations de joie.

Quand les forces vaincues se retirèrent, les fiers qarmates furent honteusement vexés et réunirent une force dont ils donnèrent le commandement à l’un de leurs officiers les plus fiables appelés Ibn al-Jahish et envoyèrent avec lui une masse d’hommes et de munitions. Ces nouvelles atteignirent Baghdad et le chambellan Abou Mouzahim Bachkam fut envoyé à la tête de plusieurs régiments différents. Les qarmates étaient à l’ouest de Jami’ayn. Le chambellan traversa le fleuve et les engagea dans une bataille où mourut Ibn al-Jahish et un grand nombre d’officiers qarmates furent capturés tandis que leur camp et leurs bagages furent pillés. Un certain nombre d’entre eux qui s’échappèrent, se réfugièrent de nouveaux à Koufa. Les deux chefs qarmates avec ces hommes qui s’étaient enfuis se retirèrent. Abou Mouzahim entra alors dans Koufa et les poursuivit aussi loin qu’al-Qadissiyah, mais sans pouvoir les rattraper.

Le trouble prit ainsi fin de même que la réputation des qarmates et la terreur qu’ils avaient inspirée. Chaque communauté à un terme de prospérité durant laquelle elle progresse. Puis, la rétrogradation commence alors par le déclin et la transition exceptée dans le cas de la prospérité religieuse, qui suit une ligne de progression et quand elle se sépare du monde périssable, elle passe dans le monde qui dure.

 

Toujours cette année, Ward le byzantin et ses compagnons captifs furent libérés par l’intervention de Ziyar Ibn Shahragouyah et retournèrent au pays byzantin.

Nous avons déjà mentionné son arrestation sous le règne de ‘Adoud ad-Dawlah et il resta emprisonné durant tout ce temps. Ziyar négocia pour sa libération et parla à Samsam ad-Dawlah. Les conditions furent établies pour être imposées à chaque partie et des garanties prises pour leurs applications. Il fut stipulé qu’il devait reconnaître les faveurs que lui avait concédé Samsam ad-Dawlah et qu’il devrait être l’ennemi de ses ennemis et l’ami de ses amis, qu’ils soient de la même ou d’une différente religion. Qu’il devait libérer tous les Musulmans qui languissaient en captivité ou étaient assiégés. Qu’il devait les aider à revenir dans leur propre pays et protéger leurs vies, leurs propriétés, leurs femmes et leurs enfants, quel que soit leur rang. Qu’il ne devait envoyer aucune armée vers aucune frontière, ou autoriser traîtreusement n’importe lequel de ses disciples à faire le contraire. Qu’il devait abandonner sept forteresses byzantines avec leurs banlieues et leurs champs cultivés et sans enlever leurs habitants. Et pour le reste de sa vie, il devrait exécuter tout qui avait été stipulé et convenu avec lui. En sa faveur, il fut stipulé qu’il devait être libéré et protégé contre les attaques avec ses compagnons jusqu’à ce qu’ils soient, avec leurs présents, sortit de la juridiction du territoire islamique. Que la pratique habituelle soit observée dans le cas des forteresses cédées, de protéger les habitants, de les autoriser à retenir leurs possessions et à respecter leurs traditions dans les opérations et les arrangements  en rapport avec les revenus. Les mêmes assurances furent reçues de son frère Constantine et de son fils Romanus. Ces contrats furent copiés sur des rouleaux pour les ratifications sollicitées par le calife at-Ta'i’ qui ordonna de porter la plus stricte attention à la formulation. Quand le brouillon fut rédigé de manière satisfaisante, Ward fut relâché. De l’argent et des habits lui furent apportés et Samsam ad-Dawlah tint une réception pour le rencontrer. 

L’auteur a rapporté : Je me souviens parfaitement de Samsam ad-Dawlah assit attendant de rencontrer Ward, pour lui rendre hommage et lui retourner ses remerciements. C’était l’hiver et le palais avec ses salons étaient recouverts de tapis coûteux, des rideaux de soie tissée étaient suspendus sur les porches et les cavaliers en uniforme élégants avec des Qahas colorés se tenaient sur deux rangs devant son estrade qui avait été déployée dans le salon d’or dont les portes s’ouvraient sur la cour et le jardin. Derrière ces rangs, se trouvait les troupes Daylamites, dans une tenue semblable, aussi loin que le Tigre. Ward avec son fils et son frère avaient traversé le fleuve dans un Zahzah[6] qui avait été envoyé pour eux. Ils marchèrent alors entre les rangs jusqu’à arriver devant Samsam ad-Dawlah Samsam devant qui se trouvaient des braseros d’or contenant des sticks incandescents. Ward s’approcha, inclina légèrement sa tête et embrassa la main du prince. Un siège avec un coussin fut placé pour lui et il s’assit dessus. Samsam ad-Dawlah procéda quelques affaires civiles avant d’invoquer une bénédiction sur le prince et le remercia en grec tandis que la conversation fut conduite par un interprète. Ward dit : «  Votre majesté m’a traité avec une gentillesse que je ne mérite pas et a rendu obligé un homme qui en a conscience. J’espère que Dieu m’aidera à maintenir ma loyauté et récompenser vos services » Puis, il se leva alors ; les chambellans et les gardiens marchèrent devant lui comme ils l’avaient fait lorsqu’il entra et il embarqua de nouveau pour sa résidence.

Alors qu’il procédait en direction de son pays, il apaisa un grand nombre de Bédouins, à qui il offrit des salaires généreux et des gratifications. Puis, il poursuivit sa route jusqu’à ce qu’il arrive et s’arrête à Malatiyah, où Koulayb était le gouverneur pour les deux empereurs byzantins. Il était un associé de Ward, comme il a déjà été mentionné dans le rapport d’Ibn Shahram. Il abandonna fidèlement son pouvoir à Ward en le mettant ainsi de nouveau en tête d’un puissant parti. Il proposa de marcher contre Wardis le fils de Léo montrant ainsi son hostilité. Des messages furent échangés entre eux et un arrangement fut conclu sur la base que Constantinople et les terres contiguës sur la même rive du détroit seraient pour Wardis le fils de Léo, alors que les terres de l’autre côté du détroit seraient attribuées à Ward. Après l’échange de serments, ils acceptèrent de se rencontrer et les deux procédèrent au rendez-vous. Quand Wardis le fils de Léo l’eut en son pouvoir, il le fit arrêter.

Ward avait obtenu les garanties les plus satisfaisantes, mais il vint à l’esprit de Wardis le fils de Léo qu’il était face à une chance qui ne pouvait être manquée. Il rompit son serment, arrêta Ward et le fit emprisonner dans une forteresse. Mais quand il réfléchit, il se rendit compte qu’il avait commis une offense qui le marquerait pour toujours comme un traître, qui empêcherait les gens de faire un contrat avec lui dans l’avenir et aliénerait tous ses amis. Il s’amenda donc en le libérant rapidement, s’excusa et renouvela leur pacte. Ils se remirent à leur coopération et mirent de côté ce qui pouvait mener à la dispute. Wardis partit alors aussitôt, établit son camp devant Constantinople et fit la guerre aux deux empereurs, Basilic et Constantine. L’opinion publique était de son côté et il fut rejoint par les troupes et les civils. Les deux empereurs furent abandonnés avec quelques partisans et se retranchèrent dans leurs villes et ses fortifications.

Réduits à la faiblesse, les deux empereurs envoyèrent des messagers pour solliciter l’aide du roi des Russes qui demanda en échange la main de leur sœur en mariage mais elle refusa de se livrer à un homme marié et d’une religion différente. Une correspondance s’ensuivit dont le résultat fut que le roi russe adopta le Christianisme. L’alliance fut alors contractée et on lui donna la princesse. Il envoya un certain nombre de ses hommes forts et courageux pour les aider. Quand ce renforcement arriva à Constantinople, ils traversèrent le détroit dans des navires pour rencontrer Wardis, qui méprisa leur aspect et demanda ironiquement pourquoi ils s’étaient ainsi risqués. Lorsqu’ils atteignirent le rivage et prirent position sur le même terrain que l’ennemi, s’ensuivit alors la bataille où les Russes prouvèrent être supérieurs et où ils exécutèrent Wardis. Ses forces furent dispersées et les empereurs se retrouvèrent fermement installés et leur gouvernement qui avait chancelé retrouva sa force. Ils envoyèrent un message conciliant à Ward et lui confirmèrent sa lieutenance. Il resta paisiblement dans cette position pour quelque temps, avant de mourir, empoisonné d’après certains.

L’empereur Basilic prospéra dans son empire et démontra ses capacités politiques, son solide jugement et sa force d’esprit. Durant trente-cinq ans,  il poursuivit la guerre contre les Bulgares, au cours desquels un grand nombre de batailles furent livrées. Finalement, il les conquit et emménagea leurs terres d’où il expulsa le plus grand nombre d’entre eux, pour les remplacer par des Byzantins. Il se rendit célèbre par sa justice et son affection pour les Musulmans et j’imagine que sa longue vie et règne sont dues au fait qu’il resta à l’écart de leur territoire et son noble traitement envers eux.

 

 

Durant l’année 376 de l’Hégire (986), Sharaf ad-Dawlah marcha contre son frère Samsam ad-Dawlah, le vainquit et l’aveugla. L’armée préféra alors Sharaf ad-Dawlah qui marcha sur Baghdad. Le calife at-Ta'i’ sortit pour le rencontrer, le féliciter de sa conquête des provinces, l’investit de la dignité du sultanat et le couronna.

 

 

En l’an 378 de l’Hégire (988), une grande pénurie toucha Baghdad et beaucoup de gens moururent de faim tandis que les gens de Basra souffrirent d’une violente chaleur et d’un vent brûlant. Un vent fort souffla à Fam as-Silh, un grand canal près de Wassit, qui assécha le Tigre. On a rapporté que le fond apparut et beaucoup de navires se retournèrent.

 

 

Durant l’année 379 de l’Hégire (989), mourut Sharaf ad-Dawlah et son frère Abou Nasr lui succéda. Le calife at-Ta'i’ alla au palais lui présenter ses condoléances et embrassa plusieurs fois la terre devant lui. Ensuite Abou Nasr se rendit chez le calife at-Ta'i’. Les nobles étaient présents et le calife lui accorda sept robes d’honneur, dont la partie supérieure était de couleur noire, un turban de la même couleur, un collier et deux bracelets. Alors il embrassa la terre devant at-Ta'i’ et s’assit sur un siège d’état. Le calife at-Ta'i’ le surnomma alors Baha ad-Dawlah et Diyah al-Millat. (La gloire de l’État et l’éclat de Foi).

 

Cette même année, des nouvelles arrivées de la mort d’Abou al-Faraj Ya’qoub Ibn Youssouf, le vizir du régnant d’Egypte qui portait le titre d’al-’Aziz.

Le souverain d’Egypte ordonna qu’il soit enterré dans son palais sous un dôme qu’il avait construit pour lui. Il fut présent à l’enterrement, conduisit la prière funéraire sur lui et le déposa avec ses propre main dans la tombe. Puis, il rentra chez lui affligé par sa perte et fit fermer les bureaux publics durant quelques jours.

Ce vizir prit, durant un certain temps, à son service Abou ‘AbdAllah Mawsili et investit ensuite ‘Issa, le fils de Nestorius, de l’office. ‘Issa était un chrétien et il administra les affaires, ramassa de l’argent et préféra les chrétiens, à qui il attribua tous les postes, au dépens des Musulmans. Il nomma pour la Syrie son député un Juif appelé Manassih Ibn Ibrahim Ibn al-Farrar, qui favorisa les Juifs comme ‘Issa favorisa les chrétiens, si bien que les Juifs et les Chrétiens occupèrent toutes les postes de fonctionnaires.

Un des Musulmans écrivit une plainte qu’il donna à une femme à qui il donna une large somme d’argent pour quelle se mette sur la voie du régnant d’Egypte et lui remette la plainte dans ses propres mains. Voici le contenu de cette lettre : Votre majesté : Par celui qui a exalté les Chrétiens par ‘Issa le ‘fils de Nestorius, les Juifs par Manassih Ibn al-Farrar (le déserteur) et a humilié les Musulmans par toi, je te prie d’examiner mon cas.

Le régnant d’Egypte avait un mulet célèbre qui, quand il le montait, allait à toute allure comme le vent et ne pouvait être dépassé. La femme l’attendit dans un endroit étroit, quand il s’approcha, elle lui lança la plainte et se glissa parmi les gens. Quand le souverain lue la plainte, il ordonna de rechercher la femme, mais elle ne put être trouvée. Il revint perplexe dans son palais et convoqua son Qadi, Abou ‘AbdAllah Muhammad Ibn Nou’man, un conseiller privé, pour lui demander son conseil sur l’affaire. Ibn Nou’man a dit au prince qu’il savait comment gérer la situation. Il dit : « La femme avait tout à fait raison dans sa plainte et je me suis maintenant réveillé de ma somnolence ». Il ordonna immédiatement l’arrestation de ‘Issa et de tous les fonctionnaires chrétiens et écrivit en Syrie en ordonnant l’arrestation de Manassih Ibn al-Farrar et de tous les fonctionnaires juifs. Il ordonna que les bureaux et les postes publics soient restitués aux Musulmans et que des Qadis soient nommés pour les superviser partout dans l’empire. Néanmoins, ‘Issa réussit à sortir de son bureau et à récupérer son poste.

‘Issa chérissait beaucoup une fille d’al-‘Aziz appelé Sitt al-Moulk à qui il ne refusait rien. ‘Issa obtint son amnistie et donna à la Trésorerie 300.000 dinars. Plus tard, il écrivit au prince, et lui demanda de considérer ses revendications en lui rappelant ses services. Le prince le restitua à son ancien poste mais sous la condition qu’il devrait engager des Musulmans.

 

Toujours cette année, après le départ de Baha ad-Dawlah, il y eut une vague de brigandage et le respect pour l’autorité fut suspendu. Il y eut une série de batailles entre les habitants des différentes rues et des quartiers qui ne purent pas être réprimés. Il y eut de nombreux incendies et les propriétés furent à plusieurs reprises pillées, tantôt par les bandits et tantôt par les fonctionnaires. Le ministère de la sécurité publique changea de mains plusieurs fois, mais aucun des ministres ne fut d’une quelconque utilité et les nuisances continuèrent jusqu’au retour de Baha ad-Dawlah.

 

 

En l’an 381de l’Hégire (991), les émeutes civiles s’apaisèrent et les bandits furent pourchassés, attrapés et exécutés.

 

Cette même année, le calife at-Ta'i’ fut arrêté lors d’une réception en l’honneur de Baha al-Dawlah.

Abou al-Hassan al-Mou’allim, un vil associé, magnifia les possessions d’at-Ta'i’ et ses trésors à Baha ad-Dawlah pour exciter sa cupidité. Il traita comme banal ce qui était vraiment sérieux et l’encouragea à commettre un crime. Baha ad-Dawlah accepta son conseil et arrêta le calife. Il n’acquit rien excepté l’infamie pour l’éternité et si les avantages du règne d’al-Qadir Billah n’avaient couvert la cruauté de cette action, il n’aurait trouvé aucune excuse de la part de Dieu ou d’un homme sachant que ce souverain dévot et vertueux restitua l’éclat de la religion et la verdure à l’arbre de l’Islam. Nous implorons l’aide d’Allah Exalté contre les séditions et les catastrophes et Lui demandons de nous gratifier de l’immunité complète et une fin heureuse.

D’autres ont rapporté que cela arriva parce qu’il avait emprisonné quelqu’un de la suite de Baha ad-Dawlah. Alors, Baha ad-Dawlah alla trouver avec une épée le calife at-Ta'i’ qui habitait dans un quartier populaire et quand il s’approcha de lui, il embrassa le sol et s’assit sur une chaise. Son myrmidon avança, tira at-Ta'i’ de son trône, le jeta au sol avant de s’assoir sur lui. Le Daylamite l’enveloppa dans une cape et l’emmena au palais du Sultan. La ville s’agita et Baha ad-Dawlah fit lire un avis qu’at-Ta'i’ avait abdiqué et démissionné du gouvernement en faveur d’al-Qadir Billah et les nobles et les principaux hommes en témoignèrent.

 

Le 19 du mois de Sha’ban de l’année 381 de l’Hégire, un message fut envoyé à al-Qadir Billah qui était à al-Ba’tihah, entre Wassit et Basra, pour le convoquer. At-Ta'i’ habita dans le palais d’al-Qadir Billah, respecté et honoré dans la plupart des circonstances jusqu’à sa mort la nuit de ‘Id al-Fitr de l’année 393 de l’Hégire (1002) et le calife al-Qadir pria sur lui.



[1] Sermon du vendredi.

[2] Roi.

[3] Abou Nasr Sayf ad-Din surnommé Malik al-Ashraf, le huitième sultan d’Egypte de la deuxième dynastie des Mameloukes Bourjites, qui débuta son règne en l’an 825 de l’Hégire (1421) et mourut en 841 après un règne de 7 ans.

[4] Impôts.

[5] Shar (mal) était le pseudonyme du Kurde Houmaydi, dont le nom était Abou ‘AbdAllah al-Houssayn Ibn Doushang. Il pratiquait constamment le brigandage et avait l’habitude d’aller aux frontières ou il menait ses raids Il était large et d’hideuse apparence. Quand ‘Adoud ad-Dawlah vint à Mossoul, il se présenta à la Porte par la médiation de Ziyar Ibn Shahragouyah mais s’enfuit aussitôt. Il a été rapporté qu’après s’être enfuit de ‘Adoud ad-Dawlah, ses partisans lui avaient demandé la raison de sa fuite. Il répondit qu’il avait vu un homme, qui, il était convaincu, ne l’épargnerait pas quand il serait en son pouvoir. Immédiatement après son départ, ‘Adoud ad-Dawlah le chercha et ordonna son arrestation, en disant : C’est un homme entreprenant, énergique et un traître, qui ne doit pas être épargné. Il fut alors informé que l’homme avait fui. Shar arriva aux frontières de Diyar Bakr, où il resta jusqu’à ce qu’il devienne puissant.

[6] Vaisseau.