Muhammad al-Fatih et la libération de Constantinople

 

Le Sultan Muhammad ath-Thani (II, le deuxième) fut le septième Sultan de la famille de ‘Uthman et il fut surnommé al-Fatih (le libérateur) ou Abou al-Khayrat (le père du bien). Il régna pendant trente ans, une période de gloire pour les Musulmans. Il succéda à la tête de l’État Ottoman à l’âge de 22 ans, après la mort de son père le 16 Mouharram, 855 (18 février 1451). Sa personnalité combinait force et justice, et il avait une connaissance approfondie de nombreux domaines scientifiques, qu’il avait appris à l’Institut Prince. Il apprit également les langues de son temps, tout en étant enclin à étudier l’histoire. Toutes ces connaissances l’aidèrent à développer son caractère pour son administration à la fois de l’état et du champ de bataille, avant d’être connu sous le nom de Muhammad al-Fatih (le libérateur), pour sa libération de Constantinople.

 

Il suivit la même voie adoptée par son père et ses grands-pères, en réorganisant les différentes administrations de l’état, en mettant davantage l’accent sur l’équilibre des ressources financières de tout le pays et leur gestion, de manière à éviter tous les aspects de l’opulence et des dépenses excessives. Il fit également un effort pour améliorer l’armée, en consignant des registres personnels de ses soldats, en augmentant leurs salaires et en les armant des dernières armes disponibles à l’époque.

Concernant la gestion des provinces, il les améliora en rétablissant le poste de certains anciens gouverneurs, tout en remplaçant ceux qui avaient montré des signes d’insouciance. Après avoir passé un certain temps à faire des réformes chez lui, il se tourna vers les fronts chrétiens en Europe afin de libérer plus de régions et de diffuser le message de l’Islam.

De nombreux facteurs aidèrent le Sultan à atteindre ses objectifs, comme la faiblesse de l’Empire Byzantin dû à des conflits avec d’autres pays européens et aussi à d’autres internes qui s’étaient répandus dans tout le pays.

Le Sultan al-Fatih travailla dur pour couronner toutes ses conquêtes avec la libération de Constantinople, la capitale de l’Empire Byzantin et la principale base des invasions de la croisade contre le Monde Islamique. Il en fit la capitale de l’État Ottoman, réussissant ainsi ce que ses prédécesseurs échouèrent.

 

La libération de Constantinople

 

Constantinople était une ville majeure du monde. Elle fut fondé en -300 de l’Hégire (330) par l’Empereur Byzantin, Constantin I (le premier). Elle avait une position stratégique unique au niveau international, et on dit un jour : « Si le monde avait été un seul royaume, il aurait été juste que Constantinople en soit la capitale. » Dès sa fondation, les Byzantins l’adoptèrent comme capitale, car c’était l’une des villes les plus grandes et les plus importantes du monde.

Lorsque les Musulmans s’engagèrent dans le Jihad contre l’État Byzantin, cette ville eut un rôle spécial dans ce conflit. Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) donna à ses compagnons la bonne nouvelle de sa libération dans de nombreuses circonstances, comme lors de la Bataille de la Tranchée. Ce fut pour cette raison que les Califes musulmans et leurs commandants d’armée concoururent pour la libérer à travers les âges, dans l’espoir que le Hadith du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) serait accompli par leurs mains.

 

Le Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) a dit : « Constantinople sera (définitivement) libérée par les mains d’un seul homme. Quel excellent Amir (est-il), et quelle excellente armée (est cette armée) ! » Rapporté par l’Imam Ahmed dans son Mousnad.

 

Les forces islamiques s’efforcèrent de conquérir la capitale byzantine, depuis l’époque du Mou’awiyah Ibn Abi Soufyan (radhiyallahou ‘anhoum) lors de la première des invasions islamiques en l’an 33 de l’Hégire en passant par les invasions du Sultan Amawi, Souleyman Ibn ‘Abd al-Malik, en 98, le Sultan abbasside, Haroun ar-Rashid en 190, et les dirigeants seljouk aux Xe (10) et XIe (11) siècles de l’Hégire.

 

Les Ottomans remplacèrent les Seljouk et renouvelèrent leurs attaques contre Constantinople particulièrement sous le règne du Sultan Bayazid « la foudre, » dont les forces assiégèrent la ville en 796 (1393). Le Sultan négocia avec l’Empereur Byzantin pour remettre pacifiquement la ville aux Musulmans, mais il continua à retarder sa décision dans l’espoir de recevoir un soutien européen pour empêcher l’attaque des Musulmans sur sa ville. A cette même époque, les armées tatars (mongoles) de Timour Link pénétrèrent à l’intérieur des territoires ottomans et commencèrent à ravager le pays. Le Sultan Bayazid fut contraint de retirer ses troupes afin de pouvoir affronter lui-même les tatars. La célèbre bataille d’Ankara fut la dernière de Bayazid, qui fut capturé et décéda en captivité en 804 (1402).

Muhammad al-Fatih avait l’habitude de participer à la gestion de l’état de son père, et dès lors, il fut témoin du conflit avec l’État Byzantin dans différentes circonstances. Il était parfaitement au courant des précédentes campagnes ottomanes pour libérer Constantinople.

 

Par conséquent, depuis qu’il fut nommé Sultan en 855 (1451), il fut toujours désireux de conquérir Constantinople et de la libérer. L’éducation islamique reçue des érudits contribua à accroître son amour pour l’Islam, le Qur’an, la Sounnah du Prophète Muhammad (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) et l’adhésion à la Shari’ah Islamique. Il fut décrit comme un chef pieux, qui aimait les érudits islamiques, encourageait la propagation du savoir et de l’éducation islamiques, qu’il avait lui-même reçus de son père et des savants respectés.

 

Muhammad al-Fatih fut influencé, dès son plus jeune âge, par des savants pieux, comme l’éminent Ahmad Ibn Isma’il al-Qourani, qui était son professeur sous le règne du Sultan Mourad ath-Thani, le père d’al-Fatih. Ce fut  cette véritable éducation islamique et ces grands éducateurs, en particulier al-Qourani, l’érudit pieux, qui affrontait le Sultan s’il voyait des décisions contre les Lois de l’Islam qui permirent naturellement de produire un aussi grand leader que Muhammad al-Fatih, qui était un vrai croyant et adhérait aux limites de la Shari’ah.

 

Il y eut aussi le rôle du Sheikh Aq Shams ad-Din dans le développement de la personnalité de Muhammad al-Fatih, car il l’encouragea à motiver le mouvement du jihad ottoman, et lui rappela qu’il pouvait être l’émir prévu mentionné dans le Hadith du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam). C’était pour cette raison qu’al-Fatih souhaita que la prophétie s’applique à lui.

 

La préparation de la libération de Constantinople

 

Le Sultan Muhammad al-Fatih fit toutes les planifications nécessaires pour la conquête. Il renforca son armée avec plus de recrues, jusqu’à atteindre près d’un million de moujahidines. C’était un nombre énorme par rapport aux armées d’autres pays à l’époque.

 

Il supervisa personnellement l’entraînement de son immense armée avec toutes les différentes stratégies de combat, en utilisant différentes armes. Il se concentra également sur leur formation spirituelle, pour qu’ils soient qualifiés pour leur mission de Jihad, en leur rappelant l’admiration du Prophète (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) pour l’armée qui libérerait Constantinople, en espérant qu’ils seraient ceux dont il était question. Ce rappel leur donna force et courage. L’existence d’érudits islamiques parmi les soldats contribua à accroître la détermination des soldats à accomplir le Jihad conformément aux commandements d’Allah, à Lui les Louanges et la Gloire.

 

Le Sultan construisit alors une forteresse appelée Roumélie Hisar du côté européen du Bosphore, au point le plus étroit, face à la citadelle construite sous le règne du Sultan Bayazid du côté asiatique. L’Empereur Byzantin essaya de convaincre le Sultan de ne pas construire la forteresse, en échange d’un arrangement financier qu’il avait promis auparavant mais al-Fatih insista pour la construire en raison de son importance militaire stratégique. Lors de sa construction, elle mesurait 83 mètres de haut, face à l’autre forteresse, avec seulement 660 mètres entre elles. Il interdit tout navire d’atteindre Constantinople depuis les régions du côté oriental, telles que le royaume de Trabson et d’autres provinces qui pourraient soutenir Constantinople.

 

La production par le Sultan des armes nécessaires 

 

Le Sultan accorda une priorité particulière à la production du bon type d’armes pour libérer Constantinople, en particulier les canons. Il fit venir un ingénieur hongrois nommé Urbain, qui excellait dans la fabrication d’armes lourdes. Il l’accueillit bien, lui fournit les moyens financiers et les effectifs nécessaires à la réalisation de son projet. Cet ingénieur put fabriquer plusieurs gros canons, dont le célèbre énorme canon du Sultan qui pesait cent tonnes et avait besoin d’une centaine de taureaux puissants pour le déplacer.

 

L’intérêt du Sultan pour sa flotte de frégates

 

Parmi les préparatifs faits par le Sultan, il y eut son attention particulière envers sa flotte. Il les équipa comme différents navires de guerre pour lancer une attaque bien préparée sur Constantinople qui était une ville côtière qui n’aurait jamais pu être conquise sans l’existence d’une forte puissance navale. Il a été rapporté que la flotte préparée pour cette mission comptait plus de quatre cents de navires.

 

Traités conclusifs

 

Avant son assaut sur Constantinople, al-Fatih conclut des traités avec différents ennemis afin de se concentrer sur un seul d’entre eux. Il conclut un traité avec Galata, à côté de Constantinople à l’est, qui n’était séparé que par le détroit de la Corne d’Or. Il conclut également un traité avec la Hongrie et Venise, deux des pays européens voisins.

Cependant, ces traités ne furent pas respectés (vous connaissez le refrain) au début de l’assaut de Constantinople car de nombreuses forces de ces villes vinrent au secours de leurs compagnons chrétiens pour défendre Constantinople, sans tenir compte de leur traité avec les Musulmans.

 

Alors que le Sultan préparait les dernières étapes pour commencer son assaut, l’Empereur Byzantin essaya de faire changer d’avis le Sultan, en lui envoyant de l’argent et des cadeaux différents et aussi en essayant de corrompre les consultants du Sultan. Mais le Sultan était catégorique pour exécuter son plan, et rien ne pouvait le faire changer d’avis. Constatant la détermination du Sultan, l’Empereur décida de solliciter l’aide de différentes autorités européennes, au premier rang desquelles le Pape, chef des catholiques romains, à une époque où les églises de l’Empire Byzantin suivaient l’Église orthodoxe. Il y avait de l’hostilité entre les deux églises aussi l’Empereur fut-il contraint de flatter le Pape en admettant qu’il était prêt à travailler pour l’unité de l’Église orthodoxe, sous l’autorité du Pape, contre la volonté des masses orthodoxes.

Le Pape envoya son représentant à Constantinople pour donner un sermon dans l’église Sainte-Sophie, où il déclara l’unification des deux églises. Cette mesure mit en colère les orthodoxes de la ville qui pensèrent à contrer l’entreprise impérialiste conjointe. L’un des dirigeants orthodoxes déclara alors : « Je préfère plutôt voir à Byzance des turbans turcs plutôt que des coiffes latines. »

 

L’attaque

 

Constantinople est entourée par la mer sur trois côtés, le Bosphore, la Mer de Marmara et l’estuaire de la  Corne d’Or qui était fortement protégé par une immense chaîne qui contrôlait l’accès des navires. Il y avait aussi deux murs, qui l’entouraient des rives de la plage de Marmara à la Corne d’Or, avec un espace de 60 m entre les murs. La hauteur du mur intérieur était d’environ 12m, avec des tours qui s’élevaient à 18m. Quant au mur extérieur, sa hauteur était d’environ 8m, avec des tours détachées pleines de soldats.

Du point de vue militaire, la ville resta l’une des villes les mieux protégées du monde, en raison de ses hauts murs, de sa forteresse, de ses tours, ainsi que de ses éléments de protection naturels. Il était donc été très difficile de l’envahir. En effet, de nombreuses tentatives militaires pour la conquérir échouèrent dans le passé dont onze d’entre elles islamiques ! Le Sultan al-Fatih prépara les dernières étapes de l’attaque, recueillit plus de renseignements sur la ville et prépara les cartes nécessaires à son siège. Il avait l’habitude de visiter toute la zone autour de la ville pour observer ses murs et ses défenses naturelles.

 

Le Sultan avait donné l’ordre de réparer la route d’Edirne à Constantinople pour faciliter le transport des énormes canons jusqu’à Constantinople ; un voyage qui dura deux mois, protégés par une partie de l’armée, jusqu’à l’arrivée d’al-Fatih à la périphérie de Constantinople le Jeudi 26 Rabi’ al-Awwal 875 (6 avril 1453).

Il rassembla son armée, qui comprenait près de 250000 soldats, et leur donna un discours inspirant, dans lequel il les exhorta à faire le Jihad, en cherchant la victoire ou le martyre. Il leur rappela de faire un grand sacrifice et d’être sincère tout en combattant. Il récita quelques versets du Qur’an, louant ces qualités, et il leur rappela également le Hadith du Messager d’Allah (sallallahou ‘aleyhi wa sallam) sur la libération de la ville de Constantinople et les mérites de l’armée de libération et de son chef. Toute l’armée commença à lancer des Takbir, Tahlil et faire des Dou’a. Il y avait des savants dans l’armée, qui s’engagèrent comme soldats et prédicateurs, ce qui contribua à élever le moral des soldats avant l’engagement de la bataille, remplissant ainsi leur devoir.

 

Le lendemain, le Sultan donna ses ordres de positionner son armée de terre devant les murs extérieurs de la ville, créant trois sections principales, pour achever le siège de tous les côtés. Il posta également des réserves de l’armée derrière les principaux soldats et plaça les canons devant les murs, en particulier le canon du Sultan, qui était placé devant l’entrée Tob-Kabi. Il assigna des groupes pour surveiller de partout toutes les positions hautes et proches de la ville. Dans le même temps, les navires ottomans se positionnèrent partout dans les eaux proches, mais ne purent s’approcher de l’estuaire de la Corne d’Or, en raison de l’énorme chaîne tendue en travers pour empêcher l’accès de tout navire, bien que la flotte ottomane ait réussi à prendre le contrôle des îles Princes dans la Mer de Marmara.

 

Les Byzantins firent de leur mieux pour défendre Constantinople. Ils placèrent leurs soldats autour des murs mais l’armée ottomane avait déjà achevé son siège de la ville, mais pas sans quelques escarmouches, entre les deux armées, pendant les premiers jours du siège. De nombreux soldats ottomans atteignirent le martyre, en particulier ceux placés plus près des portes de la ville fortifiée.

 

Les canons ottomans tirèrent leurs missiles à partir de différentes positions autour de la ville. Leurs tirs, ainsi que le son assourdissant, eurent un grand rôle dans l’instauration de la peur et de la terreur dans le cœur des résidents. Les canons détruisirent une partie des murs de la ville, mais les assiégés reconstruisirent rapidement les murs, ou du moins les réparèrent.

Le soutien des Chrétiens ne cessa pas de venir d’Europe et Gênes envoya cinq navires commandés par le commandant génois, Lucas Giustiniani (Justinien), accompagné de sept frégates volontaires de différents pays européens. Leurs navires purent atteindre la vieille ville byzantine après une confrontation navale avec les navires ottomans. L’arrivée du soutien européen eut un grand effet et remonta le moral des Byzantins qui nommèrent Justinien commandant de toutes les forces défendant la ville.

 

Le cardinal et tous les prêtres avaient l’habitude de visiter les lieux de défense autour de la ville, exhortant les Chrétiens à être fermes et patients et encourageant les gens à se rendre aux église pour demander au « Christ et à la Vierge Marie » (paix sur eux) de sauver la ville si bien que l’Empereur en personne se rendit fréquemment à l’église Sainte Sophia pour cette raison.

 

Les négociations entre al-Fatih et Constantine

 

Les soldats ottomans, menés par al-Fatih, firent preuve de bravoure dans leur puissant assaut contre la ville, et les Byzantins, dirigés par Constantin XI, résistèrent héroïquement à l’attaque. L’Empereur tenta tout ce qu’il put pour défendre sa ville et son peuple avant de présenter au Sultan diverses offres pour le tenter de se retirer, en échange d’argent ou même d’allégeance. Mais le Sultan répondit en demandant la remise de la ville, avec la garantie qu’aucune personne ou église ne serait lésée ; sa réponse fut la suivante : « L’Empereur doit me remettre la ville et je jure que mon armée épargnera la vie et les biens de chacun. Quiconque veut rester dans la ville restera en paix et en sécurité, et quiconque veut partir peut le faire aussi en paix et sécurité. »

 

Le siège était encore incomplet en raison du contrôle naval byzantin de l’estuaire de la Corne d’Or barré par la chaine transversale cependant, l’attaque des Ottomans était implacable et les janissaires montrèrent la plus grande et rare bravoure. Le 18 avril, les canons ottomans réussirent à percer les murs byzantins, du côté de la Rivière Lukas, du côté ouest des murs. Les soldats ottomans se précipitèrent donc courageusement en avant pour assaillir les murs avec leurs échelles, mais l’espace n’était pas assez grand pour qu’ils puissent attaquer rapidement en plus du fait qu’ils durent faire face à une forte résistance avec des flèches et différents types de missiles. Alors que la nuit approchait, le Sultan donna l’ordre de se retirer des murs pour attendre une autre chance d’attaquer.

 

Le même jour, la flotte ottomane tenta de prendre d’assaut l’estuaire de la Corne d’Or en détruisant le bloc de chaînes, mais les navires européens et byzantins ainsi que les forces de défense positionnées derrière les énormes chaînes bloquèrent la flotte islamique et en détruisirent une partie dans le processus. Le reste des navires ottomans fut forcés de se retirer après avoir échoué à atteindre leur objectif.

 

Le limogeage du commandant de la flotte ottomane et la bravoure de Muhammad al-Fatih

 

Deux jours après la bataille de la Corne d’Or, une autre bataille eut lieu entre la marine ottomane et certains navires européens qui tentaient d’atteindre le golfe. Al-Fatih en personne mena la bataille sur la rive, après avoir envoyé un message au commandant de la flotte, lui disant : « Soit tu captures ces navires ou les coule, mais si tu échoues ne revient pas vivant. » Cependant, les navires européens réussirent à atteindre leur destination et les navires ottomans ne purent les arrêter malgré tous les efforts de la flotte. Le Sultan al-Fatih fut très déçu par le commandant de la flotte et le renvoya, lorsqu’il se rendit au centre de commandement central. Il le fit appeler et l’accusa d’être un lâche. Le commandant, Balta Oglu, fut profondément offensé et répondit : « Je fais face à la mort avec un cœur ferme, mais il me peine de mourir alors que je suis accusé d’une telle accusation. Mes soldats et moi avons combattu à notre meilleur niveau. Il souleva ensuite son turban pour dévoiler son œil blessé.

Al-Fatih fut alors persuadé que son commandant avait fait tout ce qu’il avait pu. Il le laissa partir après son renvoi et nomma Hamza Basha à sa place.

 

Les archives historiques mentionnent que Muhammad al-Fatih avait l’habitude de surveiller les batailles navales sur son cheval et d’entrer dans la mer jusqu’à ce que l’eau atteigne son poitrail. Les navires de combat n’étaient qu’à un jet de pierre de lui, alors il criait à Balta Oglu, en agitait ses mains vers lui.

Les défaites navales eurent un impact profond sur la pensée de certains conseillers, dirigés par le Vizir, Khalil Basha, qui essaya de convaincre le Sultan à renoncer à la tentative de conquête de Constantinople et de lever le siège. Mais le Sultan insista pour libérer la ville et poursuivit le bombardement de tous côtés des positions défensives de la ville. En même temps, il envisagea sérieusement de faire naviguer sa flotte dans l’estuaire de la Corne d’Or, surtout après avoir observé les murs qui s’effondraient de ce côté.

 

Une ingéniosité militaire brillante

 

Le Sultan eut alors la brillante idée de transporter les navires de leurs ports de Besiktas dans l’estuaire de la Corne d’Or en les transportant sur la route reliant les deux ports, évitant ainsi d’être attaqué autour de Galata. La distance entre les ports n’était que d’environ 4km, ce qui n’était pas une simple route à parcourir.

Muhammad al-Fatih rassembla ses commandants d’armée, leur présenta son plan et leur dévoila leur prochaine position sur le champ de bataille. Il reçut leur soutien et leur admiration pour son plan.

 

Lorsque le plan fut mis en œuvre et qu’al-Fatih donna son ordre de renforcer la route, les soldats apportèrent du bois imbibé d’huile et de graisse pour faciliter le transport des navires. La partie la plus difficile de ce plan fut de contrôler les navires lors de leur descente vers le bas, cependant, les navires ottomans étaient généralement petits et légers. Cette nuit-là, les Ottomans réussirent à déplacer plus de soixante-dix navires dans la Corne d’Or. Ce fut sans conteste un grand exploit à cette époque ; un miracle, montrant la rapidité de la réflexion et de l’exécution dans la mentalité ottomane. Les Byzantins furent stupéfaits quand ils apprirent l’événement et qu’ils virent les navires ottomans dans la baie. Ils ne purent y croire mais la réalité de la situation les força rapidement à accepter ce plan inattendu et audacieux.

 

Le mérite de ce miracle revient certainement à Allah, Exalté et Loué soit-Il, qui donna au Sultan une grande sensibilité et une intelligence incroyable. Cela montre également les brillants architectes et les ouvriers qui étaient prêts à exécuter n’importe quel projet avec beaucoup d’enthousiasme. Cela eut lieu de nuit et lorsque les habitants de la ville se réveillèrent le lendemain matin ce fut pour entendre les Takbir (Allahou-Akbar) des Ottomans et leurs bruyants chants islamiques, alors qu’ils montaient à bord de leurs navires dans la Corne d’Or. Le barrage avait été contourné et plus aucun obstacle ne se dressait entre eux et les soldats ottomans.

Un historien byzantin exprima son admiration de l’événement en déclarant : « Nous n’avons jamais vu ni entendu parler d’un événement aussi inhabituel que celui-ci. Muhammad al-Fatih transforma la terre en mer et ses navires traversèrent le sommet des collines au lieu des vagues de l’océan. Al-Fatih a dépassé Alexandre le Grand par cet acte. » (L’Histoire de Muhammad al-Fatih p135 par Yelmaz Azantu)

 

Les habitants de Constantinople se sentirent alors désespérés et de nombreux présages et rumeurs se répandirent dans toute la ville, disant que Constantinople tomberait quand on verrait des navires naviguer sur la terre !

 

La présence des navires ottomans dans la Corne d’Or eut un grand effet en affaiblissant l’esprit combatif de la force défendant la ville car une grande partie de cette force dû être déplacée pour défendre les murs par la Corne d’Or, qui était auparavant protégée par la mer. L’Empereur Byzantin organisa de nombreuses opérations pour tenter de détruire la flotte ottomane dans la Corne d’Or, mais ses efforts incessants échouèrent devant la résistance ottomane.

Les Ottomans déployèrent également des canons spéciaux sur les collines pour détruire tous les navires byzantins de la Corne d’Or et du Bosphore, ce qui empêcha le mouvement des navires ennemis.

 

La rencontre du roi Constantin Paléologue XI et de ses aides

 

L’empereur Constantin XI organisa une réunion avec ses aides, ses conseillers et les chefs religieux de la ville, qui lui conseillèrent de quitter la ville, pour rechercher le soutien des pays européens chrétiens. Ils avaient espéré que les armées chrétiennes viendraient à leur aide pour forcer le Sultan al-Fatih à se retirer et à lever le siège de la ville. Mais l’Empereur rejeta cette opinion, insista sur le combat jusqu’au bout et refusa de quitter son peuple, décidé à affronter le même sort qu’eux. Il considéra également sa décision comme une obligation sacrée et suggéra de ne pas lui conseiller de partir. Il consentit toutefois à envoyer des délégations dans les pays européens pour demander de l’aide et un soutien mais ils revinrent totalement déçus.

Les services secrets ottomans avaient déjà infiltré Constantinople et étaient donc conscients de toutes les préoccupations politiques et militaires de la ville.