L’avis juridique contre ceux qui se rebellent contre l’état

Puisque les Ottomans jugeaient par ce qu’Allah Exalté avait révélé et que le Hijaz avait porté allégeance au sultan, les Sa’oud avaient-ils un prétexte pour se rebeller contre l’autorité ottomane ou locale excepté ceux qui furent donnés comme l’adoration des tombeaux et la consommation du tabac d’autant plus que ce mal ne s’étendait pas simplement au Hijaz mais dans l’ensemble du monde islamique. Si les Sa’oud ne sont rebellés contre les Ottomans pour ces raisons, il serait logique que le peuple saoudien actuel se rebellent contre la famille régnante, puisqu’ils ne jugent plus ou si peu parce qu’Allah Exalté a révélé, que les idoles et les tombeaux sont toujours adorés, le tabac vendu publiquement, l’usure officiellement instituée dans les banques etc., la liste est longue.

Quel est donc l’avis juridique islamique contre ceux qui se rebellent contre l’état.

La sédition est le principal crime portant atteinte à la sécurité intérieure de l’état et la tentative de renverser par la force le gouvernement par différents moyens

« Les séditieux sont des croyants qui se révoltent contre l’autorité de l’Imam et visent à le renverser pour une (ou des) raison valable à leurs yeux. Pour les arrêter s’ils sont assez puissants, il faut les combattre car le mal s’étendrait rapidement sur l’ensemble du territoire. »
Abou ‘Ali dans al-Ahkam as-Soultaniyah a dit : « Ce sont ceux qui se rebellent contre l’Imam et se séparent de la communauté et ont créé des différences doctrinales élaborées, bien qu’ils manifestent ouvertement l’obéissance à l’Imam ; s‘ils ne choisissent pas un lieu de réunion et s’ils agissent séparément, pouvant ainsi être appréhendés ; ils seront laissés à leur sort et passibles des lois citées dans le Qur’an. Nihayat al-Mouhtaj 114/VIII.

Selon les Shafi’i, la sédition n’est pas une appellation péjorative car ils se sont différenciés pour une raison qu’ils croient bonne mais qui est erronée. Ils ont altéré l’Ijtihad. Les juristes les ont blâmés quand ils ont abordé leur rébellion et la licence des mœurs, rejetant ainsi la qualité de l’Ijtihad ou de l’interprétation, ou considérant leur interprétation comme nulle et non avenue. »
Il convient de réunir l’armée et on doit aider cette dernière à les capturer.

Si un homme se révolte contre l’Imam, réussit à le vaincre et soumet le pays par l’épée de telle sorte qu’il soit reconnu et obéi, il sera désormais interdit de lui faire la guerre ou de se révolter contre son autorité.
On rapporte que ‘Abd al-Malik Ibn Marwan se révolta contre Ibn az-Zoubayr (qu’Allah soit satisfait d’eux), le tua et s’empara du pouvoir, devenant ainsi Imam, et désormais toute rébellion contre lui fut interdite. Se rebeller serait provoquer une scission parmi les Musulmans et les exposer à verser leur sang et à détruire leurs biens ((Al-Moughni ; 49/X. Ibn Arabi : Ahkam al-Qur’an, 224/II. Al-Qarafi ad-Dhakhira 71/VIII. Ad-Dhila’i : 293/III.)

On relève dans ash-Sharh al-Qabir d’al-Dardiri, ce qui suit :
« Les citoyens doivent prêter main forte à l’Imam juste contre les séditieux et ne doivent point secourir l’Imam injuste. »
Malik dit : « Abandonne-le à ce qui doit lui arriver. Allah se venge de l’injuste par un autre injuste puis tire vengeance des deux. De même, il n’est point licite de mener la lutte contre eux, car leur rébellion pourrait revêtir un caractère injurieux. »

On relève dans la marge d’al-Banani sur l’explication d’ad-Dhourqani dans al-Moukhtassar de Khalil :
« Si l’Imam ou son représentant impose aux gens des taxes injustes, et que ces derniers refusent de les payer ; si cet Imam s’apprête à leur déclarer la guerre, ont-ils le droit de défendre leur vie ? » Conformément à la définition d’Ibn Arafa, ce sont des séditieux, car cet Imam ne leur a point intimé l’ordre d’accomplir une chose défendue et il lui est interdit de les combattre, car c’est injuste. Selon Al-Moussanaf ce ne sont pas des séditieux car ils ne s’opposent pas à un droit et n’ont point tenté de renverser un pouvoir. Cette opinion est équitable. (Ad-Dhourqani : Sharh ad-Dhourqani en marge d’al-Moukhtassar de Khalil. 60/VIII.)

On relève dans Sharh Ad-Dhourqani, ce qui suit : « Aboul Hassan, notre vénérable cadi, approuve l’avis de Sahnoun, à savoir qu’il faut combattre les séditieux si l’Imam est juste, et de combattre contre ceux qui se sont soulevés contre lui s’il est injuste. Quiconque se rebelle contre lui est juste et c’est un devoir d’embrasser sa cause pour affirmer la religion d’Allah. Et si, en faisant cause commune avec lui cela nécessite le sacrifice de sa vie ou de ses biens, il faut le faire. Mais il n’est point licite de faire ce sacrifice pour un homme injuste.
Ibn Arafa conclut, après avoir cité ce texte et d’autres : Il apparaît de tout ce qui précède qu’il est strictement défendu d’aider l’injustice.

 



Le deuxième règne Sa’oud-Wahhab

Le règne de Faysal fut de nouveau interrompu en 1837 lorsqu’il refusa de porter allégeance aux forces (ottomanes) égyptiennes du Hijaz qui envoyèrent une expédition à Riyad ou Faysal fut tué.
Les Egyptiens nommèrent un membre d’as-Sa’oud du nom de Khalid pour régner dans le Najd du sud et la situation se maintint jusqu’à ce qu’un membre d’une branche secondaire d’as-Sa’oud, ‘Abdallah Ibn Thounayan se révolta contre Khalid, qui s’enfuit de Riyad pour Jeddah. ‘Abdallah Ibn Thounayan régna sur Riyad jusqu’à ce que Faysal s’échappa de sa captivité au Caire et revint à Riyad en 1843 avant de tuer ‘Abdallah et de commencer son deuxième règne qui dura jusqu’à sa mort en 1865.

Après la mort de Faysal, son fils ‘Abdallah (1865-71) devint le souverain de Riyad mais ses demi-frères, Muhammad et ‘Abd ar-Rahman rivalisèrent avec lui pour le leadership, qui s’avéra être préjudiciable pour les Sa’oud. Quand ‘Abdallah, le fils l’aîné, devint émir, son demi-frère Sa’oud, exclus du pouvoir, commença une campagne militaire pour saper son autorité. Sa’oud mena une série de contacts avec les souverains de ‘Asir et ‘Arid dans l’espoir de gagner leur loyauté contre son frère. Il négocia aussi une alliance avec Mourra, ‘Ajman et les confédérations de Dawasir qui essayaient de maintenir leur autonomie en s’alliant eux-mêmes avec le frère rival de ‘Abdallah.
La lutte intérieure entre les frères Sa’oud fut alimentée par le désir des différentes confédérations de se libérer de la domination des Sa’oud. Entre 1870 et 1875 les frères Sa’oud incapables de parvenir à un accord continuèrent à se défier.

Sa’oud mourut en 1875, laissant ses frères ‘Abdallah et ‘Abd ar-Rahman dans une féroce concurrence pour le leadership. Immédiatement après la mort de Sa’oud, ‘Abd ar-Rahman devint le souverain de Riyad tandis que son frère ‘Abdallah et ses neveux (les fils de Sa’oud) continuèrent à défier son autorité.

En 1887, ‘Abdallah fit appel au souverain de Ha’il, Muhammad Ibn Rashid, pour l’aider contre ses neveux et ce dernier saisit l’occasion pour marcher sur Riyad. Les fils de Sa’oud s’enfuirent à Kharj laissant leur oncle ‘Abdallah emprisonné que l’émir de Ha’il libéra mais qu’il prit comme otage dans sa capitale, laissant Salim as-Sibhan, un de ses commandants les plus fidèles, nouveau gouverneur de Riyad.

Le nouveau gouverneur Rashidi de Riyad poursuivit les neveux de ‘Abdallah et élimina la plupart d’entre eux dans Kharj. Il fut permis à ‘Abdallah et son frère ‘Abd ar-Rahman de revenir à Riyad puisque ‘Abdallah était aussi malade que vieux. ‘Abdallah mourut en 1889 et ‘Abd ar-Rahman gouverna comme un vassal d’Ibn Rashid sous le gouvernement général de Salim as-Sibhan.

Dans une tentative de restituer l’hégémonie de sa famille dans le sud du Najd, ‘Abd ar-Rahman coopéra avec les gens de Qasim et les sections de la confédération tribale de Mou’ayr, qui en voulait tous les deux au pouvoir montant des Rashidi et une alliance avec les Sa’oud contre les Rashidi fut formée.
Muhammad Ibn Rashid rassembla toutes ses forces, de Shammar, Mountafiq et les confédérations de Harb puis marcha sur Qasim. Les Rashidi et Qasimi se rencontrèrent à Moulaydah en 1891 et Muhammad Ibn Rashid fut victorieux. Avec la défaite de ses alliés Qasimi, ‘Abd ar-Rahman s’enfuit de Riyad après une tentative infructueuse de retrouver son pouvoir et trouva refuge d’abord parmi la tribu de Mourra du Roub’ al-Khali (désert) avant de s’installer plus tard au Koweït en 1893 sous le patronage d’as-Sabah avec un revenu du gouvernement ottoman et sa capitale Riyad fut gouvernée par ‘Ajlan, le représentant d’Ibn Rashid.
Ce fut l’exil d’as-Sa’oud au Koweït qui permis à une amitié de se développer avec as-Sabah, le souverain de ce port. Cette amitié s’avéra cruciale pour le retour d’as-Sa’oud à Riyad au vingtième siècle.

La désintégration du premier règne de Sa’oud fut partiellement due en raison de l’intervention égyptienne agissant pour le compte de l’empire ottoman tandis que le deuxième règne s’effondra pour deux raisons.
- Le fragile leadership de Sa’oud, de la deuxième moitié du dix-neuvième siècle fut un peu plus affaibli par le conflit intérieur entre les membres de la famille Sa’oud.
- Le pouvoir ascendant d’un émir d’Arabie central rival au nord de la base de Sa’oud réussit à saper l’hégémonie de Sa’oud pendant la période cruciale où les Sa’oud s’entretuaient pour le pouvoir.
Avec la fuite de ‘Abd ar-Rahman, la capitale des Sa’oud, Riyad, tomba sous l’autorité des Rashidi et les membres restants d’as-Sa’oud furent pris comme otages à Ha’il, la capitale des Rashidi.

Riyad resta sous l’autorité des émirs de Ha’il jusqu’en 1902 quand ‘Abd al-‘Aziz, plus connu sous le nom d’Ibn Sa’oud, le fils de ‘Abd ar-Rahman, revint de son exil du Koweït, tua le gouverneur Rashidi et se déclara émir de Riyad. Le troisième et final règne des Sa’oud commença à prendre la forme au début du vingtième siècle.

 



Les Rashidi de Ha’il (1836-1921)

Le deuxième fragile règne des Sa’oud (1824-91) coexista avec un nouveau pouvoir régional au nord de Riyad. L’émir Rashidi de Ha’il se hissa au premier rang durant la deuxième moitié du dix-neuvième siècle quand l’hégémonie des Sa’oud déclina dans l’Arabie centrale.
Les Rashidi tirèrent leur pouvoir et légitimité de Shammar, une des grandes confédérations tribales d’Arabie basée dans l’oasis de Ha’il, dans le Najd du Nord. Les Rashidi étaient de la noble tribu de Shammar et régnaient sur la population mixte de Ha’il, dont les membres de Shammar, des Banou Tamim des fermiers sédentaires et des marchands ainsi que des artisans et esclaves n’ayant pas de tribus.
Depuis le milieu du dix-neuvième siècle, Ha’il exerça les fonctions d’une base d’où les Rashidi se développèrent vers le nord de l’Arabie et le sud du Najd. Si les émirs Sa’oud se développèrent sous la bannière religieuse, les Rashidi étendirent leur influence sur d’autres oasis et confédérations tribales avec le soutien de leur propre tribu.
Les conquêtes de l’émir Rashidi furent en fait un mécanisme pour étendre l’hégémonie de Shammar sur d’autres et quand cette expansion se dynamisa vers le milieu du dix-neuvième siècle, les membres de Shammar fournirent la force militaire. Les sections tribales de Shammar furent la colonne vertébrale de la force qui conquit les oasis, les territoires de tribus et qui subjuguèrent aussi les plus faibles confédérations de tribu qu’ils firent leurs vassaux.
Les Rashidi ne convertirent pas Shammar pour leur cause, mais agirent en conjonction avec eux pour étendre l’hégémonie de la tribu. Les émirs Rashidi furent tirés de la tribu et attachés par des alliances conjugales contrairement au leadership de Sa’oud dans Riyad qui dépendit de l’alliance avec Muhammad Ibn ‘Abd al-Wahhab et ses disciples.

La tribu témoigna de la croissance du premier règne Sa’oud-Wahhab qui vainquit quelques sections de Shammar et les forca à émigrer en Mésopotamie vers la fin du dix-huitième siècle. En outre, en 1818, Shammar fut attaqué par les troupes ottomanes égyptiennes qui considérèrent par erreur le territoire de Shammar comme celui de Sa’oud.
Avec le soutien des Rashidi qui furent raccordés généalogiquement à Shammar, la confédération tribale posa les fondations pour organiser sa propre défense et renforcer une unité qui avait été basée auparavant sur la rhétorique d’origine commune et la solidarité tribale. Par la suite, Shammar fut capable de s’opposer aux empiètements sur leur territoire, non seulement des troupes égyptiennes, mais aussi ceux de Sa’oud rétabli à Riyad.

Après s’être établi comme les souverains du Najd vers la fin du dix-neuvième siècle, les Rashidi perdirent leur contrôle sur Riyad quand Ibn Sa’oud, le fils du souverain exilé au Koweït, revint dans sa ville natale en 1902. Ibn Sa’oud tua le gouverneur Rashidi de Riyad et s’auto proclama nouveau souverain.

Entre 1902 et 1921, les Rashidi et Sa’oud rivalisèrent pour le contrôle de l’Arabie centrale et cette concurrence affaiblit le règne Rashidi et mena à sa fin.
Le déclin du régime politique Rashidi peut être attribué à plusieurs facteurs. La rivalité entre la Grande-Bretagne et l’empire d’ottoman en Arabie bouleversa la balance entre les centres de pouvoir locaux d’Arabie. Les émirs Rashidi s’allièrent aux Ottomans bien que plusieurs confédérations tribales et émirs locaux se rangèrent aux côté de la Grande-Bretagne. Après la défaite ottomane lors de la Première Guerre mondiale, les alliés locaux des Rashidi ressentirent la pression constante des Sa’oud, qui avait obtenu une solide alliance avec la Grande-Bretagne. Ce facteur seul ne peut pas expliquer complètement la fin du pouvoir des Rashidi en 1921 et l’instabilité qui se manifesta dans les rivalités intérieures entre les différentes branches des Rashidi, ajoutées à leur position déjà défavorisée en Arabie sont autant d’autres facteurs.
Le leadership Rashidi affaibli ne fut pas capable de maintenir la loyauté des confédérations des différentes tribus qui tournèrent leur allégeance vers un centre plus vigoureux, celui des Sa’oud et ainsi il perdit le contrôle sur ses tribus tout en témoignant du rétrécissement de ses territoires sans être capable de les reconquérir.





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