Le retour du frère d’Ibn Zikrawayh

 

Muhammad Ibn Daoud Ibn al-Jarrah a rapporté : Après la mort de l’homme au poireau, le fils de Zikrawayh Ibn Mihrawayh, un homme appelé Abou Ghanim ‘Abdallah Ibn Sa’id, qui était un instituteur dans un village appelé az-Zabouqah dans le district administratif d’al-Falloujah, fut dépêché par Zikrawayh pour circuler parmi les tribus Kalb et faire de la propagande pour ses doctrines déviantes parmi eux et pour déguiser ses activités, il s’appela Nasr. Personne n’accepta sa propagande sauf un homme des Banou Ziyad que l’on appelait Miqdam Ibn al-Kayyal. Il convainquit une partie des Asbagh qui prétendaient descendre des fatimides, ainsi que certains de basse caste des Banou ‘Oullays et des vagabonds de toutes les autres sous-tribus Kalb qui ensemble marchèrent vers la région syrienne.

Le fonctionnaire des autorités centrales responsables de Damas et d’al-Ourdoun (la Jordanie) était Ahmad Ibn Kayghalagh. À cette époque il était posté en Egypte pour lutter contre Ibn Khalij, qui s’était opposé à Muhammad Ibn Souleyman et était revenu à al-Fustat (Egypte) saisissant le pouvoir là. ‘Abdallah Ibn Sa’id saisit l’occasion de l’absence d’Ahmad Ibn Kayghalagh pour avancer le vers les villes de Bousra et d’Adri’at, et les provinces les provinces du Hawran et d’al-Bathaniyyah. Il lutta contre leurs habitants et leur offrit ensuite des garanties de sécurité mais quand ils se soumirent, il tua leurs combattants, pris leurs femmes et leurs enfants captifs et confisqua leurs propriétés. ‘Abdallah Ibn Sa’id voyagea alors vers Damas, où Ahmad Ibn Kayghalagh partit laissant derrière lui une garnison d’Egyptiens avec Salih Ibn al-Fadl. Un certain nombre d’entre eux sortirent contre ‘Abdallah Ibn Sa’id, mais les qarmates les massacrèrent dans un bain de sang. Suite à cela, ils les trompèrent en leur offrant la sécurité et tuèrent Salih et dispersèrent son armée. Cependant, ils n’avaient aucun espoir de prendre Damas car ils l’atteignirent précédemment seulement pour être repoussés par ses habitants. Alors, ils avancèrent vers Tabariyah, la capitale d’al-Ourdoun où ils furent rejoints par un certain nombre de transfuges parmi les troupes de Damas. Youssouf Ibn Ibrahim Ibn Boughamardi et Ahmad Ibn Kayghalagh le fonctionnaire responsable d’al-Ourdoun, les attaqua, mais ils brisèrent sa résistance et lui offrirent la sécurité. Par la suite, ils trahirent de nouveau et, après l’avoir tué, ils pillèrent la capitale d’al-Ourdoun, prirent les femmes captives et tuèrent un certain nombre des habitants.

Les autorités centrales envoyèrent al-Houssayn Ibn Hamdan et plusieurs officiers distingués pour les poursuivre. Al-Houssayn atteignit Damas, après que les ennemis d’Allah soient entrés dans Tabariyah. Quand ils apprirent qu’’al-Houssayn était derrière eux, ils se dirigèrent vers as-Samawah. Al-Houssayn les poursuivit dans le désert d’as-Samawah, tandis qu’ils se déplaçaient d’un point d’eau à l’autre les rendant les uns après les autres inutilisables. Finalement ils se réfugièrent près des points d’eau d’ad-Dim’anah et d’al-Halah. Comme il n’avait aucune eau, al-Houssayn arrêta la poursuite et revint à al-Rahbah.

Les qarmates avec ce corrupteur appelé Nasr marchèrent de nuit sur le village de Hit où ils entrèrent par surprise au lever du soleil du 20 du mois de Sha’ban. Nasr pilla les banlieues de la ville, tua tous les habitants qu’il trouva sur son chemin, incendia les résidences et pilla les navires dans le port de la ville donnant sur l’Euphrate. Il tua environ deux-cents des habitants locaux, les hommes, les femmes et les enfants et saisit tout ce qu’il put comme richesse et marchandises qu’il chargea sur trois-mille bêtes de somme qui étaient avec lui avec environ deux-cents Kour[1] de blé, de farine, de parfum et de choses dont il avait besoin. Il resta le reste du jour ainsi que le jour suivant dans la ville où il était entré qu’il quitta pour le désert après la prière du soir. Il obtint tout le butin des banlieues seules, car les habitants de la ville étaient protégés de lui par une muraille. Suite aux méfaits de ce qarmate, Muhammad Ibn Ishhaq Ibn Koundajiq marcha vers Hit avec un certain nombre d’officiers et une substantielle armée avant d’être suivi plusieurs jour après par Mou’nis al-Khadim.

 

Muhammad Ibn Daoud a rapporté : Les qarmates vinrent à Hit, pour frapper à l’improviste le matin, mais Allah Exalté protégea les habitants de la ville grâce à la muraille. Les autorités centrales envoyèrent alors Muhammad Ibn Ishhaq Ibn Koundajiq contre les qarmates. Quand les qarmates qui étaient restés là seulement trois nuits, furent informés de l’approche de Muhammad Ibn Ishhaq, Ils s’enfuirent de nouveau vers le désert vers leurs deux points d’eau. Quand il voulut les poursuivre, il constata qu’ils avaient rendus des points d’eau, entre lui et eux, inutilisable. Des chameaux, des outres et les provisions lui furent envoyées du centre. Al-Houssayn Ibn Hamdan donna des ordres écrits d’engager des poursuites contre eux de la direction d’ar-Rahbah, pour qu’il et Muhammad Ibn Ishhaq puisse les attaquer conjointement.

Quand les Banou Kalb remarquèrent que l’armée était sur leur piste, ils décidèrent d’assaillir et d’assassiner l’ennemi d’Allah appelé Nasr et Dzi Ibn al-Qa’im, se chargea de lui. Alors, il alla à la cour du calife et utilisa ce moyen pour s’approcher de lui et demanda la sécurité pour le reste des Kalb. Il fut cru et récompensé pour ce qu’il avait entrepris et ses gens ne furent plus poursuivis. Il resta plusieurs jours avant de s’enfuir. L’avant-garde de Muhammad Ibn Ishhaq tombèrent sur le cadavre de Nasr dont ils coupèrent la tête et l’apportèrent à Madinat as-Salam.

Les qarmates luttèrent par la suite entre eux et cela mena finalement au carnage. Miqdam Ibn al-Kayyal s’enfuit au territoire des Tayyi' avec le butin qu’il avait saisi. Un groupe d’entre eux, qui détestaient ce que les qarmates faisaient, allèrent chez les Banou Assad, qui vivaient dans la région de ‘Ayn at-Tamr et leur demandèrent la protection. Ils envoyèrent une délégation aux autorités centrales pour s’excuser de ce qu’ils avaient fait et demander que l’approbation officielle leur soit donnée pour qu’ils puissent rester sous la protection des Banou Assad et leur demande fut accordée.

Le reste des vils hérétiques qarmates se retranchèrent dans leurs deux points d’eau. Les autorités centrales envoyèrent des ordres écrits à Houssayn Ibn Hamdan pour lui demander de reprendre ses tentatives de les déraciner. Zikrawayh leur dépêcha un de ses prêcheurs, un fermier du Sawad appelé al-Qassim Ibn Ahmad Ibn ‘Ali, surnommé Abou Muhammad originaire de la région rurale de Nahr Malhata, pour les informer que l’action d’ad-Dzi Ibn al-Qa’im les avaient séparés de Zikrawayh et qu’ils étaient devenus des renégats de la « vraie religion ». De toute manière, le temps était arrivé pour eux de sortir de la clandestinité après que quarante-mille hommes lui avaient porté allégeance à Koufa et quatre-cent-mille dans les environs de Koufa. Leur jour nommé était celui mentionné par Allah Exalté dans Son Livre en rapport avec Moussa, l’homme à qui s’adressa Allah Exalté et Pharaon son ennemi où Il dit : « Alors Moïse dit : « Votre rendez-vous, c’est le jour de la fête. Et que les gens se rassemblent dans la matinée »[2]. Zikrawayh leur ordonna de dissimuler leurs affaires et de faire comme s’ils partaient en Syrie, alors qu’en fait, ils devaient marcher sur Koufa, où ils devaient arriver le matin du jour du Sacrifice, le jeudi 10 du mois de Dzoul Hijjah de cette même année. On ne les empêcherait pas d’entrer dans Koufa. Ils apparaîtraient alors et réaliseraient alors sa promesse que ses messagers avaient l’habitude de leur transmettre. Ils devraient apporter al-Qassim Ibn Ahmad avec eux.

Ils obéirent à ses ordres et arrivèrent à la porte de Koufa, juste au moment où les gens revenaient de leur endroit de prière avec Ishaq Ibn ‘Imran, le fonctionnaire représentant les autorités centrales. Le nombre d’entre ceux qui arrivèrent à la porte de Koufa ce jour-là, était composé d’environ huit-cents cavaliers commandés par ad-Dandani Zikrawayh Ibn Mihrawayh, qui était d’as-Saw’ar ou, selon un autre rapport, de Jounboula'. Les cavaliers avaient des cottes de mailles et des plastrons et une tenue parfaite. Ils étaient accompagnés par un certain nombre de fantassins montés sur des bêtes de somme. Ils attaquèrent les gens ordinaires sur lesquelles ils tombèrent, les soulagèrent de leurs biens et tuèrent environ vingt d’entre eux. Les gens ne perdirent pas de temps pour revenir à Koufa où ils donnèrent aussitôt l’alarme, après quoi Ishaq Ibn ‘Imran arriva avec ses hommes. Environ cent cavaliers qarmates entrèrent dans la ville de Koufa par la porte de Bab Kindah. Les gens et un certain nombre d’hommes des forces gouvernementales les accueillirent, les bombardèrent avec des pierres et luttèrent contre eux. Environ vingt qarmates furent tués et le reste d’entre eux furent repoussés de la ville. Ishaq et ses troupes sortirent et avancèrent en lignes de bataille contre les qarmates. Il ordonna aux habitants de Koufa d’être sur leur garde, de peur que les qarmates ne les trouvent pas prêts et entrent dans la ville. Le jour du Sacrifice, la bataille dura jusqu’au temps de la prière de l’après-midi. Alors les qarmates furent mis en déroute et s’enfuirent vers al-Qadissiyah.

Les habitants de Koufa réparèrent les murs et les douves et rejoignirent les hommes des autorités centrales dans les tours de garde nuits et jours. Ishaq Ibn ‘Imran demanda aux autorités centrale des renforts. Un certain nombre d’officiers des autorités centrales furent mobilisés pour venir à leur aide dont parmi eux : Tahir Ibn ‘Ali Ibn Vizir, Wasif Ibn Sawartakin at-Turki, al-Fadl Ibn Moussa Ibn Bougha, Bishr al-Afshini, al-Jinn as-Safwani et Ra’iq al-Khazari. Un certain nombre de pages et d’autres leur furent attachés. Le mardi 15 du mois de Dzoul Hijjah, les premiers d’entre eux partirent. Il n’y avait aucun commandant en chef mais chacun d’entre eux commandait ses propres hommes. Al-Qassim Ibn Sima et d’autres membres des tribus arabes des régions du désert de Diyar Moudar, de la route de l’Euphrate, de Daqouqa’, de Khanijar et d’autres régions se rassemblèrent et se levèrent pour marcher contre les qarmates, depuis que les hommes des autorités centrales étaient dispersées dans la région syrienne et l’Egypte. Les messagers allèrent avec cet ordre chez les tribus arabes et ils vinrent.

Suite à cela, les nouvelles arrivèrent à Baghdad cette année que ceux qui étaient partit secourir Ishaq, étaient restés dans la ville en compagnie de ses hommes pour protéger la ville et qu’ils étaient eux-mêmes sortis contre Zikrawayh. Puis, ils allèrent vers un lieu à huit kilomètres d’al-Qadissiyah surnommé as-Saw’ar, dans le désert le long de la ligne de Koufa. Zikrawayh les rencontra là et ils se déployèrent en ligne de bataille contre lui le lundi 21 du mois de Dzoul Hijjah. Selon un autre rapport, la bataille eut lieu le jour précédent. Les forces gouvernementales laissèrent une distance d’environ deux kilomètres entre eux et leur caravane dans laquelle ils ne laissèrent aucun combattant. Une féroce bataille eut lieu entre eux et au début du jour, les qarmates et ses hommes furent presque battus. Cependant, à l’insu des forces gouvernementales, Zikrawayh avait monté une embuscade derrière eux. Au midi, les forces de l’embuscade arrivèrent sur leurs arrières et pillèrent la caravane. Quand les forces gouvernementales virent les épées sur leurs arrières, ils s’enfuirent le plus ignominieusement. Les qarmates et ses hommes passèrent par l’épée les forces gouvernementales comme des moutons. Une centaine de Khazar et d’autres pages gardèrent leur position et dévoués à lutter jusqu’à la mort, infligèrent de grandes pertes aux qarmates. Les qarmates se rassemblèrent et prirent possession de la caravane des bagages des forces gouvernementales. Les seuls hommes qui réussirent à s’enfuir furent ceux qui avaient une excellente monture ou qui gravement blessés, se cachèrent parmi les morts et marchèrent ensuite difficilement vers Koufa après la bataille. Les chameaux rapides de la caravane qui avait été envoyé par les autorités centrales qui portaient des armes et les tenues furent saisis, soit environ trois-cents chameaux rapides ainsi que cinq-cents mulets. Mille-cinq-cents hommes des forces gouvernementales furent tués dans la bataille, sans compter les pages, les conducteurs de chameau et les chameliers de la caravane. Le butin consistait en armes, orge, provisions et nourritures renforça considérablement les qarmates qui quittèrent l’endroit de la bataille et se dirigèrent à environ dix kilomètres dans un endroit près de Nahr al-Mathniyah à cause de la puanteur des morts qui avaient été laissés abandonnés.

Muhammad Ibn Daoud Ibn al-Jarrah a rapporté : Les membres de tribus arabes à qui Zikrawayh avait envoyé des messages arrivèrent à la porte de Koufa, juste au moment où les Musulmans revenaient de leur endroit de prière avec Ishaq Ibn ‘Imran. Ces derniers se dispersèrent dans deux directions et entrèrent dans les maisons de Koufa. Précédemment, les qarmates avaient monté une tente pour al-Qassim Ibn Ahmad, le prêcheur de Zikrawayh, en disant, « C’est le fils du Messager de Dieu ». Ils crièrent alors : « Vengeance pour al-Houssayn! »,  le al-Houssayn Ibn Zikrawayh, dont le cadavre avait été pendu à la Porte du Pont dans Madinat as-Salam. Leur cri de guerre était : « O Ahmad, O Muhammad ! », les deux fils de Zikrawayh qui avaient été tués. Ils levèrent des bannières blanches et crurent qu’ils pourraient séduire les habitants de Koufa avec ces mots. Ishaq Ibn ‘Imran et ses hommes sortirent rapidement contre eux, les repoussèrent et tuèrent tous ceux qui se mirent en travers de leur chemin. Certains membres de la famille d’Abou Talib étaient là, et combattirent aux côtés d’Ishaq Ibn ‘Imran, ainsi que certaines personnes ordinaires.

Les qarmates se retirèrent humiliés et le même jour allèrent à al-‘Oushayrah, un village à l’extrême de la région administrative d’as-Salihin et de Nahr Youssouf adjacente au désert. Ils envoyèrent à l’ennemi d’Allah, Zikrawayh, certaines personnes pour le sortir d’un trou dans la terre dans laquelle il s’était caché pendant plusieurs années dans le village d’ad-Darriyyah. Les habitants du village d’as-Saw’ar le firent cracher sur leurs mains, en l’appelant l’ami de Dieu et à sa vue, ils se prosternèrent devant lui. Un certain nombre de ses prêcheurs et intimes étaient aussi présents. Il leur dit que leur plus grand bienfaiteur était al-Qassim Ibn Ahmad qui leur avait rapporté la « vraie religion » après qu’ils l’aient quittée ; s’ils obéiraient à ses ordres, il réaliserait les promesses qui leur avaient faites et les feraient atteindre leurs espoirs. Il inventa des mythes pour eux dans lesquels il mentionna des versets du Qur’an, en leur donnant une interprétation différente de celle de la révélation. Tous les membres des tribus arabes, les Mawlah, les populations rurales et d’autres dont l’amour de la mécréance était fermement implanté dans leur cœur, reconnurent que Zikrawayh était leur ultime chef principal, leur grotte et leur refuge. Certains d’entre eux allèrent même jusqu’à l’appeler le seigneur et al-Qassim, était en fait responsable des affaires qu’il exécutait selon ses vues sur une région qui s’étendait jusqu’aux portes externes de la région administrative de Koufa irriguée par l’Euphrate. Il leur fit savoir que tous les gens du Sawad arrivaient pour le rejoindre. Il resta là environ vingt jours, pendant lequel temps il envoya des messagers déguisés parmi les habitants du Sawad. Cependant, aucun d’entre eux ne le rejoignit, sauf environ cinq-cents hommes avec leurs femmes et enfants qui affrontaient des temps difficiles.

Les autorités centrales envoyèrent des groupes de soldats contre lui et publièrent des ordres écrits à tous ceux qu’ils avaient dépêchés à al-Anbar et à Hit pour protéger ces villes de peur que les qarmates qui s’étaient retranché aux deux points d’eau puissent revenir. Les autorités centrales envoyèrent donc un certain nombre d’officiers contre lui, parmi eux : Bishr al-Afshini, al-Jinn as-Safwani, Nihrir al-‘Oumari et Ra’iq, le chevalier gradé du commandant des croyants, ainsi que des jeunes pages surnommés les pages de chambre. Ils attaquèrent les ennemis d’Allah près du village d’as-Saw’ar et tuèrent leurs fantassins ainsi qu’un certain nombre de leurs cavaliers. Les qarmates laissèrent leurs tentes tomber entre leurs mains et lorsqu’ils furent occupés à les fouiller, ils contre-attaquèrent et mirent en déroute les forces gouvernementales.

La source du rapport suivant est de quelqu’un qui a rapporté qu’il était présent dans le bureau de Muhammad Ibn Daoud Ibn al-Jarrah, quand quelques qarmates, parmi eux le beau-frère de Zikrawayh, lui furent ramenés. Le beau-frère lui dit ce qui suit : « Zikrawayh était caché dans ma résidence, dans une cave de ma maison protégée par une porte en fer. Nous avions un poêle mobile et à chaque fois qu’un groupe de recherche venait chez nous, nous placions la chaudière sur la porte de la cave et une femme se levait pour l’allumer. Zikrawayh resta ainsi quatre ans sous le règne d’al-Mou’tadid. Il avait l’habitude de dire : « Je ne sortirai pas aussi longtemps qu’al-Mou’tadid sera en vie ». Il fut alors déplacé de ma résidence vers une maison qui fit construire avec une pièce secrète derrière la porte. Quand la porte de la maison était ouverte, il couvrait la porte de la pièce; ainsi, une personne entrant ne remarquerait pas la porte de la pièce dans laquelle se trouvait Zikrawayh. Et il resta ainsi jusqu’à ce qu’al-Mou’tadid mourut.

Quand le rapport de la bataille entre les qarmates et les forces gouvernementales à as-Saw’ar arriva aux autorités centrales à Baghdad, les gens le considérèrent comme un événement important. Les officiers mentionnés précédemment furent mobilisés pour partir à Koufa et Muhammad Ibn Ishaq Ibn Koundajiq fut nommé commandant en chef. Il fut suivi ensuite par ‘Allan Ibn Muhammad Ibn Koushmard avec une grande armée. Wasif Ibn Sawartakin les avait précédés plus tôt avec une force substantielle. Environ deux-mille hommes des tribus arabes des Banou Shayban et des Banou Namir furent attachés à Ibn Koundajiq et à qui un salaire militaire fut attribué.

 

Le 18 du mois de Joumadah Awwal de cette même année 293 (905), un groupe d’environ dix personnes arriva à Baghdad de La Mecque. Ils allèrent à la cour du calife et demandèrent que l’on envoie des troupes dans leur terre, parce qu’ils avaient peur que le rebelle qarmate l’envahisse, puisqu’ils croyaient qu’il était déjà proche.

 

Le vendredi 12 du mois de Rajab, une dépêche qui arriva aux autorités centrales fut lue sur les chaires à Baghdad, disant que les habitants de San’a’ et d’autres villes du Yémen s’étaient rassemblés contre le rebelle qarmate qui avait saisi le pouvoir dans leur pays. Ils luttèrent contre lui et le mirent en déroute avec ses troupes. Ils s’enfuirent et se retirèrent dans un endroit du Yémen.

 

Le 7 du mois de Shawwal, des nouvelles arrivèrent à Madinat as-Salam que les Byzantins avaient attaqué Qourous. Ses habitants luttèrent contre eux, mais les Byzantins les mirent en déroute et tuèrent la plupart d’entre eux aussi bien que les chefs des Banou Tamim. Ils entrèrent dans la ville, incendièrent sa mosquée et chassèrent les habitants restants.

 

 

Au mois de Mouharram de l’année 294 de l’Hégire (906), Ibn Kayghalagh arriva à Tarse pour entreprendre un raid. Roustoum l’accompagna lors de son raid, le second de Roustoum, et ils allèrent aussi loin que Salandou, où Allah Exalté leur donna la victoire avant d’arriver à Alis. Environ cinq-mille personnes tombèrent entre leurs mains et après avoir tué un grand nombre de Byzantins, ils revinrent en toute sécurité.

 

Le 12 du mois de Mouharram, des nouvelles arrivèrent à Madinat as-Salam informant que le qarmate Zikrawayh Ibn Mihrawayh avait quitté Nahr al-Mathniyah avec l’intention d’attaquer les pèlerins et qu’il était arrivé dans un endroit à huit kilomètres de Waqissah.

Selon Muhammad Ibn Daoud, les qarmates allèrent vers l’ouest dans le désert et arrivèrent finalement au point d’eau de Salman. La région entre eux et le Sawad était un désert sans eau. Les qarmates restèrent où ils étaient avec l’intention d’attaquer les pèlerins et attendirent la première caravane. Le 6 ou le 7 du mois de Mouharram, ils arrivèrent à Waqissah où les gens locaux prévinrent les pèlerins, qu’ils étaient à 8 kilomètres des qarmates. Ils firent donc demi-tour et furent ainsi sauvés. Al-Hassan Ibn Moussa ar-Raba et Sima al-Ibrahimi étaient dans cette caravane. Quand la caravane tarda, les qarmates allèrent à Waqissah et questionnèrent les gens à son sujet qui répondirent qu’elle n’était pas restée. Ils les soupçonnèrent donc de l’avoir prévenue et tuèrent un certain nombre de vendeurs de fourrage, brûlèrent le fourrage, pendant que les habitants se fortifièrent dans leur forteresse. Les qarmates restèrent plusieurs jours avant de partir pour Zoubalah.

Selon Muhammad Ibn Daoud, les troupes allèrent vers la source d’at-Taff à la poursuite de Zikrawayh, mais ils partirent aussitôt quand ils apprirent qu’il était à Salman. ‘Allan Ibn Koushmard poursuivit Zikrawayh avec un détachement spécial de cavalerie par la grande route de La Mecque. Il établit son camp à as-Sibal avant de poursuivre sa route vers Waqissah où il établit son camp après que la première caravane ait traversé.

Sur sa route, Zikrawayh passa par des groupes des Banou Assad qu’il emmena avec lui avec leurs tentes vers la grande route de La Mecque pour attaquer les pèlerins de retour.

 

Le 16 du mois de Mouharram, le poste de pigeons de Koufa envoya les nouvelles à Baghdad que le dimanche 11 du mois de Mouharram, Zikrawayh avait attaqué la caravane des Khorassani à al-‘Aqabah sur la Route de La Mecque et qu’ils avaient luttés contre lui énergiquement. Il les interrogea et leur demanda si des hommes gouvernementaux étaient parmi eux. Quand ils répondirent négativement et dirent qu’ils étaient simplement des pèlerins, il leur dit qu’il n’en n’avait pas après eux et qu’ils pouvaient partir. Quand la caravane poursuivie sa route, il l’a suivie et l’attaqua ensuite. Ses hommes piquèrent les chameaux avec leurs lances et coupèrent les liens les retenant les uns aux autres pour rompre la caravane. Alors, ils tombèrent sur les pèlerins et les tuèrent à volonté, les hommes, les femmes, et prirent captives toutes les femmes qui voulurent ainsi que l’intégralité de la caravane.

Un des pèlerins qui s’échappa rencontra ‘Allan Ibn Koushmard et il lui raconta ce qui était arrivé et dit : « Il y a seulement une courte distance entre toi et les gens. Ce soir ou demain, la deuxième caravane arrivera. Quand ils verront la bannière des autorités centrales, ils se sentiront confidents. Au nom d’Allah montrez de l’inquiétude pour eux ! » Mais ‘Allan retourna immédiatement en arrière et ordonna à ceux qui étaient avec lui de faire pareil en disant : « Je n’exposerai pas les forces gouvernementales à la mort ».

Zikrawayh se leva alors et la deuxième caravane arriva. En utilisant un certain nombre de messagers qui évitèrent la grande route, les autorités centrales informèrent les chefs des deuxièmes et troisième caravanes, les officiers et les fonctionnaires civils parmi eux, ce que le vil hérétique faisait aux pèlerins. On leur ordonna d’être en garde contre lui et aller vers Wassit et Basra au lieu de suivre la grande route, ou revenir à Fayd ou à al-Madinah et d’attendre l’arrivée des troupes pour les accompagner. Les messages les atteignirent mais ils ne les écoutèrent pas.

Les gens dans la deuxième caravane accélérèrent leur marche et parmi eux se trouvaient al-Moubarak al-Qoummi, Ahmad Ibn Nasr al-’Ouqayli et Ahmad Ibn ‘Ali Ibn al-Houssayn al-Hamadani. Les criminels étaient arrivés à Waqissah et avant le départ, ils avaient rendu les points d’eaux inutilisables, en remplissant les étangs et les puits avec des cadavres de chameaux et de chevaux éventrés. Ils arrivèrent à la station de ‘Aqabah le lundi 12 du mois de Mouharram et les hommes de la deuxième caravane luttèrent contre eux. Abou al-’Asha’ir était en tête de la caravane avec ses hommes, pendant que Moubarak al-Qoummi était à l’arrière. Le combat fut féroce et finalement, ils mirent en déroute les criminels et ils étaient sur le point de les battre quand les criminels trouvèrent leur arrière dépourvue, ils les attaquèrent de cette direction. Ils enfoncèrent leurs lances dans les flancs et les ventres des chameaux qui tombèrent sur les combattants de la caravane et les écrasèrent. Ils les maîtrisèrent ainsi et les passèrent par l’épée, en les tuant jusqu’au dernier homme, sauf ceux qu’ils prirent comme esclaves. Le vil hérétique dépêcha alors des cavaliers au-delà d’al-‘Aqabah où ils rencontrèrent ceux qui avaient échappé au massacre. Ils leur accordèrent la sécurité et sitôt qu’ils se rendirent, ils les massacrèrent tous. Ils prirent captives toutes les femmes qu’ils voulurent, saisirent tout l’argent et toutes les marchandises. Al-Moubarak al-Qoummi et son fils Mouzaffar furent tués et Abou al-’Asha’ir fut capturé. Les cadavres furent rassemblés et empilés, formant une grande colline. Les mains et les pieds d’Abou al-’Asha’ir furent tranchés avant d’être décapité. Les femmes qu’ils ne voulurent pas furent libérées. Certains des blessés étaient tombés parmi les tués. Pendant la nuit, ils se dégagèrent en se trainants; certains d’entre eux sont morts, quelques-uns furent sauvés. Les femmes qarmates avec leurs enfants se promenaient toujours parmi les tués voulant offrir de l’eau. Ceux qui avaient le malheur de parler et indiquer ainsi qu’ils étaient toujours vivants, étaient achevés.

Vingt-mille pèlerins étaient dans la caravane. Ils furent tous tués, sauf un tout petit nombre dont ceux qui dominèrent l’ennemi et furent ainsi sauvés, bien que laissés sans provisions, les blessés qui étaient tombé parmi les tués et plus tard échappèrent et ceux que les qarmates firent esclaves pour les servir. L’argent et les luxueuses marchandises saisies par les qarmates dans cette caravane furent estimés à deux-millions de dinars.

Un des artisans travaillant dans les métaux précieux a rapporté que des lettres des ouvriers égyptiens des métaux précieux leur étaient parvenues et disaient : « Vous deviendrez riches cette année. La famille d’Ibn Touloun, les officiers égyptiens qui avait été envoyés à Madinat as-Salam et aux gens de réputation semblable ont envoyé leur propriété égyptienne à Madinat as-Salam, de la vaisselle en or et en argent et de l’or fondu en lingots ». Les lingots furent emmenés à La Mecque pour être transportés avec les pèlerins à Madinat al-Salam. Tout cela fut perdu et rien n’a été récupéré.

Pendant que les qarmates tuaient et pillaient cette caravane de lundi, la caravane des Khorassani fut rapportée en approche. Un certain nombre de qarmates sortirent contre eux et les attaquèrent si bien qu’ils subirent le même destin.

Quand Zikrawayh eut fini avec les gens de la deuxième caravane de pèlerins, qu’il eut pris leurs possessions et les femmes comme butin juridique, il remplit les mares et les puits d’al-’Aqabah avec les cadavres des gens et des chevaux et partit immédiatement.

 

Les nouvelles de son assaut sur la deuxième des caravanes atteignirent les autorités centrales à Madinat as-Salam le vendredi soir 16 du mois de Mouharram 294 (906) et leur causèrent beaucoup de peine ainsi qu’à tous les Musulmans. Le vizir al-’Abbas Ibn al-Hassan Ibn Ayyoub mobilisa Muhammad Ibn Daoud Ibn al-Jarrah, le secrétaire responsable des Bureaux de la Taxe foncière et des Domaines de l’Est aussi bien que le Bureau de l’armée, pour aller à Koufa et y rester, pour dépêcher des troupes contre les qarmates. Ibn al-Jarrah quitta Baghdad le 19 du mois de Mouharram, en emportant avec lui beaucoup d’argent pour payer les troupes.

 

Zikrawayh partit alors pour Zoubalah où il établit son camp et déploya des avant-gardes et des arrière-gardes, parce qu’il avait peur que les forces gouvernementales postées à al-Qadissiyah ne l’attaque et aussi parce qu’il attendait l’arrivée de la troisième caravane qui transportait l’argent et les marchands. Il partit alors à ath-Tha’labiyah et ensuite à ash-Shouqouq. Il resta entre ash-Shouqouq et al-Bitan à at-Toulayh, en attendant la troisième caravane commandée par les officiers Nafis al-Mouwalladi et Salih al-Aswad. Salih avait avec lui le parapluie qu’al-Mou’tadid avait orné de pierres précieuses et le coffre de la caravane. Parmi eux se trouvait aussi, Ibrahim Ibn Abi al-Ash’ath, qui était le juge en chef de La Mecque et d’al-Madinah et qui était aussi responsable de la route de la Mecque et des dépenses pour son entretien, Maymoun Ibn Ibrahim al-Katib qui était responsable des affaires du Bureau de Comptabilité des Taxes foncières et les Domaines, Ahmad Ibn Muhammad Ibn Ahmad, surnommé Ibn al-Hazallaj, al-Fourat Ibn Ahmad Ibn Muhammad Ibn al-Fourat, al-Hassan Ibn Isma’il, un parent d’al-’Abbas Ibn al-Hassan, qui était le receveur des Postes des deux villes sacrées et ‘Ali Ibn al-’Abbas an-Nahiki.

Quand les gens de cette caravane arrivèrent à Fayd, ils furent informés des crimes du vil Zikrawayh et de ses hommes. Ils restèrent à Fayd plusieurs jours et attendirent des renforts des autorités centrales, puisque Ibn Koushmard était revenu de la route d’al-Qadissiyah avec les troupes que les autorités centrales avaient dépêchées avec lui. Quand la caravane entra en contact avec le maudit dans un endroit appelé al-Habir, le 21 du mois de Mouharram, ce dernier les attaqua. Ils luttèrent contre lui tout le jour jusqu’à la tombée de la nuit et ensuite le maudit se retira. Le lendemain matin, il revint une fois pour les engager dans la bataille et ils luttèrent l’un contre l’autre. Le troisième jour, les gens de la caravane devinrent assoiffés et après le combat se rendirent. Le maudit les passa tous par l’épée et seulement quelques-uns d’entre eux s’enfuirent. Les qarmates saisirent les femmes et l’intégralité de la caravane.

 

Cette même année, les autorités centrales envoyèrent deux-mille-deux-cents cavaliers du Banou Shayban pour lutter contre les qarmates.

 

Toujours cette année, Zikrawayh alla à Fayd où le représentant des autorités centrales était Hamid Ibn Firouz. Hamid, avec environ cent hommes qui étaient avec lui dans la mosquée, se réfugièrent dans une des deux forteresses de Fayd. Zikrawayh correspondit avec les habitants de Fayd et leur demanda de leur remettre leur fonctionnaire et les troupes avec lui. Les habitants de Fayd, cependant, ne répondirent pas à sa demande et il lutta contre eux sans résultat. Quand il vit qu’il ne pouvait faire rien avec eux, il se retira à an-Nibaj et alla ensuite chez Houfayr Abi Moussa al-Ash’ari.

 

Le 1 du mois de Rabi’ Awwal, al-Mouktafi mobilisa Wasif Ibn Sawartakin avec un certain nombre d’officiers. Ils quittèrent al-Qadissiyah par la route de Khaffan.

Le samedi 22 du mois de Rabi’ I, Wasif rencontra Zikrawayh et ils combattirent toute la journée, jusqu’à ce que la nuit les séparent. Ils passèrent la nuit à se surveiller mutuellement  avant de retourner les attaquer. Les troupes gouvernementales massacrèrent les qarmates et quand ils arrivèrent face à l’ennemi d’Allah, Zikrawayh tourna son dos et voulut s’enfuir. Mais un des soldats le frappa à la nuque avec son sabre de telle façon qu’il traversa son cerveau. Zikrawayh, son lieutenant, un certain nombre de ses intimes et proches dont son fils, son secrétaire et sa femme furent prit captif et les troupes prirent possession de tout son camp. Le parapluie du calife fut retrouvé sans ses pierres précieuses tandis que les captifs, les pèlerins capturés furent tous libérés.

Zikrawayh vécu cinq jours supplémentaire avant de mourir. Son ventre fut ouvert, vidé de son contenu et il fut ainsi emporté à Madinat as-Salam monté sur un chameau. Coiffé d’un capuchon sur sa tête et couvert d’une cape de brocart. Devant lui se trouvait sa femme Mou'minah, vêtu d’une robe en soie et couverte.

 

 

Le 1 du mois de Mouharram, Ibn Kayghalagh entreprit un raid du Tarse. Il prit quatre-mille captifs ennemis et saisi beaucoup de chevaux, du bétail et des marchandises. Un des Patricio vint chez lui demander la sécurité et devint par la suite Musulman.

 

Toujours cette année, le Patricio Andronikos, qui était le commandant militaire du souverain byzantin de ceux qui vivaient dans les régions frontalières, écrivit aux autorités centrales à Baghdad et demanda la sécurité qui lui fut accordé. Le souverain byzantin lui avait envoyé des hommes pour l’arrêter. Il remit donc des armes à environ deux-cents Musulmans retenus captifs dans sa forteresse et partit en les envoyant en avant avec certains de ses fils. Ils tombèrent la nuit sur le Patricio qui avait été envoyé pour arrêter Andronikos et tuèrent un grand nombre de ses hommes et pillèrent leur camp.

 

Au mois de Joumadah Awwal de cette même année, Roustoum partit avec les gens des régions frontalières pour sauver Andronikos et arriva à Qouniyah peu après l’incident. Le Patricio apprit que les Musulmans marchaient contre eux et retourna en arrière. Andronikos envoya son fils à Roustoum, tandis que Roustoum envoya son secrétaire et un certain nombre de marins à Andronikos. Ils passèrent la nuit dans la forteresse et au matin, Andronikos sortit son argent, ses biens  et partit pour le camp musulman avec tous les captifs musulmans qui étaient avec lui. Les Musulmans pillèrent Qouniyah et revinrent à ensuite à Tarse avec Andronikos, les captifs musulmans et les chrétiens qui étaient avec Andronikos.

 

Au mois de Joumadah Thani, il y eut une bataille entre les hommes d’al-Houssayn Ibn Hamdan et des hommes de Zikrawayh. Ces derniers s’étaient enfuis de la bataille, au cours de laquelle Zikrawayh avait rencontré son destin, par la route de l’Euphrate ayant l’intention d’aller en Syrie. Un certain nombre d’entre eux furent tués et un certain nombre de leurs femmes et de leurs enfants furent pris captifs.

 

Cette année, les émissaires du roi byzantin, dont l’oncle maternel de son fils Léon et Basilio, accompagnés par un certain nombre de personnes, arrivèrent à Bab ash-Shammassiyah avec une lettre du roi à al-Mouktafi demandant d’organiser des négociations de rançon pour les Musulmans retenus prisonniers chez les Byzantins et les Byzantins retenu prisonniers chez les Musulmans. Il demanda à al-Mouktafi d’envoyer un émissaire eu territoire byzantin pour réunir les captifs musulmans et pour trouver un accord sur les conditions de rançon avec lui. Basilio devait rester dans le Tarse pour rassembler des captifs byzantins des régions frontalières et les ramener avec le représentant des autorités centrales, à l’endroit où devait se tenir les négociations de rançon. La délégation resta dans Bab ash-Shammassiyah plusieurs jours avant d’être ramené à Baghdad. Ils vinrent avec des cadeaux de l’empereur byzantin et dix captifs musulmans. Les cadeaux furent acceptés comme la demande du souverain byzantin.

 

Toujours cette année, un homme qui prétendait être le Soufyani[3] fut arrêté en Syrie avec un certain nombre de ses compagnons et ramené de Syrie à la cour du calife. Il a été rapporté qu’il souffrait de crises de délire.

 

Cette même année, des membres de tribu arabes sur la route de la Mecque capturèrent deux hommes, dont l’un se nommait al-Haddad et l’autre al-Mountaqim qui apparut être le frère de la femme de Zikrawayh. Les deux furent confiées à Nizar dans Koufa, qu’il les envoya à la cour du calife à Baghdad. Selon les membres des tribus arabes, les deux étaient venus les appeler à se rebeller contre les autorités centrales.

 

Cette année, al-Houssayn Ibn Hamdan envoya al-Kayyal avec soixante de ses hommes de la route de Syrie aux autorités centrales à Baghdad. Ces hommes, des hommes de Zikrawayh, étaient venus le trouver pour lui demander la sécurité. 

 

Toujours cette année, le Patricio Andronikos arriva à Baghdad,

 

Au mois de Ramadan, il y eut une bataille sur la route de l’Euphrate entre al-Houssayn Ibn Hamdan et les Banou Kalb, les Banou Namir, les Banou Assad et d’autres membres de tribus arabes qui s’étaient rassemblés contre lui. Ils le mirent en déroute et le poursuivirent jusqu’aux portes d’Alep.

 

Cette même année, les Banou Tayyi' assiégèrent Wasif Ibn Sawartakin, qui avait été nommé commandant militaire pour la saison du pèlerinage, dans Fayd. Il fut assiégé durant trois jours avant de sortir ensuite contre eux. Il les attaqua, tua un certain nombre d’entre eux tandis que le reste s’enfuit et Wasif quitta Fayd avec les pèlerins qui étaient avec lui.

 

 

En l’an 295 de l’Hégire (907), al-Houssayn Ibn Moussa attaqua par surprise les Banou Tayyi' qui avait assiégé Wasif Ibn Sawartakin, tua soixante-dix de leurs hommes et pris un certain nombre de leurs cavaliers captifs.

 

Au mois de Dzoul Qi’dah de cette même année, les négociations de rançon entre les Musulmans et les Byzantins furent achevés. Trois-mille hommes et femmes furent rançonnés.

 

 

Al-Mouqtadir Billah, le dix-huitième calife abbasside

 

Au mois de Dzoul Hijjah de l’année 295 de l’Hégire (907), décéda le calife Abbasside al-Mouktafi Billah et il fut porté allégeance à un jeune enfant qui n’avait pas encore atteint l’âge de 13 ans, Ja’far Ibn al-Mou’tadid Billah, qui fut surnommé al-Mouqtadir Billah et dont la mère était une romaine du nom de Gharib. D’autres ont rapporté qu’elle s’appelait Shaghab.

 

Les événements que nous venons de voir, nous démontre les graves événements auxquels faisait face le gouvernement abbasside, au cœur même de son état. Les villes et les banlieues étaient attaquées en Iraq, en Syrie et dans l’Ahwaz, les caravanes de pèlerins pillées et détruites.

Pourquoi ces événements sont-ils arrivés et pourquoi n’avons-nous pas entendu parler précédemment de telles séditions hormis qu’à ce moment précis ? Parce que l’état abbasside était entré dans son ère de faiblesse, faiblesse qui fut engendrée par l’introduction des Turcs dans l’armée du gouvernement abbasside par le calife al-Mou’tassim. L’armée est le pilier de l’état et du pouvoir. Si les généraux n’étaient pas satisfaits du calife, ils se rebellaient contre lui et imposaient leurs propres désirs. C’est pour ça que les armées doivent être écartées impérativement et tenues loin de la politique. L’armée ne doit être sous l’influence d’aucun parti politique. Son premier but doit être la protection du pays et des citoyens. L’armée qui s’implique dans les affaires politiques ou commerciales ne peut mener le pays qu’à la destruction.

Comme sont criantes ses vérités dans les pays musulmans de nos jours, où l’on voit les armées non pas protéger le pays et servir les citoyens mais plutôt détruire le pays et massacrer les citoyens, pour le plus grand bénéfice des nations étrangères qu’elles servent dans l’ombre. Combien de pays, avons-nous vu, se rendre avant d’avoir même combattu. Des armées entières, des centaines de milliers de soldats de carrière payés par l’état disparurent purement et simplement des casernes où elles étaient stationnées, sans même tirer une seule balle contre l’ennemi, le jour ou leur pays fut envahi !

 

 

Al-Mouqtadir Billah devint calife à l’âge de treize ans et n’eut donc forcément entre ses mains aucuns pouvoir ni puissance. Il devait forcément avoir quelqu’un derrière lui pour mener les affaires de l’état. Et malgré cela, les principaux généraux cherchèrent le moyen de venir à bout de lui pour le remplacer par ‘AbdAllah Ibn Mou’taz. Et effectivement, quatre mois après son entrée au pouvoir, le 20 du mois de Rabi’ Awwal de l’année 295 de l’Hégire (907), ils portèrent allégeance à ‘AbdAllah Ibn Mou’taz qu’ils surnommèrent ar-Radi Billah.

Néanmoins, les servants de l’état d’al-Mouqtadir Billah et des gens de son palais, se levèrent et il y eut une guerre ouverte entre les deux partis qui finit par la capture de ‘AbdAllah Ibn Mou’taz, deux heures après sa nomination. Après, la justice fit son devoir, un certain nombre de personnes furent tuées et d’autres se virent proposés de grandes sommes d’argent particulièrement ceux qui avait défendu le calife.

 

 

Le samedi 26 du mois de Rabi’ Awwal de l’année 296 de l’Hégire (908), la neige tomba à Baghdad du début de la matinée jusqu’à la prière de l’après-midi. Il y eut une accumulation d’environ quatre doigts, environ neuf centimètres ou presque quatre pouces, sur les toits. Il n’a jamais été rapporté que quelque chose de similaire fut vu à Baghdad.

 

Le 15 du mois de Sha’ban de cette même année, une robe d’honneur fut octroyée à Mou’nis al-Khadim et il lui fut ordonné d’aller à Tarse pour mener la campagne d’été. Mobilisé pour ce but, il partit avec une force considérable et un certain nombre d’officiers, de pages de chambre.

 

 

En l’an 297 de l’Hégire (909), il y eut la campagne d’été dans le territoire byzantin par Mou’nis al-Khadim accompagnée d’une force considérable de la ville frontalière de Malatyah. Et par Abou al-Agharr as-Soulami. À la fin de l’année 297 (le 19 septembre, 909), il vainquit les Byzantins et prit plusieurs captif non-musulmans. Le rapport sur cet événement arriva aux autorités centrales à Baghdad le 6 du mois de Mouharram.

 

Au mois de Shawwal de cette année, al-Mouqtadir envoya al-Qassim Ibn Sima avec un grand corps de troupes pour la campagne d’été dans le territoire byzantin.

 

 

Durant l’année 299 de l’Hégire (911), Roustoum Ibn Bardou, qui était responsable de la région frontière pour Bounayy Ibn Nafis, entreprit la campagne d’été de la région du Tarse accompagné par Damyanah. Roustoum assiégea la forteresse de Malik al-Armani. Il la quitta alors et brûla les banlieues de Dzoul al-Kila’.

 

Cette année, al-’Outayr, un des hommes de Zikrawayh, arriva à Baghdad pour demander la sécurité accompagné par al-Agharr, un autre des officiers de Zikrawayh.

 

 

En l’an 300 de l’Hégire (912), il arriva à Baghdad un messager du fonctionnaire responsable de Barqah avec un rapport concernant un rebelle khariji qui s’était levé contre lui. Barqah appartenait à la région administrative de l’Egypte, à 16 kilomètres de la région administrative du Maghreb Il vainquit l’armée du rebelle et tua un certain nombre de ses hommes. Le messager arriva avec des colliers d’oreilles et de nez appartenant aux tués, aussi bien que plusieurs bannières du rebelle.

 

Cette même année, les gens de Baghdad souffrirent de beaucoup de maladies. Il fut rapporté que les chiens et les loups avaient contractés la rage et qu’ils chassèrent des humains, des chevaux et du bétail. Quand ils mordaient un homme, ils provoquaient sa mort.

 

 

En l’an 301 de l’Hégire (913), il y eut une épidémie de deux sortes de peste à Baghdad, l’une était inoffensive et la seconde mortelle.

 

Cette même année, Abou Muhammad al-Hallaj, un prestidigitateur, fut ramené dans la maison du vizir ‘Ali Ibn ‘Issa, accompagnée par un compagnon. J’entendis un certain nombre de personnes dire qu’il s’était réclamé la seigneurie divine. Lui et son compagnon furent pendu trois jours, du début de la matinée jusqu’au midi, avant d’être descendus et renvoyés en prison. Abou Muhammad al-Hallaj resta longtemps dans la prison. Un certain nombre de personnes, parmi eux Nasr al-Qoushouri, furent séduits par lui. Finalement, les gens devinrent indisciplinés et maudirent ceux qui étaient trouvé en sa compagnie. Alors ses pieds et ses mains furent tranché, puis il fut décapité et incinéré.

 

Toujours cette année, al-Houssayn Ibn Hamdan conduisit la campagne d’été. Une dépêche arriva du Tarse à Baghdad qui indiquait qu’il avait conquis beaucoup de forteresses et tué un grand nombre de Byzantins.

 

Cette année, Abou Sa’id al-Jannabi al-Hassan Ibn Barhan, le maudit rebelle qarmate athée qui se trouvait à Hajar dans la région du Bahrayn fut tué par un de ses servants. Son fils Sa’id le remplaça mais le commandement des qarmates revint à son fils Souleyman Ibn Hassan Ibn Barhan surnommé Abou Tahar al-qourmouti, qui fut un terrifiant démon humain sanguinaire et dont nous verrons tous les crimes qu’il commit non seulement envers l’état des abbassides mais l’ensemble de la communauté musulmane.

 

Il y eut aussi beaucoup de maladies à Baghdad qui provoqua une grande mortalité parmi les habitants de la ville est particulièrement dans al-Harbiyyah et parmi les gens des banlieues.

 

 

En l’an 302 de l’Hégire (914), Ibn ‘Abd al-Baqi partit pour le Tarse avec deux-mille cavaliers pour mener la campagne d’été. Pour le soutenir, le vizir ‘Ali Ibn ‘Issa lui le fit rattraper par Bishr, le servant d’Ibn Abi as-Saj, qui était le gouverneur de Tarse de la part des autorités centrales. Comme ils ne purent pas mener la campagne d’été, ils entreprirent une campagne d’hiver par un sévère froid sévère et sous la neige.

 

Cette année, une dépêche de Bishr, le fonctionnaire responsable du Tarse de la part des autorités centrales, atteignit les autorités centrales à Baghdad. Bishr mentionnait sa campagne dans le territoire byzantin. Il rapporta les forteresses qu’il conquit, le butin qu’il fit et les captifs qu’il prit. Il prit aussi cent-cinquante captif patricios et le nombre total des captif était d’environ deux-mille.

 

Le 22 du mois de Dzoul Hijjah de cette même année, des membres d’une tribu arabes partirent pour al-Hajir, à dix-huit kilomètres du désert, contre les pèlerins revenant de La Mecque. Ils les attaquèrent et saisirent tous leurs biens ainsi que deux-cent-quatre-vingts femmes libres, sans compter les mâles et les esclaves capturés.

 

 

L’état abbasside était extrêmement faible non seulement du point de vue de ses armées mais aussi de ses revenus qui étaient insuffisants pour subvenir aux besoins de toutes les armées de l’empire et ne pouvait donc pas faire face à la menace des qarmates qui semait la sédition, la corruption et la destruction sur la terre. La majeure partie des graves menaces dont eut à faire face l’état abbasside ne venaient donc pas de l’extérieur mais de l’intérieur, ce qui était encore plus grave. Et suite à ces troubles intérieurs engendrés par ces hérétiques, qui occupaient l’état, les armées romaines en profitèrent pour attaquer les frontières musulmanes, à plusieurs reprises, et particulièrement à Marat où ils détruisirent la ville et prirent un grand nombre de prisonniers musulmans. Pourtant l’état et les armées abbassides n’étaient pas particulièrement pauvres pour ne pas pouvoir faire face à tous les problèmes mais les troubles organisés aussi par les principaux généraux rendaient l’état et l’armée incapable de faire quoi que ce soit. Un puissant état, et de grandes et puissantes armées étaient ainsi réduits à l’impuissance à cause des luttes intestinales pour le pouvoir.

Pourtant, en l’an 305 de l’Hégire (917), quand l’empereur byzantin, Constantin VII envoya une mission à Baghdad pour conclure un traité de paix et une échange de prisonniers, le calife faible al-Mouqtadir Billah ordonna de déployer toute la splendeur et la force de l’état abbasside devant les émissaires. La puissante et immense armée du calife, 160.000 cavaliers et fantassins réunis se déployèrent dans les rues de la capitale, de la porte Shammassiyah au palais. Ils furent suivis par l’escorte royale au nombre de 7.000 soldats mélangés blancs et noirs et derrière eux 700 chambellans et tous vêtus somptueusement. Des navires de toutes sortes, décorés pour l’occasion, jetèrent l’ancre dans le fleuve du Tigre. Les murs du palais califal furent recouverts de 38.000 parures de brocart. 22.000 tapis furent déroulés dans la cour, cent bêtes sauvages tenues en laisse et une quantité d’autres choses. Les émissaires furent stupéfiés par ce qu’ils virent et lorsqu’ils virent le vizir dans toute sa splendeur, ils crurent que c’était le calife mais les guides continuèrent leur marche sans s’arrêter et leur dire que ce n’était que le secrétaire du calife. La visite continua et ils entrèrent dans le palais, ou plutôt la ville du calife, où ils découvrirent merveille après merveille. Enfin, ils furent introduits dans la salle du conseil où se tenait assit sur un siège (sarir) sculpté dans du bois de cèdre, recouvert de tentures et de voiles, le calife en personne, al-Mouqtadir Billah. Il fut donné l’occasion aux émissaires, de voir toute le lustre, certainement inconcevable dans les esprits des Romains, de la force en puissance de l’époque. Les émissaires furent ordonnés de s’arrêter à 100 coudées[4] (45 m) du siège du calife. Si les émissaires durent s’arrêter à 45 m du Calife que dire alors de la taille de son siège !

Ces détails ne vous ont été donnés que pour vous permettre de réaliser la force de l’état abbasside et de ses armées mais, comme nous l’avons déjà précédemment mentionné, cette force était sans effet.

 

Cette même année, arriva à la cour califale des présents du prince de ‘Oman et parmi eux un oiseau noir qui parlait le farsi et l’hindî plus couramment qu’un perroquet.

 

Toujours cette année, al-Qahim Muhammad Ibn al-Mahdi le fatimide retourna de nouveau en l’Egypte et se rendit maître d’une grande portion de l’Egypte Supérieure.

 

 

En l’an 308 de l’Hégire (920), les prix montèrent vertigineusement à Baghdad privant ainsi les gens et ce à cause du vizir Hamid Ibn al-’Abbas a qui fut confié l’administration des domaines royaux dans le Sawad et qui commis des exactions injustifiées. Les gens furent réduits au pillage et les troupes durent intervenir contre le peuple qui fut dispersé après plusieurs jours de combats. La foule mit le feu à la prison, ouvrit les cellules, pilla les citoyens et jetèrent des pierres au vizir et les affaires de la Maison d’al-’Abbas tombèrent dans un grand désordre.

 

Cette année, les troupes d’al-Qahim prirent possession du Delta (du Nil) jusqu’à Fustat et la détresse des gens du Caire augmenta grandement et ils se préparèrent pour la guerre, suite aux hostilités.

 

 

Durant l’année 312 de l’Hégire (924), les qarmates, sous le commandant d’Abou Tahir, attaquèrent des caravanes de pèlerins de retour de la Maison Sacrée, où ils avaient accompli leur pèlerinage, chez eux. Ils massacrèrent un grand nombre d’entre eux, violèrent, détruisirent, pilèrent et abandonnèrent les survivants dans le désert, sans eau, ni provision et ni montures où ils ne tardèrent pas à tous mourir.

 

Cette même année, Abou Tahir Souleyman Ibn Hassan le qarmate combattit dans la banlieue de Koufa contre les commandants du Sultan qu’il prit captifs.

Ja’far Ibn Warqa était responsable des régions de Koufa et de la route de Koufa. Quand les pèlerins quittèrent Baghdad, il partit en avant par crainte d’Abou Tahir le qarmate et il avait sous son commandement mille hommes de ses cousins, les Banou Shayban. La première caravane fut accompagnée par l’émir Thoumal  et dans la caravane du « parapluie » se trouvait Jinn Safwani, Tarif Soubkari et Siyashir ad-Daylam.

L’escorte des caravanes fournies par le Sultan comptait six-mille hommes. Ils furent interceptés par Abou Tahir Jannabi, le premier commandant qui entra en contact avec lui fut Ja’far Ibn Warqa. Il s’ensuivit une escarmouche, au cours de laquelle Ja’far fut attaqué par un groupe des partisans d’Abou Tahir qui étaient montés sur des chameaux rapides guidant leurs chevaux. Ils descendirent de leurs chameaux, enfourchèrent leurs chevaux et joignirent la bataille contre Ja’far Ibn Warqa qui ne put tenir ses positions et s’enfuit avec les Banou Shayban.

En rencontrant la caravane, qui descendait de la colline, il leur dit de retourner en arrière en expliquant ce qui était arrivé.

En conséquence, ils tournèrent aussitôt les talons et revinrent à Koufa. Abou Tahir poursuivit les troupes impériales et les caravanes jusqu’à la porte de Koufa. Les commandants des forces impériales qui furent appelées à l’aide sortirent et furent vaincus tandis que Jinn Safwani fut pris captif.

Durant six jours Abou Tahir resta hors de Koufa, en entrant dans la ville durant le jour et la quittant la nuit, pour la passer dans son camp, en emmenant tout qui pouvait être emporté, dont quatre-mille robes brodées et trois-cents jarres contenant de l’huile. Quand il prit tout ce qui pourrait être emmené au loin, il retourna dans sa propre ville.

Ja’far Ibn Warqa ramena ses troupes vaincues à Baghdad, où le calife al-Mouqtadir ordonna à Mou’nis de marcher sur Koufa pour combattre les qarmates. Les gens de Baghdad furent sérieusement inquiétés et la plupart d’entre de ceux qui vivaient sur la rive ouest émigrèrent sur la rive est.

Quand Mou’nis arriva à Koufa, Abou Tahir l’avait déjà évacué. Mou’nis y laissa donc Yaqout son député et lui-même procéda à Wassit. Personne ne put donc accomplir son pèlerinage cette année.

 

 

L’année suivante, en 313 de l’Hégire (925), le criminel Abou Tahir, attaqua de nouveaux les caravanes de pèlerins à destination de La Mecque et à cause des qarmates, le pèlerinage prit du retard cette année avant d’être annulé par la suite car, lorsque les pèlerins d’Iraq furent informés des exactions des qarmates, ils annulèrent leur voyage. Les habitants de La Mecque s’enfuirent à Taif pour les mêmes causes. Les sédentaires ne furent pas non plus à l’abri de leur mal et le qarmate les attaqua et leur imposa, par tête, deux dinars, comme l’ont rapporté des historiens.

 

Cette même année, l’empereur byzantin envoya une lettre aux gens des frontières leur ordonnant de lui payer le tribut. Il les menaça en leur disant que s’ils ne faisaient pas ce qui leur ordonnait, il les attaquerait, connaissant leurs faiblesses.

 

 

En l’an 314 de l’Hégire (926), les Byzantins entrèrent à Malatiyah, où ils restèrent seize jours durant lesquels ils pillèrent la ville et prirent les habitants en captivité. Ceux qui réussirent à s’enfuir, allèrent à Baghdad pour demander de l’aide contre les attaques des byzantins.

 

Cette même année, les habitants de La Mecque abandonnèrent leur ville avec leurs biens et leurs familles après avoir entendu dire que les qarmates étaient dans leur région, craignant pour leurs vies et leurs biens.

 

Cette même année, le Tigre gela à Mossoul et le bétail put traverser le fleuve et il n’a jamais été mentionné précédemment un événement similaire.

 

 

En l’an 315 de l’Hégire (927), les Byzantins attaquèrent Damiette et prirent tous les habitants de la ville prisonniers ainsi que l’ensemble de leurs propriétés. Ils firent aussi sonner leurs cloches dans les mosquées de la ville alors qu’en même temps les Daylam attaquaient Rayy et les régions montagneuses ou ils tuèrent beaucoup de gens y compris les enfants.

 

Cette même année, une robe d’honneur fut attribuée à Mou’nis avant qu’il soit expédié à la frontière. L’empereur byzantin entra dans Soumayssat et la cloche fut sonnée dans la mosquée centrale ou les Byzantins tinrent leur service religieux.

 

Cette même année, ‘Ali Ibn Issa lut au calife une lettre qu’il reçut de Wasif Baktimouri dans laquelle il était mentionné que les Musulmans avaient contre-attaqué les Byzantins et les avaient vaincu avec toutes les troupes et avait tué un grand nombre d’entre eux et capturé un aussi grand nombre.

Il arriva alors un envoyé de l’empereur byzantin portant une lettre du logothète (vizir) de l’empereur au vizir ‘Ali Ibn ‘Issa, dans laquelle il demandait une trêve.

 

Les qarmates menace Baghdad

 

Il y eut aussi cette année, une rumeur concernant l’envoi d’une expédition de Fariqi de Basra ainsi qu’une nombreuse armée qarmate, marchait en direction de Koufa et qu’elle avait déjà traversé la porte de Basra près du désert. Par conséquence, al-Mouqtadir écrivit à Mou’nis al-Mouzaffar, lui ordonnant de se rendre à Baghdad. Il quitta donc Tikrīt et arriva à Baghdad après la prière de l’après-midi, après avoir envoyé un détachement de son armée à la frontière.

Abou Tahir quitta Hajar le mercredi 13 Ramadan et établit son camp à al-Hass à deux jours de voyage d’al-Ahsa, où il resta jusqu’à samedi matin avant de se mettre en route. Le Sultan écrivit à Ibn Abi as-Saj pour l’informer des mouvements d’Abou Tahir et lui ordonner de se dépêcher vers Koufa.

‘Ali Ibn Issa écrivit aux autorités à Koufa, leur demandant de fournir des réserves et du fourrage pour Youssouf. Ce dernier quitta Wassit au début du mois de Ramadan en direction de Koufa. Salamah Toulouni, qui lui avait apporté de l’argent, le quitta et retourna chez lui.

Quand Abou Tahir le qarmate s’approcha de Koufa, il libéra tous les pèlerins captifs qu’il avait avec lui, pendant que les autorités du Sultan fuirent de Koufa, de manière qu’Abou Tahir saisit toute la nourriture et le fourrage apprêté pour Youssouf, d’un montant de cent Kour de nourriture et de mille Kour d’orge, après que ses propres réserves furent vraiment basses après avoir connu des difficultés lui et ses partisans. Ces acquisitions leur redonnèrent de la force et Youssouf qui arriva dans la banlieue de Koufa, le vendredi 8 du mois de Shawwal, constata qu’Abou Tahir s’y était trouvé un jour plus tôt et l’intercepta.

Il a été rapporté qu’Abou Tahir déclara que son armée s’était approchée de celle de Youssouf sur la route entre Wassit et Koufa, mais qu’à cause du brouillard, aucune armée n’avait pu voir l’autre.

Il fut donc conscient de la proximité de l’ennemi et souhaita qu’il l’ait (l’ennemi) attaqué. Youssouf envoya une lettre à Abou Tahir pour l’inviter à lui porter allégeance (à Youssouf) mais il refusa. Alors, il lui demanda de se préparer à combattre le dimanche. Le messager raconta que lorsqu’il arriva dans le camp d’Abou Tahir, il fut emmené dans un endroit où il y avait un certain nombre de personnes qui étaient habillées de la même manière et où il fut invité à lire son message, puisque le « Sayyid » écoutait et il ne sut pas lequel d’entre eux il était. Il livra son message et reçut la réponse que le « Sayyid » refusait la proposition et de retarder la bataille qui débuta donc le samedi 9 du mois de Shawwal, à la porte de Koufa. On a rapporté que quand Ibn Abi as-Saj vit l’armée d’Abou Tahir et compta son nombre, il la méprisa complètement et dit : « Qui sont ces chiens ? Dans une heure, ils seront entre mes mains » et ainsi méprisant, il ordonna que le communiqué de la victoire soit écrit avant même l’engagement.

Les deux armées avancèrent vers l’autre. Quand les qarmates entendirent le son des trompettes et des tambours avec les cris de l’armée d’Ibn Abi as-Saj, l’un d’entre eux se tournant vers son compagnon demanda : « Quel est ce bruit ? » Il répondit « Peur ? » Et l’autre  de répondre : « Aye » sans dire un mot de plus. Il était dans l’habitude d’Abou Tahir de n’avoir ni trompette, ni tambours ou ni cris dans son armée. Ibn Abi as-Saj déploya ses forces, tout en restant à distance avec son élite, selon une de ses coutumes dans la bataille. L’engagement commença après le lever du soleil du samedi et dura jusqu’au coucher du soleil.

Ibn Abi as-Saj n’afficha aucun manque de détermination, en harcelant les troupes d’Abou Tahir avec des flèches qui blessèrent beaucoup d’entre eux. Quand Abou Tahir, qui se tenait dans un char avec environ deux cents cavaliers fiables près des murs d’al-Hayz vit cela, il descendit de son char, monta un cheval et chargea avec ses hommes. Youssouf fit de même et une bataille féroce s’ensuivit entre les deux partis et vers la fin du jour Ibn Abi as-Saj fut capturé avec une blessure dans son front. Ses hommes lui avaient conseillé de se retirer, mais il refusa et ainsi avec un certain nombre de son élite, tomba entre les mains d’Abou Tahir après qu’un grand nombre de ses hommes furent tués et que le reste s’enfuit. Youssouf fut amené dans le camp d’Abou Tahir; une tente fut montée pour lui dans laquelle il fut jeté et qui fut gardé. Ils allèrent chercher un médecin du nom d’Ibn as-Soubay, qui rapporta : Quand, il l’ordonna, j’entrais dans la tente où le prisonnier était gardé que je trouvais assis vêtu d’un gilet de satin de couleur argent, excepté le col et la poitrine qui était de satin rouge, taché par le sang qui coulait de la blessure de son front. En constatant que le sang sur son visage était coagulé, j’ai demandé de l’eau chaude, mais un des partisans d’Abou Tahir me dit qu’il n’avait aucun instrument pour chauffer de l’eau car ils avaient laissé leurs bagages près d’al-Qadissiyah et que cela n’était pas exigé pour la bataille. Je lavais donc son visage et sa blessure avec de l’eau froide et traitait ce dernier. Il me demanda mon nom et pourquoi on m’avait appelé et quand je lui dis, je constatais qu’il connaissait ma famille quand il était à Koufa avec son frère Afshin, qui était le gouverneur. Je fus surpris par sa mémoire, sa précision et son indifférence envers sa condition.

Le rapport de la bataille et la capture d’Ibn Abi as-Saj atteignit ‘Ali Ibn ‘Issa, qui se hâta au Palais avec Nasr le Chambellan et Mou’nis al-Mouzaffar pour transmettre les nouvelles au calife. La nouvelle se répandit rapidement, et les gens devinrent terriblement effrayés d’Abou Tahir. La population entière considéra d’émigrer à Wassit et ensuite à Ahwaz.

Mou’nis monta son camp sur la plate-forme de parade d’Oushnah, avec l’intention de marcher à Koufa quand arriva une nouvelle du gouverneur de Qasr Ibn Houbayrah pour ‘Ali Ibn ‘Issa, l’informant qu’Abou Tahir et ses partisans avaient quitté Koufa le mardi 12 du mois de Shawwal, en direction de ‘Ayn Tamr. ‘Ali Ibn ‘Issa s’empressa de louer cinq-cents bateaux où il embarqua mille hommes et un certain nombre de péniches qui fit traverser du Tigre à l’Euphrate, où il embarqua une compagnie de Houjari[5], qui devaient empêcher les qarmates de traverser le dernier fleuve. Il ordonna aussi à un certain nombre de commandants d’aller à Anbar pour garder la ville.

Le vendredi, les gens d’Anbar et des commandants virent la cavalerie d’Abou Tahir avancer du côté de la rive ouest et ils s’empressèrent de démonter le pont d’Anbar. Abou Tahir attendit jusqu’à ce qu’il soit capable de traverser en bateaux et le mardi suivant cent de ses hommes traversèrent cette voie sans être aperçu par les hommes du Sultan, jusqu’à ce qu’ils arrivent à Anbar.

Un engagement commença alors entre eux et certains des commandants. Quand l’endroit fut nettoyé des troupes du Sultan, Abou Tahir remonta le pont d’Anbar et traversa, laissant ses bagages sur la rive ouest ainsi qu’Ibn Abi as-Saj. Quand les troupes impériales sur les navires apprirent qu’Abou Tahir avait restitué le pont, ils allèrent de nuit et l’incendièrent.

Ainsi Abou Tahir avec un groupe de ses partisans resta sur la rive est de l’Euphrate, pendant que ses bagages étaient sur la rive ouest tandis que les navires et les péniches étaient entre eux. Quand les nouvelles de la traversée d’Abou Tahir à Anbar et la tuerie des commandants parvinrent dans la capitale, Nasr le Chambellan partit avec les troupes Koujari, l’infanterie Massaffi et tous les commandants quittèrent Baghdad, précédé par l’enseigne impérial, qui ressemblait à tous les autres drapeaux hormis qu’elle était de couleur noire sur lequel était écrit en blanc « Muhammad Messager d’Allah ».

Mou’nis qui était déjà arrivé à la porte d’Anbar unifia ses forces à celles de Nasr. La cavalerie, l’infanterie et les gradés parmi eux s’élevait à plus de 40.000 hommes. Abou al-Hayjah et ses frères Abou-Walid, Abou al-’Ala et Abou as-Saraya sortirent avec leurs hommes et des Arabes. Nasr arriva avant Mou’nis au pont du canal appelé Zoubarah dans la région de ‘Aqr Qoub à environ 8 kilomètres de Baghdad ou Mou’nis le retrouva et ou leurs forces s’unirent sur le canal. Abou al-Hayjah conseilla à Nasr le Chambellan de détruire le pont sur le Zoubarah et insista particulièrement sur cela. Quand il vit que Nasr ne se hâtait pas d’adopter sa suggestion, il dit : « Oustad, fait le et coupe ma barbe en même temps ». Nasr fit alors détruire le pont.

Abou Tahir avec ses partisans qui étaient avec lui sur la rive est de l’Euphrate procéda en direction de Zoubarah quand il fut éloigné de l’armée impériale d’une distance de 4 kilomètres à la fin du lundi 10 du mois de Dzoul Qi’dah, il passa la nuit où il était et marcha au début du jour suivant en direction du pont de Zoubarah. Un fantassin noir avança devant l’armée et devint une cible pour les archers impériaux si bien qu’il ne tarda pas à ressembler à un porc-épic criblé de flèches. Il continua son avance non découragé, monta le pont et ne revint que lorsqu’il s’aperçut qu’il avait été coupé. Les partisans d’Abou Tahir essayèrent plusieurs fois de passer l’eau à gué du canal, mais, quand ils constatèrent qu’ils ne pouvaient passer nulle part à gué, ils se retirèrent sans tourner leur dos. Quand ils atteignirent Hassaniyah, ils la trouvèrent encerclée par l’eau, Nasr et Mou’nis ayant précédemment envoyé des hommes pour percer les digues pour que l’eau du Makhr entoure l’armée d’Abou Tahir. Il resta là le mardi et rattrapa ensuite ses partisans à Anbar aucune des forces impériales ne s’est hasardée à le suivre, à réparer le pont sur le Zoubarah ou à le traverser. Le conseil d’Abou al-Hayjah de détruire le pont s’avéra avoir été une inspiration divine; car s’il était resté en état, les qarmates l’aurait traversé sans être inquiétés par les nombres des forces impériales. Ces forces auraient été mises en déroute et les qarmates auraient pris Baghdad. Car effectivement la plupart des troupes impériales fuirent dans le désordre à Baghdad quand ils entendirent dire qu’Abou Tahir avait atteint le canal, avant qu’ils aient aperçu l’ennemi, si terrible était l’alarme qui remplit leur poitrine après la catastrophe qui était arrivée à Ibn Abi as-Saj. Personne parmi eux après sa capture, ne s’imagina qu’il serait capable de se tenir tête à Abou Tahir.

Abou Tahir avait avec lui un certain nombre de guides, qui le sortirent du Makhr et l’emmenèrent vers Anbar. Quand lui et ses partisans abandonnèrent leur campement près du Zoubarah, les forces impériales élevèrent de grands cris et des acclamations. Les cavaliers de l’expédition s’empressèrent d’apporter ‘à Ali Ibn ‘Issa les nouvelles qu’ils étaient en sécurité et qu’Abou Tahir était parti et se retirait à Anbar, qu’il n’y avait aucune route, gué, ou appareil par lequel il pourrait atteindre son camp, ou s’approcher de Baghdad. Mou’nis était inquiet de capturer ses bagages avec le reste de ses forces sur la rive ouest d’Anbar et ainsi sauver Ibn Abi as-Saj. Il expédia donc son chambellan Yalbaq, un certain nombre de commandants et des hommes d’Ibn Abi as-Saj avec six-mille hommes, croyant qu’Abou Tahir serait incapable de traverser l’Euphrate et rejoindre sa cavalerie et ses bagages. Abou Tahir, informé de cela, conçut un plan, se sépara de ses troupes et après avoir marché une longue distance atteignit la région abandonnée contiguë sur l’Euphrate ou il traversa dans le bateau d’un pêcheur à qui selon ce qui a été rapporté, il paya mille dinars et revint à ses bagages. Ayant rejoint ses partisans, il combattit Yalbaq, qui fit peu de résistance et s’enfuit en perdant un grand nombre d’hommes. Abou Tahir remarqua qu’Ibn Abi as-Saj était à l’extérieur de la tente dans laquelle il avait été confiné et regardait vers la route pour voir la bataille. Abou Tahir pensa que son prisonnier essayait de s’échapper.

Il le fit donc ramener en sa présence et lui dit : « Tu as voulu t’enfuir, n’est-ce pas ? D’autres ont rapporté que les hommes d’Ibn Abi as-Saj l’avaient appelé et le qarmate dit : « Tu voulais être sauvés par tes hommes, n’est-ce pas ? » Alors, il ordonné de trancher la gorge du prisonnier devant lui et celles de tous les autres captifs en plus.

Après cela, Abou Tahir conçut un plan qui lui permis de réunir toutes les troupes qui avaient été avec lui sur la rive est de l’Euphrate à Anbar et de traverser le fleuve du côté ouest qui est contigu avec le désert.

Yalbaq retourna à Mou’nis al-Mouzaffar par une route chaotique.

Abou al-Qassim Ibn Zanji déclara que le nombre des disciples d’Abou Tahir était mille-cinq-cents, sept-cents cavaliers et huit-cents fantassins. Il obtint cette information d’un homme d’Anbar, qui agit comme un espion pour lui et ses troupes. D’autres ont rapporté que leur nombre était mille-sept-cents. Il ajouta : « J’entendis un des déserteurs d’Abou Tahir, quand questionné pourquoi les forces impériales s’étaient enfuit aussi rapidement, alors que les forces d’Abou Tahir avaient été si ferme ? », il répondit : « La raison consiste en ce que les forces impériales supposent que la sécurité se trouvaient dans la fuite, à laquelle ils donnent donc la préférence, alors que nous supposons que c’est dans la ténacité, d’où nous tenons ferme et ne bougeons pas ».

‘Ali Ibn ‘Issa organisa entre Zoubarah et Baghdad une série de postes, avec cent pigeons et un homme pour chaque pigeon qui devait envoyer chaque heure les nouvelles des mouvements de l’ennemi par ces oiseaux. Ainsi Baghdad resta en sécurité le jour où les qarmates avancèrent vers Zoubarah en dépit du grand nombre de bandits de grand chemin et d’hommes masqués comme des soldats, tous inquiets de piller la ville, du fait des instructions données par ‘Ali Ibn ‘Issa à Nazouk de patrouiller avec sa force entière, matin et soir, des deux côtés du fleuve. De plus, le jour où Abou Tahir avança vers Zoubarah, le vizir ordonna à Nazouk de prendre sa force entière tôt le matin à la Porte Harb et d’y rester jusqu’au soir et de patrouiller continuellement les deux côtés de la rive et de faire savoir que n’importe quel bandit de grand chemin ou personne masqué comme un soldat qui serait découvert et que quiconque serait trouvé en possession d’une arme sera immédiatement décapité. Ainsi les bandits de grand chemin restèrent dans leurs antres et les commerçants de la Porte Mouhawwal, du Canal Tabiq, de Qalla’in et d’autres quartiers fermèrent leurs magasins, transférèrent leurs marchandises dans leurs résidences et montèrent la garde. Les principaux habitants recueillirent des bateaux qu’ils lancèrent sur les canaux qui communiquaient avec le Tigre et embarquèrent leurs marchandises. Certains les prirent en aval à Wassit.

Ceux qui étaient préparés aux urgences transférèrent leurs marchandises à Houlwan, et espéraient voyager avec les pèlerins vers le Khorasan. Personne ne doutait que les qarmates prendraient Baghdad. Nazouk conformément aux ordres de ‘Ali Ibn ‘Issa resta à cheval du début du matin jusqu’à ce que la première partie de la nuit soit passée et ni lui ni ses hommes ne sont descendus sauf pour exécuter leurs dévotions. Les tentes furent montées ensuite pour eux. Ces mesures protégèrent la ville.

Le qarmate fit de Hit son prochain objectif. Haroun Ibn Gharib et Sa’id Ibn Hamdan se dépêchèrent pour défendre la ville et arriver avant lui. Ils montèrent en haut des murs de garde remontant ainsi le moral des habitants et quand les qarmates arrivèrent, ils les bombardèrent de leur position. Un grand nombre de qarmates furent tués et Abou Tahir leva le siège. Quand ces nouvelles atteignirent Baghdad, ce fut un soulagement général et quand le calife al-Mouqtadir et la reine mère furent informés de son départ (Abou Tahir) ils donnèrent cent-mille dirhems en charité. Mou’nis et Nasr dressèrent la liste des troupes qui se trouvaient sur le flanc de Baghdad à Zoubarah, sans prendre en compte les Arabes et toutes les personnes à charges et constatèrent qu’ils étaient au nombre de 42.000.

Quand ‘Ali Ibn ‘Issa fut informé de la capture d’Ibn Abi as-Saj, il alla trouver immédiatement Mouqtadir et lui dit : « Les califes précédents amassèrent de l’argent pour le seul but de supprimer les ennemis de notre religion, comme les khawarijes et protéger l’Islam et les Musulmans. Depuis le décès du Prophète Béni (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui), il n’est pas arrivé aux Musulmans de désastre plus sérieux que celui-ci. Cet homme (Abou Tahir) est un mécréant, qui attaqua les pèlerins durant l’année 311 (923), d’une manière sans précédent. Sa terreur a pris possession des cœurs de tous tes servants. Al-Mou’tadid et al-Mouktafi ont amassé des trésors dans leur trésorerie privée pour les urgences de ce style. Et il ne reste à présent pas grand-chose dans la trésorerie privée. Craint Allah Exalté, ô commandant des croyants, parle à la reine mère, qui est une femme dévote et excellente et si elle a un trésor qu’elle a amassé pour n’importe quelle nécessité alors c’est le moment pour le sortir. Et si l’autre chose survient, part avec ta compagnie vers les régions les plus lointaines du Khorasan. Je t’ai donné un conseil véridique ». Le calife rendit visite à sa mère et après consultation avec elle, il ordonna le transfert d’un demi-million de dinars lui appartenant à la Trésorerie Publique, pour être dépensé sur les troupes. Il demanda alors à ‘Ali Ibn ‘Issa combien restait dans la trésorerie privée et il lui répondit qu’il y avait un demi-million. Le vizir se mit au travail pour économiser et ordonna que pas un seul dirham de cet argent ne doit être gaspillé sur les commissions et il collecta aussi de l’argent dû des provinces, en envoyant des personnes pour demander aux fonctionnaires locaux de payer.

 

Un certain commerçant avertit ‘Ali Ibn ‘Issa qu’il avait établi qu’un homme du Chiraz agissait comme un espion pour les qarmates et qu’il correspondait avec lui. Le vizir envoya un groupe pour l’arrêter et le ramener au palais. Questionné par ‘Ali Ibn ‘Issa en présence du  Qadi Abou ‘Omar et des commandants, cette personne dit : « Je suis un partisan d’Abou Tahir et je le suis par ce qu’il est dans le droit, alors que vous, ton maître et vos partisans sont des menteurs mécréants. Dans le monde de Dieu il doit toujours y avoir Son représentant et un juste souverain désigné par Lui ; notre souverain est le Mahdi fils de…, fils de…, fils de…, fils de…[6], Ibn Isma’il Ibn Ja’far et nous ne ressemblons pas aux rafidi fous, qui font porter allégeance des hommes pour un souverain qui est absent et attendu ». ‘Ali Ibn ‘Issa lui dit : « Donne-moi une liste des gens de Baghdad et de Koufa qui correspondent avec les qarmates ». « Et pourquoi », répliqua-t-il, « devrais-je vous donner une liste de vrais croyants pour être livré entre les mains d’infidèles, qui les exécuteront ? Jamais! » Le vizir ordonna que l’homme soit attaché en sa présence, puis fouetté et ensuite entravé et chargé avec un lourd collier en fer et enchaîné. Puis il fut alors livré à Nazouk et emprisonné. Il mourut huit jours après, ayant refusé de manger ou boire.

 

Cette même année, l’armée se mutina ce qui était devenu maintenant une coutume.

 

 

En l’an 316 de l’Hégire (928), Abou Tahir le qarmate après être retourné dans sa capitale Hajar, construisit une maison qu’il appela « la maison de l’émigration » (dar al-hijrah). Puis, il s’appliqua à ramener vers ses croyance perverses et diaboliques ‘Oubaydillah al-Mahdi, l’ignoble chef des ismaéliens battiniyah qui habitait dans la ville d’al-Mahdiyah en Tunisie et qui fut le premier « calife » ‘oubaydi comme nous l’avons déjà mentionné. Face à tous ces différents troubles contre l’état abbasside, leurs partisans devinrent plus nombreux et particulièrement ceux en lesquels se trouvait une maladie dans le cœur et ceux qui étaient à la recherche des biens de ce monde. Ces gens étaient enchantés de suivre la « religion » du diable, une « religion » qui permet tout et n’interdit rien. Ils envoyèrent des bandes dans chaque direction et augmentèrent leurs viles et infâmes exactions. Ils conquirent de nouvelles villes et attaquèrent les Musulmans et à cause d’eux les calamités se multiplièrent et la frayeur gélifia le cœur des Musulmans de la région. Le califat fut durement éprouvé par eux et les troupes d’al-Mouqtadir furent mises en déroute à plusieurs occasions.

 

Cette année, le pèlerinage à La Mecque fut interrompu par la peur des qarmates et les Mecquois quittèrent la ville.

 

Toujours cette année, les Byzantins marchèrent contre Khalat[7] ou ils détruisirent la chaire de la principale mosquée et mirent une croix à la place.

 

Cette même année, des nouvelles arrivèrent qu’Abou Tahir était entré dans Daliyyah, en Cisjordanie entre Rahbah, sur la Route de l’Euphrate et n’ayant rien trouvé, il tua un certain nombre d’habitants. Puis, il procéda, il procéda à Rahbah, dans laquelle il entra après que les habitants aient résistés, et qu’il massacra tous. Mou’nis al-Mouzaffar fut invité à aller combattre et affronta les qarmates, à Raqqah. Les habitants de Qarqissiyah avaient envoyé une délégation au qarmate pour solliciter sa protection qui leur fit de larges promesses. Abou Tahir envoya ensuite un héraut pour proclamer que personne ne devait se montrer ce jour et personne ne se hasarda à le faire. Abou Tahir envoya un groupe qui traversa le fleuve sur un pont érigé par lui à Rahbah et massacra un très grand nombre d’Arabes, dont il saisit les chameaux et les moutons. Les Arabes conçurent une très grande peur de lui et il leur imposa le tribut à raison d’un dinar par an qu’ils paient encore à ce jour (c’est-à-dire à l’époque où les faits étaient rapportés par l’historien). Il procéda alors au nord vers Raqqah. Mou’nis marcha vers Mossoul, puis vers Raqqah, empruntant la route qu’Abou Tahir avait pris pour Rahbah.

Abou Tahir, embarqua dans des bateaux, descendit une partie du fleuve, avant de débarquer dans le but de revisiter Hit dont les habitants avaient érigé sur leur mur des machines de toutes les tailles pour lancer des projectiles. Ils s’opposèrent à lui, tuèrent un certain nombre de ses hommes et il partit en direction de Koufa. Son mouvement fut transmis et Bounayy Ibn Nafis et Haroun Ibn Gharib furent expédiés dans le fourgon de Nasr.

La cavalerie qarmate commandée par Ibn Sanbar marcha sur Qasr Ibn Houbayrah, où ils traversèrent l’Euphrate par un gué et tuèrent un certain nombre des habitants de Qasr. Nasr le chambellan marcha avec les commandants et l’infanterie Massaffi avec l’intention d’engager Abou Tahir tandis que Nasr avait une attaque de fièvre aiguë qui ne l’a pas empêché de procéder à Soura. Abou Tahir atteignit la rive du fleuve à Soura au coucher du soleil. Nasr était si malade qu’il fut incapable de monter son cheval et il nomma donc Ahmad Ibn Kayghalagh pour prendre son poste, à la tête de l’armée. Cependant, le qarmate partit avant que ce commandant ne puisse l’engager. La maladie de Nasr s’aggrava, sa langue s’assécha, la fièvre augmenta et il fut renvoyé chez lui à Baghdad dans un chariot mais il mourut sur la route. Shafi’ Mouqtadiri fut envoyé à l’armée avec un ordre du calife ordonnant à Haroun Ibn Gharib de prendre le commandement à la place de Nasr et le nouveau commandant ramena l’armée à Baghdad.



[1] Le Kour correspond communément à soixante charges d’âne. Si les montures étaient des ânes ou des mulets, le Kour s’élèverait donc à environ quinze charges.

[2] Qur’an  20 : 59.

[3] Le Soufyani émergera avant le Mahdi de Damas Il sera l’un des nombreux tyrans musulmans à qui le Mahdi devra faire face. Le Soufyani nest pas le Dajjal qui viendra avant l’arrivée de ‘Issa Ibn Mariam (paix sur eux). Les Ahadith concernant le Soufyani précisent quil est un tyran qui étendra la corruption et le mal sur la terre avant le Mahdi. Il sera un tel tyran quil tuera les enfants et éventrera les femmes. Le Soufyani assassinera les descendants de la maison du Prophète (Saluts et Bénédictions d’Allah sur lui) et régnera sur la Syrie. Quand il entendra parler du Mahdi, il enverra une armée pour le combattre et le tuer. Cependant la terre engloutira cette armée avant qu’elle n’atteigne le Mahdi. Abou Hourayrah (qu’Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le Prophète (saluts et bénédictions d’Allah sur lui) a dit : « Un homme émergera des profondeurs de Damas. On lappellera as-Soufyani. La plupart dentre ceux qui le suivent seront de la tribu de Kalb. Il tuera en déchirant les estomacs des femmes et tuera même les enfants. Un homme de ma famille apparaîtra dans le Haram, les nouvelles de sa venue atteindront le Soufyani et il lui enverra une de ses armées. Il (le Mahdi) les vaincra. Le reste de l’armée du Soufyani partira jusquà ce qu’ils arriveront dans un désert et alors la terre les engloutira. Personne ne sera sauvé sauf celui qui informa les autres deux. (Al-Moustadrak - Al-Hakim)

[4] La coudée est une unité de longueur allant du coude jusqu'à l’extrémité de la main. Elle correspond à 45 cm environ.

[5] Une classe de servants achetés à l’origine par le calife al-Mou’tadid et instruit de rester dans le palais.

 

[6] Ainsi mentionné dans le texte.

[7] En Arménie.